Chapitre 10
Shannon s'installa dans son siège, le classeur ouvert devant elle. Elle se demandait si elle devait se réjouir ou non de la nouvelle que le commandant lui avait annoncée un peu plus tôt.
"Marc a joué de ses relations pour vous aider. Vous n'êtes plus suspendue."
Pour quelle raison Marc avait-il fait une chose pareille ? Quel était son objectif ? Voulait il vraiment l'aider ou juste la mener vers de fausses pistes ? Quoi qu'il en soit, elle avait d'autres choses à faire. Le classeur qu'elle avait devant elle contenait le rapport de l'enquête sur un bijoutier retrouvé mort, une semaine avant la mort de Roy.
"Déclaration de vol... effraction... propriétaire retrouvé mort égorgé..."
Elle faisait attention à chaque détail du rapport lorsqu'elle l'aperçut finalement.
- Salut Roy.
Grâce à ses deux pierres supplémentaires, elle pouvait désormais s'adresser aux âmes errantes, autrement dit aux fantômes, sans avoir à les ramener dans un corps. Elle avait également la capacité de les voir.
- Salut, lui répondit le défunt.
- J'ai beaucoup de choses à te demander, dit-elle en refermant le classeur.
- Tu ne te mettras pas en colère ?
- Je le suis déjà. Juste que je ne ferai rien d'impulsif cette fois. Je n'ai pas envie que mes collègues viennent toquer pour demander ce qui se passe.
- D'accord. Je t'écoute.
- Combien de personnes sont au courant au juste ?
- De quoi ?
- La nuit dernière, et même la nuit d'avant, le vieux n'a pas mentionné que les pouvoirs augmenteraient seulement si l'ancien porteur décédait.
- Le vieux n'a plus toute sa tête depuis plusieurs mois. La quantité d'informations qu'il donne aux nouveaux porteurs est infime comparée à ce qu'il donnait aux premiers. Je ne le savais pas non plus.
- Ah bon ?
- Oui. Mon père était l'un des premiers scientifiques à avoir travaillé sur ces pierres. Et le premier à en avoir touché n'était pas Paul Walker. C'était le troisième scientifique de la bande. Après l'accident qui a tué ce dernier, mon père a tenté de voler la pierre à Paul histoire de tester ces fameux pouvoirs mais rien ne s'était produit. Le seul facteur qui était différent était...
- Le décès. Conclut Shannon.
- Très peu de gens le savent en réalité. Pour la majorité, il suffit soit d'en trouver, soit d'en voler.
- Je vois, dit elle en se levant de sa chaise.
Elle soupira un instant avant de se décider à poser les véritables questions qui lui taraudaient l'esprit :
- Quand je suis allée confronter Marc, il a dit que c'était toi qui avais fondé le réseau. C'est vrai ?
- Shannon...
- Est-ce que c'est vrai ? Répéta t-elle en insistant.
- Oui. Je l'ai fondé et j'ai fini par lui laisser les rênes.
- Est-ce que c'est toi qui as tué mes parents ?
Il ne répondit pas, se contentant de garder le silence et de baisser la tête. Shannon comprit finalement que c'était la vérité. À cet instant, ses yeux commencèrent à s'embuer. Contrairement à son habitude, elle ne les essuya pas cette fois-ci. Pour une fois, elle désirait laisser libre cours à ses émotions.
- Si tu n'étais pas déjà mort, je te jure que j'aurais moi-même tenté de te tuer.
- Shannon je...
- Tais toi ! Tu étais là le jour où j'ai appris leur décès. Tu étais là et tu as vu ma souffrance. Tu as quand même continué de me mentir et de faire comme si de rien n'était.
- Je suis désolé.
- C'est un peu trop tard pour ça, dit elle en essuyant finalement ses larmes. Dis moi comment tout ça fonctionne.
- L'homme de tout à l'heure te l'a dit je pense. Ils vont te contacter pour l'intégrer. À toi de voir si tu acceptes ou pas.
