Chapitre 14

- Shannon, est-ce que ça va ?

Daya était perplexe. L'expression faciale de Shannon changea en un rien de temps. Il est vrai qu'elles ne se connaissaient pas beaucoup mais si Daya avait la possibilité de l'aider, elle le ferait avec plaisir. Voyant que Shannon ne l'écoutait pas, elle s'approcha délicatement d'elle et lui toucha le bras, ce qui lui fit sursauter.

- Shannon !

- Écoute, il vaut mieux remettre cette conversation à plus tard.

- D'accord mais...

- Mais rien du tout. Va-t'en !

Ne voulant pas insister, Daya se contenta de partir sans rien dire de plus. Une fois partie, Shannon répondit par message écrit qu'elle acceptait le rendez-vous.

Plus tard.

Assise dans un bar du coin, Shannon attendait patiemment l'arrivée de son maître chanteur. Une dizaine de minutes passa lorsqu'il fit enfin son arrivée. L'individu en costume gris la chercha du regard une seconde puis s'approcha d'elle. Le visage de l'homme en question lui disait quelque chose. Elle fouilla dans sa mémoire une minute et tomba enfin sur ce qu'elle cherchait.

- Vous !

- Oui, moi.

Il déposa son téléphone et son portefeuille sur la table. Il prit ensuite siège en face d'elle.

- Je suppose que ma réputation me précède.

- Quelle réputation ? Celle d'un avocat véreux qui tire tous les criminels des merdiers dans lesquels ils s'enfoncent ? Effectivement, votre réputation vous précède.

- Un peu de retenue voyons ! Je veux me présenter officiellement à vous.

- Jordan Cold Dickson, diplômé de l'université de droit et d'ailleurs, major de promo durant tout son cursus. A aujourd'hui trente-deux ans, est marié avec trois enfants et le fait le plus important : est l'avocat le plus connu pour ses bassesses. J'avais déjà eu à faire des recherches sur vous, j'espère n'avoir rien oublié.

- Si. Je fais partie du réseau.

- Pourquoi venir me voir ?

- Ce que je viens de dire ne vous étonne pas ?

- Vous avez dit dans votre message vocal, je cite : j'ai une très forte envie d'envoyer cette vidéo à X. N'importe quel idiot comprendrait que vous en faîtes partie.

- Vous êtes décidément parfaite !

- Que me voulez-vous ?

- J'aimerais passer un accord. Je veux que vous m'aidiez à arrêter X. Je vous donnerai toutes les informations dont vous aurez besoin et vous, vous vous chargerez de l'éliminer.

- Merci de croire en moi, dit-elle, manquant de rire.

- Merci de vous sous-estimer.

- Pourquoi devrais-je vous faire confiance ? Vous êtes la dernière personne à qui je penserais pour conclure une affaire.

- Je sais. Mais pour vous prouver ma bonne foi, je vous donnerai des informations sur Freud Hirson.

- Je vous écoute.

- Il me semble qu'hier, vous vous étiez rendus à son domicile. Avez-vous trouvé quelque chose d'intéressant ?

- Non, rien. Juste sa mère qui est muette.

- Parce qu'il n'habite plus là. Il vient rendre visite à sa mère de temps en temps mais c'est tout.

- Où est-il alors ?

- Pas besoin de le savoir. Écoutez Shannon, la mère de Freud fêtera son anniversaire demain et forcément, son fils y sera. Il passe toujours là journée avec elle pour ses anniversaires. C'est là que vous interviendrez.

- C'est tout ? Plutôt simple.

- En fait, non. Si vous voulez déstabiliser le réseau et atteindre X, vous devez vous attaquer à leur stock de pierres.

- Un stock ?

- Freud est en quelque sorte le trésorier du réseau. Il garde toutes les pierres dans un coffre à l'intérieur d'une petite boutique.

- Et où est-elle cette boutique ?

- Je vous donnerai l'adresse, ne vous inquiétez pas. Mais vous n'aurez droit qu'à cet essai. Après, ils déménageront dans une bijouterie plus grande, plus sûre et plus sécurisée, celle qu'il a acquise...

- En grugeant et en éliminant l'ancien propriétaire.

- Je vois que vous m'avez compris. Laissez vos collègues se charger d'arrêter Freud.

Shannon était étonnée de toutes les informations qu'il lui balançait comme ça. Malgré ses doutes, elle enregistra toutes les informations afin de pouvoir les utiliser à bon escient.

- Au fait, dit l'avocat, combien de pierres possédez vous ?

