Chapitre 17
PDV Anna
Nous finissons par nous rendre dans un restaurant à proximité du café et de l'université, que je connais bien en vue du nombre de fois où je m'y suis rendue. Le trajet à pied se trouvait étrangement silencieux entre Dean et moi, et le seul moment où nous avons discuté, c'était pour nous disputer puisque Dean souhaitait manger au McDonald's. Même lorsque nous sommes plus ou moins en "paix", nous sommes obligés de nous faire la guerre...
Les lieux du restaurant sont très chaleureux, et la nourriture qui y est servie est extrêmement bonne. J'y suis allée avec Raph, pour la première fois, et c'était vraiment bien.
Et maintenant, tu y amènes Dean... Quelle honte tu fais à ton copain, Annabelle... me murmure venimeusement ma conscience.
Je me secoue la tête, légèrement honteuse. C'est faux, Dean et moi ne sommes qu'amis, et rien de plus. Je ne fais honte à personne en me rendant ici avec lui.
Nous nous installons toujours aussi silencieusement à une table, et je constate avec surprise que Dean guette tous les recoins du restaurant, légèrement anxieux... Eh bien dis donc, aujourd'hui, c'est ton jour de "Dean vulnérable" ! Je chasse cette idée, et le questionne ensuite.
— Un problème ?
Il tourne sa tête vers moi, et se gratte nerveusement l'arrière du crâne. C'est comme s'il n'osait pas avouer son problème, par peur de passer pour ridicule...
— Disons que... Je ne pense pas avoir les moyens pour manger ici, finit-il par avouer.
Ma bouche s'ouvre légèrement, et je fronce les sourcils. Je finis par le rassurer en souriant.
— Ne t'inquiète pas, je peux payer. C'est vrai que l'argent n'est pas... un très grand problème pour ma famille.
— Ok.
Aussi rapidement que l'éclair, toute angoisse quitte son visage, et un sourire narquois étire ses lèvres rosées. Plus bipolaire que lui, tu meurs. Un serveur vient à notre table pour prendre nos commandes, et je décide alors de prendre une salade de César. Pas de pizza pour aujourd'hui... Dean, de son côté, prend non pas un, mais deux menus burgers. Je rigole légèrement lorsque je le vois hésiter en fronçant les sourcils devant la carte. Maintenant qu'il sait qu'il ne paira pas, il se lâche ! Moins gentleman que lui, tu meurs !
Pour ce qui en est des boissons, il tourne finalement son choix vers de l'eau, alors que de mon côté, je prends du Cola. Le serveur part, et Dean pose un regard amusé sur moi.
— Quoi ? lui demandai-je alors qu'il me dévisage avec amusement.
— C'est juste que je ne m'attendais pas à du Coca venant de ta part... C'est beaucoup trop sucré, calorique, et mauvais pour la santé ! Voyons Annabelle !
Je rigole, et il se joint à mon hilarité. En fin de compte, il est plutôt supportable...
— Oui, d'accord, j'admets que ça n'est pas très bon pour la santé, mais c'est vraiment mon péché mignon ! Mais bon, je n'en bois pas souvent, car si ma belle-mère venait à me surprendre à boire du Cola-
— Du quoi ? me coupe-t-il soudainement, un grand sourire fendant ses lèvres.
Je fronce les sourcils, pas sûre de comprendre pourquoi il me demande cela.
— Bah, du Cola-
— Du COLA ! s'exclame-t-il avant d'éclater de rire. HAHaha ! Qui dit Cola en 2019 ?! C'est du Coca bordel de merde !
Il lâche un rire tonitruant, et la moitié des personnes présentent aux alentours, se retournent vers nous pour fusiller Dean du regard. Malgré la gêne qui fait rougir mes joues, je ne peux m'empêcher de rire à mon tour. Je dois admettre que c'est assez rare d'entendre Dean rigoler aussi... enfin, vous voyez quoi, naturellement. C'est assez troublant, même si ça reste agréable.
— Ah-ah-ah ! C'est hilarant Dean ! Mais dois-je te rappeler le nombre de calories que tu viens de commander, et qui, même si j'en doute fortement, finira dans ton estomac ? Ça, c'est limite pire qu'une simple canette de col-... Enfin, de Coca.
— N'en doute pas, tigresse. Je vais bien tout manger. Disons que mon corps extrêmement musclé et puissant a besoin de beaucoup, pour en... donner beaucoup.
Il dit ça en me lançant un regard coquin, et je rougis légèrement. Quel pervers, celui-là...
— Sinon, tu disais quoi à propos de ta belle-mère ? me demande-t-il subitement.
Le serveur nous amène nos boissons, et je fronce les sourcils devant sa question. Au début, je ne vois pas où il veut bien en venir, puis je comprends qu'il fait allusion à ce que je disais auparavant à propos du Coca. Pourquoi me pose-t-il cette question ainsi et maintenant ? Dean n'est généralement pas du genre à se questionner et s'intéresser sur les autres. Du moins, lorsqu'il le fait, c'est plus pour en tirer profit pour lui.
Ou au pire, tu peux simplement lui répondre, et cesser de te tracasser pour un rien ? me demande ma déesse intérieure -AKA la partie gentille de mon esprit.
— Oh ! Eh bien, je disais que ma belle-mère me tuerait si elle me surprenait à boire -non du cola, mais du Coca.
Il rigole légèrement, avant de prendre une longue et inquiétante gorgée d'eau.
— Je suis ravi de constater que c'est en ma compagnie que tu commets des "belle-mère-pêchés".
Il affiche un rictus, et je lève les yeux au ciel.
