16. Alice
Les doigts de Nazir coururent sur le tatouage qui s'était étendu de mon aine au milieu de mon ventre. Sa tête était baissée, mais je pouvais voir son expression.
Concentrée, sombre même.
Il observait attentivement et suivait la courbe de ce grand symbole, le regard attentif. Son toucher ne me faisait rien et ne me ferait jamais rien. Même la première fois où il l'avait vu et qu'il avait agi de la même façon, je n'avais pas été gênée de me retrouver à moitié nue devant lui.
C'était en grande partie parce que j'avais vécu avec des loups et que pour eux, la nudité ne signifiait rien. Et quand Nazir était concentré de la sorte, le monde aurait pu sombrer dans l'oubli qu'il n'en aurait eu cure. Il était comme ça. C'était un vieux sorcier pour qui le temps et le monde ne signifiaient plus grand-chose.
Il pratiquait la magie noire depuis des siècles, mais n'avait jamais succombé, il était toujours resté du bon côté et il était un des piliers de la toile magique de l'Éthérée. Nazir avait parcouru le monde de la même façon que moi, mais certainement en des temps bien plus vieux.
Il avait vu des peuples éteints depuis longtemps quand j'étais née et sa connaissance des autres races était impressionnante. Plus d'une fois, Benjamin et lui s'étaient retrouvés pour parler entre grands penseurs comme se moquait souvent Nohlan. Benjamin était bien plus jeune que Nohlan ou moi, mais je savais qu'il savait bien plus de choses. Quand quelqu'un voulait savoir quelque chose, il fallait s'adresser à lui. Sa mémoire était une mine d'or et il avait aussi une pièce où des souvenirs s'entassaient.
Nazir était celui qui m'avait aidé à poser le plus gros de mes scellés sur mon corps. Sans lui, j'étais incapable de le remettre en place et il était vite devenu logique qu'il reste autour de moi. C'était un ami de longue date en plus d'être un sorcier extrêmement puissant.
Et c'était un de mes Huit.
Mais personne ici hormis Nohlan n'était au courant. Peut-être l'avait-il dit à Peython, mais cela n'avait pas grande importance. Je pouvais avoir confiance en elle tout autant que j'avais eu confiance en Enora.
Elle ne trahirait jamais Nohlan. Et je savais que je pouvais compter sur elle. Je savais que quand je ne serais plus là...
— Je t'avais dit que rester exposée trop longtemps au Mal ne serait pas bon pour tes scellés, Alice.
Il releva les yeux vers moi.
Que pouvais-je lui dire ?
Que Basile était dangereux et que je l'avais su dès le début, mais que rester éloignée de lui n'avait pas été possible ? Était-ce seulement une bonne excuse ?
Bien sûr que non.
Ma faiblesse avait amené tout ceci et je n'avais même pas cherché à lutter, ou du moins pas suffisamment.
Je savais tout cela.
J'avais juste tenté le Diable comme disait souvent Aaël et voilà où j'en étais.
Mes scellés étaient dans un état qui me rendait faible et exposée. Mais étrangement, même dans cet état, je ne... regrettais pas. Ce qui s'était passé était... Je soupirai doucement. Il ne fallait pas que j'y pense.
Mieux valait même que j'essaye d'oublier.
Mais essayer ne voulait pas dire réussir, n'est-ce pas ?
— Cette magie est mauvaise. La marque aurait pu s'étendre à tout ton corps et tu aurais pu perdre le contrôle suffisamment longtemps pour causer beaucoup de dégâts. Aux autres ou même à toi.
Cela n'était encore jamais arrivé et j'espérai que ce ne serait jamais le cas. Parce que si ma marque s'étendait comme Nazir le disait alors le premier en danger serait Nohlan et cela n'était pas une option envisageable. Il était le seul que je devais protéger de tout, ou du moins, celui qui importait le plus à mes yeux.
Parce que tout ce que j'avais fait jusqu'à présent, c'était pour lui. Et il n'y avait aucune limite à ce que je pouvais lui donner, à ce que je voulais lui offrir et à ce que j'avais déjà accompli.
L'Éthérée avait sauvé beaucoup de monde.
C'était une immense toile de la seconde chance pour beaucoup de surnaturels et surtout pour les loups.
Mais pour moi, elle n'était là que pour une seule chose, que pour un unique but et c'était pour cela que je l'avais créée.
Pour que Nohlan soit entouré. Toujours.
Que rien ne puisse l'atteindre et qu'aucun mal ne lui soit jamais fait, que ce soit physique ou moral.
Pour cela, je lui avais donné des liens.
