Attention, avis aux intéressées : présence de Spoils concernant l'histoire d'Elijah & Amalia ! Vous voilà prévenues :3

— Il y a beaucoup de ténèbres autour de toi, Alice, souffla la voix d'Elijah depuis l'entrée de la chambre.

J'enfilai les bottes – encore à Marina -, et relevai les yeux vers lui. Il portait un jean et un t-shirt tout simple. Nous étions très loin de sa tenue de Chasseur, mais même avant tout ça, il ne la portait que rarement. Pour Liam c'était différent, c'était comme une seconde peau. Et si pendant le coma d'Elijah, Amalia n'avait pas quitté la sienne, maintenant, il était plutôt rare de la voir avec. Je l'avais même sûrement aperçue une ou deux fois en robe.

Il portait son bandeau autour des yeux, et avait noué ses cheveux en catogan. Il ne les avait pas encore recoupés et ceux-ci commençaient à être plutôt longs. Tout comme ceux d'Amalia quand j'y pensais.

Ce n'était plus qu'une question de semaines avant qu'Elijah ne revienne à Ann Arbor et qu'il réintègre la meute. Cette dernière avait tenu grâce à un nouveau pilier dans les hauts gradés ; Amalia. Mais la place de Lieutenant était aussi importante que n'importe laquelle et le vide s'était fait ressentir. Nohlan et tous les autres avaient empêché tous les dommages qu'ils avaient pu et avaient tenu deux longues années, mais aujourd'hui, l'Alpha avait besoin que sa meute retrouve toute sa stabilité.

Et cette stabilité, c'était le retour d'Elijah.

— Et que vois-tu, louveteau ? demandai-je en le voyant légèrement pencher la tête.

Elijah était un être intéressant, tant pour les loups que pour les Chasseurs. Il y avait un côté intriguant chez lui et pour moi, ça n'avait rien à voir avec ses yeux, avec son étrange pouvoir. C'était sa... nature même. Le vent lui parlait et il savait écouter. Il y avait de la magie en lui, un pouvoir étrange et pourtant, il n'avait aucune souche de sorcier.

Elijah était intrigant et fascinant. Et il pouvait voir l'aura des gens et il ne lui était pas difficile de lire en eux.

— De tout l'Éthérée, ton aura a toujours été la plus lumineuse et la plus... douce. Elle est d'une blancheur incroyable.

Il s'avança doucement, sans faire un seul bruit. Le silence personnifié. C'est souvent ce que bon nombre de gens disaient de lui.

Je me levai et il s'arrêta à un mètre de moi. Il leva un bras et sa main sembla caresser quelque chose autour de moi.

Mon aura.

— Elle pourrait éclairer les plus insondables ténèbres, mais... là, il y a cette ombre qui est venue s'y attacher.

Je posai ma main au niveau de mon aine, là où mon tatouage de maudite s'étendait.

— Et... ça vient de toi. Et ça grignote ta blancheur.

Mes doigts se crispèrent.

Avec le Vengeur au sein même de l'Éthérée mes scellés ne tarderaient pas à devenir totalement inutiles. Ne l'étaient-ils pas déjà de toute façon ? Et même Nazir ne pourrait rien. Parce que le moment approchait.

Au solstice d'Hiver, il ne resterait rien.

— Liam dit que tu es damnée, Alice. Et je crois que je commence à comprendre.

Damnée ? Il disait ça de moi ? Ce psychopathe ? Lui était fou. Complètement fou. Alors, je préférais être damnée qu'être comme lui.

Mais j'étais persuadée qu'il ne savait pas. Qu'il n'avait pas deviné ce que j'étais vraiment.

Mais Elijah, lui... il réfléchissait beaucoup et surtout, surtout il observait et pouvait capter le moindre détail. Il était comme ça.

Il pouvait savoir ce que j'étais.

Une Maudite.

Et si beaucoup de surnaturels ignoraient même ce que nous étions, Elijah savait, parce qu'Elijah était vieux, très vieux, bien plus que Nohlan ou moi.

Et qu'il était très cultivé. Pas autant que Benjamin ; personne ne pouvait l'être vraiment autant que lui. Ce dernier avait passé sa vie à apprendre tout ce qu'il y avait à savoir, sur tout et sur tout le monde. Sur tous les peuples, ceux existants et ceux éteints depuis longtemps.

— Nohlan sait, n'est-ce pas ?

Nohlan savait ce qu'il devait savoir. Ni plus, ni moins. Il savait que j'étais Maudite, mais il ignorait tout de mon pacte avec un Vengeur. Et il ignorait surtout quel était le prix de ce pacte.

