Syrine
Il me fallut plus d'une semaine pour comprendre que tout ce qui s'était passé n'était en rien différent de ce qu'il était arrivé pendant les années où Bajram et moi avions été ensembles.
C'était presque comme de se réveiller d'un cauchemar. Un long cauchemar peut-être un peu trop vrai. C'était cette sensation là que j'avais tout du moins. Je n'arrivais pas vraiment à dire si j'étais malheureuse ou simplement soulagée d'avoir compris.
Compris que ce serait toujours ainsi. Qu'il ne pourrait, ne pouvait rien y avoir de plus entre Bajram et moi.
J'entendais souvent des mères dirent à leur enfant qu'on ne choisissait pas de qui on tombait amoureux et je crois qu'il n'y avait rien de plus vrai.
Tout comme on ne choisissait pas d'avoir mal ou d'avoir peur. On ne choisissait pas d'être déçu par quelqu'un. Ça arrivait.
Je ne détestais pas Bajram. Je ne pouvais pas éprouver de tels sentiments à son égard.
Je l'aimais trop. Il comptait trop. Et je savais, je savais au fond de moi que si sa vie avait été différente, alors notre relation l'aurait été.
Les choses n'allaient pas changer parce que je le voulais.
Je voulais Bajram. Mais c'était le genre de chose complètement hors de ma portée. Et je ne pouvais rien faire.
Rien du tout.
À part le regarder s'éloigner.
Encore et encore.
Jusqu'à ce que même son ombre ne me soit plus visible.
Si ça faisait mal ? Il aurait fallu avoir un cœur de pierre pour que ce ne soit pas le cas, n'est-ce pas ? Parfois, j'avais l'impression d'éprouver de trop.
J'avais l'impression que rien n'irait jamais comme je le voulais.
Il ne suffisait pas de tendre la main pour avoir ce qu'on désirait, ni même d'avoir beaucoup de volonté. Tout cela, ce n'était pas vrai. Et mentir ainsi aux gens n'étaient pas juste. Pas bien.
— Tu rêvasse encore, Rine, dit Blaise en entrant dans ma chambre.
J'étais assise au bord du lit, le regard dans le vague. C'était à peu près tout ce que je faisais depuis des jours et des jours. Quand je n'étais pas à l'école, je restais ainsi, sans bouger.
Et je pensais.
Encore.
Encore.
Et encore.
Comme si ça pouvait m'aider à quelque chose.
Je savais ce dont j'avais besoin. Ou du moins, de qui j'avais besoin. Mais je ne pouvais pas juste aller le voir.
Je ne pouvais pas juste lui demander ce qu'il ne pouvait me donner. Je n'étais pas égoïste. Pas à ce point-là. Je préférais avoir l'ombre de quelque chose plutôt que rien du tout. Est-ce que c'était une bonne chose de penser ainsi ? Je n'en savais trop rien.
Je senti Blaise s'approcher de moi et son bras enveloppa mes épaules.
C'était devenu un homme. Je ne pouvais plus m'y tromper. Il était grand et savait porter le poids de certaines responsabilités sur ses épaules.
J'étais fière de ce qu'il était devenu. De ce qu'il avait toujours été.
— Il s'est passé quelque chose ? Demanda-t-il doucement.
Il se passait toujours quelque chose quelque part.
— Rien qui ne doive t'inquiéter, répondis-je avec un léger sourire.
Blaise n'avait pas besoin de savoir pour Bajram. Il n'avait pas besoin de comprendre. Bajram n'était pas un secret à proprement parlé. Mais il était une partie de ma vie que les gens n'avaient pas forcément besoin de connaitre.
Je voulais que ça reste ainsi.
Ce n'était pas comme si Blaise verrait Bajram autrement que comme le Second de Shay. Du reste, c'était très bien ainsi.
— Vraiment ? Je ne dois pas m'inquiété quand tu passes des heures à fixer le vide ?
Il marquait un point. Je n'avais jamais été très bonne quand il était question de mes sentiments. Et ça, Blaise commençait à le voir. Nous n'en serions jamais à nous dévoiler l'un à l'autre. Je faisais office de figure maternelle pour lui et on ne pouvait pas tout dire à sa mère, n'est-ce pas ? Même si je n'étais pas réellement sa mère...
— Je suis un peu ailleurs ces derniers temps, c'est vrai, mais ce n'est rien.
Je senti le regard de Blaise peser sur moi. Il n'était pas du genre à laisser tomber ou à abandonner. Même quand il se battait avec les loups d'Élias, il se relevait à chaque fois. C'était cette ténacité chez lui qui m'avait toujours impressionnée.
Blaise était le genre de personne à savoir ce qu'il voulait et à ne jamais, jamais abandonner. Quoiqu'il puisse arriver, j'étais sûre qu'il serait toujours le dernier debout. Jashue avait dit de lui que c'était un petit bulldog très hargneux. Je ne pouvais qu'être d'accord avec lui.