Je lui avais donné une toile si grande qu'il fallait l'esprit de millier de sorciers pour la protéger et l'alimenter. Et j'avais tout fait pour qu'il soit entouré de personnes de confiance, des personnes loyales. Chaque membre de la meute aurait donné sa vie pour leur Alpha et même si jamais je n'avais laissé cela arrivé, c'est ce qu'il fallait.
Tout cela n'était que pour lui. Et mon dernier souffle serait pour lui aussi.
Y avait-il une limite à cette loyauté sans faille ?
Mes pieds étaient en sang.
Je ne les sentais plus depuis... depuis combien de temps au juste ? Je ne me rappelais plus depuis quand je marchais.
Était-ce des heures ? Était-ce des jours ? Je savais que j'étais toujours dans la forêt ; elle était si grande, comme s'il n'y avait aucune fin, ou même aucun début.
Des arbres partout. Si grands qu'ils semblaient pouvoir toucher le ciel et peut-être même qu'ils le touchaient. J'étais trop petite pour le voir. Quand je tendais le bras, ma main était encore terriblement loin de tout ce bleu incroyable.
Et je n'étais pas comme les oiseaux. Je n'avais pas d'ailes, même si j'avais pu. Comme Jada. Je l'avais vu faire.
Et je l'avais vue tombée aussi. Alors, j'avais eu peur et je n'avais pas voulu le faire.
Le rire de Jada était devenait un hurlement et j'avais vu son sang sur sa peau si pâle. La grande Jada brisée. Comme les ailes d'un oiseau. Et il n'y avait plus eu de Jada.
Le soleil m'éblouit et mon corps chancela. Mes pieds n'étaient plus qu'un amas de chair. Tellement de sang, comme celui de la grande Jada.
Rouge. Rouge. Rouge.
C'était une couleur qui faisait mal aux yeux. Une couleur qui tachait ma jolie glace.
Mais ce n'était pas comme le bleu foncé de l'eau. Le bleu presque noir qu'on voyait en profondeur, quand mama vous maintenait la tête sous l'eau parce qu'elle disait que c'était drôle.
Mais ça ne l'était pas.
Le rouge et le bleu ténébreux.
Je n'aimais pas ces couleurs.
Ça faisait peur et ça faisait mal.
— C'est un jeu mon petit glaçon. Tu arrêtes de respirer pendant que tu es sous l'eau. Et tu attends. D'accord ?
Je regardai mes bras. Je me souvenais de la glace. Et des cris. Et maintenant... J'avais froid et j'avais faim. Et mon corps me faisait mal.
Il n'y avait plus personne.
Et la forêt m'entourait, immense. Je m'étais déjà perdue ici. Il faisait toujours sombre, le soleil, on ne le voyait pas beaucoup.
Trop petite.
J'étais toute petite et tout était toujours trop grand pour moi.
Une nuée de gros oiseaux noirs s'envola et je levai les yeux. Une branche craqua alors et il y eut un grondement sourd.
Je baissai la tête et mes yeux plongèrent dans ceux de la bête tapie dans les fourrées, juste devant moi.
Des yeux qui brillaient comme la surface de l'eau en plein été. Je savais que les bêtes aimaient bien l'odeur du sang et qu'après, elles voulaient nous manger. C'est pour ça que Jada disait qu'il fallait courir vite, mais moi, je pensais plutôt qu'il ne fallait pas trop bouger.
La bête sortie.
C'était gros et beau. Avec plein de poils. Mama... Mama appelait ça un loup.
De grandes dents toutes blanches, de belles couleurs, des yeux tout grands. C'était plus grand que moi. J'étais encore plus petite soudain. Mais je n'avais pas peur. Parce que même s'il grondait et qu'il avait les poils tout dressés, je savais qu'il voulait juste m'effrayer pour que je m'en aille. Peut-être que c'était une maman qui voulait protéger ses petits. J'aurais bien aimé m'approcher de lui ou d'elle – ça ressemblait plus à un papa en colère quand même -, pour voir si le poil était doux. Mais j'avais mal aux pieds et je savais que je ne pourrais pas aller plus loin. Mes jambes ne me portaient plus. C'était comme après avoir couru beaucoup, comme ne plus rien sentir.
Je me laissai tomber au sol et soufflai doucement. Le loup s'avança doucement en reniflant l'air. Je le regardai approcher d'une démarche tranquille. Il savait qu'il n'y avait aucun danger. De près, il était encore plus gigantesque. Nos yeux s'accrochèrent un instant et il s'assit sur son train arrière. Son souffle était chaud. Il se pencha alors et sa langue chatouilla mon pied droit. Je sursautai avant de rire. Même si j'avais mal, sa langue râpeuse me chatouillait. Je gigotai pour échapper à cette séance gratuite de chatouille et le loup gronda. Je me figeai et levai une petite main pour la poser sur sa tête, entre ses deux oreilles.
