CHAPITRE 42 - DIEGO

05.01.18,
Baccarat Hôtel | MANHATTAN – 12:09 AM.

J'ai le cœur en miettes quand il descend les marches de la piscine pour me rejoindre dans l'eau. Il ne me quitte pas des yeux mais, moi, je ne peux m'empêcher de regarder encore une fois son corps  : sa peau pâle mais à la fois dorée – j'avoue, c'est étrange – ses abdominaux finement dessinés et les quelques poils au niveau de son nombril et de son sternum. Je distingue quelques suçons sur son cou, et cela m'arrache un sourire  : je craque.

- Elle est chaude.

Sa voix douce me fait frissonner, un peu, tandis qu'il marche dans l'eau afin de s'approcher de moi. Quand ses mains se glissent sur ma taille, je ferme les yeux. Il m'embrasse sur la joue, et je me met à trembler malgré moi.

- Ta peau aussi est chaude.

Je sais qu'il a raison. Je le sens. Depuis que nous avons baisé j'ai la sensation que mon corps est en flammes, tant j'ai chaud et tant ma peau est moite. D'une certaine façon je suis encore dans cet état de transe, complètement retourné par le plaisir et le désir. Quand il passe ses mains sur mes abdominaux et mes pectoraux, avant de venir s'agripper doucement à mes épaules, j'ouvre les yeux.

Un sourire stupide étire mes lèvres quand, devant moi, il se baisse afin de se laisser aller sous l'eau. Quand il ressort, je le vois repousser ses cheveux en arrière sur son crâne et, un court instant, je cesse de respirer  : il est beau. Ses yeux noisette brillent, encadrés par ses cils magnifiques et humides. Les gouttes d'eau ruissellent sur son visage, ses lèvres, ainsi que ses épaules, ses bras et le haut de son torse. L'eau nous arrive au niveau du nombril, chaude, mais je ne peux m'empêcher de frissonner.

- Tout va bien  ? , me demande-t-il tendrement.

- Heu... oui. Oui tu es... t'es magnifique.

Je le pense réellement, et je suis ému de voir que j'arrive à le faire sourire. Ses yeux pétillent de bonheur et un sourire amoureux étire ses jolies lèvres pulpeuses. Mon cœur loupe un battement, et mon ventre commence alors à me faire délicieusement souffrir. Qu'est-ce-que j'ai fait pour mériter un garçon aussi génial  ? Bon sang.

- T'es pas mal non plus.

Il se mordille la lèvre tout en me regardant dans les yeux. Ses doigts caressent mes abdominaux saillants, avant de remonter sur mes pectoraux. Je soupire discrètement quand il fait rouler mes tétons sous ses pouces, sans pour autant s'y attarder. Il vient poser ses mains de part et d'autre de mon cou ensuite, tandis que je viens poser les miennes sur ses reins pour l'attirer à moi.

- Juste pas mal  ? , je taquine.

- M'ouais.

- Tu me déçois.

Je lui lance un regard malicieux, tandis qu'il ricane un peu  : je souris. J'adore le voir rire, car ses yeux sont toujours plissés et des petites fossettes creusent ses joues. Ses iris noisette brillent de bonheur et j'aimerais pouvoir le voir ainsi jusqu'à la fin de mes jours. Il est réellement parfait. Du moins, à mes yeux.

- Non... , murmure-t-il en entourant mon cou de ses bras. Tu es très beau.

Je souris, satisfait, quand il vient m'embrasser en fondant son corps contre le mien. Nos torses nus se touchent, nos jambes sous l'eau s'emmêlent, et ses doigts se glissent dans mes cheveux trempés. Nos visages sont à l'étroit au creux de ses bras, tandis que ses coudes reposent sur mes épaules  : j'adore ça.

Le baiser est tendre, lent et hypnotique. Il n'a rien à voir avec les baisers pressés et désireux que nous avons échangés depuis que nous sommes arrivés ici. Le fait d'avoir baisé dans la chambre quelques heures plus tôt nous a totalement détendus et la tension entre nous n'est plus aussi palpable. Tout est calme, doux et tendre, et j'aime ça aussi. Sa tendresse m'avait manquée. Nos lèvres claquent subtilement les unes contre les autres lorsqu'il se recule pour reprendre son souffle. Mon front contre le sien, yeux dans les yeux, je murmure en me mordant la lèvre  :

- Je t'aime, Evan.

Je ne peux pas m'empêcher de le lui dire. J'éprouve constamment le besoin de partager avec lui mes sentiments. À chaque fois que je le dis, je me sens plus léger, comme libéré d'un poids, et ça me fait du bien. J'ai le cœur qui explose dès que les mots passent la barrière de mes lèvres, mais c'est une douleur délicieuse.

- Je t'aime, aussi.

