18. Alice
Brianna ne dit rien, se contentant de m'observer, les doigts sur la marque et la main enserrant le collier de Basile.
Est-ce que j'essayai de me rassurer ? C'était trop tard pour cela.
Notre bouclier était puissant, mais contre un Vengeur, c'était inutile. Car ceux-ci avaient un pouvoir particulier et pouvaient passer n'importe où.
Ils étaient uniques.
Et ils étaient terriblement puissants. Toute la magie du monde n'aurait pas suffi à les arrêter et surtout pas les plus puissants. Et celui qui était entré sur l'Éhérée était l'un d'eux.
Il était vieux.
Il avait passé de nombreux pactes et avait pris beaucoup de Maudits avec lui. Et il avait traversé notre barrière comme un couteau aurait coupé du beurre.
Je levai les yeux au niveau du ciel, au niveau de l'immense dôme protégeant le Michigan tout entier.
Notre barrière était la plus grande de tous les États-Unis. Peut-être la plus puissante si on prenait en compte le nombre de sorciers et de sorcières qui y avaient contribué. Ce n'était pas la plus parfaite et il était arrivé que des Chasseurs réussissent à passer sans que je ne m'en aperçoive.
Aucune magie n'était infaillible et encore une fois, la preuve en était.
— Est-ce qu'il... faut faire quelque chose ? s'enquit doucement Brianna.
Elle était la plus jeune de mes Huit. Et la plus faible, même si je ne me basais que sur les sept autres. Elle n'était pas originaire des États-Unis, comme cinq de mes Huit. Mais même d'une puissance modeste, Brianna était un rouage important de l'Éthérée.
Qu'est-ce qu'il fallait faire ?
Brianna s'avança à côté de moi et regarda ce qui devait être pour elle plus une tâche qu'un dessin, qu'une marque. Elle ne savait pas que c'était un Vengeur qui était passé, ne savait pas pourquoi il était ici.
— Rien, répondis-je.
Mes doigts lâchèrent prise autour du pendentif de Basile et ma main rejoignit l'autre sur la paroi invisible de la barrière.
Ma magie fourmilla doucement et la tache disparut. Le dôme étincela un instant, parcouru par mon pouvoir. Il n'y avait aucune fissure, aucun dommage notable.
Il était simplement passé. Sans rien toucher. Sans rien essayer de détruire.
Pour l'instant. Parce qu'il n'était pas venu ici pour rien, bien sûr.
— Rien ?
Brianna semblait surprise.
Je sentis son regard sur moi. Généralement, quand quelqu'un réussissait à pénétrer sur le territoire, la meute était prévenue ou du moins je prévenais Nohlan.
Si c'était un loup, il s'en occupait, si c'était un vampire, c'était Gabriel et quand c'était autre chose, c'était moi, Chasseur compris.
Ou alors Liam, quand l'envie lui en prenait. Mais je n'avais jamais réussi à lui faire confiance alors je préférai m'en occuper. Et il ne faisait pas partie de l'Éthérée.
À bien des égards, l'avoir ici était un danger constant, que ce soit pour nous, pour la meute tout entière ou simplement pour Nohlan. Même si simplement n'était pas un mot qui pouvait aller avec Nohlan pour moi.
— Alice ?
Je me reculai. Il n'y avait rien à faire contre un Vengeur. Surtout contre un Vengeur qui était venu chercher son dû après des siècles d'attente.
Le retenir n'était pas une option.
Le traquer n'était pas une option.
L'entraver et le tuer n'étaient pas des options non plus.
Il n'y avait vraiment rien à faire. Il était ici et il ne repartirait pas sans ce qu'il était venu chercher. J'aurais aimé qu'il ne vienne pas si tôt, mais quelque chose me soufflait qu'il voulait être sûr que je ne marchande pas sur le terme de notre contrat qui était pourtant simple. Il était venu ici pour s'assurer lui-même qu'il était bien temps pour moi de le suivre. Après tout, plus de cinq ans s'étaient écoulés depuis le pacte.
— Alice ?
La main de Brianna sur mon épaule. J'inspirai silencieusement :
— Tu peux prévenir les autres, mais personne ne fait rien.
— Pourquoi ? Quelqu'un ou... quelque chose est entré.
Quelqu'un et quelque chose.
Un Vengeur était une branche très étrange de la magie noire. Beaucoup préférait faire comme s'il n'existait pas.