Il ne pourrait supporter. Supporter de savoir que j'avais vendu ma propre vie pour lui et seulement pour lui. L'univers entier pouvait bien disparaître demain, les milliards d'humains qui peuplaient cette terre pouvaient bien mourir demain, tant que Nohlan allait bien, tout le reste ne comptait pas.

— Tu n'as jamais été curieux, louveteau. Et toutes les questions que tu poses, tu connais déjà les réponses.

Il sourit doucement et ramena son bras le long de son corps.

— Je t'aime beaucoup, Alice. Et Nohlan t'aime tout court. Tout comme Liam est une partie de moi, tu es une partie de notre Alpha. Tu as créé l'Éthérée. Chaque lien, c'est toi qui l'as établi, ne crois pas que partir n'aura aucune conséquence.

Alors, il avait deviné ça aussi ? Cet homme était bien trop intelligent. On disait dans les vieilles légendes de certains peuples que ceux qui savaient écouter le vent pouvaient connaitre tous les secrets. Je n'avais jamais été superstitieuse, mais il y avait des choses que j'avais vues... alors après tout, pourquoi pas ?

Je lissai la chemise au manche bouffante et callai une mèche de mes cheveux derrière mon oreille.

— Tu sais garder les choses pour toi, louveteau. Je sais que tu ne parleras de rien à Nohlan et je sais aussi que ça ne te concerne pas. Alors, oubli ce que tu crois savoir.

Il sourit légèrement.

Elijah n'était pas du genre à raconter les secrets des gens à d'autres. Alors je savais très bien qu'il ne parlerait de rien à Nohlan.

Ce dernier était d'ailleurs en bas, se préparant pour notre départ imminent. Il avait quelques affaires à régler à l'Éthérée avec le Gardien. Timothy ne pouvait pas venir aussi souvent qu'il l'aurait fallu, alors quand c'était le cas, les loups qui devaient être liés à la toile devaient être rassemblés et c'était là le rôle de Nohlan. Ça facilitait le travail du Gardien et c'était un gain de temps considérable. Il y avait une dizaine de loups qui attendaient cela et Timothy restait à peine deux jours.

— Nohlan finira par le savoir. Un secret peut être gardé des siècles, mais vient un jour où secret, il n'est plus.

— À ce moment-là, je ne serais plus là.

Je passai à côté de lui et descendis en bas. Elijah ne me suivit pas. Nohlan était dans la cuisine, au téléphone avec un membre de la meute. Il hocha la tête et me sourit.

La maison de Liam était magnifique et il fallait avouer qu'il avait un certain goût pour la déco. Ce que je préférais ici, même si j'évitai l'endroit, c'était son salon qui donnait sur la forêt. Il n'y avait rien à des kilomètres à la ronde ; coupé du monde, coupé de tout. Un vrai havre de paix.

— Dis-lui que ça ne sert à rien qu'elle se déplace, Alice m'y déposera directement.

Elle. Il parlait d'Eryn à n'en pas douter.

Il hocha une nouvelle fois la tête et raccrocha :

— Il y a deux nouveaux loups qui attendent de pouvoir passer, me dit-il.

— Allons-y alors.

Il fourra son téléphone dans la poche arrière de son jean et me tendit son bras. Vieux usages, vieilles habitudes. Cela me fit penser à Basile. Et mon cœur me fit mal pendant un instant.

Il... me manquait. Réellement. Même alors que nous n'avions pas eu tant de temps ensemble. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi je m'étais... attachée aussi vite et j'essayai de ne pas y penser la plupart du temps. Mais ce n'était pas facile.

Parce qu'il y avait cette sensation de manque. Et elle était forte. Son corps me manquait, mais au-delà de ça, sa simple présence. Sa chaleur me manquait.

— Alice ?

Je levai ma tête vers Nohlan qui me fixait tranquillement. Se doutait-il du fait que je pensais à Basile ? Je souris doucement et ma magie nous transporta très loin de la demeure du Chasseur.

Bientôt, nous fûmes de nouveau chez nous.

Je lâchai Nohlan alors que nous nous trouvions au niveau de la frontière où la plupart des surnaturels arrivaient.

Il y avait quelques veilleurs et le troisième Dominant de la meute était là aussi.

Silas Bowman.