Il revient m'embrasser, très rapidement et chastement, avant de me libérer de ses bras. Il me fait un clin d'oeil avant de s'éloigner de moi. Je ne le lâche pas des yeux quand il plonge gracieusement vers le fond de la piscine afin de la traverser d'une seule nage dans le sens de la longueur. Quand son corps émerge, il replace à nouveau ses cheveux bruns en arrière sur sa tête avant de me regarder. Il sourit de toutes ses dents et, là encore une fois, je tombe amoureux.

- Tu viens  ?

Je me mords la lèvre. Même si nous sommes séparés par une dizaine de mètres et que l'éclairage de la pièce est passé en mode nuit, je suis certain de voir ses yeux briller de malice et d'envie. Je plonge alors à mon tour et, en quelques coups de bras et de jambes, me retrouve à sa hauteur. Je l'attire dans mes bras, son visage au creux de mon cou, tandis qu'il rit bruyamment. Mes mains glissent sous ses cuisses et, me comprenant immédiatement, il enroule ses jambes autour de ma taille. Je viens tendrement le plaquer contre la paroi en marbre de la piscine. Il se crispe.

- J'ai quelque chose à te demander.

Il tique, curieux. J'aurais aimé lui en parler pendant le dîner mais, d'une certaine façon, j'ai senti que ce n'était pas le moment. Là, il est minuit passées et nous sommes seuls dans la piscine d'un hôtel de luxe. Nous sommes calmes, posés et heureux, et je sais que c'est le moment. De plus, je n'ai rien d'autre à lui dire et je me sens stupide à rester ainsi silencieux depuis tout à l'heure.

- Mh  ?

Il passe à nouveau ses bras autour de mon cou, et je sens ses doigts caresser tendrement mes cheveux et ma nuque. Mes mains à l'arrière de ses cuisses glissent sur ses flancs, et je viens papouiller ses abdominaux. Le clapotis de l'eau autour de nous et le silence de la pièce m'apaisent, tout comme la lumière dorée et tamisée.

- Hem... mon frère se marie, le 20 janvier.

- Abraham  ? C'est super  !

Je vois le sourire heureux sur son visage, et sincère. Je lui ai quelques fois parlé d'Abraham, lorsqu'il lui est arrivé de me poser des questions sur ma famille. Il sait qu'il vit en Floride avec sa petite-amie depuis plus d'un an, qu'il s'est tiré pour fuir le gang, et que c'est un garçon qui me ressemble plus qu'il ne ressemble à papa et à Luis.

- Ouais, hem... tu veux venir avec moi  ?

Je me mordille l'intérieur de la joue, gêné. C'est important pour moi. Je veux dire, mon frère se marie et j'aimerais beaucoup y aller avec Evan. Je nous imagine déjà, habillés en costume pour l'occasion, installés tous les deux dans l'église. C'est peut-être bizarre, mais ça me tient à cœur. J'ai besoin de partager avec lui des moments importants de ma vie, moi qui n'ait pas grand chose d'autre à lui offrir.

- Heu... avec toi  ? En Floride  ?

- Oui, je fronce les sourcils. Tu ne veux pas  ?

Je le vois rougir, tandis qu'il fuit mon regard. Il n'est pas tendu contre moi mais je distingue clairement le malaise sur son visage. J'ai peur d'être allé trop loin et trop vite, et de l'avoir effrayé.

- Non, c'est pas ça... , commence-t-il. C'est juste que... j'ai fugué ce soir, tu sais. Mes parents vont me tuer et...

- OK. J'ai compris.

Je ne sais pas vraiment pourquoi ça me vexe, mais c'est le cas. Je suis conscient que ma réaction est totalement stupide, que mes muscles se crispent pour rien et que mon cœur se serre, mais je ne le contrôle pas vraiment. Je suis agacé. Il s'empresse de répondre, tout en caressant ma joue  :

- Mais j'adorerais, vraiment. J'aimerais beaucoup t'accompagner, ça me touche que tu me l'aies demandé.

- Mais  ? , je souris un peu.

- Mais... ils vont me faire la peau, demain. Je peux toujours leur demander, mais je suis sûr qu'ils vont refuser. Fuguer à New-York c'est simple, mais en Floride...

Je sais qu'il n'a pas tort, dans le fond. C'est facile de s'enfuir de chez lui pour une seule soirée, avec sa voiture. Je sais que ce serait plus compliqué de prendre la fuite pour monter dans un avion, avec moi, et partir tout un week-end. Tout comme lui, désormais, j'ai peu d'espoir qu'il m'accompagne  : il a raison. Ses parents vont certainement lui passer le savon du siècle  : il ne leur obéit jamais. Du moins, depuis que nous sommes ensemble.

- Je comprends. T'inquiète , dis-je en caressant sa joue.

- Je demanderai, vraiment, mais j'y crois pas trop.

- C'est pas grave.