— Je vais faire comme si je te croyais, d'accord ? Mais si tu continues comme ça, j'irais le dire à Catalina.
Je grimaçai et Blaise éclata de rire. Ne jamais rien dire à Catalina, sinon, c'était la fin assurée. Cette pensée me fit sourire largement.
Ma vie ne se résumait pas à Bajram.
Mon amour peut-être, mais pas tout le reste.
Je ne pouvais pas l'attendre indéfiniment. Je ne pouvais pas espérer jusqu'à ce que tout prenne fin. Ce n'était pas comme ça que c'était censé marcher.
Ce n'était pas comme ça que je pouvais vivre. Mais encore une fois, penser ainsi était bien beau. Agir était toujours une autre paire de manche.
Blaise m'embrassa sur la joue et avec un léger soupir, se leva.
— Allons manger quelque chose en ville, ce soir. D'accord ?
Je me levai à mon tour, mais avant d'avoir pu répondre, je senti quelque chose dans l'air.
Léger. Mais bien là.
Le regard de Blaise se voila et il tomba en avant. Je le rattrapai in-extremis et repoussai les mèches de son front.
Son souffle était régulier.
Les battements de son cœur aussi. Il semblait juste... endormi.
Magie, souffla ma louve aux aguets.
— Blaise ?
Dehors, il y eut une rafale de vent puissante qui fit claquer la fenêtre contre le mur. Je sursautai et ravalai mon cri quand je vis que quelqu'un se tenait sur le seuil de ma chambre.
Mes yeux s'écarquillèrent légèrement alors que j'essayai d'analyser ce qui était en train de se passer. Que... comment cet homme était-il entré ? Et pourquoi est-ce qu'il...
Une autre présence.
Je tournai vivement la tête et vis un autre homme accroupi au niveau du bord de la fenêtre, prêt à bondir.
Ses yeux étincelaient et leurs couleurs... je crois que de toute ma vie je n'avais jamais vu ça.
La puissance qui se dégageait des deux hommes était... comment dire, insoutenable ? Effroyable ? Je n'étais même pas sûr qu'il existait un seul mot pour décrire cela.
— Je ne croyais pas Sheil quand il m'a dit t'avoir vu ici.
— Tu devrais avoir plus foi en ceux qui t'entourent, Yahto, répliqua l'autre homme.
Yahto.
Yahto comme dans celui qui était considéré comme le père des Mains ?
Honor nous avait appris tout ce qu'il y avait à savoir sur notre peuple, alors forcément, Yahto Harendra en faisait partie. Mais c'était un très vieux loup. Jamais je n'aurais pu croire qu'il était encore en vie. Et pourtant, il était là, sous mes yeux.
Chez moi.
— Je verrai venir plus facilement la traîtrise, c'est ça ?
Un sourire. Non, ce n'était même pas ça. C'était une grimace animale. Quelque chose qui n'était pas humain.
L'homme à la fenêtre haussa ses épaules :
— Va savoir. On ne trahit pas les gens en qui on a confiance tu sais ? On ne trahit pas les gens qui comptent.
— Toi et tes grands sermons... Toujours aussi ennuyant.
Est-ce que je rêvai ? Je devais forcément délirer. Je ne voyais que ça. J'avais deux monstres dans ma chambre et ils discutaient comme si je n'étais pas là.
— Retourne chez toi, Yahto. Tu n'as rien à faire ici.
Yahto baissa son regard sur moi.
Ses yeux me rappelaient Bajram. La couleur, cette nuance autour de la pupille... Est-ce que Bajram et lui avaient un quelconque lien de parenté ?
— J'avais très envie de faire connaissance avec cette louve. Tu sais très bien que tout ce qui concerne Bajram m'intéresse beaucoup.
Ça sonnait terriblement faux. Dans les yeux de Yahto, il n'y avait rien. Ils étaient comme morts. C'était terriblement effrayant.
— Passe ton chemin, Yahto. Tu n'as pas envie que je me fâche. N'est-ce pas ?
— Peut-être...
Yahto m'observait. Il y avait une certaine dose d'intérêt, mais autre chose.
De plus froid.
De plus mortel.
Et ça me paralysait. Complètement. J'étais tout simplement incapable de bouger.
— Qu'est-ce que vous voulez ? Demandai-je, la voix tremblante.
— Simplement observer.
Il jeta un coup d'œil à l'homme à la fenêtre avant de reporter son attention sur moi.
— Tu m'as l'air d'être une personne très intelligente, plus sensée que ton père je dirais même.
Que mon... père ?
Que... C'est bien ce qu'il venait de dire, n'est-ce pas ?
— Vous... vous connaissez mon père ?
Jamais une telle question n'avait franchi mes lèvres jusqu'à maintenant. Mais jamais personne ne m'avait dit une telle chose.
