Chapitre 7

Aux premières lueurs de l'aube, je n'ai toujours pas réussi à fermer l'œil de la nuit. Mon insomnie vient du fait que dès que mes paupières se ferment, . . . je le vois, . . . lui, . . . son regard, . . . je sens ses caresses sur ma peau. Bref, impossible de trouver le repos. Je me lève sans bruit et réajuste la couverture sur Erin qui dort comme une vraie petite marmotte. Je lui laisse un petit mot et rentre chez moi.

Arrivée à la maison, je constate qu'Hanna a bien profité de sa soirée car son lit n'est pas défait. Je souris mais j'espère quand même qu'elle n'a pas oubliée qu'elle avait cours ce matin.

Avant de passer à la salle de bain pour prendre ma douche, je choisis tranquillement ma tenue du jour. Après quelques hésitations, j'opte pour une jupe plissée marine, et un haut en dentelle écru. Je file sous la douche. Ce retour à ma vie me permet de redevenir moi – même après cette folle nuit.

Une fois habillée, maquillée très légèrement comme à mon habitude et coiffée, je glisse mes escarpins dans mon sac et mets mes converses. Il est plus tôt que d'habitude mais j'ai envie, enfin besoin de marcher avant d'être opérationnelle pour le travail. Avant de claquer la porte de la maison, je prends mon thermos de café, ma veste en jean et mes clés.

Je flâne tranquillement dans les rues de mon quartier de Brooklyn. Je passe par le petit parc derrière et regarde les passants et les travailleurs. Car même à une heure aussi matinale, le quartier ressemble à une vraie petite fourmilière. Chacun semble avoir une tâche, un but à accomplir. Cette promenade me vide complètement la tête.

Je suis des plus sereine quand je passe les portes du poste. Tout m'indique que je vais passer une bonne journée . . . j'en suis sûre . . . enfin presque aurais – je du ajouter. . . ou encore pas du tout aurait été plus proche de la réalité.

Comme tous les matins, je dépose mes affaires dans mon casier, salue tout le monde avec un sourire. Mais ce matin il y a quelques choses qui cloche . . . comme une tension sous-jacente. Mais je secoue la tête pour chasser cette idée saugrenue et retrouver ma bonne humeur.

En fait cette idée n'était pas si saugrenue que cela, et elle devient l'évidence même quand je croise le regard d'Harry. Je crois que je ne l'ai jamais vu aussi furax. J'avoue que je n'aimerais pas être celui ou celle à l'origine de cette colère. Je lui souhaite d'ailleurs bien du plaisir pour affronter le grand Harry Walker dans cet état. Je m'apprête donc à poursuivre mon chemin en souhaitant bon courage à celui à l'origine de cette fureur . . . mais peine perdue.

_ Hailly dans mon bureau . . . tout de suite, hurle – t – il à pleins poumons.

Je me fige sur place ainsi que la presque totalité du poste de police. Je me mets à trembler mais sans raison, je ne peux pas être à l'origine de sa colère. Je n'ai rien fait de mal. Je me dirige vers son bureau comme une adolescente qui serait convoquée dans le bureau du principal. Je souffle un bon coup et entre dans le bureau d'Harry.

_ Oui, qui y a – t – il ? Demandais – je calmement en entrant dans son bureau.

_ Assieds toi, me répond – t – il froidement en me désignant le siège en face de lui.

J'en avais la confirmation, je ne l'avais jamais vu aussi furieux. Même la fois où Erin et moi avions été arrêtées ivres au volant de la voiture familiale des Walker avec de fausses cartes d'identité. Bref la total quand on a seize ans.

Je m'assois bien sagement en face de lui en lissant les plis de ma jupe. Je lève les yeux vers lui en attendant la suite.

_ Hailly, est – ce que tu m'as bien compris lors de notre dernière discussion, commence – t – il froidement sans préambule.

_ Oui, Harry mais pourrais – tu être plus précis car j'avoue que je suis un peu perdue là . . . J'ai l'impression que tu es en rogne contre moi et je pense n'avoir rien fait pour cela.

À mes paroles, il se lève brusquement repoussant son fauteuil qui heurte violemment le meuble situé juste derrière. Il contourne son bureau et se dirige rapidement vers la porte qu'il claque brutalement me faisant sursauter au passage. Il s'approche de moi, m'obligeant à mettre la tête en arrière pour le regarder dans les yeux.

_ Que t'ai – je dit à propos des Jensen ? Me crache – t -il au visage les traits déformés par la colère.

_ De ne pas les fréquenter, répondis – je comme une enfant ayant fait une bêtise en m'enfonçant dans mon siège.