Doux.
Doux et chaud.
Quand il eut fini avec mon pied droit, il s'occupa du gauche et je gardai ma toute petite main sur ses poils.
Il se recula alors et donna un coup de museau dans ma main. Je souris. Il se redressa alors et redressant le museau, il hurla.
Je crois que de ma toute petite vie, je n'avais jamais entendu quelque chose d'aussi beau et je me demandai pourquoi je ne pouvais pas chanter comme lui. Il me jeta alors un coup d'œil et détala si vite qu'en quelques secondes, il n'était plus qu'un rêve.
Le loup magnifique n'était plus là.
La bête était partie.
Le souvenir défila devant mes yeux ouverts avec précision. Il ne manquait aucun détail. Je pouvais presque encore sentir le pelage du loup de Nohlan sur mes doigts. Je pouvais presque le voir là, devant moi. Ces souvenirs étaient une partie de moi. Nohlan était une partie de moi. J'avais passé ma vie avec lui.
Nazir passa dans mon dos sans attendre une quelconque réponse de ma part. Sa paume se posa au centre exact du scellé dans mon dos, là où la main de Basile s'était trouvée un peu plus tôt.
Ça me semblait pourtant être une éternité maintenant. Ne l'était-ce pas ?
— Je ne suis pas sûr qu'il tienne aussi bien que d'habitude.
Un picotement dans mon dos, montant le long de mes épaules, descendant le long de mes hanches. La magie de Nazir à l'œuvre.
— Je sais.
Et ça n'avait pas d'importance.
Il restait un peu plus de deux mois avant la Fête de l'Hiver, d'ici là, les scellés tiendraient, après, ça ne compterait plus. Parce qu'après, ils ne me seraient plus d'aucune utilité.
— Je sais que le solstice n'est pas maintenant, mais... comment comptes-tu gérer, Alice ?
Je me concentrai sur sa magie, faisant appel à la mienne. Nos pouvoirs se mélangèrent un instant et la brûlure irradia dans mon dos. Mes lèvres s'entrouvrirent et j'inspirai fort.
Ça tirait sur mes muscles, ça écartelait mon dos. Et je senti la marque sur mon ventre se résorber doucement et avec elle, cette noirceur qui m'oppressait se faire moins forte, beaucoup moins présente.
Mais les ténèbres ne partiraient pas pour autant. Il y aurait toujours ses bras pour me saisir dans la nuit. Il y aurait toujours cette peur insidieuse tapie au fond de moi.
J'avais du mal à prendre mon souffle :
— Je... j'aviserai sur le moment, Nazir.
Ce que je pouvais éprouver ou ressentir n'avait aucune importance.
Seul Nohlan comptait. Seuls sa sécurité et son bonheur comptaient.
— Ton âme est reliée à Nohlan d'une façon que même moi je ne peux comprendre, Alice. Si ça ne te tue pas, ça te prendra quelque chose que tu ne retrouveras jamais.
Ma vision se flouta et mon corps tomba en avant. Le bras de Nazir me rattrapa :
— Robin n'a pas fait tout cela en vain, grommela le sorcier.
— Depuis quand... tout cela t'inquiète-t-il ?
Robin... et Basile... Y avait-il une chance que tout cela ne soit qu'une immense coïncidence ?
— Je te Vois.
— Personne d'autre que toi n'aurait pu faire cela. Vendre son âme de cette façon pour protéger quelqu'un... Il y a de la grandeur en toi, Alice, mais beaucoup de stupidité aussi. Ça brisera Nohlan.
Non.
Non, ça ne lui ferait rien. Parce qu'il ne devait pas le sentir. Les liens de la meute étaient là pour étouffer le nôtre. Alors quand... quand le solstice arriverait, Nohlan ne sentirait rien.
J'ouvris la bouche, mais je sombrai dans le sommeil.
— Tout le monde nous regarde, dis-je en faisant la moue.
Robin m'attira au centre de l'immense salle et me fit face. Il garda ma main dans la sienne et posa l'autre sur ma hanche. Un sourire s'épanouit sur son visage et ses pommettes remontèrent légèrement le masque qu'il portait sur les yeux.
Il était habillé avec classe et dégageait un certain charme qui en laissait très peu indifférente.
