Chapitre 25

« La conscience, c'est cette tranquille petite voix que personne ne veut entendre : C'est pour ça que les choses vont mal de nos jours ! »
Pinnocio

PDV Anna

Mes sens sont masqués, ma tête me tourne. Hors du temps et de l'espace, je sens... je sens toutes ces sensations transportant mon plaisir au-delà du possible.

Ses lèvres flambent les miennes. Elles happent des mouvements secrets sur ma peau rosée, s'épuisent à baiser ma bouche, à mordiller la peau délicate de mes lèvres. Elles se désirent, se veulent, s'assouvissent entre elles...

Sur ma peau frémissante, se forment de petits points plus communément appelés frissons. Aussi nombreux que les sensations qui se bousculent en moi, je me sens tomber, tomber, tomber...

La chute risque d'être brutale, mais le sucre de sa peau ne m'y fait plus penser.

L'ivresse et le désir forment un brasier ou mon âme prend un goût d'incendie. Il s'embrase, brûle, saccage tout sur son chemin...

Nous nous embrassons. Lentement. Tellement lentement. Mais avec tellement de puissance et d'intensité en même temps. C'est langoureux, doux, et ça monte, ça monte tellement...

Son goût est aussi sucré que son odeur, et lorsque je me rappelle le nombre de filles qu'il a dû embrasser, mes gestes se font plus brutaux. Je mords sa lèvre, tords sa langue dansant avec la mienne, passe ma main dans ses cheveux et tire dessus... Il grogne doucement, et passe son bras autour de ma taille. Collés, nous ne faisons qu'un. Nos corps ne sont espacés que d'un étroit passage, et je ne peux plus respirer sans que son doux parfum ne parvienne à ruisseler telle une cascade dans mes narines.

Puis soudainement, tout s'arrête.

Nous sommes interrompus par un klaxon derrière la voiture dans laquelle nous sommes toujours installés. Dean se fige, et retire ses lèvres des miennes sans pour autant briser notre contact visuel.

Sa bouche glisse le long de ma peau, jusqu'à se poster devant mon oreille qui frémit doucement.

— Moi qui pensais que tu étais un ange, murmure-t-il doucement. En réalité, tu embrasses comme une diablesse Annabelle...

Et cette fois-ci, il se détache complètement de moi. Plus rien ne nous connecte. Il s'est rassis à sa place de conducteur, et regarde devant lui. Plus de contact physique ou visuel.

Je ressens alors un vide, un froid s'emparant de mon corps pourtant chaud et haletant.

Quelques secondes s'écoulent avant que je ne finisse par sortir de la voiture. Je referme la porte derrière moi, et frissonne lorsque l'eau glacée de la pluie entre en contact avec ma peau brûlante.

Dean démarre sa voiture et s'en va, en me laissant seule. Ma respiration se calme petit à petit, mais se hache de plus en plus lorsque je me rends compte de ce qui vient de se passer.

Je viens d'embrasser Dean.

J'ai perdu le contrôle le temps de quelques secondes, mais qui ont été suffisantes pour me faire flancher. Et durant ces quelques secondes, j'ai succombé au désir vorace qui me lacérait le bas-ventre.

Car oui, cette fois-ci, nier ne me mènera à rien si ce n'est le déni : Je suis attirée par Dean. Incontestablement, et irrévocablement. Lui le savait, et il a su trouver mes points faibles pour me faire craquer. Il savait pertinemment que je finirais par flancher...

— Oh mon Dieu... soufflai-je sous la pluie.

L'eau dégoulinant le long de mon corps, je me rends compte que ce que je viens de faire risque de porter des séquelles en moi.

Car oui, en embrassant Dean avec tant de ferveur, j'ai trompé Raph.

Un sanglot me prend soudainement lorsque cette vérité éclate. Dean n'a jamais cessé de me dire que Raph me trompait, mais maintenant, les rôles s'inversent. Et mon copain n'a rien demandé. Je pleure doucement en me maudissant intérieurement.

"La chute risque d'être brutale"... Ça c'est le cas de le dire.

— Bordel mais je suis tellement conne ! m'écriai-je en prenant ma tête entre mes mains.

Certes, je suis attirée par lui, et même si j'essayais de vivre dans le déni le plus total, c'était inévitable. Pourtant, j'étais intérieurement sûre d'une chose : jamais rien ne se passera entre Dean et moi. Pourtant, je viens de passer la première étape en fondant sur ses lèvres.

Ses lèvres...