Beaucoup préférait faire comme si ce n'était qu'une histoire qu'on racontait autour d'un feu de camp pour faire peur. Et je pouvais le comprendre.
La magie noire faisait peur, elle effrayait. Et s'il y avait des sorciers qui étaient pires que cette simple idée, c'était les Vengeurs.
— Fais juste passer le message, Brianna, s'il te plaît.
Elle fit la moue, mais il y avait longtemps qu'elle avait appris à ne pas attendre de réponses de ma part.
Les Huit savaient qu'un jour je partirais et que je leur laisserais la charge totale de l'Éthérée. Ils savaient que tout ce que j'avais fait jusqu'à présent était pour Nohlan et pour personne d'autre. Et ils avaient prêtés serment il y avait près de quatre cents maintenant. Nous n'étions liés par aucun serment du sang, mais cela ne changeait rien.
Un Sorcier se devait de n'avoir qu'une seule parole.
J'avais autant confiance en eux qu'en Nohlan et cela n'était pas rien. Ils étaient les seuls à part la meute à qui je pouvais confier Nohlan. Et je le ferais sans hésiter le moment venu. Tous ne vivaient pas ici, mais quand je les appelais, je savais que je pouvais compter sur eux.
— J'y vais, dit-elle.
— Utilise l'ancienne méthode, soufflai-je.
Elle fronça les sourcils et ouvrit la bouche avant de la refermer. Elle se contenta de disparaître, me laissant seule.
Il y avait peu de chance que le Vengeur trouve mes Huit, mais je ne voulais pas lui faciliter la tâche. D'aucune façon.
Alors, Brianna utiliserait un chemin détourné pour mettre au courant les sept autres. Le Vengeur ne devait pas remonter à eux.
Depuis tout ce temps, nous avions laissé suffisamment de leurres pour faire face à cette situation en particulier.
La magie qui protégeait l'Éthérée était immense.
C'était une toile dont de nombreux sorciers avaient la charge. Nous nous devions de l'alimenter, mais elle avait une spécificité ; les surnaturels présents étaient dans l'impossibilité totale de communiquer entre eux.
La toile d'une meute était nourrie par ses loups, elle était puissante si la meute était puissante. Mais c'était à double tranchant. Une meute avec des loups forts possédait une toile puissante, mais une meute avec des loups faibles perdait de cette puissance.
Ici, c'était différent.
Les seuls à rendre cette toile forte et intemporelle, c'était nous, les sorciers. Et surtout, les Huit et moi.
Nous étions les piliers de départ.
Nous étions ceux qui faisaient que ça marchait et que ça continuerait à marcher, même quand moi, je ne serais plus là. Je m'étais assurée de cela dès le départ. Dès que Robin m'avait donné toutes les cartes en main.
L'Éthérée n'était pas un immense château de cartes. Il ne suffisait pas d'un simple courant d'air pour nous faire chuter.
Nos fondations étaient solides.
Et il faudrait plus d'un Vengeur pour ébranler cela.
— Il faut un flux continu et ininterrompu. Qui traverse l'Éthérée sans jamais faiblir.
— Il faut rester dans l'esprit du lien d'une meute, sans la communication.
— Tous liés, mais incapable de se percevoir les uns les autres, c'est ça ?
— Oui, Il y aura trop de consciences pour que la cohésion se fasse. Ce serait trop dur à gérer, à supporter. Pour nous comme pour ceux qui viendront.
— Créer des portes qui seraient toujours fermées. Leurs consciences nourriront la toile. Aucun rapport de supériorité.
— Il faut partir d'une base et étendre tout cela. Comme la toile d'une araignée. Tourner autour d'un point d'ancrage.
— Protéger le noyau central. Le reste serait des sortes de leurres tout en agissant pour le bien de cette toile.
— Il faut que ce soit parfait. Rien ne doit venir affaiblir cela. L'énergie doit être constante et ceux qui la diffuse, infaillibles. Aucune erreur ne pourra être commise.
— J'ai besoin de fondations solides. Vous serez les huit piliers de l'Éthérée. Vous serez mes Huit, dis-je.
Je ne devais pas m'inquiéter maintenant. C'était inutile. J'avais su dès le début que ce jour arriverait. J'aurais simplement pu espérer que le Vengeur ne vienne que lorsque la Fête de l'Hiver aurait débuté. Mais n'aurait-ce pas été trop simple alors ? C'était dans un peu moins d'un mois et soudain, j'avais l'impression que l'étau s'était largement resserré.