— Ce n'est pas toi, petit glaçon, dit-il, mais moi qu'ils observent tous de cette façon.
La musique commença et il m'entraîna à sa suite. C'était un danseur hors pair. Le suivre était presque un jeu d'enfant quand c'était lui qui commandait chacun de mes pas.
— Et ça ne te dérange pas ? soufflai-je alors que nous évoluions parmi les autres danseurs.
S'il avait pu, il aurait haussé les épaules, mais il y avait trop de gens importants ici pour qu'il se laisse seulement aller. Et il était déjà la risée de tout le monde à cause de sa Vue. Et être le fils d'un des Éminents ne changeait rien pour lui.
— Je m'en fiche royalement tu penses bien, petit glaçon. Il y a des choses bien plus importantes en ce monde que le mépris qu'on me porte, tu ne crois pas ?
Il rit et son torse vibra.
— Nous afficher ainsi n'est peut-être pas...
— Ils se fichent de toi, Alice. Crois-moi. Tu ne serais pas là que ce serait pareil pour eux.
— Mais...
Il me fit tournoyer, complètement en décalage avec la musique et je me surpris à éclater de rire. Il me ramena vers lui et se pencha sur mon oreille :
— Ma Vue s'est attachée à ton âme et mes Visions ne me montrent plus rien d'autre que toi. Mon peuple ne peut pas accepter ça. Un Oracle qui ne sert pas n'est pas un bon Oracle.
Il n'y avait aucune tristesse dans sa voix. Il s'en fichait vraiment. Parce qu'il savait qu'il avait l'amour de son père malgré tout cela. Vue inutile ou pas.
— Et qu'est-ce que tu vois alors ?
Il secoua doucement la tête, un sourire énigmatique aux lèvres :
— Un Oracle ne dévoile jamais ses Visions, à moins qu'il soit payé pour cela. Et payé très cher.
— Je suis prête à mettre le prix qu'il faudra, tu sais, dis-je, me prenant au jeu.
— Je n'en doute pas, petit glaçon.
— Alors, dis-moi au moins une chose !
Il sembla réfléchir, continuant de nous faire valser. J'avais l'impression de voler, d'avoir des ailes et d'évoluer avec une grâce incroyable.
Son regard se riva au mien alors :
— Tu seras heureuse. Un jour. Il y aura quelqu'un qui te rendra heureuse. Je ne vois pas son visage, mais... son expression se fit moins sérieuse soudain, je suis sûr qu'il sera moins beau que moi.
Je le frappai à l'épaule et il éclata de rire, rejetant la tête en arrière.
— Quel égo, Monsieur De Turenne, dis-je en levant les yeux au ciel.
— Et quel caractère, Miss Klein, répliqua-t-il taquin.
Je secouai doucement la tête et retins un rire.
Je me tenais debout au bord de l'eau, les vagues léchant doucement la plage, léchant mes pieds nus. Un vent froid soufflait, mais la neige avait cessé de tomber. Nous étions peut-être fin octobre, mais depuis quelques années, notre monde connaissait beaucoup de dérèglement climatique qui sévissait dans le monde entier. Alors même la neige à cette époque de l'année ne choquait personne. Et moi encore moins.
J'observai les bateaux au large, la plupart étant des voiliers de pêche. Il y avait de gros nuages dans le ciel, preuve qu'une tempête n'était pas très loin et que bientôt, la mer s'étendant sous mes yeux ne serait plus aussi calme.
Mon scellé remis en place, je me sentais mieux. Fatiguée, mais mieux.
Mais il y avait quelque chose de triste qui demeurait. Un sentiment de solitude que je n'avais pas connu depuis des années, un sentiment de perte que je n'avais pas approché depuis quelques décennies.
Basile partait aujourd'hui. Et demain, il serait de nouveau en France, parmi les siens, parmi son peuple si fermé et si obtus d'esprit.
Était-il encore ici ? Oui. Ma magie le sentait. Il était encore là, à portée de main. Je voulais aller le voir, mais qu'est-ce que ça changerait ? Il devait partir. C'était mieux ainsi, bien plus sûr pour moi. J'aurais pensé qu'éloignée de lui, je reprendrais mes esprits, mais ce n'était pas le cas. Il était là, dans ma tête, dans mon esprit et je ne pensais qu'à lui.
Il était telle une obsession.
Tel un poison.
Une part de moi savait qu'il reviendrait, pas pour moi, mais pour Liam, pour son père. Après tout, n'était-il pas venu ici pour ça ?
Le vent souffla plus fort et je resserrai les pans de mon gilet. Mon visage était agressé et mes mains étaient glacées.
