Chapitre 31 / Interrogations
Le soleil était levé depuis peu quand Lucy jeta un rapide coup d'oeil par la fenêtre du grenier. Le corps de la jeune femme qui était morte sous les yeux de Harry était toujours étendue sur le sol, à quelques mètres de la maison où les cinq volontaires s'étaient réfugiés.
Harry était assis à l'écart des autres. Lucy s'approcha de lui.
- Comment vas-tu ? lui demanda-t-elle.
- Aussi bien que possible, répondit-il avec détachement, prenant soin de choisir des mots qui ne trahiraient pas sa pensée exacte.
- Tu n'as pas réussi à trouver le sommeil ? insista Lucy.
- Non pas vraiment. Harry baissa le regard. Je me rattraperai ce soir, dit-il simplement.
Réveillé par leur conversation, Sina se leva pour s'étirer. Il s'était allongé à même le sol, à côté de Lola qui dormait encore. Il s'approcha d'eux sur la pointe des pieds.
- Bonjour les amis. Comment allez-vous ce matin ? Sina regarda le corps de la jeune femme par la fenêtre. Elle n'a pas bougé. C'est une bonne chose.
- Une bonne chose ? demanda Lucy.
- Oui, au moins elle ne s'est pas transformée en zombie.
Lucy leva les yeux au ciel.
- Quoi ? On ne peut pas en rire ? C'est encore trop tôt ?
- Oui c'est trop tôt, dit Harriet l'air contrarié. Il va falloir décider ce que l'on fait maintenant.
- C'est à dire ? demanda Harry.
- Est-ce que l'un d'entre vous à prévenu son Refuge de ce qui était arrivé cette nuit ?
- Je ne pense pas, répondit Sina.
- Bien. Je propose qu'on passe cet épisode sous silence pour l'instant. Si nous les informons, ils voudront que l'on rentre. Ils trouveront que la situation est trop dangereuse, et je n'ai pas particulièrement envie de retourner dans mon Refuge. Pas déjà.
- Je comprends, répondit Harry. Moi non plus.
- Que fait-on alors ? demanda Lola qui venait juste de se réveiller.
- On reprend la route, dit Lucy. Pas question de rebrousser chemin.
***
Les cinq volontaires quittèrent la maison peu après le réveil de Jonas. Dehors, une pluie fine et désagréable tombait. Ils avancèrent prudemment jusqu'au corps de la jeune femme qui était recouverte de sang. Jonas s'agenouilla pour l'inspecter.
- Regardez ses poignets et ses chevilles, on dirait qu'on l'a attachée. Il marqua une pause. Et qu'elle a réussi à s'échapper en se séparant de ses liens. C'est de là que proviennent ses blessures.
Jonas souleva légèrement le t-shirt qu'elle portait. Tous constatèrent que la jeune femme était recouverte d'ecchymoses et de plaies. Certaines étaient récentes, mais le plus grand nombre d'entre elles étaient anciennes.
- Cette jeune femme a été torturée, dit Lola qui détourna le regard devant l'ampleur des blessures de la jeune victime.
- Torturée, c'est le terme exact, dit Lucy. Ne trainons pas ici. Je ne voudrais pas qu'on nous réserve le même sort.
Ils reprirent leur marche quand Harry s'arrêta net.
- Attendez, on ne peut pas la laisser pourrir comme ça ! dit-il manifestement surpris par le manque de compassion des autres.
- Et que veux-tu qu'on fasse Harry ? demanda Sina. Qu'on l'enterre ?
- Oui, cela me paraitrait être la moindre des choses, répondit Harry.
- On n'a pas le temps et ça ne servirait à rien, trancha Lucy. Je suis désolé pour elle mais l'enterrer ne ferait que nous ralentir et attirer l'attention sur nous.
- Elle a raison, dit Jonas. Il faut qu'on parte d'ici et vite. Je suis désolé.
