Partie 1 : Le décor

Oslo, février 2056


« Fille de la lune, princesse des glaces, depuis toujours mes nuits sont blanches... Dans la froideur de ces nuits glacées, j'ai ravivé une infime lueur d'espoir amenant sans cesse à se dépasser, se surpasser, repousser ses limites, en oublier les obstacles... Dans le sport on appelle ça se dépasser, dans la vie on appelle ça survivre. ».


- Vous vous en souvenez ?

- Une pseudo biographie retraçant ma vie, mon œuvre et tout le narcissisme égocentrique qui va avec...

- J'en conclus que vous ne l'avez pas aimée...

- Pas vraiment... Inutile de dramatiser l'essentiel de ma vie ! Je sais que le bonheur n'est pas vendeur et que les gens heureux énervent mais de là à tout virer au pathos !

- Racontez-moi comment tout a commencé. Poursuivit la journaliste, voyant peu à peu le regard de la vieille dame se plonger dans ses souvenirs.

- Je devais avoir dix-sept ans et c'était chaque soir le même rituel... Il faisait nuit, l'air était glacial et je sortais seule dans les rues d'Oslo. J'y croisais souvent les mêmes bandes de jeunes dont je ne faisais pas partie. Sans regrets. Nous étions différents. Eux étaient en quête de nouveauté et moi de liberté. C'est un sentiment étrange à dix-sept ans... Je n'avais jamais ressenti ce besoin étant enfant, sûrement parce que ma mère m'avait offert la vie de n'importe quelle petite fille. C'est à l'âge de huit ans qu'elle m'initia au patinage, un soir d'hiver sur Gressbanen. J'ai pour la première fois ressenti cette sensation de liberté, éprouvé le sentiment catalysant de fendre l'air, senti cette brise légère me transpercer. C'était devenu notre rituel, quelques nuits par semaine.

- C'est là que vous l'avez rencontré ?

La vieille dame acquiesça, posant un regard attendri sur un portrait lointain de celui qui avait changé sa vie.




Décembre 2018

«Je suivais mes habitudes nocturnes... Je travaillais sans cesse de nouveaux enchainements que ma mère m'avait fait découvrir. Je n'avais jamais su d'où lui venait sa passion pour le patinage. Elle ne me l'avait jamais dit, je ne le lui avais jamais demandé. On patinait ensemble certains soirs et c'était suffisant ; je ne cherchais pas à en savoir plus. Elle n'était pas du genre à en dire plus.

J'ai rencontré Kristian un soir de décembre, il s'était arrêté pour me regarder patiner. Je ne lui avais prêté aucune attention. J'ai finis par abandonner vers une heure du matin. Kristian était encore là. Je quittais la patinoire lorsqu'il m'interpella. Les premiers mots qu'il lâcha se voulurent protecteur, les miens furent méfiants. Je n'avais ni l'habitude ni le besoin qu'on s'inquiète pour moi. Je ne voulais que vivre ma vie et je pense qu'il l'a vite compris.

- Ce n'est pas raisonnable pour une jeune fille de trainer ici en pleine nuit !

- A en croire la demi-bouteille de scotch que vous tenez, vous n'êtes pas non plus un modèle de raison !

- J'ai quelques soucis à oublier.

- On en a tous !

Il avait trop de prestance et de charisme pour être un homme comme les autres. Il dégageait quelque chose de malin et de négligent à la fois. C'est pour ça qu'il ne m'a jamais impressionné : je ne voyais en lui que l'homme qu'il voulait être et non celui qu'il était. Comme si ce lieu où nous nous retrouvions révélait chez nous la moindre de nos inhibitions. »



La vieille dame marqua une pause. Elle avait longuement hésité à accorder cet entretien. Mais après des années de silence, elle était enfin prête à dévoiler son passé ; faire taire des années de rumeurs infondées.



A suivre...



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Comment vous trouvez cette première partie ? Le personnage d'Anna, de Kristian ? A votre avis, que cache-t-elle  ? 

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