Je n'avais pas manqué de temps, loin de là. Mais maintenant, ça me paraissait si peu. Oui le temps à rester ici me paraissait si court.
J'avais toujours repoussé le moment où je devrais penser à ce qui se passerait après.
Après avoir quitté tout ce que j'avais créé.
Après avoir quitté la meute.
Après avoir quitté Nohlan.
Mais aujourd'hui, c'était le moment. Aujourd'hui, je devais enfin penser à mon statut de Maudite.
Parce que c'est ce que j'étais devenue dès que la meute d'Aaron avait été mise à feu et à sang. Voilà ce que signifiait le tatouage sur mon aine, voilà pourquoi je portai tant de scellés sur mon corps.
Pour retarder ma déchéance.
Pour retarder ma chute vers l'obscurité.
Mais cela ne semblait-il pas vain soudain ? Je savais que j'avais réussi. Je savais que Nohlan était en sécurité parce que j'y avais mis toute mon énergie, tout mon temps.
Il était le centre de la toile.
Il était le point d'ancrage.
Combien cela pouvait paraître excessif pour un seul homme. Parce que c'était donné tout ce qu'on avait, parce que c'était s'oublier soi-même.
Il y avait longtemps que mes besoins étaient au second plan.
Il y avait longtemps que ma personne ne m'intéressait plus.
— Vais-je devoir moi-même me soucier de ton bien-être ?
— Un Vengeur ici n'est pas une bonne chose, Alice, souffla la voix d'Aaël.
Il portait un long manteau noir et des cheveux d'un blond cendré magnifique. Un tatouage se trouvait au-dessus de son œil gauche et se finissait en dessous sans toucher la paupière.
Je le regardai approcher et il sourit tranquillement.
Il était le Sixième.
— Trop de gens veulent de choses. Il y a trop de désir, trop de noirceur dans certains cœurs.
Oui. Je le savais.
N'était-ce pas un terrain parfait pour un Vengeur ?
— C'est le moment ?
— C'est un test, dis-je.
Il s'arrêta devant moi et inclina légèrement la tête en signe de respect.
— Sommes-nous prêts ?
L'étions-nous ?
— C'est ce que nous allons voir, n'est-ce pas ?
Peu après vingt et une heures, je ramenai Peython au Mighty Wolves. Elle avait passé la journée à l'orphelinat et avait tenu à coucher les plus petits.
Comme toujours, il y avait beaucoup de monde. Des loups pour la plupart, mais quelques vampires aussi, même si leur « territoire » se trouvait beaucoup plus au nord, plus près de chez moi. L'ambiance était légère et festive, même si la plupart du temps, il n'y avait rien à fêter.
Evan était derrière le comptoir alors qu'Eryn et Nayah évoluaient dans la salle. Sans Elijah et Nohlan, l'organisation était un peu chamboulé et même depuis qu'Aaron et Khaleb avaient choisi de partir, il manquait de bras. Mais Nohlan n'arrivait pas à trouver de bons remplaçants.
Peython alla poser ses affaires et rejoignit Evan pour l'aider. Eryn me jeta un coup d'œil et sa louve brilla un instant à travers ses yeux.
Qu'elle soit devenue la Seconde de Nohlan n'avait pas manqué de me surprendre. Comme tout le monde d'ailleurs. Elijah aurait été tout désigné pour ce poste - même si nos débuts n'avaient pas été très... amicaux -, ou même Evan, mais Eryn ? Et pourtant, elle semblait être parfaitement à sa place.
Elle murmura quelque chose à Nayah qui hocha la tête et me fit un très léger signe de tête. Je la suivis dans l'arrière-salle, là où se trouvait Marina, assise sur un tabouret.
— Il s'est passé quelque chose ? demanda Eryn sans préambule, des Veilleurs t'ont vu près de la frontière Sud un peu plus tôt dans la journée.
Je souris. Oui, c'était une bonne Seconde qui ne laissait aucune information passer entre les mailles du filet.
Même quand Nohlan n'était pas là, la meute était bien gérée.
Marina releva la tête et nous regarda une minute avant de se replonger dans ce qu'elle était en train de faire.
— Un problème au niveau de la barrière, répondis-je.
— Dois-je m'en inquiéter ?
Si Nohlan m'avait lui-même posé cette question, je ne sais pas si j'aurais été capable de lui mentir, de façon détournée ou non.