Son regard croisa le mien et il me sourit en penchant légèrement la tête. Son loup brilla à travers ses yeux. Je les avais sauvés tous les deux de la mort il y avait quelques années, lorsque des Chasseurs avaient pris en chasse Elijah et Liam. Tout l'Éthérée avait tremblé face à cette attaque et Silas avait subi plus que les autres.

Il était mort. Et je lui avais rendu la vie. Aucun lien ne s'était créé entre lui et moi, mais son loup était devenu très protecteur, bien plus que tous les autres dans la meute, mais pas autant que celui de Nohlan.

— Où sont-ils ? demanda ce dernier en passant à côté de moi et en s'avançant vers son Dominant.

Silas lui fit un signe de tête et je regardai deux loups qui se tenaient juste derrière ma barrière de magie.

Un homme et une femme. L'homme était jeune, d'apparence, je lui donnais à peine trente ans, mais chez les surnaturels, l'apparence ne voulait strictement rien dire. Alors il pouvait être beaucoup plus vieux en définitive. La femme, elle... Je l'a fixai alors que Nohlan marchait vers eux, Silas à ses côtés.

Il y avait quelque chose... d'étrange ? C'était plus une sensation qu'une donnée sûre. Je n'arrivais pas à mettre le doigt dessus, mais je le sentais. Je ne bougeai pas. Nohlan franchit la barrière sans même le sentir et s'arrêta devant les deux loups.

Mon pouvoir, au creux de mon ventre sembla prendre vie.

Et un signal d'alarme.

Danger.

Mon souffle forma de la buée et un filet de givre partit de mes pieds à la femme. Ça l'effleura et quelque chose ondula. Autour d'elle, sur elle.

De la magie.

Elle se camouflait. Parce que ce n'était pas une louve, mais qu'elle arrivait à se faire passer pour telle aux yeux de tous ceux présents ici.

— Nohlan.

Ce dernier bougea légèrement la tête alors que la femme me regardait en souriant. Elle venait de remarquer que j'avais percé à jour son petit tour de magie. Elle ne fit rien, ne bougea même pas.

Et c'est à ce moment-là que l'homme à côté d'elle passa à l'action. Son corps changea et le loup bondit, gueule ouverte sur Nohlan.

Mais Silas fus plus rapide, ainsi que les Veilleurs qui se trouvaient là. Je faisais confiance à la meute.

Ma glace jaillit et fondit sur la sorcière, parce que c'est ce qu'elle était. Elle tendit le bras pour utiliser son propre pouvoir et ce dernier percuta la barrière qui m'enveloppait. Mes pieds dérapèrent légèrement et ma glace figea son corps tout entier. Ses yeux s'écarquillèrent et bientôt, mon pouvoir l'enveloppa complètement.

Je ne réfléchis pas et senti ma magie fourmiller dans le bout de mes doigts, je refermai le poing et la statue glacée vola en éclat, transformant la sorcière en poussière blanche.

Mon corps se détendit complètement. Il ne resta rien d'elle. Deux Veilleurs sous leurs formes animales plaquaient le loup au sol alors que Silas s'agenouillait juste à côté de lui et murmurait quelque chose.

Je m'avançai, mes pieds ne faisant aucun bruit sur la couche de neige. Nohlan tourna la tête vers moi quand j'arrivais à sa hauteur. Son Alpha brillait légèrement à travers ses yeux, mais Nohlan était toujours aux commandes. Il finit par détourner les yeux et s'adressa à Silas :

— Qu'on l'enferme. Quand son humain reprendra le dessus, nous aurons une petite discussion avec lui. Alice.

Je hochai la tête et me penchai en avant pour que je puisse toucher la bête. Dès que mes doigts effleurèrent la fourrure si douce du loup, une image s'imprima dans mon esprit.

Une marque.

Le Vengeur.

Je ne fus pas surprise. Parce que j'avais compris dès que j'avais su pour la sorcière. Il avait dit qu'il testerait tout ce que j'avais créé. Et il commençait dès aujourd'hui. Cela n'était rien. Même pas un avant-goût de ce qui m'attendait, de ce qui attendait tout l'Éthérée.

Il chercherait les moindres brèches.

Et il y mettrait les formes.

Il savait où porter ses coups puisqu'après tout, c'est lui qui m'avait indiqué la marche à suivre pour que ma part du contrat se réalise.

Alors lorsqu'il passerait réellement aux choses sérieuses, ça ferait vraiment mal.

Pour la meute, pour l'Éthérée, pour moi.

Tout cela pour savoir si Nohlan était aussi intouchable que je l'avais voulu. Et il le serait. Parce que je n'avais pas consacré plus de la moitié de ma vie à ça pour rien.

