Chapitre XIV

Freckles :
« Laisse tomber, je t'ai cerné » 17h48
« A demain, au lycée ! » 17h49

Morgan :
« Noah ? » 17h50

Mais le jeune roux ne répondit plus. Il avait éteint son téléphone. Ou du moins, Noah ignorait complètement Morgan, qui venait d'essayer de l'appeler. Après plusieurs sonneries, messagerie impersonnelle -tout comme la sienne pour éviter que Noah ne le reconnaisse- et messages sans réponses, Morgan laissa tomber.

Le noiraud se décida plutôt à aller cuisiner quelque chose pour sa petite sœur et lui. Quoiqu'il arrive, il aurait les réponses à ses questions, le lendemain, au lycée.

Morgan bougeait sa jambe frénétiquement dans un mouvement nerveux. Il n'avait pas croisé le jeune roux devant le portail, ce qui le forçait à attendre son heure de cours d'anglais en commun avec Noah. Malheureusement, le tacheté l'ignora royalement, et s'assit à côté de Linh comme à son habitude.

-Yo, le salua Ulysse suivi d'une tape sur l'épaule du noiraud.

Perplexe de par la réaction de Noah à son égard, Morgan ne fit qu'un léger mouvement de tête. Il s'assit juste derrière le rouquin et Ulysse suivit son ami. Morgan passa le cours entier à fixer Noah de dos.

Pourquoi est-ce qu'il ne faisait rien ? Quand bien même Noah serait gêné, il ne disait même pas bonjour à Ulysse. Ce qui n'était pas dans les habitudes du roux qui restait toujours poli et souriant. Contrarié au possible, Morgan commença à s'acharner sur son pauvre stylo qu'il maltraita. Il passa ensuite ses nerfs sur sa feuille, la froissant alors qu'il essayait de gommer. Cela le mit d'autant plus sur les nerfs.

-Calme mon pote, chuchota le blond qui remarquait le comportement étrange de Morgan.

-Vas-y ta gueule, le rembarra Morgan qui n'avait qu'une envie : être seul.

Ulysse comprit que ce n'était pas le moment de déranger son ami, bien qu'il ne comprenait pas son attitude inhabituelle. Pour être tout à fait honnête avec lui-même, Morgan ne la comprenait pas non plus. Il aimait tout maîtriser, ce n'était pas nouveau. Ne pas avoir de réponses à ses questions l'énervait au plus au point. Mais alors être ignoré, par la personne qui était supposée être la victime de son jeu malsain, c'était le pompon sur la Garonne !

Son sang ne fit qu'un tour lorsqu'à la sonnerie de fin de cours, Noah sortit dans les premiers, accompagné de la jeune asiatique. Cette dernière releva la tête, adressa un sourire poli à Ulysse et Morgan, puis continua son chemin avec son meilleur ami.

-Putain, même elle, elle nous a regardé ! S'exclama Morgan les yeux exorbités en se tournant vers le blond.

-Euh... ouais ?

-Noah nous a littéralement ignoré.

-Il a le droit, non ?

-Par ce que tu penses que c'est bien pour nous qu'il se foute de nous regarder, ou de venir nous parler ?

Ulysse fronça les sourcils et ramassa ses affaires éparpillées sur la table.

-Mec, faut vraiment que tu te calmes. C'était pas toi hier, qui me parlait d'arrêter ?

-Quoi ? J'ai jamais...

-Non, mais tu l'as fortement suggéré, le coupa le blond.

Ulysse soupira, se leva et posa une main amicale sur l'épaule du noiraud.

-Faut pas s'énerver pour ça, ok ? Lui dit Ulysse avant de repartir.

Comme s'il était dans une position assez supérieure pour lui donner des exemples ! Outré, Morgan rangea à son tour ses affaires, lança un regard noir à une pauvre seconde qui se trouvait sur son chemin et rejoint son prochain cours.

Le noiraud pensait s'assoir à côté de Noah en italien. C'était sans compter l'intervention de Julian. Le rugbyman attrapa son bras et le tira à la table du fond.

-Mec, je suis dans la merde ! Commença le brun s'en se donner la peine de sortir ses cahiers.

Le free runner s'affala sur sa chaise, porta son sac sur ses genoux et laissa tomber sa tête sur la table. Les problèmes de Julian étaient toujours surfaits. Le genre de problèmes qui se réglaient en un claquement de doigts, mais que le rugbyman prenait un malin plaisir à prolonger. Une fois, Julian avait "sans le faire exprès", laissé trainer des restes de joints dans la voiture de ses parents. Il s'était ensuite empressé de téléphoner à Morgan pour qu'ils puissent trouver une solution et un mensonge potable à donner à ses parents.

