31. Basile

Nazir et moi réapparûmes non loin de là où s'était passée la cérémonie. Nous avions déposé Alice dans un endroit sûr, et elle allait y rester quelques heures. Elle dormait pour l'instant, mais se réveillerait bien assez tôt. Je devais ramener Nathaniel et les autres.

J'avais envie de vomir, mais je devais faire en sorte de garder la face. La seule chose que je voulais faire c'était aller voir Alice, la serrer contre moi et qu'elle m'embrasse. Qu'elle me dise qu'elle n'y avait pas cru. Et pourtant... pourtant, j'avais lu la douleur dans son regard.

_ Tout ira bien, souffla Nazir.

Je le fusillai du regard et le repoussai, au bord de l'hystérie.

_ Laisse-moi, crachai-je.

_ Tu devais le faire, Basile, dit-il.

Mes Ombres cherchèrent à couler sur mes bras, s'approchant dangereusement de Nazir. Il fit un pas en arrière alors que je tentais de retenir mes Ombres.

_ Va-t'en, murmurai-je, une douleur lancinante dans les côtes.

Je m'appuyai un instant contre le mur à mes côtés.

Tout cela... tout ce qui est arrivé était une erreur, Alice.

La douleur dans son regard.

Le mensonge qui s'agrandissait.

Les mots qui sortaient.

Je pourrais te dire que j'ai rencontré quelqu'un d'autre, mais je ne veux pas mentir. Tu n'es pas faite pour moi. Même si j'ai quitté mon peuple, je reste un Oracle de la Haute Sphère et j'ai besoin d'une sorcière de mon peuple. Si un jour je veux avoir des enfants puissants, il me faut quelqu'un de ma trempe. Tu es puissante, mais pas assez pour moi, Alice.

C'était presque sorti d'un coup. Sans que je réfléchisse trop. C'était comme un serpent qui avait pris possession de moi et qui avait déballé tout ce mensonge.

Elle s'était avancée vers moi.

Avait tenté de me toucher.

Avait-elle cru à un cauchemar ?

Moi oui.

Bon sang... Il fallait que je reprenne le contrôle.

Il fallait que je réussisse à tenir.

Ramener Nathaniel.

Ramener Izy.

Retourner voir Alice.

Je me répétai ça comme un mantra et réussis à retrouver Nathaniel. Il comprit que quelque chose n'allait pas et rappela tout le monde. Je les ramenai sans un mot, tentant de ne pas exploser. De ne pas laisser la peine être maîtresse de mes Ombres. Si cela arrivait...

Si cela arrivait, je ne donnais pas cher de ma peau.

Elle y avait cru.

Elle avait cru à tous mes mots.

J'y avais mis les formes, je le savais.

J'avais fait exprès... tout.

Tout.

Et elle y avait cru. Comment ? Comment avait-elle pu y croire si facilement ?

Pourquoi n'avait-elle pas réagi ?

Pourquoi avait-elle souri ?

Et Nohlan... Nohlan allait me détester maintenant.

Me ferait-il confiance à nouveau pour Alice ?

Et Alice... me laisserait-elle revenir ?

Comment allais-je me lier à une femme à qui je venais de piétiner le cœur ?

Ce cœur qui était à moi. Qui m'appartenait.

Je m'éclipsai dans la véranda, suivit de près par Nathaniel.

_ Que se passe-t-il ? murmura-t-il.

_ Tu me fais confiance ? soufflai-je.

Il fronça les sourcils et hocha la tête sans hésiter.

_ Demande à Izy de surveiller la barrière, ajoutai-je le souffle court. Je... j'ai besoin de temps.

_ Qu'as-tu fait ? souffla Nathaniel.

_ Tu ne veux pas savoir, murmurai-je.

Je disparus et réapparus chez Nazir. Je retins un cri de douleur alors qu'une de mes Ombres m'attaqua légèrement. Je regardai mon bras, blessé sur toute la longueur.

Merde.

_ Elle t'a pris ton contrôle, murmura ma sœur, juste à mes côtés.