Mais ce n'était pas Nohlan.
— Non. Je m'en suis occupée, Eryn.
Elle hocha simplement la tête et me laissa là sans chercher à en savoir plus. Je la regardai repousser le rideau et disparaître pour se remettre au travail.
— Elle prend son rôle très à cœur, dit alors Marina.
— C'est la Seconde de Nohlan, répondis-je, comme si cela voulait tout dire.
Marina rit doucement, une main sur son ventre. Je savais que le bébé grandissait bien.
— Si je te demandais de me dire d'où te vient cette loyauté sans faille pour Nohlan, tu me le dirais, Alice ?
Je souris, penchai légèrement la tête sur la droite.
— Si je te demandais de me dire d'où te vient ton amour pour Liam, tu me le dirais, Marina ?
Elle rit de plus belle, son visage illuminé.
— Je vois. Il y a des choses qu'on ne peut comprendre nous-mêmes, c'est ça ?
Oui. Il y avait des choses qui échappaient à tout.
Il n'existait pas toujours de raison.
Il n'existait pas toujours de pourquoi.
C'est son souffle qui me fit ouvrir les yeux.
Ça chatouillait, comme sa langue. Et je ris alors que sa gueule n'était qu'à quelques centimètres de mon visage.
Il était revenu ! Il était revenu me voir.
Il avait de grands yeux.
Mais ses dents étaient encore plus grandes. J'étais sûre qu'elles pouvaient déchirer ce qu'elles voulaient, qu'elles pouvaient tout percer sans la moindre difficulté.
Il se recula et me donna un grand coup de langue sur le visage.
J'éclatai de rire et m'essuyai avec mon bras. Sa langue était toute râpeuse, mais c'était tellement drôle !
Il s'ébroua et donna un coup de museau dans mon bras. Je ne bougeai pas, observant cette bête qui restait près de moi et dont elle semblait garder la peur éloignée de moi. Je voulais me pelotonner contre elle, parce qu'il faisait froid et que ses poils semblaient si chauds !
Je n'avais qu'à tendre le bras et...
Ses crocs se refermèrent sur mon poignet. Je me figeai et écarquillai les yeux. Mon cœur eut un loupé et mes lèvres s'entrouvrirent.
Du sang coula, mais... je n'avais pas mal. Ça m'avait piquée sur le moment, mais maintenant... c'était une drôle de sensation.
Le loup tira, comme s'il voulait me forcer à faire quelque chose.
Me forcer à... me lever ?
Il tirait doucement, pas trop fort, ne voulait pas me faire mal. Ses crocs avaient déjà percé ma peau.
Il tira une nouvelle fois, ses yeux rivés aux miens. Je pris appuis sur le tronc derrière moi et poussai légèrement pour me redresser. Le sol sembla tanguer un instant sous mes pieds et les arbres semblèrent tourner tout autour de moi.
Je papillonnai des cils. Essayai de ne pas tomber.
Et il me lâcha.
Il me tourna le dos et battant la queue, se mit à marcher. Partait-il une deuxième fois, me laissant toute seule ?
J'ouvris la bouche, mais il me regarda et quelque chose dans son regard me fit comprendre.
Doucement, oubliant la douleur de mes pieds, je le suivais.
— Restes-tu ici cette nuit ? m'enquis-je.
— Je ne vais pas te faire attendre ici toute la soirée, Alice. Je dormirais ici cette nuit, oui.
— Et Liam ? demandai-je.
Elle sembla réfléchir un instant :
— Il est... occupé, je crois.
Un sourire énigmatique au coin de ses lèvres.
— Bonne soirée, alors.
Mon Air m'enveloppa et je me retrouvai chez moi.
Il faisait presque nuit noire et en me concentrant suffisamment, je pouvais entendre les vagues qui léchaient doucement la plage.
Dans le salon, j'allumai ma lampe tamisée et ouvrai la baie vitrée qui donnait droit sur la mer. Je regardai un instant le ciel qui était parsemé d'étoiles brillantes et étincelantes. De très légers flocons de neige tombaient en continu. Il faisait froid, mais pour moi, ce n'était qu'une brise. J'avais connu des hivers très durs dans ma longue vie, des hivers qui avaient tué des gens, qui n'avaient épargné ni femmes, ni enfants. Ni même les hommes les plus vigoureux.
J'étais née lors d'un jour comme ça.