Sans même que je ne m'en rende compte, mes doigts effleurent doucement la peau fine de mes lèvres rougies par le baiser enfiévré que j'ai échangé avec Dean. Je me remémore sans même le contrôler tous ses baisers, tous les contacts que nous avons eus... et la boule de feu qu'est mon bas-ventre s'embrase une énième fois, tandis que mon sang s'enflamme.

Finalement, après quelques minutes à rester sous la pluie, je m'abrite chez moi, l'esprit et le corps chamboulé...

« — Moi qui pensais que tu étais un ange. En réalité, tu embrasses comme une diablesse Annabelle... »

* * *

261 moutons... 262 moutons... 263 moutons...

Les moutons viennent et repartent dans mon esprit sans arrêt... Beh beh...

Pour être plus directe, je n'arrive pas à dormir. D'après mon téléphone, il est actuellement 4:28 du matin. Génial tout ça.

Honnêtement, et même si j'en ai honte, c'est bien à cause de Dean et de son regard brûlant que je ne parviens pas à trouver le sommeil. Dès que je ferme les yeux, j'ai l'impression de revivre notre baiser... sans arrêt... comme les petits moutons dans ma tête.

Néanmoins, mon insomnie ne m'a pas servi qu'à ça, et j'ai quand même réussi à réfléchir un peu. Je me suis promis solennellement que plus jamais -je dis bien plus jamais, je ne referais d'erreur de la sorte. C'est à la seconde même où j'ai perdu le contrôle que tout a dérapé, donc c'est que dont j'aurais besoin : du contrôle, pur et dur. Et si je me dois de ne plus m'approcher de Dean pour parvenir à garder ne serait-ce que ça, alors je le ferais.

Il n'a pas le droit de débarquer dans ma vie du jour au lendemain, et d'y foutre le bordel. J'ai une famille, des amis, et le plus important ; j'ai un copain. Un copain aimant que j'ai trompé.

À cette pensée je déglutis longuement, et me masse le front. Mais qu'est-ce qui m'arrive en ce moment ?! Un seul être humain ne peut pas me mettre dans de tels états dans un laps de temps si court ! C'est inhumain !

Mais en me rappelant des baisers affolants qu'il m'a donnés, de son regard topaze, de sa bipolarité... de lui, je me rends compte que dans tous les cas, Dean est inhumain. Pas besoin d'en faire toute une dissertation, car c'est un fait réel. Une vérité générale.

Je soupire en me disant qu'à cause de cette stupide perte de contrôle, je risque d'y perdre une amitié que je commençais à aimer. Car oui, j'aime bien l'amitié que je partage -partageais, avec Dean. Elle est atypique, étrange, mouvementée... mais avant tout, elle est unique et je sais que jamais je ne pourrais vivre quelque chose de similaire.

Sauf que les amis ne s'embrassent généralement pas, et ne sont pas attirés l'un par l'autre ! s'énerve ma conscience.

Et pour une fois, je suis d'accord avec elle. C'est donc pour ça que tout doit cesser.

Un autre soupir m'échappe, et je me roule dans ma couverture. Attaquée par une soudaine montée d'ennui, j'attrape ma tablette auparavant posée sur la table de chevet, et vais sur Instagram. Je surfe un peu partout, regarde quelques vidéos ASMR, lis quelques actualités people comme celle du nouveau couple entre Julia Jones et Ryan Alvarez... Puis soudainement, une poussée de curiosité me prend : est-ce qu'il a Instagram ?

Sans même que je ne passe par le filtre de mon cerveau, mes doigts se mettent à taper son nom sur la tape de recherche, et c'est avec surprise que je constate qu'il a bien un compte sur ce réseau social. Son compte compte plus de 8K abonnés ! Je ne pensais pas qu'il était si connu... Je constate qu'il a publié en tout une soixantaine de posts, dont la plupart sont des posts de lui avec des filles toutes plus belles et chaudes les unes que les autres...

Dean étendu sur une plage avec une blonde qui lui embrasse le cou à travers son t-shirt...

Dean affalé sur un fauteuil avec une rousse assise en une position plutôt osée sur ses genoux...

Dean entouré de strip-teaseuses en tenues légères...

Dean faisant semblant de prendre une brune en levrette...

Des photos et encore des photos toutes plus osées les unes que les autres, avec des descriptions du style : « 👅🍆🍑🔞💦 ». Malgré tout, je constate qu'étrangement, il ne se trouve jamais torse nu sur ses photos... Mon cœur se serre au fur et à mesure des photos que je regarde, et je finis par éteindre et poser légèrement brutalement ma tablette à sa place initiale.

Je me rends rapidement compte qu'en réalité, du point de vue de Dean je ne suis qu'une fille parmi des millions d'autres sur son tableau de chasse. Si ça se trouve, il n'a pas ressenti la même chose que moi lorsque nous nous sommes embrassés... Peut-être que je me fais trop de films.