Sans réfléchir, elle répondit :

- C'est une information que je préfère garder pour moi.

- À votre guise. Menez à bien votre mission et je vous garantis que quel que soit le nombre que vous possédez, vous en aurez beaucoup, beaucoup plus. Sur ce, dit il en se levant, j'ai d'autres chats à fouetter.

- D'autres chats à fouetter ou d'autres vampires à innocenter ?

- J'aime bien votre humour Shannon, lui répondit il avec un léger rictus au coin des lèvres. J'aime beaucoup.

De retour dans son ancien quartier, Molly prit une profonde inspiration puis avança lentement. Elle observait le marché toujours animé, les enfants qui jouaient ici et là, les rares motocyclistes qui passaient en transportant de la marchandise, le ciel bleu et ensoleillé qui éclairait le tout. Elle marchait, sentant son rythme cardiaque de plus en plus rapide à chaque fois qu'elle s'approchait de sa destination. Concentrée sur son objectif, elle ne fit même pas attention aux murmures que suscitait son passage. Puis, elle entendit une conversation assez intrigante entre la marchande d'oranges et son client, la coupant de ses pensées et de ses frayeurs :

- Les pauvres chéries ! Entama la marchande. Elles ne méritaient pas de disparaître de la sorte.

- À ce qu'il paraît, elles rôdent toujours dans le quartier. Le fantôme de la dernière fois, c'était sûrement l'une d'elle.

- Je me demande toujours ce qui a bien pu leur arr... Oh mon Dieu ! Regardez ! C'est Molly ! Lança t-elle en la pointant du doigt.

«Ce quartier et ses rumeurs !» pensa t-elle avant de poursuivre son chemin. Elle ne prit même pas la peine de répondre aux questions qui lui étaient posées.

Arrivée devant son ancienne maison, les visions d'horreur du reste de Viviane lui revinrent à l'esprit. Elle fut prise de panique, mais se ressaisit rapidement. «Tu prends tes affaires et tu dégages.» c'est ce qu'elle se répétait pour faire disparaitre son angoisse.

Une fois entrée, elle prit automatiquement une petite valise et commença à y mettre ses affaires notamment quelques vêtements, son téléphone, quelques billets qu'elle avait caché sous le plancher et son "matériel" de vol constitué par un stéthoscope, des clous, un marteau, un pied de biche, une boîte de gants noirs, un grappin et des sacs poubelles. Elle enfonça le tout dans la valise, puis, bien que difficilement, la ferma. En voulant soulever la valise pour pouvoir s'en aller, elle tomba nez à nez sur un des gorilles de son ex patron. Elle activa instinctivement son pouvoir mais le gorille réussit quand même à la saisir et à la courber sur son épaule.

- Alors c'était vrai cette histoire de fantôme ? Dit il en resserrant son emprise sur sa hanche pour qu'elle ne s'échappe pas.

- Laisse moi partir ! Dit-elle en donnant des coups sur son dos.

- Le patron sera content de te revoir, tu sais ?

Elle accentua ses coups, sans résultats. Subitement, les coups cessèrent. Le gorille ne parlait plus. Plus aucun oiseau ne bougeait, plus rien ne se faisait entendre. Le temps s'était arrêté. Pendant ce laps de temps, le gorille fut frappé très fortement et à cinq reprises sur la tête à l'aide d'une poêle qui traînait là. Il était assez costaud et le premier coup aurait sûrement attiré l'attention.

Dès que Molly retrouva ses esprits, elle se retrouva allongé sous le gorille inconscient. Elle se dégagea rapidement, prit sa valise, jeta un dernier coup d'œil étonné au gorille, puis s'en alla. À peine passée le pas de la porte d'entrée :

- De quel droit tu te permets de te mettre en danger comme ça ?

La voix la fit sursauter, activant ainsi son pouvoir. Mais elle se calma rapidement et redevint visible en se rendant compte que c'était Clarke.

- Je... Je suis désolée. Dit-elle en reprenant son souffle. Je ne voulais pas t'inquiéter.

- Tu es sous ma responsabilité Molly. Comment puis-je te protéger si tu prends de telles décisions sans m'en parler ? Heureusement que je t'ai suivie.

- Je voulais juste récupérer mes affaires.

Molly baissa la tête, tel un enfant qu'on prenait en flagrant délit et qui voulait se faire pardonner, ce qui réussit à l'attendrir.

- Allons nous en avant qu'il ne se réveille.

- Oui.

Journal Histoire.