- Tu disais que c'était Marc qui avait les rênes. Autrement dit, si je l'arrête lui...
- Non, plus maintenant. Actuellement c'est une autre personne qui gère le réseau. Marc n'est qu'un pion que tu ne pourras malheureusement pas arrêter, faute de preuves.
- Qui t'a dit que j'allais passer par des moyens légaux pour le faire ?
- Il n'hésitera pas à t'éliminer.
- Tout comme tu as éliminé mes parents et probablement d'autres personnes ? Oui, j'avais remarqué que les frères Ruiz n'avaient pas de cœur.
- C'est bien facile de blâmer les autres. Tu n'en as pas eu non plus lorsque tu as tué Paul Walker qui entre parenthèses, ne faisait pas partie du réseau.
- Quoi !?
- Marc t'a embobinée parce que Paul était le seul capable de venir à lui tout seul à bout du réseau. Et toi, tu l'as tué sous l'effet de la colère. Moi je te comprends mais pas sûr que son fils te comprenne lui.
- Son fils, un gamin bien intelligent pour son âge, lâcha t-elle en regardant dans le vide. Mais attends, comment ça il pouvait venir à lui tout seul à bout du réseau ?
- Il a écrit un livre. Trouve le et tu sauras.
- Il l'a publié ?
- Non.
- Alors comment tu connais son existence ?
- C'est le vieux qui m'en a parlé. C'est possible de discuter avec lui, tu sais.
- Le vieux sait tout sur tout apparemment.
- Paul aussi, vu que ce n'est qu'à lui que le vieux se confiait. Ils étaient inséparables ces deux-là.
- Du coup, il va falloir retourner... Non. Chez le gamin. Le livre doit se trouver chez son fils...
Pendant ce temps
- J'ai réussi !
- Tu vois que ce n'était pas difficile.
Molly et Clarke se trouvaient dans la salle de bain de l'appartement, devant le miroir plus précisément. Molly s'entraînait à activer son pouvoir par elle-même. Clarke, derrière elle, admirait ses progrès et son sourire par la même occasion. Brusquement, Molly prit sa main puis activa son pouvoir, mais ce ne fut qu'elle qui disparut.
- Pourquoi ça ne marche pas ? Demanda t-elle, étonnée.
- Parce que tu n'as qu'une seule pierre. Tu peux juste te rendre invisible, seule.
- Mais alors, dit-elle en désactivant son pouvoir, pourquoi tu l'étais la dernière fois ?
- Peut-être parce que ma pierre était instable.
- Je ne comprends pas.
Les deux se redirigèrent vers le salon avant que Clarke ne commence son explication :
- Les pierres se connectent à l'énergie vitale de leur porteur. Lorsque celle-ci est menacée ou devient instable, il est possible qu'une pierre se connecte temporairement à l'énergie la plus stable se trouvant à proximité. Ma pierre a dû se connecter à toi lorsque je m'étais évanoui, c'est ce qui a permis d'augmenter ta capacité pendant ce laps de temps.
- Mais si les pierres sont connectées à l'énergie vitale de leur porteur, comment est-ce qu'on fait pour utiliser une pierre volée ?
- J'ai parlé de proximité. Après les avoir déstabilisées, il suffira de les éloigner suffisamment longtemps pour perdre leur connexion.
- Donc on aura juste à les assommer ? Comme quand tu t'étais évanoui ?
- Exactement. À les assommer et à aller le plus loin possible avant leur réveil.
C'était un mensonge. Clarke restait ferme sur sa décision de ne rien lui révéler. Mais il savait pertinemment que quel que soit la distance, tant qu'un porteur restait en vie, sa pierre restait connectée à lui. Il avait apprêté ce mensonge pour quand Molly lui poserait la question.
- Clarke.
- Oui ?
- Tout ce que tu sais, tu l'as appris de ton père, n'est-ce pas ?
- Oui.