_ Je n'ai pas besoin de toi, soufflai-je. J'ai besoin d'elle.

Je pris le chemin de la cave et poussai doucement la porte. Le Sort qui entourait la pièce la referma en la claquant. Il faisait un noir opaque ici. Je tendis une main devant moi et voulus allumer une petite boule de feu, mais ici, aucun pouvoir ne marchait. Nazir avait fait en sorte qu'Alice ne puisse rien faire. Qu'elle soit coupée du monde. Complètement. Qu'elle ne puisse pas s'enfuir pour faire sa maligne. Comme elle essayait de le faire depuis le debout.

Elle était allongée sur un lit d'appoint, une couverture que j'avais posée sur elle. Je me laissai glisser contre le mur, remontant un genou contre moi. J'y appuyai mon coude et frottai mes cheveux.

Comment avait-elle pu me croire ?

Comment avait-elle pu me laisser faire ?

N'avait-elle donc aucune confiance en moi ?

Pensait-elle donc que j'étais à ce point assoiffé de pouvoir ?

J'avais quitté mon peuple bon sang ! Comment cette excuse avait-elle pu faire mouche ?

Je grognai et laissai ma tête aller contre le mur.

J'allais devoir attendre qu'elle se réveille.

Nazir s'occupait du reste.

Tout comme Adélaïde.

J'entendis sa respiration se modifier. Elle gémit de douleur et sursauta. Le haut de son corps partit en avant et elle regarda tout autour d'elle, le regard brillant d'une peur brute. J'avais allumé deux bougies, non loin d'elle. J'étais plongé dans le noir. Mes Ombres courraient autour de moi, cherchant encore où elles pouvaient planter leurs crocs.

_ Il y a quelqu'un ? souffla Alice.

Elle bascula ses jambes hors du lit, ses mains sur le bord. Je ne savais pas comment faire. Je ne savais pas quoi dire. Qu'est-ce que j'étais censé dire ? « Tu m'as cru ? C'était une blague ! Un poisson d'avril ! » Je laissais échapper un soupir. Alice leva la main et tenta sûrement d'utiliser son pouvoir.

_ Tu ne peux rien utiliser ici, murmurai-je.

Elle se crispa et son regard se posa exactement là où j'étais. Son visage se crispa de douleur et son regard fut empli de tristesse. Si vite ! Bon sang... Cela remua quelque chose en moi. Quelque chose que j'avais longtemps préservé. Cette part de moi qui pouvait aimer sans compter. Qui pouvait tant donner...

_ Laisse-moi partir, haleta-t-elle. Tu ne veux plus de moi. Qu'est-ce que tu fais ?

Je grimaçai et me levai. Elle détourna son regard alors que je m'approchai.

_ Tu as fait passer ton message, souffla-t-elle. Maintenant, laisse-moi partir. Je dois partir...

Je me laissai tomber à genoux devant elle, la gorge serrée.

_ Tu croyais vraiment pouvoir partir comme ça, grondai-je.

Elle se figea complètement.

_ Tu croyais vraiment que personne ne te retiendrait, ajoutai-je, la colère revenant pas à pas.

Je relevai mon regard sur elle. Je serrai les dents autant que possible. Je ne devais pas être faible. J'étais un homme, mais cette femme...

J'aimais cette femme.

Et elle m'avait menti.

_ Tu croyais vraiment que je pourrais te quitter, soufflai-je enfin.

Elle retourna son regard sur moi, retenant son souffle.

_ Qu'as-tu fait ? murmura-t-elle.

_ Tu penses vraiment être si interchangeable que ça, affirmai-je, mauvais à présent.

Je serrai le bord du lit entre mes mains et mes Ombres vibrèrent dans mon dos. Je frissonnai.

_ Tu m'as menti, soufflai-je. Tu m'as menti. En me regardant dans les yeux... sans vergogne.

Les yeux d'Alice s'agrandirent un peu plus et elle posa une main sur sa bouche.