Je me redressai après avoir marqué le loup pour l'autoriser à être sur le territoire et Silas fit un signe de tête aux deux loups qui traînèrent leur prisonnier.

— Fais venir des remplaçants et rejoins-nous au bar.

— Pas de souci.

Silas sortit son téléphone de sa poche et passa des coups de fil. Il n'était pas rare que malgré le lien qui les reliait à tous les autres, les membres de la meute choisissent un moyen beaucoup plus... technologique pour communiquer entre eux. C'était assez drôle et j'étais sûre qu'ils ne s'en rendaient même pas compte.

Nohlan me tendit une nouvelle fois son bras et je nous transportai au Mighty Wolves.

À cette heure-là, le bar n'était pas ouvert et il n'y avait que des loups de la meute. Eryn était là, ainsi qu'Evan et Tomas. Il y avait quelques remplaçants aussi et Peython bien sûr. Cette dernière vint saluer son compagnon d'un baiser chaste, se pressant contre son corps avant de me tendre sa joue. J'y déposai un rapide baiser alors qu'Eryn demandait ce qu'il s'était passé. Nohlan leur raconta alors qu'une voiture s'arrêtait devant le bar et que les deux Veilleurs – sous leurs formes humaines cette fois – entraient en portant le loup qui semblait inanimé. Ils avaient été rapides, comme toujours. Evan ouvrit la voie jusqu'au sous-sol, là où se trouvait la grande cage. Eryn leur emboîta le pas alors que Nohlan chuchotait quelque chose à Peython. Cette dernière hocha la tête avant de laisser son compagnon disparaitre en bas à son tour.

— Il faudrait réunir les loups non liés, Tomas. Tu peux t'en occuper avec moi ?

Le deuxième Dominant de la meute hocha la tête et son visage se ferma alors qu'il devait se concentrer sur le lien de la meute.

Je pouvais laisser Nohlan et les autres gérer tout ça. Même si c'était... mon Vengeur qui avait fait cela, intervenir n'était d'aucune utilité.

Je devais attendre de voir quel serait le prochain coup porté. Et il ne tarderait pas à venir, je n'en doutais pas du tout. Essaierait-il d'atteindre Nohlan encore une fois ? Cette tentative n'avait pas fonctionné, mais elle avait été plutôt légère, aussi.

Le tout était de savoir quel serait le prochain coup. Et comment il serait porté. Un sorcier pratiquant la magie noire avait un large panel de choix à sa disposition et un Vengeur encore plus.

— Je veux voir ce que tu as créé pour honorer ta part du contrat, Alice. Je veux voir si tu as réussi à protéger Nohlan Christensen de tous les dangers.

Son souffle sur mes lèvres :

— Toi y comprise.

Mon Air enveloppa mon corps et je me retrouvai chez moi, à l'intérieur de mon cercle de magie. Je retirai les bottes de Marina et m'installai au sol, les yeux fermés.

Je pouvais sentir ma marque de Maudite qui pulsait doucement sur ma peau. Lui ici, les pouvoirs retenus en moi voulaient prendre le dessus, ils voulaient se réveiller et répondre à son appel. Les scellés étaient encore présents sur mon corps, mais je sentais qu'ils ne feraient bientôt plus aucun effet. Mais il fallait que je tienne jusqu'au solstice. Il fallait que je garde le contrôle jusqu'à la Fête de l'Hiver. Et après cela, tout le reste n'aurait plus aucune importance.

Ma magie Blanche m'enveloppa et me caressa.

Le temps passa. Et je laissai toute trace de peur ou de doute disparaitre.

Il ne fallait pas que je pense au moment où je devrais laisser Nohlan. Je ne devais pas penser à ce que je deviendrais une fois les scellés ouverts et ma marque prenant le dessus.

Je ne devais penser à rien.

— Vais-je devoir moi-même me soucier de ton bien-être ?

C'était comme sentir ses lèvres sur mon visage, ses mains sur mon corps. Il était partout... partout en moi. Comme si... comme si je l'avais dans la peau.

Basile.

Bon sang, j'avais tellement envie qu'il... qu'il...

Mes yeux s'ouvrirent quand un papillon m'effleura. Il était d'un beau violet foncé avec des taches noires sur les ailes.

Je levai une main et il se posa sur l'un de mes doigts.

Sa couleur était celle d'un de mes Huit. Il était courant de communiquer ainsi entre nous.

Balthazar voulait me voir ?

Le papillon s'envola et disparut. C'est comme s'il n'avait jamais été là.