Je me radoucis comme un agneau quand je vois son joli sourire et ses iris noisette brillants d'amour et de joie. Il est le seul qui puisse m'apaiser à ce point là, grâce à un simple regard ou une simple caresse.

- Diego, je...

- Quoi  ?

Il regarde ma bouche, et je constate qu'il se mordille l'intérieur de la joue. Ses mains sur ma nuque glissent sur mes épaules et viennent se poser sur mes pectoraux. Il les laisse là, immobiles, alors que je le porte encore dans mes bras. J'aime être à l'étroit, ses jambes enroulées autour de moi.

- Je suis désolé.

- Désolé pour...  ? , je demande à voix basse.

- Ta moto , dit-il tout bas. J'voulais pas que tu te sentes obligé de...

- Tais-toi.

Je pose tendrement ma bouche sur la sienne, pour le faire taire. J'ai le cœur qui bat très vite à l'intérieur et le bas-ventre qui s'embrase. Je resserre mes doigts sur ses petites poignées d'amour, et le plaque un peu plus contre la paroi de la piscine. L'eau nous arrive au nombril, et j'aime l'odeur de sa peau humide.

Je pense à hier matin, à ma moto. Je me faisais fumer le cerveau à trop réfléchir  : quel cadeau pour Evan  ? Que pourrais-je faire d'inoubliable pour lui  ? Puis, tandis que je descendais les boulevards de Manhattan, je suis passé devant ce fichu hôtel. J'ai eu le souffle coupé par le luxe de la façade, et par les prix affichés près de la porte d'entrée. Puis, ça a été comme une évidence pour moi  : je devais amener Evan ici. Je n'ai pas hésité une seconde.

Big K, un mec du quartier, a toujours eu des vues sur ma moto. J'y tenais comme à la prunelle de mes yeux, raison pour laquelle j'avais toujours refusé de la lui vendre bien qu'il m'agitait souvent sous le nez une liasse de billets dans le but de me faire craquer. Sauf qu'Evan compte beaucoup plus qu'une putain de bécane à mes yeux et, quand j'ai frappé à la porte de cet idiot de Kris, l'échange s'est déroulé en moins de cinq minutes. 1500$, en cash, tirés de son petit coffre fort planqué dans son armoire. C'était fini.

J'ai été touché par la réaction d'Evan lorsque j'ai avoué, bien qu'il m'ait clairement traité d'idiot et d'abruti. J'ai vu la peine dans ses yeux et je me suis senti minable  : il ne voulait pas que je vende ma moto, pas pour une chose aussi futile qu'un hôtel de luxe, parce que ça ne compte pas pour lui. Mais ça compte pour moi  : je suis heureux d'être ici, avec lui, et pouvoir boire du champagne et passer un bon moment dans une piscine chauffée après l'avoir baisé dans une suite de luxe. Je suis heureux de voir les étoiles dans ses yeux, même si je sais qu'un pauvre repas au Burger King lui aurait suffit. On n'a pas 18 ans tous les jours et j'aimerais qu'il se souvienne de cette soirée toute sa vie.

- Diego...

Il soupire d'aise quand j'embrasse son cou, tendrement, avant de mordiller cette peau tendre et chaude au niveau de son épaule. Ses ongles griffent mes pectoraux musclés sous le plaisir et, à l'entendre gémir ainsi, ma queue se réveille. Aussitôt, à nouveau en transe, je viens palper sa virilité par dessus son boxer avec ma main droite. Ma main gauche, elle, maintient sa nuque fermement en place.

- ... s'il-te-plaît.

Doucement, je le hisse afin de l'asseoir sur la margelle en marbre de la piscine. Sous mes lèvres, je sens la peau de son torse se recouvrir de chair de poule. Tout en embrassant ses tétons, ses pectoraux et ses abdominaux, je caresse sa verge par dessus le tissus trempé de son sous-vêtement afin de la réveiller. Un soupir d'aise lui échappe quand je glisse ma langue au creux de son nombril.

- Et si... et si on nous surprend  ? , murmure-t-il tout bas.

- Regarde la porte. S'il y a quelqu'un, tu me pousses.

Je souris, mesquin, tout en mordillant sa poignée d'amour du côté gauche. Je fais aller ma main sur son entrejambe et, peu à peu, je sens son érection se tendre dans son boxer. Quand je lève les yeux vers lui, je constate qu'il fixe la porte en bois massif avec attention, juste face à nous de l'autre côté de la pièce. L'idée qu'on puisse nous surprendre, là, m'excite, même si je doute réellement que quelqu'un vienne prendre un bain à cette heure de la nuit.

- Tu vas me tuer, couine-t-il.

- Mais non, bébé.