_ Comment as-tu pu ? soufflai-je. Tu savais... tu savais ce que ça voulait dire... ce médaillon... tu savais !

Je ravalai quelque chose qui resta bloqué dans ma gorge. Je fermai les yeux et tentai de respirer.

_ Basile, souffla-t-elle.

Je secouai la tête. Quelque chose mouilla ma joue. Les mains d'Alice frôlèrent mes joues. Je gémis et glissai mes bras dans son dos, me pressant contre elle, me pressant contre sa poitrine, me cachant entre ses jambes.

_ Je suis désolée, murmurait-elle. Je suis tellement désolée.

Je respirai son odeur.

Je savourai cette odeur si caractéristique.

Si vitale pour moi à présent.

Elle me berça doucement contre elle, pleurant à son tour.

Quels idiots ont faisaient, à pleurer comme ça. J'avais mal à la gorge à force de me retenir, mais j'étais un homme. Je ne devais pas pleurer. Je devais rester fort. Alors qu'Alice me pressait un peu plus contre elle, je l'écartai légèrement, mes mains sur ses bras. Elle me regarda, paniquée. Je la secouai doucement.

_ Comment as-tu pu croire à ça ? soufflai-je. Comment ?

Je tirai sur le médaillon qui pendait entre ses seins pour le lui mettre devant ses yeux. Ses lèvres tremblèrent légèrement.

_ Tu savais, murmurai-je. Tu savais que cela voulait dire que tu étais à moi. Pour toujours. Tu l'as accepté... Pourquoi Alice ? Pourquoi l'as-tu accepté tout en prenant la décision de partir ? Tu comptais me laisser ? Tu croyais que je te laisserais partir ?

Elle secoua la tête et tenta de s'accrocher à mes épaules. Je la laissai faire et elle enfouit son visage dans mon cou. Je la pressai contre moi, embrassant son cou.

Jamais je ne la laisserais partir de nouveau.

Jamais.

Elle devait comprendre.

_ Je devais y aller, souffla-t-elle contre mon cou. Je le devais. J'ai passé un pacte, je... j'ai sacrifié ma vie. Je ne peux pas faire autrement... je ne pouvais pas. Il aurait tout détruit. Tout. Je... je ne pouvais plus reculer, Basile.

Elle n'avait jamais pensé à elle.

Seulement à la sécurité de l'Éthérée.

Seulement à la sécurité de Nohlan.

Pas la sienne.

Jamais.

Et pourtant...

_ Je ne pensais pas que je pourrais rencontrer une personne... une personne comme toi. Je ne pensais pas que tu... que tu...

Je relevai son visage.

_ Je t'aime, Alice, soufflai-je.

Elle ferma les yeux et sanglota de plus belle.

_ Je ne t'aurais jamais donné ce médaillon si ce n'était pas le cas et tu le sais. Tu le savais au fond de toi.

Ses mains glissèrent dans mes cheveux.

_ Pardonne-moi, gémit-elle.

Je la tirai à moi et embrassai doucement ses lèvres. Elle agrippa mes cheveux avec force et tomba à genoux à son tour avec moi. Je la rattrapai et elle pressa son front contre le mien.

_ Je... je ne peux pas rester, Basile, haleta-t-elle. Il va tout détruire. Il va me chercher. Je suis le prix à payer. J'ai choisi ça il y a des centaines et des centaines d'années. C'est ainsi.

_ Tu ne demandes même pas quelle est notre solution ? murmurai-je.

Elle fronça les sourcils.

_ Notre ? répéta-t-elle, inquiète.

_ J'ai rencontré tes Huit, Alice, avouai-je enfin, lui tirant un petit bruit d'exclamation. Ils sont venus à moi. Ils avaient déjà tout prévu. Ils ne t'auraient jamais laissé partir.

_ Mais...

_ Non, Alice, soufflai-je. Nous avons un plan. Nous avons un plan pour te sauver. Et je fais partie de ce plan.