Agacée par le flot de pensées qui me prend, je me force à dormir, en espérant ne pas recroiser le regard topaze de Dean lundi au travail...

Enfin bref, où en étais-je ? Ah oui, donc... 264 moutons... 265 moutons...

Et je sombre.

* * *

Quatre jours.

Quatre jours depuis que Dean n'a pas remis les pieds au café. Venant de lui, ce n'est pas très choquant, mais étant de nature paranoïaque, c'est comme s'il s'était absenté trois mois.

Je sais, je sais... Je m'étais promis de ne plus penser à lui et de ne plus le fréquenter, mais ce n'est pas pour autant que je me fiche de lui. Un petit signe de vie de sa part ne serait pas de refus, je l'admets.

Mais au fond, ce n'est pas cela que je crains le plus... J'embrasse si mal que ça ?

Enfin, ce que je veux dire, c'est que... il n'est pas revenu travailler depuis notre, hum... baiser. Donc il m'arrive de supposer qu'il n'est pas venu travailler parce que notre baiser l'a dégoûté au point qu'il ne souhaite plus remettre les pieds dans un endroit où je me trouve.

Ça craint, j'en conviens.

En dehors de ça, si je devais récapituler ma semaine, sachant que nous sommes jeudi, deux mots pourraient me suffire : calme et... étrange.

Calme parce que Dean n'était pas là pour foutre le bordel dans ma vie en organisant des fêtes clandestines, ou en... m'embrassant. Hum.

Et étrange parce que justement c'était beaucoup trop calme ! Je dois admettre que depuis que Dean Gonzalès est entré dans ma vie, je m'étais habituée à un train-train quotidien plutôt mouvementé. Donc c'est assez étrange de revenir à la normale.

Mais ce n'était pas étrange seulement pour ça, mais également parce que depuis que j'ai embrassé Dean, j'ai l'impression que chaque fois que je croise l'un de mes proches, ce dernier m'insultera pour la bêtise que j'ai faite. C'est-à-dire embrasser le diable. Vous n'imaginez même pas comment je me sentais mal en compagnie de mon copain... que j'ai trompé.

Je déglutis devant toutes les sombres pensées, et astique le sol du café. La salle est complètement vide sachant qu'il est presque vingt-trois heures, et que nous fermerons d'une minute à l'autre. Une fois la serpillère passée, je m'active à nettoyer les tables sous l'œil admiratif de Linda qui boit un énième café sur le comptoir du bar.

Soudainement, quelqu'un habillé d'un sweat-shirt à capuche voilant son visage entre dans le café. Je me presse à le prévenir :

— Désolé monsieur mais nous sommes fermés-

C'est alors que cet homme retire sa capuche, laissant alors apparaître de jolis cheveux bruns, ainsi qu'un visage d'ange aux yeux noisette.

Bordel, Dean est là.

Ne m'attendant absolument pas à cette venue, je serre fortement mon balai entre mes mains en rougissant. Je n'ose le regarder et sens mon cœur battre la chamade sous ma poitrine.

Pourquoi t'es-tu absenté ?
Je crois qu'on devrait arrêter tout ça... l'amitié et tout...
Ce qui s'est passé dans ta voiture ne se reproduira plus jamais, donc tu peux l'oublier.
Désolé de t'avoir embrassé...

J'avais préparé tant de fois ce que je comptais lui dire, mais maintenant qu'il se trouve devant moi, mes cordes vocales semblent... bloquées.

Sans me saluer, Dean se dirige d'un pas pressé vers Linda qui le dévisage un instant avant de s'avancer à son tour vers lui. Ils discutent un moment, mais sont placés trop loin de moi pour que je puisse comprendre quelque chose. Cela me semble néanmoins être une demande de la part de Dean. Mais étrangement, à en voir les têtes qu'ils affichent tous les deux, cela ne semble pas très joyeux. Les traits de Dean sont tirés, et prouvent sa fatigue ainsi que son... angoisse ? Étrange, Dean n'est pas du genre à montrer si facilement ses faiblesses. Il est plus du genre à afficher une tête nargueuse et maline, à l'ordinaire. Un instant, je me demande ce qui a bien pu lui arriver durant ces quatre jours d'absence pour qu'il se trouve maintenant dans un tel état...