Je chantonne, ma bouche contre son ventre. Je titille son nombril avec ma langue, avant de faire remonter cette dernière sur son téton droit. Je lèche ce dernier, le mordille et le suçote enfin. Il s'agrippe à mes cheveux tout en soupirant d'aise, et j'aime le sentir se cambrer d'impatience contre moi. Sa peau sous ma bouche est douce, chaude et humide, et j'adore son odeur et son goût salé. Je passe au téton gauche, entamant la même torture délicate que sur le droit, avant de venir capturer ses lèvres dans un baiser.

Tout en l'embrassant, je remarque son érection désormais imposante dans son boxer. Quand je me recule, alors qu'il tentait d'introduire sa langue douce dans ma bouche, je l'entends grogner de frustration. J'embrasse alors son cou, descendant mes lèvres toujours plus bas, jusque là. Mes doigts tirent sur l'élastique de son boxer et je cesse de respirer quand sa virilité s'en échappe, tendue au possible, avant de claquer sensuellement contre son bas-ventre.

- Bordel, Evan.

Je la prends dans ma main, alors qu'il caresse mes épaules et le haut de mon dos lourdement avec ses mains. Lentement, je donne un coup de langue sur cette veine qui pulse sous sa peau soyeuse, avant de suçoter doucement son gland. Il se cambre et j'entends un gémissement se bloquer dans sa gorge.

- S'il-te-plait... s'il-te-plaît...

J'aime l'entendre me supplier, comme ça, en soupirs. Un sourire carnassier étire mes lèvres, tandis que je les fait descendre sur toute sa longueur. Puis, enfin, je le prends dans ma bouche. Quand je lève les yeux vers lui, je constate qu'il a abandonné la porte pour fermer ses yeux avec force. Le voir ainsi, les joues et le sternum rougis par le plaisir, à se mordre la lèvre aussi fort, me ferait presque jouir.

Je suis insatiable lorsqu'il s'agit de lui  : je pourrais passer mes journées à le toucher, à le baiser, à le sucer ou à l'embrasser. Son corps chaud contre le mien, son odeur dans mes narines, son goût dans ma bouche... j'aime ça plus que tout au monde. Comme je le lui ai dit, il est mon échappatoire. Il est ma porte de sortie de cet enfer, le temps de quelques heures, et j'adore ça.

Je le torture, pendant près de deux minutes  : je le prends dans ma gorge, ou suçote simplement son gland. Je lèche cette veine, ou son extrémité. Mes mains palpent ses bourses tandis que je creuse les joues sur son érection, la prenant toujours au plus profond de ma gorge. Il s'agrippe avec force à mes cheveux, me faisant presque mal mais, comme lui, j'en redemande. Quand je le sens trembler et s'arc-bouter contre moi en soupirant d'aise, je sais que c'est le moment.

- Diego... je vais...

- Jouis dans ma bouche bébé.

- Oh merde.

Il se libère sur ma langue. Je sens aussitôt le goût de sa semence dans ma bouche chaude, et c'est dément. J'avale en silence, enivré par son odeur et ses caresses sur mon crâne, et j'explose sans même me toucher lorsqu'il couine  :

- J'ai envie... , couine-t-il. De faire l'amour... ah, s'il-te-plaît.

En moins de cinq minutes, nous nous retrouvons à nouveau dans la chambre d'hôtel. Mais, cette fois-ci, j'abandonne la vitre. Je l'emporte dans mes bras dès le seuil de la porte d'entrée et le jette sans délicatesse sur le lit, avant d'éteindre la lumière.

Plongés dans l'obscurité délicate de la chambre, éclairés par les lumières de Manhattan, je lui fais l'amour.

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Quelque part dans les rues... | BROOKLYN – 11:56 AM.

Je passais une matinée géniale et parfaite, à simplement le câliner sous la couette et à nous papouiller en silence. J'ai passé aussi une nuit incroyable  : je ne dors jamais aussi bien que lorsque je suis avec lui. Quand je me suis réveillé, j'ai été surpris de me voir blotti contre lui, ma tête sur son estomac et mes bras autour de lui, alors que nous nous étions endormis dans la position inverse.

- Je te dépose ici  ?

- Oui, merci.

Je maudis cet abruti de Skull de toujours nous convoquer au mauvais moment. Mon portable a sonné dans la poche de mon jean aux alentours de 10:30 AM et je n'ai reçu qu'un seul ordre «  ramène toi, midi au hangar  ». Je sais que j'aurais dû arriver bien plus tôt que midi, mais je n'ai pas pu me résigner à quitter le lit en quatrième vitesse  : j'ai baisé Evan avant qu'on ne quitte la chambre et, malgré Skull, je suis de bonne humeur.

- On se voit quand  ? , je demande en détachant ma ceinture de sécurité.

- Aucune idée.

- Oh, c'est vrai.

Je me souviens alors qu'il a fugué, et que sa mère l'attend de pied ferme dans leur appartement de Manhattan. Je fais la moue, gêné qu'il soit dans cette situation là à cause de moi, mais je cesse de culpabiliser lorsque je vois le sourire heureux et amoureux sur son visage.