Quelques minutes plus tard, elle regarda dans le vide, cherchant sûrement si c'était un rêve ou si elle devait réellement réfléchir à présent à tout ça. Elle devait y réfléchir. Elle devait nous donner une chance. Ce Vengeur. Ce Vengeur devait mourir. Alice devait vivre.

Alors qu'elle réfléchissait, un souffle me traversa.

Elle était assise sur son canapé, un pull bouffant sur le ventre. Mais je savais moi. Je savais ce que cachait ce pull. Je le savais tellement fort que parfois, j'avais besoin de me pincer pour savoir si c'était vrai. Je retirai mes chaussures et mon manteau et rejoins ma femme dans le canapé. Elle sourit en me voyant et me tendit ses lèvres que j'embrassai avec ferveur.

_ Comment se portent ma femme et mon fils ? soufflai-je contre sa tempe.

Elle sourit et caressa son petit ventre de cinq mois.

_ Très bien, sourit-elle. Et mon mari ?

Je m'allongeai sur le canapé et posai ma tête sur ses cuisses, mon oreille non loin de son ventre, écoutant et surveillant.

_ Nathaniel va m'avoir à l'usure, grondai-je.

Alice rit et caressa mes cheveux.

_ Tu as eu de la visite ? m'enquis-je en voyant le bouquet de fleurs sur la table.

_ Nazir devient gaga avant toi, fit Alice.

Je fis la moue alors qu'elle riait. Je pressai mon nez contre le petit ventre de ma femme. Là-dedans se trouvait mon fils. Notre fils.

Je rouvris mes yeux sur le visage anxieux d'Alice. Elle venait de prendre sa décision. J'allais retrouver son avenir. Cela voulait dire qu'elle voulait se battre. Cela voulait dire qu'elle voulait nous laisser une chance. Mais je sentais la fragilité de ce qu'elle avait choisi. Ce Vengeur mettait en péril ce que nous pouvions avoir. Cela était extrêmement dangereux. Elle le savait aussi bien que moi.

_ Et comment puis-je contrôler assez de pouvoir pour tuer le Vengeur ? murmura Alice.

J'avais omis cette partie. C'était... compliqué et presque gênant à aborder. Je m'assis à ses côtés sur son lit de fortune et frottai mes cheveux. Après quelques secondes de silence, je pris la parole.

_ Il y a un phénomène qui peut subvenir quand deux sorciers de grandes puissances se lient, murmurai-je. Ça s'appelle...

_ La Symbiose, souffla Alice en me regardant.

Je hochai la tête.

_ J'ai... senti quand le Faucheur t'a blessé, chuchota Alice, comme si c'était un secret. Avant que Nathaniel ne m'appelle... j'avais senti quelque chose.

Je pivotai mon torse vers elle et pris son visage entre mes mains.

_ Je ne partirais nulle part, Alice, dis-je. Il faut que tu le comprennes. Et ni Nohlan, ni Nazir, ni tes Huit, ni moi nous ne te laisserons partir.

_ C'est trop dangereux, murmura-t-elle. Il est trop dangereux, Basile.

_ Si nous acceptons le lien qui est déjà entre nous, soufflai-je, nous serons encore plus puissants que lui, Alice. Tu as vu ce dont nos pouvoirs étaient capables. Tu sais...

Je pris ses mains entre les miennes, ne sachant pas du tout si ce que j'allais faire était la meilleure solution. Nous nous connaissions à peine, mais je lui avais donné ce médaillon pour une bonne raison. Et cette raison était que je l'aimais.

Qu'elle avait touché plus de choses que je ne l'aurais voulu.

Et ce, dès le premier regard dans cet ascenseur.

_ Tu es celle que j'attendais, Alice, soufflai-je en embrassant ses doigts. Tu es celle que je veux.

Elle retint son souffle. Alors que j'ouvrais la bouche pour lui demander de devenir ma femme, elle posa sa main sur ma bouche. Elle ferma les yeux et prit une longue inspiration.

_ Pas maintenant, murmura-t-elle. Plus tard... Demande-le-moi plus tard. Quand tout ça sera fini... si ça se finit et que nous sommes encore sur cette Terre.

