ACTE 2 Chapitre 8
PDV de Travis
Ma sœur et moi-même nous nous baladions à travers les rues à moitié vides de Dandelion. Tout était relativement calme autour de nous, et seuls quelques élèves passaient aux alentours, quelques instants avant de disparaître en prenant un autre chemin.
Ça me faisait presque bizarre une telle tranquillité, moi qui m'imaginais croiser du monde à chaque pas. En un sens, c'était pas plus mal, la paix qui régnait ici m'apaisait. Mon moment de colère me paraissait bien loin, ce qui était à mes yeux un bon signe.
Les yeux à la fois dirigés sur la route et sur mon livret absorbaient toutes les informations qui y étaient inscrites. J'avais encore du mal à saisir le fonctionnement de la lumière dorée qui changeait son contenu chaque fois que je le lisait, néanmoins, les modifications apportées étaient étrangement toujours en accord avec ce que je désirais savoir.
– Alors ? me demanda soudain Trissia. t'as découvert quoi ?
– Beaucoup de choses.
– Mais détaille !
– Je croyais que tu préférais être surprise ?
– Humph…! Dis moi !
– Comme tu veux.
Au même moment, la double page que j'avais sous les yeux, fut remplacée par une carte. Elle représentait l'ensemble de Dandelion, et détaillait tous ses bâtiments ainsi que ses différentes rues. L'une d'entre elles avait justement son nom illuminé, et je compris bien vite qu'il s'agissait de celle où nous étions de part les bâtiments qui nous entouraient.
Je marquais une pause, avant de montrer à ma sœur celui à notre gauche. En forme de grand U il épousait la forme de la route, tout en se dressant sur trois étages. C'était un établissement en briques rouges et au toit cramoisi. Comme les autres, il dégageait un côté ancien, presque noble dans son architecture. Il faut croire que c'était le style typique de Dandelion.
– Tu vois on est dans la rue Harrow, qui longe deux établissements. Celui-ci, Atlas, c'est celui dédié aux langues apparemment. Là-bas les élèves apprennent l'art du discours, des langages spécifiques à certaines nations et même les dialectes dit "interdits".
– Pourquoi il y aurait des dialectes interdit ?
– J'ai beau être ton grand frère j'en sais pas plus que toi à ce sujet.
– Okay, et celui-ci ? demanda-t-elle en me montrant le bâtiment de droite.
– Lui, c'est Œpharion, ils sont spécialisés dans la diplomatie et le commerce. Apparemment là-bas on peu te former à devenir un négociant où même un homme d'affaires…
– Ça à l'air sympa tout ça.
Je repris la marche, et Trissia fit de même, alors qu'on s'apprêtait à sortir d'Harrow pour se retrouver au milieu d'une bifurcation. Après une nouvelle pause, je consultais une fois de plus mon livret, histoire de m'assurer pleinement de ce que j'allais dire à ma sœur.
– À droite on a la rue Bernidas, et à gauche Hagathe. Bernidas mène à un carrefour qui relie les différents établissements liés aux combat. Iketia pour les armes à feu en tout genre, Diadem pour l'apprentissage aux techniques de défenses, Echoes pour le maniement des armes blanches et Warem pour le combat à mains nues.
– Tu penses que c'est dans l'un d'entre eux que monsieur Alex à entraîné Sadie.
– Qui sais…? Il te suffira de demander.
– Comment ça moi ? Allons-y ensemble !
– Hum… ce n'est pas ce que j'ai prévu personnellement.
– Ah, alors on ira un autre jour !
– Trissia… dis-je en soupirant.
C'était une de mes craintes, une crainte particulièrement bien dissimulée. Trissia était particulièrement attachée à moi, pas juste de part notre lien de sang, mais à cause de tout ce qui était arrivé jusqu'ici. Personnellement, j'étais bien décidé à me lancer dans mes études, ce qui signifiait cependant laisser de côté ma sœur durant mes temps d'apprentissage.
Je voulais qu'elle puisse tracer sa route ici à Dandelion, qu'elle ait l'opportunité de s'intéresser à ce qui lui plaisait, elle qui, de nous deux, était la plus déterminée à commencer une nouvelle vie. Mais j'avais l'impression que par ma faute, ses ambitions avaient été effacées au profit d'une attention portée uniquement sur moi.