— Pas aussi bien que Bajram, je le crains.
C'était comme un coup de couteau dans le cœur.
L'air fut saturé de puissance et un grognement terrible jaillit de la gorge de l'homme à la fenêtre.
C'était un son comme je n'en avais jamais entendu. Cet homme était-il un loup ? Quelque chose me soufflait que non...
— Fait attention à toi, Yahto.
— Tu ne t'es pas lassé de t'occuper de ce petit bâtard, mon vieil ami ? Le savoir heureux me met dans une colère telle que je pourrais aller jusqu'à tuer un ou deux loups de sa meute. J'ai beaucoup de respect pour Shay, mais mon dégout pour ma propre chair est bien plus fort.
L'homme à la fenêtre se retrouva debout et je frémis. Il était... dangereux. C'était... un prédateur.
Terrible.
Yahto me regarda de nouveau :
— Viens me rendre visite petite louve et peut-être pourras-tu rencontrer celui qui a contribué à ta venue au monde. Bajram n'a rien à t'offrir, moi, oui.
Et c'est comme s'il n'avait jamais été là. Son corps se flouta, faute d'un meilleur mot, et il disparut.
Mon regard croisa celui de l'autre homme.
Pendant plusieurs secondes il ne dit rien, se contentant de rester là alors que Blaise se mettait à grogner, se réveillant doucement.
— Considère-moi comme ton ombre, dit-il avant de disparaitre par la fenêtre.
C'était un rêve.
Tout cela. Bien-sûr. Je...
— Rine ? Qu'est-ce que... ouah. Qu'est-ce qui s'est passé ?
Blaise se mit assit et se frotta le crane.
Je ne lui répondis pas.
Parce que j'en étais incapable.
Blaise posa une main sur mon épaule, mais déjà, un haut-le-cœur me saisit et je me ruai aux toilettes pour rendre mon petit-déjeuner.
C'était le contre coup de cette rencontre. De deux puissances qui venaient de se heurter et qui auraient pu simplement me broyer.
— Considère-moi comme ton ombre.
Qu'est-ce que ça voulait dire ?
Bon sang...
Yahto Harendra était réellement le... père de Bajram ? Et il connaissait mon... géniteur ?
Bajram aussi. C'est du moins ce que Yahto avait sous-entendu. Était-ce vrai ?
Je ne pouvais pas croire à tout ça.
C'était... c'était presque au-dessus de mes forces.
Je fus malade les jours suivants et du rester à la maison.
Bajram ne vint pas et je ne le sentis pas plus dans les alentours. Il était bel et bien parti. Allait-il seulement revenir ?
Je ne savais pas. Ne voulais pas y penser. Je ne voulais pas...
Le téléphone sonna, me faisant sursauter alors que je me préparais un thé, emmitouflée dans mon plaid. Alors que j'allais répondre, un autre haut-le-cœur me saisit et je me précipitais aux toilettes, envoyant la porte claqué contre le mur. Je tombai devant et vomis.
Après avoir tiré la chasse, j'appuyai un instant mon front contre la cuvette et soupirai. Les nausées duraient depuis trop longtemps maintenant. Les loups étaient rarement malades, alors quoi ?
Ma louve remua étrangement en moi et je levai la tête sur le lavabo. Là où se trouvait une petite boite avec des tampons à l'intérieur. Blaise m'engueulait toujours parce que j'avais la fâcheuse manie d'oublier de la ranger.
Et alors que l'information montait à mon cerveau, j'écarquillai les yeux.
Je ne prenais plus la pilule depuis quelques années, pourtant, j'étais plus ou moins réglée et je savais toujours quand tombait mes règles.
Pourtant... là...
Non... ce n'était pas... je n'étais pas...
Je fermai les yeux et cherchai. Si nous pouvions facilement le sentir chez les autres, nous le pouvions aussi pour nous.
Et... C'était là.
Dans mon ventre.
Une énergie si faible, mais pourtant si présente.
Non. Non. Non ! Je ne pouvais pas... je ne pouvais pas être enceinte ! Ce n'était pas...
— Mon dieu.
Je plaquai une main sur ma bouche avant de me lever. Mon plaid glissa de mes épaules et je courrai presque dans le salon.
J'attrapai mon sac, enfilai mes bottes et mon manteau et dévalai les marches. Je faillis me rompre le cou, mais arrivait bien vivante à ma voiture.
De toute ma vie, je n'avais jamais fait le trajet à l'orphelinat aussi vite.
Devant la maison principale, Jashue discutait avec Honor de quelque chose en faisant de grands gestes. J'arrêtai la voiture non loin d'eux et Honor se tourna vers moi :
— Syrine ? Il est arrivé quelque chose ? Tu es toute pâle et...
Je me jetai dans ses bras et m'agrippai à elle, tremblante, les larmes dévalant mes joues.
Son souffle se coupa à l'instant même où elle le perçut.