_ Et . . . poursuit – il toujours énervé mais à la vue de mon regard, je vois qu'il essaie de se calmer.

_ Et quoi Harry ? Répondis – je sur la défensive. Cette fois c'est moi qui monte dans les tours. Harry a beau se considérer comme mon père, il ne l'est pas. Je ne suis plus une petite fille sans défense. Je ne suis pas une idiote et je sais ce que je fais . . . enfin la plus part du temps.

Il fait volte face et me crache au visage.

_ Je t'ai vu hier soir, . . . à l'exposition d'Erin.

Soudain, un frisson d'effroi me parcours l'épine dorsale. Mon cerveau se met à tourner à plein régime, qu'avait – il pu voir, . . . uniquement ce qui s'était passé pendant l'exposition car quand . . . enfin quand . . . nous étions seuls . . . enfin je crois . . . merde, de toute façon je n'avais pas vraiment le temps de tergiverser.

_ Et qu'as - tu vu ?, une simple discussion informelle entre deux adultes. Rien de plus. Pourquoi n'es – tu pas venu nous saluer ?

Cette fois, c'est lui qui est mal à l'aise. Je n'avais rien fait de mal, enfin, . . . cette partie de ma vie ne le regardait pas. J'avoue que je ne me reconnais plus du tout. Je ne lui avais jamais parlé comme ça, mais je n'en pouvais plus d'être maternée, considérée comme une petite fille incapable de prendre la bonne décision.

_ J'étais juste passer féliciter Erin, . . . et tu sais très bien à quel point je ne supporte pas la famille Jensen. Je ne voulais pas faire de scandale à sa soirée . . . Mais là n'est pas le plus important, reprend – t – il plus calme.

_ Alors où est problème, et pourquoi es – tu si froid et énervé ? Demandais – je à bout.

Harry se dirige vers le meuble derrière son bureau et se saisit d'un dossier. Il me fait signe de m'installer à la table de réunion et étale devant moi quatre photos. Chacune de ses photos montre un homme, le visage en bouilli pour avoir été tabassé à mort.

Ces photos sont à la limite du supportable, je les repousse violemment vers Harry.

_ Non Hailly, regarde les ! Me crie – t – il dessus.

_ Pourquoi, me montres – tu cela, je ne comprends rien, m'énervais – je à mon tour mais surtout ne voyant pas où il voulait en venir.

_ Ce sont les hommes qui ont attaqué Hanna, . . . et voilà ce que les Jensen leur ont fait après les avoir utilisés, poursuit – il toujours énervé.

_ Si ce sont vraiment les hommes qui ont agressé Hanna, . . . et bien ils ont eu tout ce qu'ils méritaient, répondis – je froidement.

_ Non mais tu t'entends parler Hailly !

_ Quelques chose m'intrigue Harry, tu as dit que ces hommes avaient agressé Hanna. Comment es – tu si sûr de cela ? Si sûr que les Jensen ont quelque chose à voir là dedans ? Demandais – je cette fois sur la défensive.

_ Des gars du poste central avec qui ton père et moi avions travaillé me rendent de petits services, en souvenir du bon vieux temps. Ils savent que je suis à l'affût de tout ce qui concerne cette famille . . . et tu sais très bien pourquoi ! Termine – t – il abruptement.

_ OK, admettons pour les Jensen, mais pour Hanna, comment peux tu être sûr qu'ils s'agissent bien de ces gars là, dis – je en me levant en ayant assez d'être la parfaite petite fille docile.

À la vue du changement d'expression sur son visage, mon sang se glace dans mes veines. Non il n'avait pas fait ça . . . il n'avait pas osé . . . je la protégeais depuis la mort de nos parents de ce monde là. Je le fusille du regard.

_ Ne me dis pas que tu lui as montré ces horreurs, dis – je en désignant les photos encore étalées sur la table, ne me dis pas que tu as osé interroger Hanna alors qu'elle est encore bouleversée par toute cette histoire, hurlais – je à mon tour.

Comprenant qu'il est allé beaucoup trop loin Harry baisse les yeux et reprend avec une voix plus douce essayant de m'amadouer.

_ Hailly écoute, plaide – t – il en avançant doucement vers moi.

Mais c'est trop tard, il a dépassé les bornes, je ne lui laisse pas le temps de terminer et quitte son bureau en lui disant.

_ Non Harry, cette fois c'est trop, je prends ma journée, n'essaie pas de m'appeler, terminais – je en claquant la porte de son bureau derrière moi.

