" Another head hangs lowly, child is slowly taken,

and the violence caused such silence. Who are we mistaken ?

But you see, it's not me, it's not my family

In your head, in your head, they are fighting"

Zombie- The Cranberries

– Tu vas bien ?

Je pose une main sur son épaule mais elle se dégage

– Parce que maintenant tu me parles ? Je ne veux pas de ta pitié Paul.

– Je sais, ce n'est pas de la pitié. Je me rends juste compte que je t'avais jugé trop rapidemment.

– Le chemin est encore long ?

– Evelyn...

– Au cas où tu n'as pas encore compris, je n'ai pas envie d'en parler. C'est parce que ton Commandant m'a forcé à dévoiler le pire moment de ma vie devant toutes votre assemblée de tueurs que ça me donne envie de disserter avec toi sur les traumatismes laissés par une tentative de viol sur une enfant. Donc soit tu te tais, soit tu changes de sujet.

– On est bientôt arrivé. Tu vas voir, ça va te paraître grand après 7 ans dans la nature.

Elle garde le silence et j'en profite pour l'observer discrètement. Elle paraît tellement différente par rapport à la salle du trône, je la vois encore, luttant pour rester debout, des larmes tombant de ses yeux, le Commandant l'a poussée trop loin. J'aurai voulu intervenir, m'interposer, mais ici, il ne vaut mieux pas s'opposer à la volonté du Commandant, même quand c'est la bonne chose à faire.

Je ne sais même pas pourquoi j'en ai quelque chose à faire, je n'ai pas fait quelque chose de bien depuis au moins dix ans, je ne sais pas pourquoi cette fille me donne envie de me racheter.

Je me vois en elle je pense, elle est tellement jeune, tellement abîmée par ce monde... Quand le Commandant l'a forcée à avouer ce qu'elle avait fait, tout ce que je voulais faire c'était ressusciter ce mec juste pour le renvoyer sous terre. C'était une enfant, et ce qu'il a fait a détruit sa vie. Ce monde est tellement pourri, pas étonnant que des sociétés comme la Guilde naissent...

– Voici ta chambre, on t'apportera ton déjeuner.

– Donc je suis prisonnière, autant le dire franchement.

– Oui, tu es prisonnière.

Elle me regarde avec un mélange de colère et de surprise, elle s'attendait peut-être à ce que je lui mente, mais je ne voyais pas l'utilité. Je m'en veux d'être celui qui l'a ramené dans ce cercle de violence, même si je sais que je n'aurai pas pu l'empêcher, mais ça ne veut pas dire que je lui fais confiance. J'ai fait cette erreur une fois, je ne recommencerai pas. Elle ne mérite pas ce qui lui arrive, mais je ne peux rien y faire, et je ne vais pas me mettre en danger pour une fille que je connais depuis cinq heures. Même si j'admire sa résistance face au Commandant, j'espère qu'elle se rendra vite compte que c'est une voie sans issue, qu'on ne peut lui résister, ce que tout le monde réalise après un certain temps. Au début on essaie tous d'échapper à certains devoirs, par flemme ou parce qu'ils vont à l'encontre de nos valeurs, mais après un moment, tout le monde finit par abandonner, j'espère simplement que Evelyn abandonnera sans qu'il n'ait à la briser, garder une part d'humanité dans ce genre de monde est la seule chose qui l'empêchera de devenir un monstre comme le Commandant, comme moi.

Elle baisse les yeux et ses joues rougissent un peu.

– C'est qui le garçon qui restait au fond de la salle ? brun, un peu plus vieux que moi...

– James ?

– C'est son prénom ? c'est joli.

Je vois une lueur dans ses yeux, je la comprend, elle vit seule depuis 7 ans, ça ne m'étonne pas qu'elle veuille apprendre à connaître des gens de son âge. Cependant, James lui fera du mal s'ils deviennent amis, c'est certain.

– Reste loin de lui, c'est l'âme damnée du Commandant, il fait tout ce qu'il lui dit, il briserait toutes ses promesse sur un de ses ordres

– Comme toi en gros

Et sur ces mots elle me ferme la porte au nez, je comprends que mes paroles puissent paraître hypocrites, mais James est bien pire que moi, bien pire... Il est incapable de dire non au Commandant, c'est comme s'il avait toujours peur que quelque chose arrive s'il montre un peut de libre arbitre. Enfin bon, je ne le juge pas, le Commandant n'est pas le genre de personne qu'on peut contrarier.

Je toque à sa porte et l'appelle pour lui expliquer ce que je veux dire mais elle ne me répond pas.

Quand je quitte sa porte pour aller manger, j'ordonne à un garde de garder un œil sur sa porte et pars en direction du réfectoire. Sur le chemin je croise James avec un plateau dans les mains.

– Pourquoi tu lui apportes son déjeuner ? T'as rien de mieux à faire ?

– J'ai proposé au Commandant de lui apporter son repas et il a dit oui, je vois pas en quoi ça te regarde.

– Laisse la vivre James, elle est innocente et elle n'a pas besoin que tu lui brises le cœur.

– T'as le double de son âge Paul, je pense que tu n'es pas bien placé pour me donner des leçons

– Je ne suis pas intéressé par elle comme ça, mais je l'apprécie et elle a assez souffert comme ça, tu ne crois pas ?

– De toute façon, je ne veux rien faire avec elle, mais personne n'a en dessous de vingt ans ici, ça fait du bien de voir quelqu'un de plus jeune que moi.

– Fait ce que tu veux, mais n'oublies pas, ne lui fait pas de promesses que tu devras trahir dès que Commandant te demandera de le faire.

– Fous moi la paix Paul, tu ne sais rien alors arrête de te comporter comme si t'avais la science infuse. Maintenant laisse moi passer je dois lui apporter son plateau.

Je m'écarte de son chemin pour le laisser. Ce qu'il dit reste dans ma tête, serait-il possible que James aie de meilleures raisons que celles que je lui avais attribuées ? Enfin bon, j'espère juste que Evelyn ne se laissera pas séduire par son joli visage.

Quand j'arrive au réfectoire je m'assois seul à une table, je n'ai pas vraiment d'amis ici. Le Commandant a fait tout un discours à Evelyn sur notre sens de la famille ici, mais la vérité c'est qu'après avoir été déçu par toutes les personnes en qui ils avaient confiance, la plupart des gens préfèrent rester dans leur coin, moi y compris.