– Trissia… ici on a l'occasion de faire chacun ce qui nous plaît, alors ne restons pas ensemble en permanence alors qu'on pourrait choisir nos occupations de notre côté. Moi j'ai envie de découvrir cet endroit, et de profiter de tout ce que je pourrais y apprendre… mais ça, je ne le ferais pas forcément en t'ayant toujours à mes côtés. Je suis sûr que tu as envie de faire pleins de choses, alors profitons de cette visite pour trouver ce qui te plairait.
– Mais… même si t'es occupé c'est pas grave ! Je pourrais faire pareil que toi, qu'on puisse découvrir tout un tas de choses ensembles !
– Je…
Je n'avais pas envie de la "traîner" partout où j'allais. À mes yeux, c'était l'occasion de pouvoir entamer un parcours en solitaire, pas un énième voyage en famille. J'avais envie de le lui dire, de lui faire comprendre qu'elle pouvait, qu'elle "devait" me laisser voler de mes propres ailes, sans elle à mes côtés.
Cependant, je n'en avais pas la force.
Trissia faisait de son mieux, elle voulait prendre soin de moi, même du haut de son statut de petite sœur. Je ne pouvais pas lui dire une chose aussi… cruelle. À mes yeux, c'était comme si je lui disais qu'elle était un parasite, une chose néfaste que je ne voulais pas me "trimbaler".
Je n'avais pas les mots pour lui expliquer ma vision, pas sans la blesser…
Au final, ma voix s'essouffla avant que je n'ai l'occasion de finir une phrase qui ne viendrai jamais.
– Bon, dis-je à la place, continuons.
– Oui !
Un peu dépité, en manque d'idées, je me plongeais de nouveau dans la carte, afin de poursuivre mes explications. À mes yeux, ceci constituait mon dernier recours. J'espérais que dans ce flot d'institutions composant l'académie, au moins une titille suffisamment Trissia pour qu'elle décide d'elle même d'en savoir plus, de sorte qu'elle s'éloigne de son propre chef, et qu'on puisse chacun suivre une voie qui nous plaise.
– Du côté droit, dis-je, vers la rue Hagathe, on se dirige vers des établissements dédiés au monde du spectacle. Le Cirque de la Lune, où sont enseignés les différentes facettes du spectacle au sein d'un cirque. Funambule, acrobate, jongleur et j'en passe. Il y a également le Théâtre du Crépuscule qui se concentre davantage sur le jeu d'acteur, la capacité à pouvoir rentrer dans un personnage où à faire ressentir des émotions à un public.
– Celui sur le théâtre me plaît pas mal.
– Ça te dirais d'essayer ?
– Oh ? Tu veux y aller aussi ?
– Hum… pas vraiment non. J'ai d'autres projets en cours donc le théâtre n'est définitivement pas pour moi.
– D'accord, alors moi non plus pour l'insta-
– Et pourquoi pas ?
Je fut moi même surpris de mon manque de patience à l'égard de Trissia. À vrai dire, je ne faisais qu'y penser, au point d'avoir presque du mal à lire le contenu du livret. Ma sœur me regarda d'un air confus, ce qui me confirma mon manque de tact dans ma manière de lui parler.
– Non mais sincèrement Trissia… dis-je en tenant ses épaules. Tu n'es pas venue pour commencer quelque chose de nouveau ? C'est l'occasion de le faire ! Si le théâtre t'intéresse alors ne t'en prive pas pour simplement me suivre !
– Mais c'est pas grave je veux just-
– Je serais bien plus heureux en voyant ma sœur se découvrir un talent pour quelque chose qu'elle ne soupçonnait même pas. Trissia, tu as dis que tu allais m'écouter. Alors s'il te plaît, je veux te voir évoluer, pas juste rester auprès de moi alors que tant d'opportunités s'offrent à toi ! Je vais m'en sortir ! Laisse moi faire mes preuves et grandir, pour que tu ai l'occasion de faire pareil de ton côté ! Tu peux faire ça pour moi pas vrai ?