Selon Morgan, Julian se délectait de la peur, des erreurs, de la noirceur des gens. Si cela ne tenait qu'à lui, il ne trainerait plus avec lui. Julian était le genre de personne toxique, qu'il valait mieux ne pas fréquenter. Enfin, bien entendu, Morgan pensait tout autrement lorsque les deux jeunes hommes se retrouvaient en soirées. Ils étaient la paire d'inséparables, qui foutait le bordel le plus total. Parfois, c'était à qui boirait le plus. D'autres à qui baiserait le plus. Ils s'étaient tous les deux amusés à embrasser des filles en couple, pour voir la réaction de leur petit copain.

Isak les avait prévenu qu'un jour, ils auraient le droit à un tour du destin. Du karma, négatif bien sûr. Retour à l'envoyeur. Mais le noiraud et le brun ne risquaient rien. Ils ne tenaient à rien. Rien, c'était tout ce qu'il pouvait leur arriver en retour.

-Et en plus c'est le bac blanc la semaine prochaine, continua Julian sans se rendre compte qu'il avait complètement perdu Morgan dans les tréfonds de ses pensées.

Le mot "bac blanc" fit sursauter Morgan, qui se redressa brusquement sur sa table. Ses yeux croisèrent ceux du professeur d'italien, qui le fusilla du regard. Morgan baissa la tête, ne voulant pas se faire réprimander une nouvelle fois.

-Je fais quoi ? lui demanda alors Julian.

Morgan tourna la tête vers son ami, cligna des yeux plusieurs fois, puis la sonnerie retentit. Le noiraud ne s'était absolument pas rendu comte qu'une heure entière s'était déroulée. Julian l'avait dit lui-même, le bac blanc était la semaine prochaine. S'il commençait à arrêter de prendre ses cours en notes, il était assez mal parti.

-Je sais pas... on en reparle après, ok ? Fit Morgan en tapant sur l'épaule du brun.

Le noiraud se leva d'un bond, laissa ses affaires en plan sur sa table et dû presque courir pour rattraper le rouquin qui s'était déjà enfui.

-Noah ! S'exclama-t-il pour que le tacheté s'arrête.

Comme il l'avait souhaité, le jeune homme s'arrêta puis se retourna vers lui. Noah lui adressa un sourire qui lui semblait sincère. En quelques pas, il rompit la distance qui les séparait.

-Ça va ? Demanda Noah de manière nonchalante en tendant son poing pour saluer le free runner.

-Euh... ouais, ouais, répondit Morgan entrechoquant leurs poings, tu viens avec nous ?

Noah regarda derrière Morgan, et baissa les yeux. Il empoigna les lanières de son sac à dos nerveusement, commençant à jouer avec et à se mordiller l'intérieur de la joue.

-Non désolé. J'ai envie de manger avec mes amis.

Le noiraud fronça les sourcils, de plus en plus perplexe.

-On est pas amis ?

-Si... je crois... Je veux parler de mes vrais amis. Enfin Linh, Gab, Damien, quoi.

-Ah ouais. Tes vrais amis... répondit Morgan assez contrarié.

Habituellement, il aurait lancé une petite remarque taquine au rouquin. "Ça veut dire qu'on est faux ?" ou un truc dans le genre, pour le gêner. Pourtant, sa mâchoire se crispa et il serra les poings.

Noah fit un petit mouvement de tête étrange et un sourire gêné tout aussi crispé que la mâchoire de Morgan. Le tacheté s'éloigna de nouveau, faisant soupirer le noiraud. Il ne comprenait absolument ce qu'il faisait de mal avec lui ! En général, il réussissait à draguer une fille en seulement quelques minutes, voire quelques secondes lorsqu'elles sont déjà retournées par l'alcool. Voilà pourtant une semaine que Morgan ramait avec lui. Et en plus, il l'ignorait complètement depuis qu'il connaissait son identité d'inconnu.

Morgan ferma les yeux, se forçant à respirer calmement. Il retourna dans la salle de classe où ses affaires n'avaient pas bougées. Il remarqua alors la présence d'Ulysse, devant la porte de la salle de classe.

-C'était quoi ça ? Lui demanda le blond qui fronçait les sourcils.

-Ça quoi ?

-Ta conversation à demi-mots, avec le petit roux ?

-J'en sais rien ! S'exclama Morgan de plus en plus agacé.

Et le comble, c'était qu'il n'en savait vraiment rien. Ulysse hocha la tête, attrapa le sac à dos de Morgan et le glissa sur son épaule, à côté du sien.

-Qu'est ce que tu fous ? S'énerva de nouveau le free runner qui n'était pas d'humeur à plaisanter.