Celui-ci reprit sa marche, suivie de près par les autres. Harry chercha du regard Lola pour obtenir son soutien mais elle baissa aussitôt la tête.
***
La pluie qui tombait depuis le matin s'arrêta quand le groupe rentra dans Bordeaux. La ville n'était plus que l'ombre d'elle-même. Seul l'imposant monument aux girondins s'élevait encore du sol. Il était le seul indice qu'ils traversaient le centre-ville ; exception faite de la Garonne qui coulait paisiblement dans son lit. Les autres bâtiments avaient été détruits et la nature les avait tous recouvert depuis.
Lucy, fidèle au rôle de leader qu'elle s'était octroyée, ouvrait la marche. Sina, Jonas et Lola la précédaient de peu quand Harry, de son côté, prenait le temps d'observer ce qu'il restait de la ville. Il repensa à ce que Sam leur avait dit ressentir en la parcourant. Une sensation inconnue pour Harry tant la ville lui semblait déserte.
Le soleil brillait désormais. Lola ralentit son pas pour que Harry la rattrape.
- Je suis désolé pour ce matin. Mais j'ai pensé qu'il ne fallait pas qu'on s'attarde. J'ai eu la peur de ma vie quand nous avons été obligés de nous cacher dans le grenier. J'ai bien cru que ma dernière heure était arrivée.
- Ne t'inquiète pas Lola, je ne te juge pas. Je te comprends même. Avec le recul, je me dis que j'ai été un peu stupide de vous demander ça, répondit Harry.
- Non ce n'était pas stupide ! Tu as un coeur c'est tout !
- Merci Lola.
Harry regardait les ruines qui les entouraient quand il aperçut un homme qui se cachait maladroitement à quelques mètres d'eux seulement. Il n'eut pas le temps de prévenir Lola que l'homme sortit à découvert, un revolver à la main.
- Pas si vite ! leur dit l'homme qui s'approcha de Lola en premier.
Harry tenta de s'interposer entre eux. En vain. Le reste du groupe se mit aussitôt à courir en leur direction pour les rejoindre.
- Qui es-tu ? demanda Harry qui tremblait.
- Qui je suis ? Cela n'a pas d'importance. Il saisit le bras de Lola. Et elle, elle vient avec moi.
Lola se débattit mais l'homme pointa son arme sur elle.
- Doucement ma belle. Doucement. Calme-toi. Tu n'as pas idée à qui tu as affaire.
A peine avait-il prononcé ces paroles que d'autres hommes les entourèrent. Ils devaient être une vingtaine en tout. Aucun d'entre eux n'avait plus de trente ans.
- Que lui voulez-vous ? demanda Lucy. Ce n'est qu'une enfant. Prenez-moi à sa place !
L'homme se mit à rire, bientôt imité par les autres.
- Je ne crois pas non. Tu n'as aucune valeur.
L'homme traina Lola jusqu'à l'angle d'une rue où les attendait une voiture. Il l'installa à l'arrière du véhicule puis il se retourna une dernière fois pour s'adresser à ses hommes, avant de disparaitre.
- Ils sont à vous ! Vous en faites ce que vous voulez !
Jonas, Sina, Harry et Lucy se regroupèrent. Les hommes qui les encerclaient commençaient à se rapprocher dangereusement quand l'un d'entre eux s'écroula, touché en pleine tête par une balle. Harry chercha du regard le tireur mais il se coucha au sol quand d'autres tirs nourris retentirent.
Les hommes qui les avaient menacés disparurent rapidement. Les tirs cessèrent immédiatement. Harry se releva, aidé par Jonas.
Plusieurs voitures s'approchèrent d'eux. De la première sortit un homme d'une cinquantaine d'années, l'oeil droit couvert d'un bandeau.
- Bonjour les amis. Je m'appelle Charles et je ne vous veux aucun mal. Par contre, je vais être franc avec vous : vous venez d'atterrir directement en enfer.
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