J'embrassai sa paume et hochai la tête. Elle avait deviné.

_ À toi de choisir ce que tu veux, Alice, soufflai-je. Nous pouvons le faire. Nous pouvons y arriver.

Je la regardai avec des yeux pétillants de malice. Elle se dandina un instant et jeta un coup d'œil au berceau à nos côtés. Elle ferma les yeux et prit une longue inspiration. Je souris un peu plus quand elle grimaça et hocha la tête. Je lui sautai dessus et nous roulâmes dans le lit, tirant un léger bruit à notre bébé.

À notre petit garçon.

Notre petite fierté.

Elle avait accouché il y a quelques jours et tout s'était bien passé.

Pas d'Ombres pour l'instant.

Seulement une magie puissante et furieuse. Mais que je pouvais contenir.

Qu'Alice pouvait contenir.

Grâce à notre lien.

Grâce à notre Symbiose.

_ Tu es affreux parfois, grogna-t-elle en retenant un rire.

_ Jamie Nohlan Liam Hansen, dis-je en souriant.

_ Ça va lui porter malheur, ricana-t-elle.

Je la chatouillai et elle éclata de rire.

Les Visions venaient et repartaient, me laissant légèrement haletant. Mais toutes étaient en train de se concrétiser. Toutes m'apportaient l'image de notre fils. De ce que nous pourrions avoir si nous y arrivions.

Si nous réussissions à remporter la bataille contre ce Vengeur.

J'aurais pu montrer à Alice notre fils. J'aurais pu lui montrer tellement de choses maintenant qu'elle avait pris sa décision.

Mais je choisis de ne rien lui montrer.

On ne faisait pas ces choix par rapport au futur.

On faisait ces choix dans le présent.

Avec les gens que nous aimions. Sinon, tout cela ne servait à rien.

Sinon, les choix changeaient.

Et le destin basculait.

_ Dis-moi, Alice, soufflai-je. Dis-moi ce que tu veux.

Elle me regarda avec des yeux brillants. Je retins mon souffle alors qu'elle posa ses mains sur mes joues.

_ Je...

Elle s'humecta les lèvres, la voix légèrement tremblante.

_ Je t'aime, Basile, souffla-t-elle.

Je m'abreuvai de ses paroles, espérant férocement qu'elle me demanderait de l'aider. De laisser faire ce plan.

De nous lier.

De créer la Symbiose.

Qu'elle devienne aussi puissante que ce Vengeur.

_ L'amour est une chose, murmurai-je. J'ai besoin que tu me le dises, Alice.

_ Je... nous allons tuer ce Vengeur, souffla-t-elle.

Je hochai la tête et l'embrassai, laissant la colère et la tristesse et toute cette tension disparaître pendant quelques secondes.

Pendant quelques minutes.

Juste le temps de savourer les lèvres d'Alice.

Savourer notre futur qui redevenait plus clair.

Un petit son retentit dans la pièce. Alice fronça les sourcils.

Nazir !

_ Je reviens.

_ Pourquoi suis-je obligée de rester ici ? fit Alice en me retenant. Et où sommes-nous ?

_ Chez Nazir, répondis-je en la faisant s'asseoir sur le lit. Tu es obligée, car le Vengeur cherche à te localiser. Ici, tu es à l'abri. Je reviens.

_ Basile, souffla-t-elle.

Je l'embrassai et sortis de la pièce. La porte claqua dans mon dos. Je grimpai les escaliers et découvris Nazir, le visage fermé.

_ Il a tenté d'attaquer Nohlan, souffla-t-il.

Mon cœur s'arrêta de battre pendant une seconde.

_ Adélaïde a géré, reprit-il, me laissant le souffle court. Nohlan n'a rien vu. Mais il attaque plus vite que prévu. Il va falloir bouger. Tu as parlé avec Alice ?

Je hochai la tête.

_ Il faut que vous concrétisiez votre lien, dit-il en triturant un de ses bijoux. Il faut qu'elle puisse être Maîtresse de tes Ombres au plus vite.