De son côté, Linda semble également tendue. Apparemment, la demande de Dean est assez délicate, et je crois percevoir un « je ne pense pas que cela soit possible... », de sa part et à l'égard du brun qui ne flanche pas, et insiste d'autant plus. Finalement, après quelques secondes où je n'ai su quoi faire ni bouger, Linda finit par soupirer en acquiesçant. Alors qu'elle se dirige vers la caisse, Dean semble légèrement rassuré, et c'est seulement maintenant que je me décide à bouger et à me déplacer vers Linda pour plus d'explications. Même si au fond, la personne que je souhaite aller voir est Dean, cela ne me semble pas une bonne idée en vue de comment il semble préoccupé. D'ailleurs, même lorsque je suis passé devant lui, il ne m'a pas remarqué, étant donné qu'il s'affaire à faire les cent pas tout en se tirant les cheveux. La boule d'anxiété me taraudant le cœur s'intensifie davantage à cette vue.

Une fois à la hauteur de Linda, je constate avec stupeur qu'elle se dépêche de fourrer des billets venant de la caisse dans un sac bon marché. Je la questionne immédiatement : 

— Que se passe-t-il ?! chuchotai-je afin que Dean ne nous entende pas.

— Pour être honnête avec toi Anna, moi-même je ne sais pas.

Je lance un coup d'œil à Dean et constate qu'il ne nous prête nullement attention. Finalement, j'ose lui demander : 

— Que t'a-t-il demandé ?

Mon regard se perd sur les dizaines de billets qu'elle tient dans sa main, et même si elle ne me l'a pas encore confirmé, je comprends de quoi il est question.

— De l'argent, finit-elle par avouer, comme si elle craignait d'en dire trop. Une somme plutôt bluffante...

Mes yeux s'écarquillent devant son regard perdu.

— Je... quoi ?! Pourquoi cela ?! Et combien t'a-t-il demandé ?!

— Encore une fois, je ne saurais te le dire. Il s'est montré très clair avec moi, et ne voulait pas m'expliquer la raison du pourquoi. C'est assez sournois, étant donné que ce sont presque 500$ qu'il me demande.

Je perds littéralement pied devant ses révélations.

— Et toi... t-tu lui donnes... tout ça ! dis-je en pointant nerveusement les liasses de billets. Comme ça ! Normalement, tu n'es pas censée faire cela pour un employé.

Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai cette mauvaise envie qu'elle ne donne pas cet argent à Dean. Pas que je l'envie ou autres, mais c'est seulement parce que j'ai ma drôle d'impression que toutes ces liasses de papiers verts sont la source même d'ennuis... de très mauvais ennuis.

Pourquoi demanderait-il une telle somme à Linda, et à une heure si tardive ? Surtout qu'il s'est absenté durant quatre jours sans nous donner aucunes nouvelles, et qu'il semble tout sauf de bonne humeur. Rougissant légèrement, elle passe sa main dans ses cheveux d'un faux blond.

— Mais je le sais bien Anna, je sais bien que je ne devrais pas faire ça, mais... il sait se montrer très convaincant lorsqu'il le veut.

— Que t'a-t-il dit ? continuai-je, d'un ton à la fois anxieux et curieux.

— Oh, rien de bien méchant. Seulement que dans ce cas de figure-ci, je devais essayer de faire ça en tant qu'amie, et non en tant que patronne. Et même lorsque je lui ai dit que je retirerai cette somme de son salaire du mois arrivant, il a accepté sans broncher.

Mes bras se croisent autour de ma poitrine, et je sens alors mon cœur battre fortement dans ma cage thoracique. Je suis consciente que je suis entrain de me mettre dans des états pas possibles, alors qu'il n'y a pas mort d'homme... mais je ne peux pas m'en empêcher. Non. Je ne peux m'empêcher d'avoir ce mauvais pressentiment qui fait monter en moi un tout plein de questions et d'anxiété.

— Il est bizarre aujourd'hui, souffle-t-elle en s'approchant de moi, comme pour ne pas que le concerné ne l'entende. Il est extrêmement... pressé, et m'a forcé à me bouger rapidement. Tout cet argent lui est si important maintenant, qu'il aurait été capable de tout pour que je le lui donne au plus vite.

Linda ne fait que confirmer mes doutes. Dean n'agit pas comme à l'ordinaire, et c'est bizarre. Finalement, elle coupe court à notre discussion, et se dépêche de remplir le sachet de billets étant à la base la recette de cette semaine de travail.

— S'il te plaît Anna, peux-tu le prévenir que je n'en ai plus que pour quelques minutes ?

Sans même que je ne le contrôle, mon cœur se met à tambouriner dans ma poitrine. C'est alors sans un mot de plus que j'acquiesce d'un simple mouvement de tête, et que je me dirige vers l'endroit où se trouve Dean. Bien évidemment, il se trouve toujours dans le même état qu'auparavant lorsque je me place timidement face à lui. Étrangement, Dean ne daigne pas se tourner vers moi, et tape du pied en regardant sa montre toutes les secondes. Finalement, après quelques secondes de silence, je prends mon courage à deux mains et parle :

— Euh... salut, sinon.