Et elle ne dit rien. Parce que quelque part, elle savait très bien qui avait planté cette petite graine dans mon ventre...
— Ça va aller, Syrine. Tu verras. Ça va aller.
Je passai la nuit avec Honor. Il y avait longtemps que nous ne nous étions pas retrouvées toutes les deux. Elle parla plus que moi bien-sûr, mais cela ne sembla pas la déranger. J'aimais beaucoup écouter Honor parler. Son timbre était agréable et doux. Apaisant. Dire que j'étais un peu sous le choc était un euphémisme.
Je ne pouvais pas y croire. Tout simplement.
Ce n'était pas le genre de chose qui devait arriver. Ce n'était pas le genre de chose possible.
Non. Et pourtant... c'était bien là. Dans mon ventre et... je ne pouvais rien y faire.
Blaise vint peu après l'aube. Et lui aussi comprit. C'était là depuis bientôt trois semaines, mais il nous avait fallu du temps pour nous en rendre compte.
Il me serra contre lui. Ce n'était plus l'étreinte d'un enfant. Ce n'était plus l'étreinte d'un peu garçon. Non, c'était celle d'un homme.
Même avec les protestations d'Honor, je décidai de rentrer. J'avais besoin de réfléchir. Il y avait un bébé dans mon ventre. Un tout petit être pas encore formé, mais ne le serait-il pas bien assez tôt ?
J'avais peur.
J'étais terrifiée.
Blaise me ramena et fut aux petits soins. Il réussit même à garder Catalina éloignée ; un réel exploit.
Bajram ne vint pas une seule fois. N'était-ce pas mieux ainsi ? S'il l'apprenait... s'il apprenait que je portais son enfant, qu'allait-il dire ? Qu'allait-il faire ?
Je ramenai mes jambes contre moi. Il ne devait pas savoir. Mais comment cacher ça ? Avorter ? Non. Je... je ne pouvais pas faire ça. Je ne pouvais pas mettre un terme à une vie aussi facilement. Je n'étais pas assez forte pour cela.
Et abandonner un enfant n'était pas quelque chose que je pouvais imaginer. Je l'avais été moi-même, alors...
Qu'étais-je censée faire ?
Qu'est-ce que je devais faire ?
La main de Blaise devant mon visage me fit cligner des yeux. Je relevais mon regard sur lui :
— Il y a du soleil. Allons-nous promener, dit-il.
Il attrapa ma main, me mettant sur mes pieds avant de me tendre mes chaussures. Je les enfilais ainsi que mon manteau. Je le laissais nous conduire dans les rues animées de Newberry.
Un rayon de soleil et c'était l'effervescence un peu partout.
J'aimais bien voir toute cette vie, entendre tous ces rires et ressentir la légèreté dans l'air. Mais ça ne me faisait pas me sentir mieux. Il y avait ce poids. Sur ma conscience.
C'était comme un mensonge. Je ne pouvais pas garder ça pour moi. Ce n'était pas comme ça que ça marchait.
— Tu vas le garder, n'est-ce pas ?
Je ne regardais pas Blaise. Je ne pouvais pas penser à une telle chose. Je ne pouvais pas considérer cette vie dans mon ventre comme étant de moindre importance. Est-ce que ça venait de l'éducation d'Honor ? De ses enseignements ? Je ne savais pas. Peut-être. Sûrement.
— Ça fait du bien, dis-je en offrant mon visage au rayon du soleil.
Blaise n'en reparla pas. Nous passâmes la journée dehors, même si malgré le soleil, il ne faisait pas très chaud. Pour rentrer, il prit la petite ruelle où on avait l'impression qu'elle devenait de plus en plus petite plus vous avanciez. Nous croisâmes un groupe d'enfants qui couraient alors qu'une fillette leur demandait de ralentir ; en vain bien-sûr.
Je devais le dire à Bajram. Il n'y avait pas d'autre option. Il était le père. Bon sang, qu'est-ce que c'était bizarre de le dire de cette façon ! Malgré moi, je souri. Avant de me figer. Blaise me jeta un coup d'œil. Avant de le sentir. Là. Autour de nous.
De la magie.
Cette même magie qu'il y avait eu dans la ruelle. Opaque. Terrifiante. Ma bouche s'assécha instantanément alors qu'un homme apparaissait.
Un sorcier.
Pas le genre de bon sorcier, oh non, loin de là. Blaise fit un pas, prêt à se mettre devant moi, mais je le retins.
Le sorcier fit un pas, mais déjà, quelque chose bougeait.
Quelqu'un. Et l'homme qui avait dit être mon ombre s'abattit sur le sorcier, ne lui laissant aucune chance. L'odeur de sang me chatouilla les narines alors que l'homme se redressait. Il nous jeta un coup d'œil et son regard étincela un instant.
C'était loin d'être un loup. Qu'était-il ? Qui était-il ?
— Petit sorcier, dit-il alors.