Elle demeura un moment dans le silence, chose qui m'inquiétais profondément. Avais-je été trop brutal ? Aurais-je dû laisser un peu plus de temps passer ?
Je n'en savais rien, et je ne pouvais plus rien y faire. Tout était dit maintenant.
– Je… je sais pas si j'y arriverai. répondit-elle finalement.
Une partie de moi était soulagée de ne pas déceler de tristesse où de colère dans sa voix, cependant je tentais de comprendre ses propos.
– Si tu parvenait à faire quoi ?
– Si j'arriverai à… à évoluer toute seule ici !
– Pourquoi pas ? Je suis sûr que tu peux le faire Trissia !
– C'est juste que… je me suis rendue compte que si j'ai pu me montrer si "forte" jusqu'ici, c'est parce que tu étais avec moi. Quand tu es loin, c'est comme si je n'arrivais plus à penser à quoique ce soit d'autre que toi ! Je sais qu'au fond, tu étais prêt depuis notre départ à avancer à ta manière, à suivre ton chemin…! Mais moi, j'étais pas du tout préparée à ça ! Je voulais juste qu'on reste ensemble, comme on l'a toujours été !
Je me mordis les lèvres, embêté, alors que je comprenais bien mieux sa manière de voir la chose. Trissia n'avait que 12 ans, moi 16 ! Si pour moi notre séparation était quelque chose que j'envisageais pour notre bien à tous les deux, à ses yeux, c'était bien moins facile à accepter.
Bon sang… quel "grand" frère ne penserai pas à ça ?!
– … désolé. lui répondis-je. J'étais tellement focalisé sur ce que je voulais… que j'ai pas pensé un instant au fait que tu ne serais peut-être pas encore prête.
– Non, c'est de ma faute. J'ai fini par faire de toi le centre… de mon monde.
– Au fond je crois bien qu'on est tous les deux un peu fautifs dans l'histoire… dis-je en souriant.
Trissia répondit par un petit rire, alors que nous étions toujours au beau milieu de l'intersection de la rue Harrow.
– Mais je devrais sûrement t'écouter. ajouta-t-elle après un moment.
– Détrompe toi Trissia, j'ai beau vouloir beaucoup de choses, elles ne passeront pas au-dessus de ton bien-être ! Si être à mes côtés est la seule chose au monde qui t'aide à te sentir bien, alors il n'y a même pas à hésiter ! En tant que grand frère c'est à moi de prendre cette responsabilité !
Ma sœur resta un moment silencieuse, alors que nos regards demeuraient fixés vers l'autre. Tout était si tranquille autour de nous que ça apportait un côté presque "intime" à notre échange. Cependant, un rire malicieux me fit frémir, alors que je comprenais que nous étions observé.
– Un moment de complicité presque amoureuse entre les enfants Greoln ! Hum hum hum ! Ça peut faire la une tout ça !
Alors que je me retournais d'un coup pour faire face à cette personne, je fus surpris de croiser le regard d'une singulière jeune femme qui se tenait accroupi sur un lampadaire. Le détail le plus intriguant chez elle, c'était les oreilles de chat l'air plus vrai que nature se mêlant à sa chevelure blonde. Une queue de félin s'agitait au bas de son dos, comme s'il s'agissait d'un véritable matou. Une appareil photo en main, elle prenait des clichés l'air de rien.
– Oh ! J'ai parlé trop fort ! s'exclama-t-elle.
Comme si ses agissements étaient parfaitement normaux, elle se contenta d'agita le bras pour nous saluer alors qu'on la fixait, perplexe.
– Ne faites pas attention à moi, continuez !
Trissia allait intervenir, visiblement surprise par cette inconnue, quand je l'arrêtais.
– Laisse tomber. Pas la peine de s'occuper d'elle, continuons.
– T'es sûr que-
– Elle finira bien par se lasser.
Convaincue par ma visible assurance, ma sœur fini par me suivre, alors que je décidais d'accélérer un peu notre visite. Au fond, j'avais déjà une destination toute tracée, et ce moment d'exposition des différentes zones de l'Académie n'était en soit qu'un contretemps. Cependant, la présence de cette photographe bizarre n'était pas spécialement agréable, mais je me surpris à prendre assez tranquillement ses agissements. En fait, je crois bien que ça me faisait presque sourire.