Un mot suffira : MINABLE. Facepalm de la mort, là. Moins sereine que moi à ce moment-là, tu meurs.

Dean paraît surpris par ce que je viens de dire, et me dévisage un instant avant de fourrer sa tête dans sa capuche sombre. Un instant, j'ai comme l'impression que c'est pour éviter mon regard, mais je suis certaine que mon cerveau ne fait que me jouer des tours.

— Ouais, salut.

Je fronce les sourcils encore une fois. C'est bizarre... Dean, l'homme le plus chelou de cette planète m'a seulement dit... "salut" ? C'est bizarre oui, surtout que la dernière fois que nous nous sommes vus, ce fût avec nos lèvres collées ensemble. Je frémis en y repensant, surtout que Dean est face à moi maintenant.

— Hum... Linda voulait juste te dire qu'elle n'en aura plus pour très longtemps, lançai-je d'une voix faiblarde, hésitante.

Il arrête de se manger les ongles, et tourne sa tête vers moi. Nos yeux se croisent, et je frissonne. Profondément. Si je ferme les yeux, c'est comme si j'étais capable de ressentir encore une fois le doux contact de ses lèvres sur ma peau, le langoureux contact qui a lié nos yeux pendant si longtemps... 

Sauf qu'il faut que je me ressaisisse !

Je chasse de mon esprit toutes ces sournoises pensées en essayant de me répéter que je dois cesser de penser ainsi. J'ai un copain bon sang. 

Un copain que j'ai trompé.

Cette simple pensée suffit pour calmer mon sang qui s'échauffait. 

— Ok. Merci.

Sa réponse sèche ne m'étonne pas vraiment en vue du comportement qu'il arbore. Néanmoins, je ne peux réprimer ce mauvais pressentiment qui coule en moi. Sans vraiment comprendre pourquoi ni comment, je trouve assez de courage pour ouvrir la bouche et lui parler. Je pense qu'il est maintenant temps de mettre les points sur les « i » par rapport à tout ce qui s'est passé entre nous. Je déglutis longuement, et ne cesse de me tortiller dans tous les sens. Me balançant d'un pied à l'autre, je fais de mon mieux pour trouver un sujet quelconque de discussion.

— Et toi, ça va ?...

— Mmh.

C'est limite s'il ne me tourne pas le dos. Ça m'agace comme ça m'inquiète. Punaise, il est tellement différent d'à l'ordinaire...

... tellement différent de lorsque nous étions dans la voiture. Ensemble.

Mes joues sont sûrement entrain de prendre une teinte rosée, mais je l'ignore afin de le questionner. Bon, quand faut y aller, faut y aller... 

— Ah... T'en as pas l'air, lâchai-je finalement en me mordillant la lèvre inférieure.

Cette fois-ci, Dean dirige son regard vers le mien et me dévisage longtemps. C'est comme s'il se demandait comment je le savais... Mais non ! Je dis n'importe quoi !

— Pourquoi tu dis ça ? me demande-t-il sur la défensive, un sourire énervé sur les lèvres.

Apparemment, ma constatation ne semble pas lui plaire en vue du ton qu'il emploie. Je hausse les épaules en m'approchant doucement vers lui, une main posée sur le bar qui nous sépare. 

— Je... C'est juste que tu parais stressé. Angoissé. Et cette histoire d'argent, c'est juste...

Aucun mot ne sort de ma bouche, étant donné que je ne saurais décrire ce que je pense de cette situation. 

... de la folie ? N'importe quoi ? Une mauvaise idée ?

— Et tu peux bien me dire en quoi ça te concerne, hein ? me crache-t-il au visage.

Je baisse les yeux sous son regard de braise. Je ne comprends pas pourquoi il s'énerve ainsi... Pourtant, je parle doucement, et reste très évasive au contraire de d'habitude où je suis très indiscrète lorsque je lui pose des questions.

Peut-être que c'est justement ça qui l'énerve alors.

— En rien, c'est juste que je me suis inquiétée, me justifiai-je finalement, les joues rouges de honte. C'est bizarre de te voir dans de tels états, toi qui es d'habitude si confiant. Surtout que tu t'es absenté pendant quatre jours... On est amis, et la dernière fois que nous nous sommes vus, c'était...

Je me coupe moi-même dans ma phrase en me torturant la lèvre sous la honte énorme qui me tombe dessus. 

... après que nous nous soyons embrassés.