Cela sonnait plus comme un appel que comme un commentaire. Il attrapa l'homme au sol par le col de sa... cape et ouvrit une porte en y donnant un coup de pied. Il n'y avait personne qui habitait dans cette maison. Plus depuis quelques années du moins, si ce n'était plus. Il traîna le corps dedans et ressortit quelques secondes plus tard.
Blaise était tendu comme un arc à côté de moi. Il ne bougeait plus, sentant le danger que représentait l'étranger.
Et une autre personne apparue sans prévenir. Un jeune garçon. Il avait des cheveux noirs de jais et des yeux vifs ou brillaient l'intelligence et la puissance.
Le jeune homme nous jeta un coup d'œil puis posa son regard sur l'autre homme.
— J'ai un prénom, fit-il avec une légère moue.
L'autre se contenta de marcher droit sur nous. Sur moi. Blaise me fit passer dans son dos et je senti sa puissance grimper. Mais elle n'était rien comparée à celle de cet homme. Quel genre de bête portait-il en lui bon sang ?
Ce dernier se contenta de tendre la main. Et de me regarder.
Même s'il était effrayant, même si je ne le connaissais pas, il était comme Bajram. Il inspirait une totale confiance.
— Rine ! Dit Blaise avec surprise alors que je le contournais.
— C'est bon, ne t'inquiète pas. Je... n'en aurais pas pour longtemps. N'est-ce pas ?
Mes doigts glissèrent sur la paume calleuse de l'homme et il se contenta de hocher la tête. Le jeune sorcier se retrouva à côté de nous :
— Où ? Se contenta-t-il de demander.
— À l'Antre.
Et je me senti aspirer...
Quand mes pieds touchèrent de nouveau le sol, le monde tangua sous mes pieds et si je n'avais pas été tenu, je serai simplement tombée tête la première.
Le soleil qui tapa sur ma peau me sembla bien trop chaud, bien trop... brûlant. Je levai la tête et fut éblouie.
O... Où est-ce que j'étais ?
La terre sous mes pieds... ce n'était pas du béton, ni même des pavés. C'était... de la terre. Et les habitations autour de moi... comment dire... c'était comme se retrouver dans le passé. Comme avoir remonté le temps.
— Danil ! Cria le jeune sorcier alors que le fameux Danil me tirait derrière lui, s'avançant directement vers ce qui semblait être la maison au centre de ce petit village, faute de trouver un meilleur nom.
Une porte s'ouvrit et un homme sorti de la maison. Torse nu, il portait de nombreux tatouages. Bien plus que Bajram. Il descendit les quelques marches du perron et fronça les sourcils en nous voyant. Danil s'arrêta à son niveau et lui jeta un coup d'œil alors qu'une ombre camoufla le soleil. Quelques secondes.
Un bruit d'ailes.
Je levais la tête, mais il n'y avait rien.
— Naka !
Je baissai la tête pour voir un homme simplement vêtu d'une peau de bête se jeter quasiment sur Danil.
Ce dernier n'esquiva pas et il donna l'accolade à l'inconnu qui venait d'arriver.
— Je savais bien que t'étais pas mort ! Cet abruti d'Aymar disait que si, mais je savais que c'était impossible.
Danil sourit alors que le nouvel arrivant portait son regard sur moi. Il avait des yeux d'un brun étrangement proche d'un orange profond. C'était assez... déstabilisant, mais incroyablement fascinant aussi.
Il bougea trop vite pour moi et quand il se retrouva juste devant moi, je sursautai. Lui non plus ce n'était pas un loup.
Il se pencha doucement et renifla. Comme si j'étais un vulgaire bout de viande.
— Elle sent mon petit garçon... et...
Un grand sourire barra les lèvres de l'homme :
— Il y a un polichinelle dans le tiroir.
Je rougie et l'homme se laissa tomber à genoux devant moi. Il allait frotter son nez contre mon ventre, mais la voix de Danil s'éleva et ça le figea :
— Pas de bêtises, Yiska.
Je regardai le dos de Danil s'éloigner alors qu'une femme descendait les marches d'une maison. Elle était belle et une certaine puissance se dégageait d'elle.
— Il y avait longtemps qu'on ne t'avait pas vu ici, Ana...
Danil ne lui laissa pas le temps d'en dire plus. Il l'attrapa par les cheveux et la tira violemment en avant. Elle tomba au sol et il la traîna jusqu'à se retrouver juste devant les marches de la maison principale. J'écarquillai les yeux alors que Danil frappait la femme en plein dans le ventre. Ma main se retrouva sur le mien et ma louve resta complètement paralysée face au spectacle devant nous.
Une voix venue de nulle part s'éleva alors que les portes des maisons s'ouvraient et que les habitants en sortaient.
— On ne pense plus à ses vieux amis ?
Une ombre surgit à quelques mètres de Danil et je vis un homme, accroupit, ses cheveux cachant son visage.