- Je t'aime, dit-il.

- Moi aussi.

Je lui vole un petit baiser chaste avant d'ouvrir la portière de sa voiture. Sous la neige, je me penche pour le regarder une dernière fois  :

- À plus.

- Oui. Fais attention à toi, hein  ?

Je craque devant son air inquiet et amoureux. Il a peur pour moi, je le sais, mais je lui suis reconnaissant de ne pas passer ses journées à me harceler et à me poser des questions sur le gang. D'une certaine façon, il me fait confiance et je l'aime aussi pour ça.

- Oui.

Je me penche pour lui voler un dernier baiser. Quand je referme la portière derrière moi et que je le vois rouler vers Manhattan, je dois avouer que cela me fait un petit pincement au cœur  : cette soirée était parfaite, et le retour à la réalité est douloureux.

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Hangar des AlasNegras | BROOKLYN – 12:12 PM.

J'ai envie de vomir. Nous sommes tous là, en cercle, autour de Gim. Ce dernier est allongé au sol, clairement presque inconscient, et je n'ai qu'une envie  : m'enfuir.

Gim est un gentil gars. Je ne l'ai pas beaucoup côtoyé, bien qu'il fasse partie intégrante du gang. Enfin... faisait. Je n'arrive pas à me dire qu'il s'en sortira sans dommages. Je me dis même qu'il va mourir, parce que Skull est un fou furieux et que, la plupart des gars ici, le sont aussi.

- Flores  !

Je serre les poings quand le chef m'appelle, la voix colère et le regard noir. J'hésite un moment avant de me frayer un chemin au milieu de la foule, parce que je me suis planqué au fond comme un lâche. Sur mon passage, je bouscule Wayne qui semble tendu comme un string et Miguel qui regarde la scène avec dégoût  : il déteste les traîtres.

- Tu sais ce qu'il te reste à faire.

Skull me lance un regard entendu. Ce n'est pas Gim que j'ai envie de frapper, mais lui. Je le hais. Nous obliger à faire ça, c'est petit et répugnant. J'aimerais me défiler, lui dire d'aller se faire foutre et refuser, mais je sais que je ne le peux pas  : une trentaine de gars sont là et me regardent, dans l'attente. Si je me défile, ce sera moi à la place de Gim parce qu'on me considérera comme un lâche. Égoïstement, je préfère cogner les autres plutôt que me faire cogner moi.

Gim me regarde, clairement suppliant. Je distingue à peine ses yeux, enflés à cause des coups. Torse nu, je remarque ses abdominaux recouverts de bleus et ses pectoraux entaillés. Son sternum, lui, est à vif  : le symbole des AlasNegras est brûlé au fer rouge dans sa peau, et la plaie n'est clairement pas jolie-jolie. J'aimerais m'excuser, lui dire que je ne cautionne rien de tout ça, mais je ne le peux pas. À la place, tandis qu'il lève la main vers moi pour me supplier de l'épargner, je lui envoie mon pied dans les côtes, puis un coup de poing dans le nez. Bien évidemment, il hurle de douleur et je me fais violence pour ne pas fondre en larmes sous la colère et, même, la haine. Gim n'est qu'un gamin de 19 ans, innocent, et je déteste ce que nous sommes tous en train de faire, là.

- Miguel  !

Contrairement à moi, Miguel n'y va pas de main morte. Clairement, il le tabasse. Alors que j'ai repris ma place dans les rangs, je m'efforce de regarder partout autour de moi du moment que je ne croise pas le corps ensanglanté et abîmé de Gim. Je m'efforce de penser à Evan, à son corps contre le mien, et à ses gémissements de plaisir plutôt qu'à ceux de douleur de Gim. J'ai la nausée.

Le pire dans tout ça  ? Skull est en train de l'achever. Va-t-il le tuer  ? Je n'en sais rien. Ett out ça pour quoi  ? Tout ça parce que Gim est au lycée, qu'il est intelligent, et qu'il a voulu nous lâcher pour partir étudier à Seattle. D'un côté je me dis qu'il est stupide, et qu'il n'aurait jamais dû tenter le coup, mais à côté de ça je me dis qu'il a été plus courageux que moi  : il a au moins essayé.

Dans le fond, je ne suis qu'un lâche.

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Docks d'East River | BROOKLYN – 1:36 PM.

Je dépose Gim sur le bitume froid des docks. Dans mes bras, il ne bouge plus et n'a même plus la force d'ouvrir les yeux. Malgré tout je le vois respirer, à peine, et quelques gémissements de douleur se bloquent dans sa gorge. Ses yeux sont fermés, enflés à cause des coups, mais je distingue des larmes rouler sur ses joues et creuser des sillons sur le sang séché. J'ai encore la nausée.