Tandis que j'essaye de trouver mes mots, je sursaute lorsque Dean se met à rire. Fortement. C'est limite un rire forcé.

Je n'aime pas ce rire. Il est tellement bizarre par rapport au rire qui sort de sa bouche lorsqu'il est relaxé et réellement amusé... Celui-là est une réelle symphonie digne des plus grands maestros face à celui qu'il lâche en ce moment même.

Et au moins, celui-ci me prouve que les prochaines paroles de Dean ne risquent pas d'être très agréables.

— Après quoi ? Après que je t'ai embrassée et ai failli te baiser comme un vieux chiffon dans ma putain de bagnole si une putain de voiture ne nous m'avait pas coupés ? Hein ? C'est ça que tu voulais dire, Annabelle ?

Ce n'est pas qu'une simple claque qu'il vient de m'asséner, mais un réel coup de revolver en plein cœur. Au fond, même si je nie la raison de ma douleur, je sais exactement pourquoi je prends si mal ses paroles. C'est limite encore plus douloureux lorsque je me l'avoue.

C'est minable de se dire qu'en réalité, il n'a pas vraiment ressenti ce baiser comme moi je l'ai ressenti. Vivre dans le déni est limite moins douloureux.

Même si mon teint est très certainement devenu pâle, Dean ne se gêne pas pour me mettre six pieds sous terre.

— Et maintenant quoi ? Tu penses que maintenant que t'as enfoncé ta langue dans ma bouche, tu peux tout te permettre avec moi, et que j'allais me soumettre comme une putain de petite merde devant toi ? Que tu allais devenir... attends, comment tu disais déjà ?...

Il rigole soudainement, comme s'il venait enfin de trouver ses mots, et qu'en se rendant compte de sa phrase, il se rendait également compte que cette dernière était d'un ridicule affolant.

— « Ma petite-amie » ?

Cette fois-ci, c'est un rire tonitruant, fort et douloureux qui lui échappe. Il se tord d'un rire mesquin, forcé, et c'est une réelle torture de l'entendre. Alors que je me recroqueville sur moi-même sous les humiliations de Dean, j'aperçois Linda du coin de l'œil, nous observant d'un regard attristé. Apparemment, même si elle ne semble guère apprécier les paroles de Dean, elle craint de s'imposer dans notre discussion, n'osant très certainement pas froisser l'esprit sur les nerfs de Dean. Autant qu'il n'y ait ici qu'un punching-ball, et que ce soit moi. Comme tout le temps.

— Tu n'es rien pour moi, OK ? Il me semble de plus que je te l'ai déjà fait comprendre auparavant. Ouais, on est amis, mais ne te crois pas privilégiée des autres car tu resteras toujours au même niveau qu'eux, c'est irrévocable. Tu sais que je veux qu'on baise comme des malades, ça change pas, mais c'est juste parce que t'es bonne, OK ?

Même si je prie de toutes mes forces pour ne pas faire ce qui risque de se passer, je ne peux réprimer les petites larmes qui se forment dans le coin de mes yeux.

— Et franchement, autant te le dire maintenant ; tous les mecs qui te disent que tu es belle, que tu leur plais, c'est juste des conneries. Ils veulent seulement te baiser, comme une merde. Comme toutes les autres meufs avant toi, et leur seule solution pour y parvenir, c'est de te faire des louanges. Nous les gars, on est tous pareils, on est tous des putains de merdes. Donc arrête d'espérer quoi que ce soit, de te croire comme étant le centre de notre petit univers, car pour l'instant, tu n'es que le centre de l'univers de notre putain de queue.

Sans que je ne puisse le contrôler, mes lèvres se mettent à trembler, et une larme coule le long de ma joue. Le tout dans un silence de mort.

Est-ce que je m'attendais à ce qu'il soit aussi méchant avec moi ? Oui, ça ne m'étonne pas étant donné que ce n'est pas la première fois.

Mais est-ce que je m'attendais à ce que cela fasse aussi mal ? Non, oh non.

Pas une once de regret ne passe dans son regard lorsqu'il m'aperçoit entrain de pleurer. Au contraire, il paraît plutôt exaspéré par mes pleurs.

— Putain, et c'est qu'elle pleure maintenant ? Je te pensais pourtant un peu plus forte d'esprit que ça Annabelle. Tu me déçois.

Comme pour faire cesser cette torture, Linda apparaît soudainement dans mon champ de vision. Alors que je m'attendais à ce qu'elle prenne ma défense, elle donne simplement le sac de billets à Dean, sans un mot. Bien évidemment, même si elle est sûrement venue ici afin de stopper le brun dans ses paroles, elle ne se risquera pas à passer à son tour à l'abattoir. 