— Je veux jouer moi aussi.
Danil frappa une nouvelle fois et la femme retint un cri. Il ne retenait pas ses coups. Je voulais faire un pas en avant, mais l'homme, Yiska, me retint en secouant la tête.
— Je frapperais jusqu'à ce que tu sortes, Yahto. Je la tuerais s'il le faut.
Yahto. Ce dernier apparut et jeta à peine un coup d'œil au corps de la femme. Son regard se focalisa sur Danil. Avant de glisser sur moi.
— Quand on commence une partie, il faut s'attendre à ce que l'autre joueur veuille tout faire pour gagner, tu ne crois pas ? Grogna Danil.
Nouveau coup.
Quelque chose craqua. Je ne voulais pas savoir ce que c'était...
Danil souleva la femme par les cheveux et je vis le sang. Tout ce sang...
— Je crois qu'on a jamais eu cette discussion toi et moi, mais le moment est bien choisit je trouve.
Un coup de genoux. Cette fois un long cri sorti de la bouche de la femme et elle s'effondra. Était-elle encore consciente ? J'en doutais... Bon sang... qu'est-ce qui se passait ?
— Tu n'as jamais eu la notion de famille et je crois que cela n'a échappé à personne, mais moi, je l'ai. Plus que tu ne peux te l'imaginer. Tout comme Yiska, Aymar ou même ce vieux taré de Satya.
— Je suis là, répliqua l'homme, toujours accroupit.
Personne ne sembla lui prêter attention.
— Tu t'en prends à Bajram, c'est comme si tu t'en prenais à nous. Tu portes la main sur lui, nous te rendrons le coup porté au centuple. Et tu sais que ce n'est pas des paroles en l'air. Je suis plus vieux que toi. Nous sommes tous plus vieux que toi, Yahto. Et si les loups te craignent, c'est loin d'être notre cas. Tu ne nous veux pas contre toi.
— Hé, Naka, je peux la frapper ? Juste une fois, dit ?
Là encore, personne ne sembla écouter Satya, si c'était bien comme ça qu'il s'appelait.
— Si tu oses t'en prendre à cette louve, je te tue.
Danil donna un coup de pied à la femme et son corps roula sur le dos. Son visage était dans un état... Je plaquai une main sur ma bouche, sentant la bile monter.
— Ai-je été clair, petit loup ? Cracha Danil.
Le silence.
Leur échange de regards. Et leur puissance. Dans l'air. Ma louve s'agita alors légèrement et me fit tourner la tête.
Bajram.
Il était... juste là. Il était...
Ses yeux écarquillés. Sa lèvre tremblante.
Il avait senti. Bien-sûr qu'il avait senti. Si ce Yiska avait pu le faire aussi vite, alors Bajram...
Pendant plusieurs secondes, je fus incapable de détacher mon regard du sien. Avant de voir qu'il tenait la main d'une femme.
Mayanka.
Elle était l'Eranthe de Shay. Une femme magnifique avec des origines indiennes, lui conférant une peau aussi hâlé que celle d'Honor.
Tout de suite, son regard survola ce qui se passait et son visage ne laissa rien transparaître.
— Tu devrais faire plus attention à tes gens, Yahto. Et t'occuper d'autre chose que de mon fils.
Son... fils ? Yahto n'était-il pas le père de Bajram ? Ou était-il simplement son géniteur ? Cela changeait tout.
Danil tourna le dos au corps inerte de la femme et à Yahto.
Son regard se porta presque automatiquement sur Bajram et à côté de moi, Yiska le vit aussi. Mais il ne bougea pas, même si je pouvais voir, sentir presque à quel point il était heureux de voir Bajram.
— Bajram !
Un homme tomba littéralement du ciel, nu comme un vers, juste devant Bajram.
Yiska fit la moue alors que Danil nous faisait signe de le suivre. Yiska m'attrapa par le bras et je fus la seule à jeter un regard à Yahto. Dans ses yeux, il y avait quelque chose. De mauvais. De terrifiant. De mort. Je frissonnai avant de regarder Bajram. Yiska me lâcha et prit l'homme dans ses bras. C'était un tableau assez impressionnant.
Comme un père qui prenait son fils dans ses bras. Mais Bajram ne sembla même pas s'en apercevoir. Son regard était rivé au mien.
Il avait compris que j'étais enceinte.
Que je portais son enfant.
Et il y avait ce sentiment en moi. Cette peur. De connaitre la réaction de Bajram. Il ne fallait pas croire que l'idée d'être père rendait n'importe quel homme heureux. Si ça avait été le cas, Honor n'aurait pas eu à s'occuper de nous. C'était ça, la réalité.
— La brebis est de retour à la bergerie, souffla Satya qui s'était avancé jusqu'à Mayanka.