La voiture de Wayne est garée derrière moi, portière ouverte. Il a eu la gentillesse de me la prêter, bien que ce soit une poubelle ambulante recouverte de poussière et à moitié en panne.

- D-ie-go...

- J'suis désolé Gim. Tiens le coup, mec, OK  ?

Une larme roule sur ma joue quand il prend ma main dans la sienne. Au final, je ne sais même pas comment il sait que c'est moi  : je ne l'ai pas vu ouvrir les yeux une seule fois. Ses doigts serrent les miens, et je comprends  : il a peur. Il est terrorisé.

- J'appelle une ambulance, d'accord  ? Accroche-toi, tu vas t'en sortir.

J'étais censé le laisser agoniser au hangar, pour qu'il souffre bien le martyre, avant que quelqu'un ne daigne s'occuper de lui à le balancer et à le laisser crever dans un coin. Sauf que je n'ai pas pu m'y résoudre. J'ai passé cinq minutes à le regarder couiner de douleur par terre, baignant dans son sang, et je n'ai pas pu. Wayne a eu l'air d'approuver mon comportement et, pour une fois, j'ai complètement ignoré le regard noir que me lançait Skull quand j'ai embarqué Gim sous ses yeux sans me soucier de ses fichus principes et traditions.

À l'abri dans une cabine téléphonique à quelques mètres de Gim, je compose le 911. Le standard me répond et, en quelques minutes, la standardiste m'informe qu'une ambulance est en route. Pendant tout ce temps, même si je m'étais juré de m'en aller une fois le coup de fil passé, je reste aux côtés de Gim. Au bout de quelques minutes, il gémit  :

- Ma-... ma-man.

Je comprends, même si en apparence ce n'est pas vraiment compréhensible  : il veut que je prévienne sa mère. Par chance, je sais où il habite. Je serre sa main fort dans la mienne, tandis que les sirènes retentissent à une centaine de mètres de nous.

- T'inquiètes pas, je vais la prévenir. Je te le promets.

Je n'arrive pas à réaliser ce dont nous avons tous été complices. Nous avons tabassé, torturé et drogué un gamin. Enfin, putain, il a presque mon âge mais semble bien plus fragile que moi en apparence.

- Je dois y aller, Gim. L'ambulance arrive, tu sais qu'ils peuvent pas me trouver là. J'suis désolé. Tiens le coup, mec.

Comme un lâche, je me sauve avant que l'ambulance n'entre sur les docks.

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Hangar des AlasNegras | BROOKLYN – 2:02 PM.

- CE N'EST QU'UN GAMIN  !

Je hurle, conscient que je suis rouge de colère et que mes poings sont serrés au possible. Je sens cette veine, ma carotide, pulser sous la peau de mon cou. J'ai mal au ventre, de rage, et je me retiens de toutes mes forces pour ne pas envoyer une droite en plein dans la sale gueule de Skull.

- T'as pas de cœur, de toute façon  !, je crache. T'as pas de figure  !

Je regrette aussitôt mes paroles lorsqu'il m'empoigne par le col de ma veste. Mon dos se retrouve plaqué contre le mur en briques sales du hangar, sous les regards médusés de Dgina, Wayne, Miguel et un certain Tay. Tous les autres sont partis, dealer de la drogue et baiser des putes, et c'est mieux comme ça.

- Répète-ça pour voir, me menace-t-il.

- Tu as très bien entendu.

Je me reçois une droite dans le nez, mais je ne regrette pas. Je suis heureux d'avoir enfin pu lui dire ce que j'ai sur le cœur  : cette histoire avec Gim, c'est la goutte de trop.

- Méfies-toi, Flores. N'oublies pas d'où tu viens.

Je prends sa menace au sérieux, bien sûr, mais je suis trop en colère pour y accorder de l'importance à cet instant précis. Quand il me lâche pour s'enfermer dans son bureau, je fais signe avec mes doigts comme si je lui tirais dans le dos  : je me fiche que Miguel et Wayne, ainsi que Dgina, puissent le voir. J'ai la haine.

Quand je me laisse tomber sur le sofa défoncé, je me sers une bouteille de bière que je descends presque d'une traite. Miguel grogne  :

- Qu'est-ce-qu'il te prend  ?

- No me hables.

Je n'ai aucune envie de l'entendre me parler. Pas après l'avoir vu prendre son pied à tabasser un gamin, simplement par plaisir. Lui aussi j'ai envie d'y coller mon poing dans la figure, mais je me retiens  : je n'ai aucune envie de déclencher une bagarre.

- T'es sérieux, Diego  ? , demande Dgina choquée.

- Ferme-là  ? , je grogne. Tu sais même pas de quoi on parle  !

Je jette ma bouteille de bière vide par terre, avant d'en prendre une autre. Quand je quitte le sofa pour sortir du hangar, une clope entre les lèvres, je ressens l'envie de casser la gueule à tout le monde. Ou de faire l'amour  : seul Evan pourrait me calmer après cette après-midi de merde, mais je sais que c'est impossible.

