Epilogue

Bajram

Meute de Shay Collins.

Little Rock, Arkansas.

5 ans plus tard.


— Je t'ai eu, grogna San avec un sourire qu'il réservait pour nos petites séances d'entraînements.

Je le lui rendis.

De l'extérieur, ça n'avait rien d'un sourire amical, bien loin de là.

Nous étions des animaux après tout. Et quand nous étions ensembles, nous n'avions pas besoin de faire semblant. Shay n'aurait pas été tout à fait d'accord avec cette façon de voir les choses, mais il n'était pas là en cet instant, alors...

— Qu'est-ce que je t'ai dit, gamin ? Ne sois jamais aussi sûr de toi.

La contre-attaque l'envoya au sol et il grogna. Je n'étais pas fort au point de croire que je pouvais battre tout le monde, mais quand vous étiez le Second d'une meute, mieux valait pour vous que vous soyez le deuxième plus fort. Sinon tout cela n'avait aucun sens en quelque sorte. J'étais celui qui gardait tout le monde en forme quand Shay ne le pouvait pas.

J'étais celui qui aimait donner et recevoir des coups. C'était à peu de choses près aussi simple que cela.

— Tu es relativement calme aujourd'hui, mon petit Bajram, se moqua Locklann depuis l'endroit où il se trouvait.

Je fis la moue et il éclata de rire alors que San se redressait.

J'étais Second de cette meute depuis des années maintenant et si au début je n'avais pas réussis à avoir confiance en tous les hauts-gradés, les choses avaient radicalement changées. Je n'étais pas du genre à m'attacher. Les liens avaient toujours représentés une sorte d'entrave pour moi. Mais des évènements vous changeaient. Même si ce n'était qu'un tout petit.

Des évènements, ou des décisions.

— C'est juste qu'il sait nous cacher les choses, notre Second, dit Ludwika en arrivant, sa chemise nouée sur son ventre.

Ludwika était la première Dominante de la meute et la grande sœur de ce vieux taré d'Hermès Chavez, un Alpha puissant et excentrique. Elle était la compagne de Mikaël et ils étaient parents de deux petits loups assez prise de tête. Shaan et Khémis étaient des adultes maintenant, mais ça ne les empêchaient pas de venir faire des conneries ici.

— Tu ne devrais pas être en patrouille, toi ? Grondai-je, évitant le poing de San.

— Kéo et Jilhan ne sont pas venu. Mais je sais exactement où les chercher.

Des rires résonnèrent.

Celui d'un enfant.

San perdit sa position de combat et se retourna pour voir Kéo jeter un petit garçon dans les airs. C'était leur petit dernier à Anahi et lui.

Dans une meute, les enfants étaient ce qu'il y avait de plus précieux. Ils étaient ceux qu'on ne quittait jamais du regard. Parce qu'ils étaient tout. Parce qu'ils représentaient le futur, l'avenir de la meute. Et ça, c'était la chose la plus précieuse. Il n'existait rien de plus important.

— Les enfants... ça retourne la tête à n'importe qui, souffla Lock avec une légère trace de tristesse dans la voix.

Mon loup agit avant moi, entourant de sa puissance le Lieutenant de la meute.

Sa compagne, Raksha, avait failli mourir en couche et si elle s'en était sorti in-extremis, ce n'était pas le cas du bébé. Alors Locklann n'avait pas voulu retenter la chose, ayant trop peur de perdre définitivement sa compagne.

C'était une souffrance que la meute entière essayait de lui prendre. Mais comment faire quand Locklann comprenait qu'il ne serait certainement jamais père ? Et Raksha... Raksha c'était beaucoup tourné vers Shay, ne le quittant pas d'une semelle pendant plusieurs semaines après tout ça.

Locklann me jeta un coup d'œil et hocha doucement la tête, me remerciant silencieusement. Je n'étais pas encore habitué à tout ça. Il faut dire que j'avais fui tout ça pendant longtemps.

Mais Locklann avait raison. Les enfants retournaient la tête de n'importe qui.

Surtout quand c'était le vôtre.

Devant la maison, j'entendis plusieurs voitures se garer. Des portières claquèrent et la puissance de Shay enveloppa le domaine tout entier, nous effleurant chacun notre tour pour voir si tout le monde allait bien. C'était un Alpha exemplaire et c'était d'autant plus drôle quand on savait qu'il avait toujours tout fait pour éviter ce poste. Ces responsabilités.

Une femme pouvait changer un homme.

Surtout quand c'était celle qui comptait.

Un bruit de course dans la maison. Une petite foulée.

Locklann et San échangèrent un regard amusé alors que Ludwika sifflait pour attirer l'attention de Kéo et Jilhan.

La moustiquaire claqua contre le mur et un petit garçon jaillit de la maison.