Cette dernière sourit légèrement et inclina le haut de son corps. Je ne la connaissais pas beaucoup, savais simplement qu'elle était venue quelques fois à l'orphelinat pour parler avec Honor. De quoi, cela ne m'avait jamais regardé.
— Et le monstre rôde toujours.
— Bon, on y va ? Demanda l'homme tout nu.
À ce moment précis, des voix s'élevèrent. Bajram écarquilla légèrement les yeux et se tourna à moitié. Je suivis son regard et vis deux hommes.
Il était indéniable qu'ils étaient de la même famille. Même cheveux, même teint, même yeux. Mais l'un était plus vieux et plus grand que l'autre.
Cette vision d'eux me... troubla ? Je n'aurais su dire si le mot était le bon.
Père et fils ? Ou simplement deux frères ?
Il y avait quelque chose chez le plus grand...
Est-ce que c'était dans son sourire ? Ou dans les fossettes au coin de ses yeux ? Ses cheveux peut-être ? Ou la façon qu'il avait de se tenir ?
Il fut le premier à s'arrêter et à aviser tout ce monde. Il ne sembla pas plus surprit que cela et quand son regard passa sur Bajram, je vis une lueur de haine. De colère. Pas vraiment de dégout. D'ennui peut-être à la limite.
Et ses yeux croisèrent les miens.
La même nuance.
Le même éclat. Ce n'était pas vraiment comme de se regarder dans un miroir, mais l'impression était là.
L'homme fronça les sourcils et je fus incapable de regarder ailleurs.
Qui était-il ?
Qui... était... il ?
Il ouvrit la bouche, mais déjà, Bajram m'attirait tout contre lui et mon visage se retrouva pressé contre son torse.
— Jamy, dit-il simplement.
Des mains se posèrent sur moi.
— Chez moi, résonna la voix de Danil.
Et encore une fois, je fus aspirée, mais cette fois, quand mes pieds touchèrent de nouveau le sol, je ne chancelai pas. Bajram me tenait trop bien.
Quelqu'un siffla. Yiska ?
— C'est joli chez toi, Naka.
Il y eut beaucoup de bruits. Des grognements et Danil finit par demander à... Aymar ? de faire attention et de ne pas tout brûler.
Moi, j'étais toujours contre Bajram. Je n'arrivais pas à bouger.
Était-ce la peur ou le soulagement ?
— Satya, reste ici, tu veux ?
Danil semblait à la fois amusé et embêté. La voix de Bajram s'éleva :
— Ramène Mayanka à la maison, Jamy, tu veux ?
Je levai la tête et croisai le regard de Bajram. J'aurais été incapable de dire à quoi il pensait. Et cela me fit paniquer.
Je reculai et ses mains glissèrent de mon corps.
— Il... faut que je... Blaise, il... il va s'inquiéter. Je... dois y aller.
Avant que j'ai pu faire un seul pas, Yiska se matérialisa à côté de moi. Sa main se retrouva sur mon ventre et je sursautai.
— Blaise, c'est qui ? Demanda-t-il à Bajram.
Ce dernier était tendu comme un arc. Il fallait que je m'en aille. Je... ne pouvais pas rester ici. Je ne...
— Aymar, va t'habiller, tu veux ? Et s'il te plaît, arrête de t'amuser.
Je regardai Danil s'avancer vers Bajram et lui dire quelque chose à l'oreille. Yiska s'écarta légèrement de moi et j'en profitai pour partir.
J'eu à peine atteint la porte que Yiska se retrouva là, encore une fois :
— Tu vas où ? Demanda-t-il à la façon d'un enfant.
Chez Honor. Je devais... là-bas, je savais que je pourrais...
Je ne répondis pas à l'homme et pris mes jambes à mon cou, m'enfuyant comme si c'était la seule chose à faire.
— C'est un jeu ? Cria Yiska. Attends ! Moi aussi je veux jouer !
Mes pieds butèrent dans quelque chose et mon corps s'envola. Je vis le sol se rapprocher et fermai les yeux, essayant d'anticiper la douleur. Mais rien ne vint. Et les bras de Bajram se refermèrent autour de mes hanches.
Je ne le regardai pas. Ne voulais pas voir cette lueur dans ses yeux.
— Amène-moi chez Honor.
Et il le fit.
Les quelques apparitions du soleil avaient laissé place à la neige. Cette dernière tombait en continu depuis quelques jours.
Depuis que j'étais ici en fait. Et je l'observai depuis la chambre où j'étais. J'avais l'impression d'être épuisée alors que je ne faisais rien. C'était un peu bizarre.
Alors que j'étais assise au niveau de la fenêtre, du bruit derrière moi attira mon attention. Je tournai mon regard sur Yiska qui était assis par terre, un téléphone portable dans la main. Il le regardait comme si c'était un instrument du mal, quelque chose de dangereux et de mauvais. Je crois qu'il essayait de le faire fonctionner, mais que ça ne réussissait pas vraiment.