- Je suis de ton avis, moi.

Je lève un sourcil quand Wayne me rejoint, une clope entre les lèvres lui aussi. Il s'était un peu rasé quelques jours plus tôt mais sa barbe recommence à devenir bien fournie et je ne peux m'empêcher de me dire qu'il serait très beau s'il n'avait pas tous ces poils sur le visage. Il me considère d'un regard sincère, et je me détends un peu.

- Vraiment  ? , dis-je.

- Ouais. C'est carrément abusé. C'était qu'un gosse.

Je hoche la tête, en silence, tout en tirant une taffe de ma clope. Je n'ai plus tellement envie de parler de Gim, car j'ai envie de me calmer et je n'y arriverai pas si le sujet revient sans cesse sur le tapis. L'incident est clos  : j'ai prévenu sa mère, j'ai dis ce que je pensais à Skull, et Gim n'est pas mort. Je n'ai plus envie de parler de ça. À la place, je charrie  :

- Ta caisse est une vraie poubelle.

- Ouais, mais elle roule.

- C'est sûr.

C'est bizarre cette relation que j'aie avec Wayne. J'ai l'impression qu'il est l'un des seuls à penser comme moi, bien que ce soit aussi une véritable machine de guerre lorsqu'il s'agit de péter la gueule des types que Skull lui demande. Il est un peu comme moi, en fait, et c'est bizarre. De plus, il s'intéresse souvent à moi et à ma famille – surtout papa et Luis, qu'il semble mépriser – et je me sens un peu plus considéré avec lui qu'avec les autres. Je l'aime bien.

- Ta moto est en panne  ?

- Non.

- Ah  ?

- Je l'ai vendue.

- Dommage , il tire une taffe avant d'expirer la fumée. C'était un joli petit bolide.

- Ouais.

Je ne dis rien de plus. Je regarde le ciel blanc et maculé. D'énormes flocons tombent du ciel et tiennent au sol depuis ce matin. Une petite couche de neige commence déjà à recouvrir la route et il fait un froid de canard. Mes pieds sont gelés, tout comme mes mains.

- Tay a proposé qu'on regarde le match de foot, à 6:00 PM. Tu restes  ? , me demande-t-il.

- J'sais pas.

Je m'apprêtais à répondre autre chose, à lui demander si la soirée se résumera à bouffer des chips en picolant de la bière et en fumant de la beuh, mais je me ravise.

Je lance un regard noir à Big K qui se pavane devant le hangar en roulant sur ma moto. Enfin, sa moto, désormais.

- Hé... c'est pas ta moto, là  ? , demande Wayne.

- Ouais.

Je me sens con quand je réalise que j'ai le cœur en miettes pour une chose aussi futile qu'une bécane.

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Appartement n°4, HLM E, Quartier de Brownsville | BROOKLYN – 8:48 PM.

Nous sommes à table, en train de déguster les délicieux enchiladas de maman. Andrea est assise face à moi, pendue à son portable, maman récupère une bouteille d'eau dans la cuisine et Wayne est assis à mes côtés. Oui, Wayne. Bizarre non  ? En fait, pas tellement.

Je sais qu'il vit seul, dans le sud de Brooklyn. Nous en avons parlé plusieurs fois, lorsque je râlais de temps en temps d'à quel point cela peut être un inconvénient de vivre encore avec sa mère et sa sœur dans un petit appartement. Nous avons passé la fin de la journée au hangar, à picoler des bières devant le match de foot, et c'est avec amabilité qu'il a proposé de me ramener chez moi plutôt que me laisser me peler le cul à rentrer à pieds sous la tempête. J'ai simplement voulu être poli, et l'ai invité à dîner pour le remercier.

- C'est délicieux, madame Flores.

- Appelez-moi Amanda.

Elle lui sourit, sincère, tandis que Wayne enfourne dans sa bouche une nouvelle fourchette d'enchiladas. Il a raison  : c'est un régal. Quand je vois le joli regard que me lance maman, je vois qu'elle l'apprécie  : Wayne ne se comporte pas comme un idiot insolent et irrespectueux, et ça lui plaît.

Je ne lui ai toujours pas parlé des AlasNegras. En revanche, je ne pense pas qu'elle soit stupide  : elle doit s'en douter. J'ai présenté Wayne comme un ami, rencontré dans un bar, mais je suis certain qu'elle ne m'a pas réellement cru. Je passe mes soirées dehors, à traîner jusqu'à pas d'heures, et je rentre parfois amoché ou éméché. Un peu comme papa, même si je ne me comporte pas comme un connard quand je suis à la maison. Je suppose qu'elle l'a compris, mais qu'elle préfère ne pas m'en parler. Je pense surtout qu'elle veut l'entendre de ma bouche et, là, je réalise encore une fois qu'il faudrait que j'ai une conversation sérieuse avec elle, un de ces quatre.