_ Il faut attirer le Vengeur ailleurs...

_ Au lac, soufflai-je. Adélaïde doit l'attirer au lac.

_ Le lac d'Alice ? fit Nazir, surpris.

_ Alice y trouve beaucoup d'énergie, remarquai-je. Cela l'aidera forcément.

_ Il faut avant tout qu'elle ait ton lien. Sinon, rien de tout ça ne marchera.

Je hochai la tête.

Je retournai en bas et trouvai Alice qui faisait les cent pas. Elle voulut voir au-delà de la porte, mais cette dernière claqua toute seule dans mon dos.

_ Que s'est-il passé ? souffla-t-elle, le visage décomposé. Nohlan ? Nohlan va bien ?

Elle s'accrocha à mes bras et me secoua.

_ Il va bien, dis-je, soupirant doucement. Je t'ai dit qu'on le protégeait.

_ Adélaïde est forte mais pas infaillible, rétorqua Alice en reprenant ses cent pas.

_ Les trois jours que je t'ai dit ont changé, Alice, murmurai-je.

Elle se figea et releva son regard sur moi.

_ Il a attaqué Nohlan, murmura-t-elle.

_ Il a tenté et Adélaïde la protéger.

_ Je suis la seule qui puisse le protéger correctement, répliqua Alice, nerveuse à présent.

Je l'agrippai par les épaules pour qu'elle réagisse.

_ Tu sais ce que cela veut dire, soufflai-je.

Elle plongea son regard dans le mien.

_ Pense à tes besoins, murmurai-je. Pense à ce dont tu as besoin, toi...

Elle se mordit la lèvre et secoua la tête. Ce n'était pas aussi facile que ça et je le savais. Je le savais bien, mais il fallait agir.

Agir au plus vite.

Ce Vengeur devait mourir.

Mourir de la main d'Alice.

_ Il... il faut qu'on se lie, dit-elle en se raclant la gorge.

Je souris et frôlai sa joue. Elle s'accrocha à ma main et pressa sa joue contre ma paume.

_ Tout ira bien, soufflai-je.

Elle dut lire quelque chose dans mon regard, car elle hocha la tête.

_ Comment... comment fait-on ça ? chuchota-t-elle. Je n'ai jamais...

_ Chut, soufflai-je en l'embrassant doucement.

Elle gémit alors que ma langue cherchait la sienne. Lentement et langoureusement, je pris possession de sa bouche. Alors qu'une de mes mains glissait jusqu'à son cœur, elle imita mon geste en miroir.

Nos souffles résonnèrent dans l'espace étroit où l'on se trouvait.

Ça donnait l'impression d'être seul au monde.

Juste elle.

Juste moi.

Tous les deux.

Mes Ombres grandirent dans mon dos.

La Glace d'Alice se réveilla et bientôt, elle glissa sur mes Ombres.

Et c'est là que je sentis sa puissance.

Que je la sentis comme si c'était la mienne.

Elle s'écarta de ma bouche, le souffle court, les yeux brillants.

_ J'espère, haleta-t-elle, sous l'effort, j'espère qu'Adélaïde saura m'aider à contrôler toute cette... puissance.

Elle frissonna quand mes Ombres glissèrent sur elle.

_ Elle t'aidera, soufflai-je. Elle t'aidera, Alice. Tu seras parfaite...

Nouveau frisson avant de s'emparer de ma bouche.

Nos grognements résonnèrent et bientôt, il y eut beaucoup de lumière.

Le pouvoir d'Alice.

Le sort de Nazir n'avait pu l'air de faire effet alors que nous nous lions.

Trop de puissance.

Trop de magie.

Alors que j'attendais l'explosion et la douleur, il n'y eut que chaleur et pouvoir liquide.

C'était là, autour de nous, fusionnant.

La Symbiose nous coupa le souffle.

Je rejetai la tête en arrière quand la Glace d'Alice me traversa comme un souffle glacial.

Et je la sentis.

Elle. Entièrement. Mon Alice.


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