Chapitre 11
Chapitre Onzième
De Capucine :
Je sors de chez Flo.
De Silena :
Vous vous êtes vu alors ?
De Capucine :
On s'est séparé.
Je savais même pas qu'on était ensemble.
De Silena :
Ça va ?
De Capucine :
Je peux venir chez toi ?
De Silena :
Je pars chez mes grands-parents
De Capucine :
Ah d'acc
Bonnes vacances !
De Silena :
Après tu peux me rejoindre à Montparnasse d'ici trois heures
Ça sera mon cadeau d'anniversaire en avance
Et ça va m'aider à ne pas culpabiliser de laisser ma pote déprimer seule dans son appart'.
X+X+X+X+X
Capucine avait accepté sans vraiment comprendre pourquoi. Mais elle était passée à sa petite chambre de bonne prendre quelques affaires et avait rejoint son amie à la gare pour le TGV en direction du Croisic. Silena n'avait trop rien demandé. Elles étaient montés dans le train, Silena avait fait son plus beau sourire à l'homme qui aurait dû être assis à côté d'elle pour l'échanger avec la place que Capucine avait réussi à acheter au dernier moment. Il avait dit oui. La magie de Sissi. Le train était parti et le cliquetis régulier des roues sur les rails associés à l'une de ses playlists préférées dans les oreilles avaient fini par endormir Capucine. Les quelques heures de trajet étaient passées très rapidement.
C'est Alexandre, le cousin de Silena, qui était venu les chercher à la gare de Pornichet. C'était quelques arrêts avant le terminus. Ils avaient fait quelques minutes de voiture avant d'arriver à la maison familiale des Valencourt. C'était une très grande maison en pierre de quatre étages face à la mer. C'était un tout autre style que celle des parents de Florentin mais la même ambiance générale semblait y régner. Dans les deux cas, il s'agissait de la grande maison de famille ; celle qui renferme tous les souvenirs de vacances sur trois générations différentes. Il y avait du bruit, des rires, des cris, de bonnes odeurs de cuisine.
« Vous passez tous toutes vos vacances ici ?
— Pas tous en même temps, la rassura Alexandre. Mais pendant deux mois c'est le lieu de ralliement de toute la famille.
— Mais il semble déjà avoir beaucoup de monde, pensa à voix haute Capucine.
— Les pères d'Alex sont là. Et Léandre aussi, expliqua Silena. Vraiment là... On est pas beaucoup. T'en fais pas. Tu déranges pas du tout. »
Silena lui avait adressé un sourire réconfortant avant d'ouvrir la porte d'entrée de la maison. Elle lui avait fait visiter les différents étages et lui avait désigné un lit simple au dernier étage de la maison qui avait tout simplement été aménagé en dortoir. Elle avait ensuite laissé Capucine s'installer tranquillement.
X+X+X+X+X
Après le dîner, Léandre avait proposé d'aller manger une glace pour le dessert. Le glacier n'était pas très loin et ils avaient décidé d'y aller à pied. Pendant le trajet, Léandre s'était appliqué à leur raconter son voyage en Europe - toutes les anecdotes qu'il n'avait pas voulu évoquer devant ses oncles et ses grands-parents. Léandre avait l'art de raconter les histoires et ça avait permis à Capucine de se changer les idées. Silena avait eut raison, changer d'air lui faisait du bien.
Chez le glacier, Capucine avait choisi une boule de sorbet au cacao. Léandre lui avait conseillé de rajouter une boule à la banane parce que banane/chocolat, c'était vraiment parfait. Mais Capu avait juste sourit et appuyé sa carte bancaire sur le terminal en croisant les doigts pour que le paiement ne soit pas refusé. Ils étaient retournés vers la maison à pied en dégustant leurs glaces respectives. Ils s'étaient installés sur le muret qui séparait le chemin qui passait devant la maison des Valencourt de la plage. La marée était haute et on pouvait entendre les vagues s'échouer à quelques mètres de leurs pieds. Ils étaient restés un long moment sur ce muret, assez pour voir le soleil se coucher. Silena était allée leur chercher une couverture, des sweats et des bières comme si il y avait le moindre risque qu'ils attrapent froid un 11 juillet. Ils s'étaient raconté des histoires drôles et remémorés des souvenirs qui hantaient cette maison ; ils avaient critiqué leurs camarades de classe et les clients du restaurant où travaillaient les filles. Alexandre avait été le premier à remonter vers la maison suivit quelques minutes plus tard par Léandre.
« Alors ? demanda Silena à son amie une fois qu'elles n'étaient plus que deux.