- Tu peux me donner l'évolution de mes pouvoirs ?
- C'est assez simple. Tout d'abord tu peux te rendre toi-même invisible. Ensuite, tu peux le faire avec une autre personne ou un objet. Puis au fur et à mesure que le nombre de pierres augmente, tu passes à deux personnes ou deux objets, puis trois et ainsi de suite jusqu'à ce que tu ne puisses rendre invisible toute une ville ou tout un pays.
- Tout un pays ! Incroyable ! Et ton pouvoir à toi, comment il évolue ?
- Pour l'instant, je ne peux qu'arrêter le temps pendant dix secondes. La durée augmentera progressivement. Ensuite je serai capable d'avancer ou de reculer dans le temps. Au début, juste de vingt-quatre heures. Après, je pourrai même reculer de plusieurs années.
- Et il te faudra combien de pierres environ pour réussir à faire ça ?
- Une vingtaine. Une quinzaine pour réussir à sauver ton amie et mon père.
- C'est quand même beaucoup.
- Combien est-ce qu'on pourra en trouver chez ton ex patron ?
- Je n'en ai aucune idée. Je ne saurais même pas différencier les pierres normales de nos pierres à nous alors...
- Je comprends.
Il se leva brusquement puis se dirigea vers la porte.
- Tu vas quelque part ?
- J'ai besoin de prendre l'air, d'être un peu seul.
- Est-ce que ça va ?
- Oui, ne t'inquiètes pas.
- D'accord.
Clarke voulait réellement prendre le temps de réfléchir. Il devait trouver un moyen d'identifier les pierres qu'ils prévoyaient de voler, et ce, sans avoir à les toucher. Il devait aussi réfléchir à la manière de retrouver le livre de son père. Enfin, il devait faire le vide en lui et apaiser la douleur qui lui restait de la perte de son père.
Daya, qui était rentrée directement après la tentative d'assassinat contre elle, le vit par la fenêtre et décida de sortir pour lui parler, encore.
- Salut. Dit elle
- Salut.
- Est-ce qu'on peut parler ?
Il paraissait beaucoup plus apaisé qu'un peu plus tôt au restaurant. Elle en profita alors pour lui exprimer ce qu'elle devait lui exprimer depuis le début :
- Toutes mes condoléances pour ton père.
- Merci.
Le calme s'installa dans l'air. Daya souhaitait en réalité obtenir des informations sur les avancées des recherches de Paul. Cependant, se demandant si c'était vraiment le bon moment, elle opta finalement pour changer de sujet.
- Où est-ce que tu fais ton stage ?
- Chez JP-magazine. Et toi ?
- Journal Histoire.
- Ouche ! Je n'aimerais pas être à ta place. Mcpoly est un imbécile.
- Hey... Tu n'as pas tort. On devrait l'appeler Malpoli plutôt.
Le jeu de mot le fit sourire. Daya en était ravie. Rien de mieux que des raisons de sourire quand ça ne va pas. Et elle le sentait qu'il n'allait pas bien.
- Tu avais raison, poursuivit elle, à propos de mon pouvoir. Je me suis faite remarquer. J'ai échappé de justesse à la mort.
- Heureux que tu sois toujours en vie.
- Maintenant que j'y pense, pourquoi voulait il ma mort au juste ? Il aurait pu me la prendre tout simplement.
- C'est quelque chose que tu comprendras plus tard. Contente toi juste de faire attention. Et un conseil : utilise ton pouvoir sur Mcpoly pour entendre ce qu'il veut.
- Tu veux dire sur Malpoli.
La même blague le fit rire cette fois.
- Bon, je dois y aller, dit il en poursuivant sa route.
- Tu crois que tu pourrais me parler de ton père un jour ? Lança t-elle sans réfléchir cette fois.
- De mon père ou de ses recherches ?
Grillée ! Daya se sentit un peu honteuse. Mais il se contenta de dire :
- Au revoir Daya.
Et il s'en alla.
...
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