— Papa ! Cria-t-il.

Il faillit s'étaler de tout son long en bas des quelques marches, mais réussis à retrouver son équilibre à temps.

Bon sang, il était exactement comme sa mère... deux pieds gauches.

Son regard se riva au mien et quand il fut à portée de bras, je le soulevai et tournai sur moi-même un instant.

Je frottai mon nez contre le ventre de mon fils et il éclata de rire, étirant un peu plus mes lèvres.

— Comment va mon garçon ? Demandai-je, me stoppant.

Kamran avait cinq ans depuis deux semaines.

La moitié d'une décennie était passée depuis qu'il était né, ce petit bout d'homme... J'avais du mal à réaliser qu'il grandissait si vite. Et que c'était loin d'être finit. Il allait encore pousser pendant pas mal d'années. Juste de quoi me préparer. N'est-ce pas ?

Il avait mon teint et mes cheveux. En fait, physiquement, il était comme moi. Mais les choses se corsaient niveau équilibre. Il pouvait tomber alors même que rien n'entravait ses pieds. C'était drôle. Mais ça me filait une crise cardiaque à chaque fois. Ce gosse avait deux pieds gauches.

Les mêmes que sa mère.

Cela me fit sourire. Kamran avait aussi les yeux de Syrine. Et son caractère était un mélange de nous deux. Enfin, à peu près.

— Revoilà le petite monstre, rit San en ébouriffant les cheveux de Kam.

Ce dernier sourit avant de crocheter ses bras à ma nuque. Mon loup senti plusieurs odeurs sur lui.

Celle de Syrine bien-sûr, ainsi que celle de Shay ou encore d'Honor. Mais aussi de Danil, Yiska, Aymar et... je grinçai légèrement des dents. Pourquoi n'étais-je pas étonné ?

Kamran battit des jambes et je finis par le reposer au sol.

— Où est ta mère ? Demandai-je.

Je senti Syrine avant de la voir bien-sûr. Yiska était avec elle, ce qui était le cas depuis pas mal d'années. J'avais cru qu'après la naissance de Kamran, Yiska irait vivre chez Danil, mais il avait préféré resté ici. Et ce n'était pas moi qui allait l'en empêcher. Syrine l'appréciait et avoir une deuxième ombre ne semblait pas la déranger. Elle blaguait souvent sur le fait qu'une ombre, c'était mieux que quatre. Et pour cause, lors de sa grossesse, Danil, Aymar, Yiska et moi-même étions toujours derrière elle. Et je ne parlais même pas de la meute.

Pour l'instant, Kamran était l'héritier de Shay.

— Avec papy Yiska, répondit Kamran en attrapant la main que je lui tendais.

Yiska souffla quelque chose à Syrine et disparut à l'intérieur. Mon fils n'avait pas la même relation que j'avais pu avoir avec Yiska, Danil et Aymar. Pour lui, ils étaient ses grands-pères. Ils aimaient bien s'occuper de lui et lui apprendre quelques petits trucs, mais si Kamran avait bien une relation toute particulière avec quelqu'un, c'était bien avec une personne que je ne pouvais pas vraiment sentir, faute de trouver un meilleur mot.

Je grimpai les marches et mon regard captura celui de la femme en face de moi. Syrine sourit doucement et ma main glissa sur sa nuque. Elle ferma les yeux et me tendit ses lèvres.

Il y avait cinq ans, j'avais fait un choix. Un choix qui nous avait conduits ici. Un choix qui m'avait permis d'être un père.

Mais aussi un compagnon.

Kamran lâcha ma main et disparut dans la maison où je sentais différente énergie.

— Tout le monde va bien ? M'enquis-je en parlant d'Honor et de tous les autres de l'orphelinat.

Syrine hocha simplement la tête et je souris avant de l'embrasser.

Les choses n'avaient pas été faciles. Ni pour elle, ni pour moi. Plus d'une fois, j'avais merdé avant de comprendre que je ne pouvais plus me le permettre. Mes trois pères étaient plutôt bons pour me faire comprendre les choses. Et c'est ce qu'ils avaient fait.

Même si j'étais un homme aujourd'hui, ils faisaient partie intégrante de ma vie. Et de celle de Kamran. Je crois que Syrine avait un peu eu peur au début, surtout quand elle avait compris ce qu'Aymar, Danil et Yiska étaient. Ainsi que Satya. Jouer avec de gros chats et un gros oiseau volant amusait Kamran, mais ça faisait terriblement flipper Rine.

— Tu m'as manqué, souffla-t-elle en cachant son visage contre la peau de mon cou.

— Tu n'es parti qu'une semaine, dis-je avec un sourire.