— Alors quoi ?
— Capu ! Steuplaît !
— Quoi ? rit Capucine devant la tête de Silena. Qu'est-ce que tu veux savoir ?
— Tout. Pourquoi vous vous êtes séparés ?
— Ah. Ça.
— De quoi tu veux parler d'autre, répondit la jeune femme en levant les yeux au ciel.
— Raphaël ? tenta vainement Capucine.
— Nope. Flo. Vas-y. »
Capucine fixa quelques secondes la bouteille de bière qu'elle avait dans la main. Par où commencer ? Elle n'en n'avait aucune idée. Par le début surement.
Capucine aimait souvent dire qu'elle n'avait pas beaucoup d'amis, elle pouvait au moins assuré qu'elle en avait deux : Max et Sissi. Mais pourtant, Capucine n'aimait pas beaucoup l'idée d'exposer toute sa vie à Silena. Ce n'était pas une histoire de confiance, c'était juste qu'elle ne voulait pas que leur relation change parce que c'était chouette d'avoir une amie comme Sissi.
« Tu sais que tu peux tout me dire ? Dans tous les cas tu dormiras dans ton lit au dernier étage ce soir. T'inquiètes pas.
— Je sais.
— Okay... Bon écoute. Je vais chercher le chien pour qu'ils puissent faire ses besoins du soir comme ça t'as un peu de temps pour tout mettre en ordre et quand je reviens, tu me racontes okay ?
— Ok.
— Ça va aller ma Capu, la rassura Silena en embrassant ses cheveux. »
Silena était revenue quelques minutes plus tard avec Brooklyn, le chien de ses grands-parents. Elle avait repris sa place à côté de Capucine et lui avait tendu une seconde bière.
« Je suis née à Lyon. J'ai... Une sœur. Les sept premières années de ma vie étaient plutôt cool. J'avais ma mère, ma petite sœur et mon père. Et puis ma mère a voulu se marier. Un peu contre son gré, mon père l'a donc demandée en mariage. Ils ont tout organisé : mairie, église, traiteur et salle. La totale. Mon père tardait à publier les bans du coup ma mère à pris les devants et à commencer à réunir les pièces du dossier. C'est comme ça qu'elle a découvert que mon père menait une double vie. Et je te parle pas du fait qu'il avait une maîtresse qu'il voyait deux ou trois fois dans la semaine. Il était marié et avait deux enfants avec une autre femme. Elle l'a dégagé le soir même. C'est à partir de ce moment-là que tout est parti en cacahouète. Ma mère a commencé à boire. Elle avait toujours bu, soyons honnête. Mais c'était un alcoolisme toléré par la société. C'était l'alcoolisme mondain comme on dit. Juste en soirée. Beaucoup mais juste en soirée. Et là c'est devenu tous les soirs, puis tous les matins et tous les soirs, et puis le midi aussi et puis tout le temps en fait. Je devais gérer ma sœur de trois ans et ma mère qui pouvait boire au point de ne même pas être capable d'aller dans son lit. Parfois je buvais son verre. Je me disais que plus je boirais, moins elle, elle boirait. Et moins elle boirait, plus la vie redeviendrait comme avant. Avant quand je ne savait pas ce qu'était un huissier, quand elle avait un travail, quand mon père était là. Mais rien n'est jamais revenu à la normale. Au contraire. Ça a duré des années. J'ai détesté ma mère, j'ai été en colère aussi contre elle, j'ai eu de la pitié aussi et puis je l'ai redétesté. C'est une fois mon bac en poche que j'ai décidé de partir de la maison. Je lui ai dit que je m'en allais, que je n'en pouvais plus, je lui ai parlé de tous les souvenirs qui avaient gâché mon enfance. Je pense que j'attendais des excuses mais elle m'a répondu qu'elle ne se souvenait de rien. Elle était tellement soûle qu'elle n'a aucun souvenir de mon enfance. Elle ne connaît même pas le jour de mon anniversaire. Je crois que c'est le moment où j'ai compris que je ne ressentais plus rien pour elle... Tu sais... Je sais pas si j'ai pris la bonne décision. Quittez Lyon, je veux dire. Je ne sais pas si c'était ce que je devais faire. Parce que depuis jour-là, honnêtement rien ne s'est passé comme je l'avais prévu. Je pensais prendre une année pour m'installer et puis m'inscrire à la fac. Dans mes rêves les plus fous, j'aurais aimé l'école du Louvre. Je voulais que ma sœur, Violette, me rejoigne. Je voulais la sortir de la boucle dans laquelle ma mère était en train de l'entraîner mais ça n'a pas fonctionné. Elle en est à sa quatrième cure de désintox' et elle a dix-neuf ans. Moi, à Paris, j'ai trouvé un pauvre boulot de serveuse. J'ai dormi pendant des mois dans la voiture que j'avais volée à ma mère. Mais de toute façon, elle n'a plus de permis depuis longtemps. Et j'ai fini par trouver une chambre de bonne mille fois trop chère où je dors, me lave, chie et mange dans la même pièce. »
Capucine avait conclu son monologue en avalant une gorgée de sa bière. C'était plus simple que ce qu'elle pensait. Silena n'avait rien rajouté mais l'avait écouté attentivement. Elle ne l'avait pas quitté du regard.