J'étais ici depuis quatre jours. Et depuis ces quatre derniers jours, Yiska ne me quittait pas d'une semelle. S'il avait pu me suivre aux toilettes et sous la douche, je crois qu'il l'aurait fait. C'était assez drôle. Il s'amusait de mes deux pieds gauches et parfois je le surprenais à me fixer intensément, comme s'il essayait de comprendre quelque chose.
Bajram était ici aussi.
Shay était venu. Son Second lui avait dit. Il lui en avait parlé. Mais nous, nous ne l'avions pas encore fait. Parce que je ne le voulais pas.
J'avais trop peur. Trop peur des mots qui sortiraient de sa bouche. Je savais très bien que fuir de cette façon ne nous aidait pas, mais...
Honor ne disait rien, mais nous savions que cette situation ne pouvait pas durer. Je devais dire à Bajram ce que je comptais faire.
Avec ou sans lui.
Je ne mettrais pas un terme à la vie dans mon ventre. Cela n'était pas une option envisageable. Yiska se leva et jeta le téléphone sur le lit. Il me rejoignit et comme il le faisait depuis que nous étions rencontrés, il posa sa main sur mon ventre. Il hocha la tête avec un sourire entendu et s'éclipsa de la chambre. Pour que Bajram entre la minute d'après.
Je détournai presque immédiatement mon regard alors qu'il fermait la porte derrière lui.
C'était le moment de parler, c'est ça ?
— Yiska, Danil et Aymar sont ceux qui t'ont... élevés, c'est ça ? Demandai-je, à mi-voix.
J'avais l'impression que ça faisait une éternité que nous n'avions pas parlé tous les deux.
— Des enfants ont deux papas ou deux mamans, moi j'en ai trois. Ou quatre, si on compte Satya.
Le plus effrayant de tous de mon avis. Je ne l'avais pas revu depuis la dernière fois chez Danil.
— Tu n'as pas manqué d'amour, alors.
— C'est vrai.
J'inspirai, mon cœur aux bords des lèvres. Et je me tournai vers Bajram.
Il était beau.
Il était fort.
Mais il était têtu. Terriblement têtu, n'est-ce pas ?
— Je suis enceinte, Bajram, dis-je.
J'avais besoin de le dire à haute voix. Besoin de lui dire, à lui. Il ferma les yeux un instant et je vis toute cette tension dans ses épaules. Et cette expression sur son visage.
Je me levais, comme dans un rêve et m'avançai vers lui. Ma main se posa sur son bras et il rouvrit les yeux pour les plonger dans les miens.
— Je... veux ce bébé. Je ne mettrais pas un terme à cette grossesse. Que tu le veuille ou non, je ne... ferais pas ça.
Une larme coula le long de ma joue. S'occuper d'un enfant n'était pas une chose facile. Surtout si on était toute seule. Je pourrais compter sur tout le monde ici, sur Honor, mais aucun d'eux n'étaient Bajram. Aucun d'eux ne pourrait remplacer le père de l'enfant.
— Ce n'est peut-être pas ce que tu veux, mais... tu ne peux pas me demander de tuer ce bébé. Tu ne peux pas me...
Je baissai la tête et tentai de reprendre mon souffle.
— Je t'aime. Je crois que je suis tombée amoureuse de toi quand tu faisais l'idiot dans cet arbre, à rester là sans bouger toute la journée. Mais... malgré tout ça, je ne te forcerais pas à me choisir. Je ne te forcerais pas à être un père pour cet enfant. Jamais je ne prendrais les décisions à ta place.
Je le regardai et ma main se retrouva sur sa joue.
— Mais si tu ne veux pas de cet enfant, de... notre bébé, alors... tu peux partir et m'oublier. Je ne peux pas vivre comme ça. Plus maintenant, tu comprends ?
C'était le seul choix que je pouvais lui offrir. Il n'était plus question que de nous deux. Et Bajram devait le comprendre.
Je retirai ma main de sa joue, mais ses doigts enveloppèrent mon poignet. Et le temps sembla s'arrêter.
C'était comme s'il n'y avait que nous deux.
Lui et moi.
Et cette vie dans mon ventre.
— Si tu me lâche maintenant, il n'y aura pas de retour en arrière.
J'avais peur.
Peur de me rendre compte que je ne pourrais pas y arriver sans lui.
Doucement, les doigts de Bajram se détachèrent de ma peau et mon bras retomba le long de mon flanc.
Était-ce donc sa réponse ? Était-ce donc ici que notre histoire prenait fin ?
Je posai une main sur mon ventre et fermai les yeux.
Depuis le début, je n'avais pas eu les cartes en main. C'était Bajram. Depuis toujours. Alors qu'allait-il faire ?
La porte grinça quand il l'ouvrit et mon cœur eut un loupé.
Et puis quelque chose m'effleura.
C'était doux. Léger. Une caresse.
— C'est ta décision ?
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