Mais même une semaine était terriblement long. Au début, après la naissance de Kamran, Syrine n'avait pas voulu quitter Newberry, pensant que nous pourrions facilement vivre chacun de notre côté, nous partageant la garde de Kamran. Mais les choses avaient vite dégénérés et nous avions surtout très vite compris que ça ne pouvait pas fonctionner de cette façon.

Alors elle était venu ici, parce qu'après tout, c'était là qu'était sa place. Et plusieurs fois dans le mois, elle retournait à Newberry. Elle retournait à l'orphelinat. Parfois j'allais avec elle, parfois c'était Shay ou un autre membre de la meute. Tout comme Kamran ne l'accompagnait pas à chaque fois. Nous avions notre façon de faire depuis le temps et ça fonctionnait très bien ainsi.

Je n'avais pas peur de la laisser partir. Yiska était toujours avec elle. Et quand ce n'était pas le cas, Aymar ou Danil prenaient le relais.

Je ne devais pas oublier que Yahto était là.

— Et je vois que tu as ramené du monde.

Rine leva les yeux au ciel en voyant ma moue.

— Qu'est-ce que Danil a dit ? Sois poli et gentil.

Je grommelai dans ma barbe alors que le rire de Kamran résonnait dans la maison entière.

— Arrête papy, arrête !

Rine éclata de rire et me tira à l'intérieur. Dans le salon, Yiska était assis sur un des canapés et jouait avec un vieux téléphone. J'ignorai pourquoi il le trainait partout celui-là, mais parfois, avec lui, mieux valait ne pas demander.

Kamran était allongé sur un vieux plaid qui se trouvait au sol et sa tête reposait sur les jambes de l'un de ses grands-pères.

Celui dont j'aurais pu facilement me passer, mais comme Danil le disait souvent, entre ce qu'on voulait et ce qui arrivait vraiment, il y avait un immense fossé.

Mon loup grimpa et gronda doucement, attirant l'attention de mon fils.

Et de Naël.

— Envie de faire tes griffes, Baj ? Se moqua-t-il.

Je lui montrai les dents alors que Kamran l'escaladait littéralement. Voilà la personne avec qui Kam avait une relation spéciale. Ça me mettait en rogne, mais je ne pouvais pas y faire grand-chose. Si Syrine n'avait jamais voulu savoir qui était son géniteur, quand Naël avait débarqué devant elle, je crois qu'aucun des deux n'avaient vraiment eu le choix. Dali m'avait raconté à quel point cette découverte avait ébranlé cet abruti devant moi. Il avait voulu aller se foutre dans un trou et c'était d'autres abrutis qui étaient allé le chercher.

Naël ne se comportait pas du tout comme un père envers Syrine. Ils se parlaient, mais ça n'allait pas vraiment au-delà de ça. Mais le lien qui existait entre mon fils et cet empaffé... même si ça me faisait grincer des dents, je savais que je pouvais compter sur Cain en ce qui concernait la sécurité de Kamran.

— Je peux faire mes griffes, moi aussi ? Demanda innocemment Kamran.

Yiska releva les yeux de son téléphone :

— Que sur les meubles de Danil, souviens-toi.

Syrine secoua la tête alors que Kam éclatait de rire, presque debout sur les épaules de Naël.

— On va voir mamie Dali après, dis ?

Cette dernière détestait que Kamran l'appelle comme ça. Mais mon fils l'avait très bien comprit et je crois qu'il aimait embêter les gens. Un trait qu'il tenait de moi. Et qui rendait fou beaucoup de monde.

— Si tu veux gamin.

Syrine appuya sa joue contre mon épaule et je la senti sourire.

Même si j'étais lié à elle, j'avais encore mes défauts et mes mauvaises habitudes. On ne changeait pas du jour au lendemain. Et elle le savait.

Nous avions notre petite vie maintenant, mais le danger n'était jamais très loin. Tout comme la tranquillité n'entrait jamais en ligne de compte.

Surtout pas avec des idiots comme Yiska ou Naël.

Kamran était encore petit. Il avait encore le temps d'apprendre et de devenir un homme. Et je savais qu'il ne courrait aucun risque. Pas quand autant de monde l'entourait.

Yahto lui-même ne pourrait l'atteindre.

Des monstres veillaient sur mon fils. Sur ma famille.

Le genre de monstres qui terrorisaient les autres enfants.

Mais Kamran n'était pas n'importe qui n'est-ce pas ?

C'était mon fils.

C'était un Kumar. Un Harendra. Un Cain.

C'était notre petit garçon à Rine et moi.

Et mieux valait que personne ne l'oubli.

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Et voilà, pour Bajram et Syrine, c'est terminé ! J'espère que ça vous aura plu, même si c'était très court! Je vais réfléchir à ce que je peux vous donner maintenant x) 

Encore un merci à tout le monde :)


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