-Je te force à te bouger le cul, allez, allez, allez !

Forcé de faire avec, Morgan suivit le nageur devant le portail de leur lycée, où les attendait déjà Julian, Adam et Isak. Les trois sportifs leur firent une reflexion sur leur lenteur. Morgan préféra éviter de croiser le regard de Julian, qui avait dû le voir partir à la poursuite du tacheté.

Toujours sur les nerfs, Morgan suivit le mouvement de ses quatre amis jusqu'au snack dans lequel ils avaient pris l'habitude de manger chaque midi depuis leur entrée en première. C'était le seul moment de la journée où ils pouvaient tous se retrouver et partager un moment ensemble. Morgan et Ulysse étaient tout les deux dans la même Terminale ES, alors qu'Adam s'était retrouvé privé de son meilleur ami dans une autre classe d'économie. Isak et Julian étaient dans une classe scientifique différente.

Morgan ne se prêta pas au jeu de la conversation. Il préféra rester de son côté, sous le regard perplexe de ses amis. Il fut le premier à rentrer dans l'enceinte du bâtiment scolaire. Il allait se diriger vers la classe qu'il allait avoir ensuite, lorsqu'il croisa Noah.

Le rouquin lui sourit timidement, puis son regard s'accrocha sur quelqu'un derrière lui. Morgan fit volte face, et constata que cette personne que Noah regardait, était Ulysse. Le plus grand fut assez surpris de voir sa proie se diriger avec assurance vers son ami. Curieux, Morgan resta dans le couloir, se cachant derrières quelques casiers. Il n'était pas dupe, il savait bien que ça ne servait à rien de se cacher ainsi, il était bien trop grand et costaud pour. Morgan feignit alors d'attendre son ami en plongeant ses yeux sur son téléphone portable. Morgan tendit l'oreille, et attendit.

-Salut, fit Noah assez timidement.

-Oh, Noah ! S'exclama son ami à l'apparence heureux de voir le rouquin, t'étais pas avec nous à midi, tu m'as manqué. J'ai pas arrêté de penser à toi.

"Mais quel hypocrite !" ne put s'empêcher de penser Morgan qui lui, avait vraiment pensé à Noah durant le repas.

-Ah... dis, je voulais te demander un truc.

Morgan se retint de rire en remarquant que Noah avait complètement balayé la remarque d'Ulysse. La suite pouvait être interessante.

-C'est toi ? Reprit Noah.

Un petit silence s'installa entre les deux jeunes hommes. Morgan essaya de respirer le moins fort possible. Il voulait disparaitre dans les murs, se camoufler pour être aussi discret qu'un caméléon, et continuer d'écouter cette conversation.

-Moi qui ?

-Lui, continua Noah imperturbable.

Ne pouvant voir la scène qui se déroulait à quelques mètres de lui, Morgan ne put que deviner ce qu'il se passait. Et il s'avéra que son intuition était correcte, lorsqu'il entendit la suite de la conversation.

-Tu parles avec un inconnu ? Non, c'est pas moi, désolé... Par contre, je veux bien ton numéro, fit Ulysse qui voulu rebondir sur ses pattes.

Pile à ce moment là, leur professeur arriva devant la salle de classe. Un sourire triomphal aux lèvres, Morgan sortit de sa prétendue cachette. Il se place derrière Noah, de manière à ce que le petit roux puisse sentir sa présence derrière lui.

-Ulysse, on doit y aller.

Noah ne se retourna pas, surement trop intimidé et gêné d'avoir pensé qu'Ulysse avait été cet inconnu avec qui il parlait. Morgan se demanda comment le tacheté en était venu à cette conclusion. Enfin, peu importait, Noah ne l'évitait pas par rapport à leurs messages.

Ulysse adressa un sourire charmeur à Noah, puis se détourna de lui. Morgan allait faire de même, lorsqu'une idée lui vint en tête.

Le noiraud attrapa le bras de sa proie et le retourna le plus lentement que sa force lui permettait.

-Tu seras là ce soir ? Demanda Morgan avec un doux sourire aux lèvres.

-Ce soir ? Oh ! Oui, répondit Noah qui comprit que le noiraud faisait allusion à la salle d'art plastique.

-Oui, répéta le plus jeune qui se rappela alors qu'il tenait le bras du rouquin entre ses mains, s'cuse...

Noah pinça ses lèvres, sourit timidement à Ulysse derrière lui, puis s'en alla en tirant sur ses boucles rousses.

-La course continue ? Demanda malicieusement Ulysse qui rentra en premier dans la salle de classe.

-Je ne vais pas m'arrêter en si bon chemin, lui répondit-il.

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