Je ne voulais pas qu'il parte.
Mais il fallait qu'il s'en aille. Pour lui comme pour moi.
J'avais déjà bien trop de liens, alors je ne pouvais pas en tisser un nouveau et surtout pas avec Basile. Parce qu'il était déjà ma perte, parce qu'il représentait mon Enfer personnel. Il fallait que je reste loin de l'Oracle. C'était mieux ainsi.
Mais...
— Tu seras heureuse. Un jour. Il y aura quelqu'un qui te rendra heureuse.
— Je te Vois.
Je fermais les yeux.
Je ne pouvais pas rester ici. Il fallait que j'y aille. Même si c'était une erreur, même si c'était dangereux, je ne voulais pas juste attendre ici.
L'Air se leva autour de moi et mes pieds décolèrent du sol. La seconde suivante, j'étais devant le bar de Nohlan et Louis croisa mon regard. Il n'était pas seul, Nohlan et Evan étaient là eux aussi, attendant quelque chose. Ou quelqu'un.
L'Alpha brilla à travers les yeux de Nohlan :
— Tu es en retard, ils vont partir sans dire au revoir.
La mine de Louis était sombre. Était-il triste ou vexé que son neveu parte sans un mot ?
Je hochai la tête et les transportai avec moi là où je savais être Basile.
Son regard était sur moi avant que mon Air ne se disperse en un coup de vent. Quinn se tenait près de lui et Aliyah était déjà derrière le volant.
Basile ne sembla même pas remarquer que Louis s'avançait vers lui. Il me fixait et le léger sourire sur ses lèvres parlait pour lui. Comme s'il avait deviné quelque chose, comme s'il était content de... lui ? De moi ?
Je n'aurais su le dire et le contact visuel ne s'éternisa pas, car Louis attrapa son neveu par le cou et le força à se pencher en avant de lui frotter le sommet du crâne énergiquement avec son poing :
— On se barrait sans un mot et sans donner un putain de numéro de téléphone ? C'est quoi cette éducation de merde ?
— Les Français, Louis, les Français, répliqua Quinn avec un sourire moqueur.
Basile rit et ce son m'emplit complètement. Je le gravai en moi, l'enfermai à double tour comme un trésor.
Evan et Nohlan s'avancèrent alors que Louis chipait le téléphone de Basile pour prendre son numéro et entrer le sien.
Je ne bougeai pas vraiment, me sentant... gauche. C'était bien la première fois de ma très, très longue vie.
Evan plaisanta avec Quinn et Nohlan s'adressa à Basile qui semblait légèrement tendu. Il sentait la puissance de cet Alpha qui voulait bien de lui, mais il ne semblait pas très impressionné. Ce qui me fit sourire et me fit finalement avancer.
Mais je m'arrêtai en sentant le pouvoir étouffant de Liam. Ses Ombres apparurent, comme venues des entrailles de la Terre et s'évaporèrent, laissant place à Marina et au Chasseur.
Marina s'écarta de son amant et s'avança sur Basile. Elle n'hésita pas à le serrer contre elle et je crus même la voir lui chuchoter quelque chose. Il hocha doucement la tête et son regard se riva à celui de son père.
Liam était-il enfin au courant ? Marina lui avait-elle dit ?
Non.
Parce que le Chasseur semblait trop curieux devant l'image de Louis et Basile côte à côte. Et de Marina se détachant de l'Oracle. Elle s'écarta légèrement et jeta un coup d'œil à Liam. Il avait penché légèrement la tête et un sourire étirait ses lèvres :
— Je suis curieux de savoir qui tu es, petit Oracle aux Ombres.
Il était étonnant de voir que Louis avait été capable de le comprendre tout de suite quand Liam en semblait totalement incapable. Ou alors il se voilait la face à dessein. Avec lui, c'était dur à dire.
— J'ai même hâte de le découvrir, alors ne te fais pas dévorer par cette Ombre qui te colle à la peau.
Une lueur dans les yeux de Basile et ses mains eurent un léger tremblement. Liam sourit de plus belle et se tourna vers Marina :
— Elijah m'attend. Je reviendrais plus tard.
Et il disparut aussi vite qu'il était arrivé. Marina dit quelque chose à Louis qui haussa les épaules et Nohlan secoua la tête, comme si cette situation lui semblait... drôlement grotesque.
Mais moi, tout cela me paraissait tellement secondaire. Parce que le regard de Basile avait emprisonné le mien.
Et dans ses yeux il y avait cette étincelle.
Cette étincelle qui voulait dire « tu es venue ».
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