« Si on s'est séparé avec Flo c'est... C'est parce que j'en ai marre de mentir. C'est super fatiguant et à Paris je fais que ça. Tout le temps. J'ai toujours plein d'excuses pour expliquer pourquoi je peux pas aller à telle soirée, ou à tel resto, pourquoi je peux pas payer ma part, pourquoi mes parents viennent jamais me rendre visite. Je mens tout le temps et je gère bien sauf avec lui. Avec Flo, c'est fatiguant. C'est difficile, et un jour il va découvrir qui je suis en vrai et ... Je veux pas qu'il me voit comme ça.
— Tu ne veux pas qu'il te voit tout court en fait. »
Capucine regarda soudainement son amie avec un air interrogateur.
« Cette histoire c'est toi Capu. Aussi difficile qu'elle soit. Tout ce que tu as vécu ça a construit la femme que tu es. Ça a construit la femme qu'il aime donc ne t'en fait pas pour ça.
— Je pense pas qu'il m'aime.
— Oh please ! Capucine.
— Je... Je veux pas être une michto pour lui. Je pourrais jamais être à son niveau. En Normandie, on s'est pris la tête parce que j'ai taché la blouse que j'avais prise pour ma tenue. Je comptais la ramener en magasin parce qu'elle était trop chère pour moi. Mais avec la tâche, c'était mort. Et il a proposé de la payer pour régler le problème.
— Ça t'as pas plus, devina aisément Silena.
— Nope. ... On est pas du même monde et... Je veux rien lui devoir.
— Mais c'est pas une compétition. C'est pas une question de niveau, c'est une question de sentiments. Sincèrement, je pense qu'il s'en fiche.
— Et puis je veux pas qu'un jour il se rende compte que sortir avec moi c'est vraiment la honte. Sa maison de famille, c'est la même que la tienne. Ils vont dire quoi dans sa famille quand ils vont se rendre compte que le grand médecin de la famille sort avec une pauvre serveuse d'un bistro parisien qui squatte chez lui H24 parce que chez elle, ils pourraient pas tenir à deux.
— Tu tiens à lui ?
— Oui !
— Alors tu comptes me trouver combien d'excuses avant de comprendre qu'aucune d'entre elles ne tiens la route ?
— Je commence à être un peu à court là.
— Cool. ... Honnêtement Capucine, je t'aime vraiment beaucoup mais là... Tu te fais des nœuds dans la tête pour pas grand-chose. Même si j'imagine que pour toi c'est très important au fond... C'est « juste » de l'argent et ça n'a comme importance que celle que tu veux bien lui donner. Je pense qu'en réalité, il n'est pas là le problème. ... Je pense que tu as l'habitude d'être seule et de tout gérer par toi-même. T'es adulte depuis tes sept ans Capu... Et au vu des adultes que t'as côtoyer, je peux comprendre que t'es pas confiance. Mais... Ils sont pas tous comme ça. Ils sont pas tous comme ta mère, ni comme ton père. »
C'est étrange de s'entendre dire des phrases que l'on n'ose pas s'avouer. C'est étrange mais ça fait du bien mais en même temps. Et puis soudainement, c'est comme si tous ces mots que l'on fait taire au fond de ses pensées en profitent pour ressortir. C'est sur cette plage que Capucine s'était laissée pleurer. Silena avait passé son bras autour des épaules de son amie.
« C'est aussi l'effet de cette plage, murmura-t-elle dans son oreille. Si tu savais le nombre de non-dit qui sont sortis ici. »
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🐣❤️
Alors ce retour à Pornichet ? J'ai beaucoup aimé écrire ce chapitre ! Et vous qu'en avez-vous pensez ?
Retour à Paris pour le chapitre 12 !
Bon weekend mes pioupious
Uthopie. 🐥❤️
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