Les yeux du portoricain et moi ne se quittent pas une seconde, quand finalement il se détache de ce contact afin de compter les billets dans le sac. Le café se trouve alors plongé dans un silence de mort, empli de tension, de rage, de stress et de tristesse. Regardant droit devant moi, je sèche finalement mes larmes d'un revers de la manche sous le regard peiné de Linda qui est elle aussi figée.

— Le compte est bon, lâche finalement Dean en dirigeant son regard vers notre patronne. Merci, Linda.

Elle ne lui adresse qu'un mince et froid sourire, mais il semble s'en ficher. Apparemment, il paraît un peu plus calmé niveau colère, et c'est donc pourquoi l'angoisse semble avoir refait surface en lui. Enfin, il tourne les talons vers la sortie, et avant de plonger dans l'obscurité de l'extérieur, il se tourne vers nous. Vers moi. Je tressaille.

— Il faudra t'armer d'un caractère plus fort si tu veux survivre dans cette putain de société où certaines fois, le diable règne en personne.

Et c'est sur ces dernières paroles que Dean quitte les lieux. Je reste figée devant la porte du café, les joues légèrement humides, et le regard vide. Au fond, je me dis qu'il fallait que je m'y attende, et qu'il faut maintenant que je m'habitue à ce genre de paroles de la part de Dean. Mais non, c'est toujours plus dur et douloureux, ça s'amplifie même avec le temps. 

Durant les quelques secondes qui suivent le départ de Dean, des millions de questions se bousculent dans mon esprit, comme des boules de billard qu'on frappe.

Mais une question en particulier me tracasse.

Que cache-t-il ?

Et je sais pertinemment que ce n'est pas en le questionnant que j'aurais des réponses. Quelques fois, il faut bien monter ses manches afin d'atteindre ses objectifs. Mais d'un autre côté, je me dis que je ne dois pas faire ce que je souhaite, car je sais très bien comment cela a fini la première fois où j'ai essayé d'entrer dans son cercle intime.

Soit je le suis, et fais en sorte de découvrir ce qu'il cache. À mes risques et périls.

Soit je reste sage, finis de nettoyer le café, et rentre paisiblement chez moi, bien qu'en gardant cette boule d'angoisse au fond de mon cœur.

C'est alors que Linda se décide pour parler : 

— Est-ce que ça va Anna ? me demande-t-elle d'une voix douce, en s'approchant lentement vers moi avant de poser sa main sur mon épaule froide.

Je tourne ma tête vers elle afin de la regarder, et ses yeux s'attristent davantage lorsqu'elle constate que mon visage est mouillé, et se trouve sûrement d'une pâleur effrayante.

— Oh Anna, je suis sincèrement désolée, me console-t-elle en essuyant de ses petits doigts mes quelques larmes. Il n'avait pas le droit de te cracher tant de méchanceté à la figure, et j'aurais dû intervenir plus tôt... Mais bon, tu le connais. De plus, il était si étrange aujourd'hui... Ça m'inquiète. C'est comme s'il était tellement pressé qu'il aurait pu mourir s'il n'avait ce qu'il souhaitait dans les temps donnés. Comme s'il se trouvait... en danger.

Et c'est sans comprendre comment ni pourquoi que ces simples paroles secouent tout mon système nerveux.

« Comme s'il se trouvait... en danger ».

Dean est peut-être en danger, qui sait ? Cette pensée taraude davantage l'angoisse me tiraillant le bas-ventre, et c'est alors sans hésiter que je me décide : 

Il faut que je le suive, que je sache la raison de son comportement. Que je fasse quelque chose pour lui, car j'ai la drôle d'impression que c'était cela qui brillait dans ses yeux lorsque je lui ai proposé notre amitié : 

Un appel à l'aide.

* * *

Dans ma voiture, j'essaye du mieux que je le peux de suivre la trace de Dean.

Il y a maintenant cinq minutes, je me trouvais toujours dans le café, les larmes aux yeux, et sous le regard attristé de Linda. Maintenant, je suis dans ma voiture, les phares éteints malgré l'obscurité, afin de ne pas me faire remarquer, tout en essayant de suivre la silhouette noire que j'avais cru apercevoir. Pour moi, c'est évident qu'il s'agit de lui.

Pour être honnête avec vous, je ne sais pas ce qui me prend. Je ne le sais plus. Je me suis battue intérieurement pour ne plus l'approcher, lui et cette aura attirante qu'il dégage, afin de ne plus céder à ce qu'il souhaite que je fasse, car je ne peux me le permettre.