J'étais née lors d'un hiver si terrible qu'on m'avait condamnée avant mon premier souffle. Là était peut-être la raison, l'essence même de mon pouvoir.
Je défie le bouton de mon jean et me dirigeai dans la salle de bain. Mes vêtements atterrirent dans mon panier de linge sale et je tournai le robinet d'eau froide et légèrement celui d'eau chaude. Je relevai mes cheveux à l'aide d'une pince et envoyant valser ma culotte, j'entrai dans la cabine. Je positionnai mon visage sous le jet d'eau et fermai les yeux, laissant mon corps se détendre, laissant mes muscles devenir plus souples, moins crispés. Un bain m'aurait fait bien plus de bien, mais il y avait longtemps que je n'avais osé en prendre un, il y avait longtemps que je n'avais pu m'immerger dans l'eau.
Les vieilles peurs ne disparaissaient jamais complètement. Surtout pas les peurs d'enfant. Mais quand on essayait de vous noyer, cette peur panique de l'eau ne devenait-elle pas légitime ?
Si je fermai les yeux, je pouvais y retourner. À ce moment précis de mon existence de petite fille.
— C'est un jeu, petit glaçon. Tu arrêtes de respirer pendant que tu es sous l'eau. Et tu attends. D'accord ?
Je me rendais compte maintenant que cela ne voulait rien dire. Parce que quand on était sous l'eau, on ne pouvait respirer, on ne pouvait attendre.
Oui.
C'était encore là, dans mon esprit. Tellement vivace. Tellement présent.
Un frisson remonta le long de mon dos, comme si des doigts m'effleuraient. Comme si des doigts courraient sur ma peau.
Trop réel.
Trop... vrai.
Un doigt entre mes omoplates.
Et la sensation monta, insidieuse, terrible.
De l'eau dans mes poumons. Le manque d'air.
L'essoufflement. Non. L'étouffement !
J'écarquillai les yeux et cherchai quelque chose à quoi me retenir. Mon corps parti en avant et mes mains glissèrent sur les parois.
Je cherchai mon air. Je cherchai cette gorgée d'air qui me sauverait alors que l'eau me prenait tout. Mon esprit flancha, oubliant que tout cela ne pouvait pas être possible.
J'étais de nouveau la petite fille. Une petite fille dont la mère gardait sa tête sous l'eau, essayant de la noyer.
— Tu es mon petit glaçon.
Des larmes coulèrent sur mes joues alors que deux mains se posaient à côté des miennes, sur la paroi.
Une présence. Juste là.
— Tellement apeurée.
Il rit et la sensation disparut. Mes jambes tremblèrent alors que je respirai avec l'énergie du désespoir.
Tout ça n'était pas vrai.
La présence du Vengeur derrière moi n'était qu'illusion. Il ne pouvait pas être ici.
— Tu es ma Maudite, Alice. Tu es ma petite chose à moi.
La glace grimpait le long des parois. Elle gelait tout sur son passage.
— Il serait dommage que tu l'oublies. Que tu m'oublies.
Mon dos tapant contre la glace. Le Vengeur me faisant face, souriant alors que le jet d'eau était gelé, formant une sculpture magnifique.
— Tous ses scellés pour te protéger de moi... Inutile, tu le sais ?
Il se pencha. Un prédateur. Un monstre.
— Je veux voir ce que tu as créé pour honorer ta part du contrat, Alice. Je veux voir si tu as réussi à protéger Nohlan Christensen de tous les dangers.
Son souffle sur mes lèvres :
— Toi y comprise.
Il m'embrassa et éclata en un millier de particules. La brûlure irradia dans tout mon corps et le tatouage sur mon aine dévasta tout.
Je hurlai alors que ma glace explosait et détruisait.
Du sang gicla.
Je tombai au sol, les morceaux de verres s'enfonçant dans ma peau.
Une masse sombre se forma alors tout autour de moi. Et des bras en jaillirent.
Ils me caressèrent.
Ils m'effleurèrent.
Ils m'enveloppèrent.
Pas pour me protéger.
Mais pour m'emporter.
Pour m'emmener du côté sombre.
Pour m'emmener dans les ténèbres.
J'essayai de faire appel à ma glace. Mais elle s'effrita. Tout autour de moi, elle tomba.
Je serrai mes bras autour de ma poitrine et fermai les yeux.
Quand j'ouvrirais les yeux, il n'y aurait plus rien.
Quand j'ouvrirais les yeux, les cauchemars ne seraient plus là.
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