Au moment où je regagne mon casier afin de récupérer mon sac, tous les regards sont rivés sur moi. Jamais Harry et moi ne nous étions donnés ainsi en spectacle. Ils me regardent tous comme s'ils ne me connaissaient plus. Je fais taire les discutions sourdes d'un seul regard. En fait non, ils ne me connaissaient pas, on ne touche pas à Hanna. Je refuse qu'on la fasse souffrir, pas après ce que nous avions vécu. Après la mort de nos parents, je m'étais jurée de la protéger envers et contre tout.

Une fois hors du poste, je m'appuie contre le mur en brique rouge du poste et essuie rageusement les larmes silencieuses qui roulent sur mes joues. Je me sentais seule, perdue. Comment Harry avait – il pu faire cela, celui que je considérais comme un pilier depuis la mort de notre père, nous avait trahi.

Il savait à quel point Hanna était fragile depuis que nous étions seules. Même si elle était joyeuse et enjouée, il y avait toujours cette blessure au fond d'elle. Hanna est une belle jeune femme épanouie, mais même si elle ne se rend pas compte, cet équilibre est encore fragile. Et Harry le savait pertinemment. Alors pourquoi . . . pourquoi prendre un tel risque, lui faire du mal . . .

J'envoie un sms à Hanna afin de savoir où elle est et si elle est seule, . . .

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Hanna où es – tu ? Réponds moi stp, je suis inquiète.

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Pas de réponse

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J'ai vu Harry et je lui ai dit ce que je pensais de lui et de ce qu'il avait fait.

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Je suis à la maison.

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OK j'arrive

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Hailly . . . panique pas mais Ashton est avec moi.

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Pas de soucis, je dois lui parler de toute façon.

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Le trajet vers notre maison ne m'a jamais paru aussi long, je courrais presque. Quand notre foyer est en vue, je pousse un soupir de soulagement en voyant la grosse cylindrée d'Ashton dans notre allée. Au moins, Hanna n'est pas seule, et après tout c'est lui qui l'avait sauvée de ces quatre brutes. Bizarrement, j'ai l'impression que quoi qu'il ait pu se passer ou se passera, Ashton sera toujours là pour elle, pour la soutenir.

Quand j'entre dans le salon sans bruit, je vois Hanna qui dort en boule sur le canapé et Ashton qui la regarde tendrement en lui caressant les cheveux. Je me racle la gorge pour signaler ma présence m'en voulant de rompre leur bulle. Ashton réajuste la couverture sur Hanna qu'il couve du regard et me rejoint dans la cuisine pour que nous puissions discuter. C'est moi qui romps le silence la première.

_ Merci Ashton, dis – je simplement, merci de ne pas l'avoir laissée seule.

_ De rien, . . . et toi comment tu vas ? Me demande – il gentiment.

_ Confuse, inquiète, énervée, agacée, . . . bref un trop pleins d'émotions face à la situation mais je vais gérer, répondis – je calmement, je voudrais juste éclaircir quelques points.

_ Tu veux en parler maintenant ? Me demande – t – il en dansant d'un pied sur l'autre, je le sens mal à l'aise alors qu'il n'a rien fait de mal.

_ Non, . . . mais j'aimerais que tu restes avec elle. Tu l'apaises et elle aura besoin de toi, dis – je simplement.

_ Je sais, . . . elle m'a tout expliqué, tout ce que vous avez vécu, me répond – t – il sincèrement peiné des dires de ma petit sœur.

_ Oh, fis – je surprise, elle n'en avait jamais vraiment parlé à quelqu'un, . . . elle a vraiment confiance en toi, . . . s'il te plaît Ashton, . . . ne la trahit pas, elle ne le supporterait pas, terminais – je à bout, fatiguée de ce que cette situation faisait ressortir.

_ Hailly, je . . . je . . . je tiens vraiment à elle, me dit – il rougissant.

Je saisis l'opportunité qu'il m'offre, même si j'en voulais à Harry, ce qu'il m'avait dit au sujet de l'agression d'Hanna n'était pas tombée dans l'oreille d'une sourde. Je me place devant lui et plonge mon regard gris dans ses yeux verts.

_ Alors dis – moi la vérité Ashton. Est – ce que toi ou un membre de ta famille a quelque chose à voir avec l'agression d'Hanna ? Demandais – je avec calme et sincérité.

Ashton baisse les yeux pendant plusieurs secondes qui me semblent durer une éternité, puis quand il me regarde à nouveau, j'y lis une expression que je ne lui connais pas et que je n'arrive pas à définir. J'allais lui demander de me répondre quand enfin, il prononce ces mots qui me transperce le cœur et me glace le sang.

_ Tu devrais parler calmement avec mon frère, me répond – t – il simplement.

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