Mais voilà, il suffit qu'il vienne foutre toutes mes motivations en l'air avec de simples phrases, pour que je me démène à le retrouver, sans vraiment avoir une idée bien précise dans la tête. 

C'est alors que je semble l'apercevoir encore une fois. Il se trouve plutôt loin de moi, à une centaine de mètres environ, toujours avec sa capuche sur la tête afin de ne pas se mouiller à cause de la pluie, et le sac d'argent dans les bras. Il bifurque soudainement dans une petite ruelle, sombre et très certainement étroite.

Pour être honnête avec vous, je reste plutôt sceptique par l'endroit où il m'a emmenée. On se trouve dans les quartiers pauvres et mal fréquentés de Seattle, le genre que Diane m'a strictement interdite d'aller à cause des nombreux voyous qui traînent. De plus, le fait qu'il se dirige dans ce genre de ruelles m'inquiète d'autant plus... 

Finalement, je décide de garer ma voiture et d'y sortir afin de finir le chemin à pied étant donné que je ne parviendrais jamais à rouler ici. La pluie froide s'abat brutalement sur moi lorsque je sors, et je serre mes bras autour de moi afin de me réchauffer. Bien sûr, je ne porte qu'une chemise en flanelle avec un simple jean et des bottines. Je ne suis vraiment pas prévoyante. Je marche alors vers cette fameuse ruelle, et lorsque je m'y engouffre, un long frisson me prend. C'est plutôt glauque... Les murs en pierres sont dégradés, et le sol est sale. Je marche un bon nombre de fois sur des déchets ou des bouteilles d'alcool se trouvant par terre, et sursaute au moindre bruit que j'entends. Ça paraît bien pathétique, mais je ne peux m'empêcher d'avoir peur bien que je sois complètement seule. 

Après quelques mètres à marcher dans cette ruelle, je perçois petit à petit des bruits. Des cris. Mon sang se glace alors, mais plus j'avance, plus je me rends compte qu'il s'agit en fait de cris d'hommes.

Des hommes certainement plus âgés que moi, en vue de leur rauque voix.

Des hommes encourageant quelque chose, comme s'ils étaient devant un match de football.

Puis finalement, je tombe sur la source de tous ces cris en tournant à droite de la ruelle. Mon sang se glace, se pétrifie et cesse de couler dans mes veines lorsque je constate l'endroit dans lequel je me trouve. Et dans lequel se trouve également Dean.

C'est la pagaille. D'un côté, des hommes tatoués, sales et baraques crient, des bouteilles d'alcool ou des joints en main. D'un autre côté, d'autres font des paris. À ma droite, certains sont entrain de trafiquer des choses que je ne préfère par connaître, mais lorsque je les aperçois se filer des sachets blancs en douce, je comprends alors qu'ils trafiquent de la drogue.

Comme je l'ai déjà dit, c'est la pagaille. Mais rien de tout ça ne m'intéresse réellement, car toute mon attention est rivée vers un endroit en particulier. Il se trouve même qu'il s'agit du centre de l'attention de presque tout le monde ici.

« Mais où se trouve Dean ? », me diriez-vous.

Oh mais c'est simple, il est juste en face de moi. Sous les regards de tout le monde, au milieu d'un ring improvisé, et face à un homme faisant le double de sa taille. Les bras faces au visage, les deux hommes se tournent autour un moment, tout en se regardant avec haine.

Puis rapidement, je comprends ce qui se passe ici. Ce que trafique en réalité Dean. La raison pour laquelle il était sur les nerfs tout à l'heure et voulait de l'argent. 

Il participe à des combats clandestins.

5999 mots / Non corrigé

* * *

HELLO MES PETIT(E)S COQUINES ! 🔥

TIN TIN TINNNN ! EH OUI, VOUS COUPE ICI HAHAHAHA ! 😱

oUi, DeAn PaRtIcIpE à DeS cOmBaTs ClAnDeStInS !!! SuRpRiSe !!!

En dehors de ça, que pensez-vous de ce chapitre ?! 😊

- ENFIN CE PUTAIN DE BISOUS ! ON S'EST FAIT DÉSIRER NON ?! 💋

- Croyez-vous qu'Anna réussira-t-elle à s'éloigner réellement de Dean ? Surtout après qu'elle ait admis son attirance pour lui ? 👀

- Un changement de comportement plutôt radical de la part de Dean ? Pourquoi avait-il besoin de tout cet argent à votre avis ? 💵

- Et pour finir, que va-t-il se passer dans le prochain chapitre ?! 👑

Enfin bref, j'essaye de vous poster la suite le plus rapidement possible ! 😘

de HamidaSwan, qui vous kiff. Teehee.

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