Tout le personnel s'était rassemblé au niveau du rez-de-chaussée. Ils attendaient tous la nouvelle qu'allait leur annoncer le rédacteur en chef. Daya,  sachant déjà ce qui allait être dit, profita de leur inattention pour se faufiler dans le bureau de Mcpoly. Une fois à l'intérieur, elle s'assit dans ce qui était autrefois le siège de son patron. Elle ouvrit l'ordinateur posé sur le bureau puis l'alluma. Elle fut étonnée de voir qu'aucun mot de passe n'avait été requis. Son étonnement fut bien court lorsqu'elle se rendit compte qu'en réalité, l'ordinateur avait été formaté. Il n'y avait plus rien qui pourrait lui donner une piste. Aucun fichier, aucun mail, rien. Déçue, elle referma l'ordinateur et retourna vers les autres.

Le reste de la journée, Molly et Clarke finissaient d'échafauder leur plan. La sécurité étant plus renforcée la nuit, ils décidèrent de mettre leur plan à exécution aux premières lueurs de l'aube. Du côté de Shannon, elle finit par se rendre à la boutique en question. Elle prétexta vouloir acheter un collier pour une amie et en profita pour scruter les lieux du regard. Elle croisa même Freud en personne qui lui donna des conseils sur quel collier acheter. Elle le reconnut de suite, car Cold lui avait envoyée une photo, un peu après leur échange. Une fois sortie de la boutique, elle fit le tour et tomba sur la grille d'aération.

Le lendemain.

Il sonnait huit heures. Molly et Clarke se trouvaient devant la boutique de l'ex patron. L'équipe de surveillance de la journée était déjà en place : deux gardiens placés devant la boutique, sûrement armés.

- Prête ?

- Prête.

Molly marcha directement en direction de la boutique. Les deux gardiens qui surveillaient la devanture la reconnurent tout de suite.

- Salut les gars.

- Tiens, tiens !

- Mais qui est-ce que nous avons là ?

- Je vous ai manqué ?

- Qu'est-ce que tu fais ici Molly ?

- Tu es assez intelligente pour savoir qu'il va te tuer.

- Je sais. Mais je n'ai plus peur. J'ai un message à lui faire passer...

Pendant que Molly les distrayait, Clarke prit le sac de matériel et se dirigea vers la grille d'aération à l'arrière du bâtiment. N'étant pas trop haute pour lui, il balança le sac à l'intérieur, puis sauta pour y pénétrer à son tour. Il rampa le plus rapidement possible vers l'arrière-boutique où se trouvait le coffre-fort. Une fois arrivé au-dessus du lieu, il s'assura que personne n'y était. Il arrêta le temps avec son pouvoir avant de jeter le sac à l'intérieur de l'arrière-boutique, histoire que le bruit n'alerte personne. Une fois fini, il se retourna.

Molly, adossée contre le mur, attendait patiemment l'arrivée de Clarke qui finit par la rejoindre en moins de deux. Leurs regards se croisèrent, ils se firent signe de la tête puis Molly entra à son tour dans le conduit d'aération. Une fois au-dessus de l'arrière-boutique, elle ôta ses chaussures avant d'atterrir à l'intérieur. L'endroit n'avait pas changé. Des étagères en bois contenant du matériel de nettoyage, des outils (pinces, polissoirs...) et des matériaux (or, argent, perles...), le mur orné par des motifs floraux et le tableau de la mère de son ex patron, le tout éclairé par une lumière tamisée.

Automatiquement, elle se dirigea vers le tableau. Elle le retira, ce qui lui donna accès au coffre-fort. Elle mit ses gants noirs, prit son stéthoscope puis commença à chercher le code du coffre. Quelques minutes plus tard, Clarke descendit en catastrophe en alertant Molly :

- Clarke, moins de bruit s'il te plaît. Dit-elle concentrée sur le coffre-fort.

- Il faut qu'on s'en aille.

- Pourquoi ?

Il ne dit rien.

- Clarke !?

Étonnée, elle se retourna. Sa concentration laissa place à de la stupeur, puis à de la peur. Clarke était là, mais pas seul. Son ex patron était là avec les deux gardiens de tout à l'heure. Celui qui l'a recherchait pour la mettre dans le même état que Viviane, était là. Il était bel et bien là. Il avait toujours ce même regard, ce regard de tueur qui lui faisait tant peur. Ce regard avec lequel il la fixait en fumant un mégot de cigarette. En le voyant, elle retira son stéthoscope des oreilles.

- Comme on se retrouve !

...

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