- Amanda, répète-t-il. D'accord.

C'est bizarre pour moi d'être assis là, chez moi, et d'avoir amené Wayne dans mon chez-moi. Personne du gang n'est jamais entré ici, excepté mon père et mon frère bien évidemment. Si cela n'avait pas été Wayne, cet homme poli et droit dans ses baskets, personne ne serait à table avec nous ce soir. Or, Wayne est un type bien  : nous pensons pareil tous les deux, à quelques exceptions près, et j'ai le sentiment que je peux lui faire confiance. Peut-être que je ne devrais pas, peut-être que ce n'est qu'un connard sous ses airs de type réglo, mais je n'ai pas envie de réfléchir.

- Pourquoi t'as vendu ta moto  ?

Je lance un regard noir à Andrea, qui me fixe par dessus son téléphone portable. Je serre les dents  : j'espère qu'elle n'est pas encore en train de discuter avec cet abruti de Whitaker, bien que je pense qu'il ne serait pas assez idiot pour rester en contact avec elle après ce que je lui ai fait.

- Comment tu le sais  ? , je grogne.

- J'ai vu Big K devant le kebab.

Je roule des yeux, lassé. Je lui lance un regard entendu, comme pour lui dire «  on en parlera plus tard, promis  » et, à mon grand soulagement, Wayne change de sujet. Malgré tout, je me crispe  :

- Tu as des nouvelles de ton frère  ? Heu... Luis  ?

- Lui  ? Non. J'suis pas allé le voir depuis un moment, et c'est mieux comme ça.

- Et ton père  ?

- Pareil. Qu'il crève.

Je n'ai pas honte de dire ça à haute voix, devant maman et Andrea, car je sais qu'au fond elles pensent la même chose que moi. Elle savent pour toutes les affaires dans lesquelles il a trempé, elles savent qu'il a buté un type, et elles savent qu'il a achevé Jose. Elles sont au courant de tout et je sais que, comme moi, elles préféreraient qu'il soit six pieds sous terre. Maman l'aimait, bien sûr, jusqu'à ce qu'il devienne un taré psychopathe violent et agressif. Elle est restée avec lui pour nous, et uniquement pour nous.

- Oh. Je vois.

Wayne se tait, finalement, et nous terminons le repas en silence. Quand il quitte l'appartement une heure plus tard, après avoir bu une bière et grignoté quelques cacahuètes caramélisées, maman me dit  :

- Il est charmant, ce Wayne. Je l'aime bien.

- Maman enfin  ! , je ricane.

Je vois son regard brillant, le même que celui qu'aurait une lycéenne amourachée du capitaine de l'équipe de foot. Je suppose qu'elle a raison  : Wayne est pas mal. Enfin... si on aime les types baraqués comme des cubes et barbus. Mais il est grand, musclé, il a un joli sourire et de beaux yeux.

- Quoi  ? J'ai des yeux, c'est fait pour regarder  !

- Oh seigneur, n'en dis pas plus  !

Elle rit, et je viens la serrer dans mes bras avant de l'embrasser sur le haut du crâne. Je lui souhaite bonne nuit, en espagnol, avant de me diriger vers ma chambre après avoir donné une petite claque sur la nuque d'Andrea. Bien évidemment, comme je m'y attendais, cette dernière me suit à l'intérieur et se jette sans délicatesse sur mon lit. Je referme la porte derrière moi, et retire mon pull afin de passer mon t-shirt trop large qui me sert de pyjama.

- Alors  ? J'attends.

Elle m'agace, à me fixer ainsi comme si elle était l'autorité. Bordel, c'est moi l'adulte ici  ! Mais je n'arrive pas à lui résister  : elle s'inquiète pour moi, et je ne peux rien lui refuser quand elle me lance ce regard là. Je m'assoie à côté d'elle, avant de laisser mon dos tomber sur les draps. Mes bras croisés sous ma nuque, les yeux rivés sur la lune collée à mon plafond, je dis  :

- J'avais besoin d'argent. Pour faire un cadeau d'anniversaire à Evan.

- Hein  ? T'as vendu ta moto pour ça  ? Pour lui  ?

- Oui, Andrea. Pour lui.

- Bordel, t'es carrément aveuglé par l'amour mon pauvre.

Je lui balance un oreiller en pleine figure, l'air grognon, même si au final mes lèvres s'étirent en un petit sourire  : elle n'a pas tort. En fait, elle a même totalement raison.

Quand elle quitte la chambre après m'avoir serré dans ses bras, hyper fort comme toujours, je me sens léger.

Épuisé par cette journée, je tombe de fatigue sans même avoir le temps de m'en rendre compte. 

.   .   . #eastriverFIC 

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