Moi comme Trissia n'étions en rien des enfants incroyables, et ça m'amusait un peu de me dire que tôt où tard les gens s'en rendraient compte.
Notre voyage se poursuivit alors le long de la rue Hagathe, aux côtés de la photographe féline qui, bien que se faisant plus discrète, continuait, j'en étais sûr, de nous suivre.
Hagathe menait au centre de Dandelion par le Nord, vers un endroit bien particulier appelé Aire Royale. Tout ce secteur était dédié au fameux palais de Dandelion, la plus incroyable structure de l'Académie. Il était si grand qu'il était, d'après le manuel, accessible depuis n'importe côté de Dandelion, qu'on vienne du Nord, du Sud, de l'Est où de l'Ouest.
L'Aire Royale constituait alors la délimitation entre la zone libre, où se trouvaient tous les clubs et leur édifices, et le territoire en quelque sorte "VIP" que seuls certains élèves pouvaient pénétrer sans conditions.
Cette séparation se présenta à nous sous la forme de diverses indications relativement visibles, comme une immense démarcation dorée au sol, et des bannières tout le long, faisant presque office de barrière dissuasive.
Au-delà de cette limite, se dressait alors un immense bâtiment qui formait une enceinte carré tout autour du palais, où plus précisément, entourait et faisait partie de ce dernier. De part l'énorme logos en forme d'épée dorée sur fond noir, je compris qu'il s'agissait du fameux premier étage, où siégeait la milice de Dandelion.
Rien que de repenser à sa seule existence me faisait froid dans le dos.
– C'est vraiment incroyable ici…! déclara Trissia émerveillée.
– Ouais…
– Ensuite on va où ?
– Eh bien, pour tout te dire, je me dirigeait vers la bibliothèque qui se trouve plus loin.
– Ooh, tu vas te mettre à fond dans la lecture ?
– Eh oui. Y a beaucoup de choses que j'ai envie de savoir et d'apprendre, et cet endroit est justement la première étape.
– Alors allons-y !
– Tiens, pas envie de savoir toutes les autres spécialisations de Dandelion ? Y en a encore pas mal tu sais ? Cuisine, exploration, écriture et même philosophie… on a clairement pas encore fait le tour.
– Pour de vrai…?! Ouah !
– Eh bien dans ces cas prolongeons un peu notre visite des lieux.
– Mmmh non !
– Ah ? Pourquoi ?
– Je veux te rendre fier Travis ! Alors toutes ces autres choses à découvrir… je les découvrirais moi-même !
Je ne pu cacher mon soulagement à la vue de sa volonté. C'était pour moi la preuve que ma petite sœur avait au fond d'elle le désir de grandir, et de voler de ses propres ailes. Caressant sa tête avec enthousiasme, je lui tendis alors mon livret.
– Tiens ça alors, ça t'évitera de te perdre.
– Mais et toi ?
– Ton grand frère a déjà mémorisé une bonne partie du plan de l'Académie. T'en fait pas pour moi, je saurais me déplacer ici sans trop de problème !
Je commençais alors à marcher, un grand sourire sur les lèvres, tout en lui faisant signe sans me retourner.
– Si jamais tu t'ennuies où que tu me cherches, retrouve moi à la bibliothèque ! À toute !
– Compte sur moi pour découvrir plein de choses !! cria-t-elle.
Bien, direction la bibliothèque ! Il est temps de rattraper toutes ces années de retard !
Trissia se confesse enfin ! Un mal-être constant en l'absence de son frère qu'elle ne peut guérir qu'en restant auprès de ce dernier... Voilà quelque chose de bien embêtant, surtout quand lui espère pouvoir se détacher un peu de sa famille pour pouvoir continuer sa route !
Leur échange était assez plaisant à écrire, et il me permettait également de montrer une fois de plus l'état de leur relation frère-soeur :3
L'académie aussi était intéressante à détailler, bien qu'un chouïa technique ( vu que je voulais éviter trop d'incohérences architecturales, où dans le positionnement de telle où telle chose )
Et vous ? Quel discipline auriez-vous souhaité apprendre là-bas ?
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