— Parle-moi de toi, lâche-t-il par la suite en croisant ses grandes mains ensemble. Car je suppose que si nous voulons entretenir une relation "amicale", nous nous devons de nous connaître un minimum.
Encore une fois, il me surprend. Je ne pensais pas qu'il serait si impliqué dans cette amitié -pas très naturelle à mon goût certaines fois.
— Ma vie n'est pas très intéressante.
— Je n'en doute pas, réplique-t-il avant de glousser.
Je le fusille du regard, et il se calme en affichant un air innocent pour me laisser la parole.
— Eh bien, je m'appelle Annabelle Rose Walker, et j'ai dix-neuf ans, le taquinai-je, ce qui semble le faire rire. J'ai toujours vécu à Seattle, et n'ai jamais vraiment voyagé hors des États-Unis. Je vis en ce moment avec mon père, Chris Walker, qui est homme d'affaires, ainsi qu'avec ma belle-mère Diane Walker qui est également femme d'affaires. Ma mère est décédée il y a cinq ans, lorsque j'avais quatorze ans, mais je te l'ai déjà dit. Je suis en couple, et Raph est juste le meilleur des copains.
— Des barres.
Je le fusille du regard.
— Tu sais Dean, si nous devenons amis, il faudrait que tu cesses toutes ces remarques désobligeantes sur mon couple.
— Je ne dis que la vérité.
Je me retiens de lui dire de se foutre sa vérité bien profondément là où je pense, et me contente de rouler des yeux.
— Enfin bref, je disais ? Ah oui. Je suis en fac de médecine, et j'ai... peu d'amis. Néanmoins, le peu d'amis que j'ai sont géniaux ! Alex, et Élisa. Je préfère m'entourer de peu de personnes qui comptent beaucoup pour moi, que toute une promotion qui ne m'aime pas vraiment.
Dean applaudit doucement des mains devant ma petite autobiographie, et rigole légèrement.
— C'est vrai que ta vie est vraiment inintéressante.
Je hausse les sourcils en affichant une mine choquée. Dean glousse encore, et le serveur arrive finalement, avec notre commande -ou plutôt celle de Dean en particulier, à bout de bras. Nous commençons donc à manger, coupant notre conversation. Dean fonce tête baissée sur ses burgers, et en dévore un à la vitesse de la lumière.
— Tu dis que ma vie est inintéressante, mais que vaut la tienne ? lui demandai-je finalement, en reposant ma fourchette.
Dean avale avec une lenteur inquiétante son morceau de burger, et me dévisage un moment. Une petite tâche de sauce mayonnaise se trouve sur la commissure de sa lèvre, ce qui me déconcentre un instant. C'est vrai qu'il est beau cet enfoiré, note ma déesse intérieure en se vantilant avec sa main.
— Qu'est-ce que tu sous-entends ? me demande-t-il en fronçant légèrement les sourcils.
— Eh bien, à ton tour de me raconter des choses sur toi.
Ses sourcils se froncent d'autant plus, et il pose assez brutalement son burger sur son assiette. Je trésaille, et le dévisage. Qu'est-ce qui lui prend ? Il plisse les lèvres, mais finit par se lancer :
— Je m'appelle Dean Gonzalès, et j'ai vingt ans. Je suis né au Puerto Rico, mais j'ai déménagé à Seattle il y a peu de temps. J'aime baiser, boire, et les meufs. Voilà, c'est ma vie.
J'en reste bouche bée. Il est sérieux là ? Il ne m'apprend pas grand-chose, ça c'est sûr... Et en plus, cette courte description ne fait qu'en ajouter sur ma curiosité.
— Pourquoi tu as quitté le Porto Rico ? C'est un chouette pays pourtant ?
Il serre légèrement sa mâchoire, et lâche un rire amer.
— Bah, ce n'est pas si "chouette" que ça.
— Pourquoi ? continuai-je sur ma lancée, ce qui semble l'agacer.
— Bah... Parce que !
Ok, il est sur les nerfs. Mais comment pouvais-je ne serais-ce que savoir que cela le mettrait en rogne ? Il est juste tellement bipolaire que je me perds.
— Ok...
Nous continuons de manger en silence. J'ai l'impression que c'est toujours comme ça entre nous ; on rigole bien, et la Deanobipolarité arrive et détruit tout sur son passage, ne laissant que du silence, et des bruits de... masticage. Eurk, je déteste ça, et Dean est tout sauf discret.
— Punaise, DEAN ! Tu veux bien arrêter de faire autant de bruit en mangeant ?!
Il se fige soudainement, la bouche complètement pleine, et me regarde d'un air innocent. Il essaye donc d'avaler l'énorme morceau de burger qu'il a dû prendre, en silence. Mais bien évidemment, il n'y arrive pas, et est à la limite de s'étouffer -toujours en silence. J'éclate donc de rire, et il reste toujours silencieux. Il est limite mignon cet enfoiré, ajoute ma déesse intérieure.
— Non mais, ne fais pas en sorte de mourir non plus !
Nous finissons par rigoler, ce qui me perturbe. Voilà qu'à mon tour, je deviens bipolaire... On dirait qu'il déteint sur moi.
— Enfin bref, on peut jouer à un petit jeu au pire, proposai-je soudainement.
Dean s'essuie la bouche en fronçant les sourcils. Il finit par sourire malicieusement, mais je ne comprends pas pourquoi.
— Vérité ou conséquence ? propose-t-il, l'œil pétillant de malice.
— Roh mais non ! Ne me parle littéralement plus jamais de ce jeu à la noix.
Il glousse, tandis que je me calme pour lui expliquer.
— Non, je parlais plus d'un jeu auquel je jouais avec mon meilleur ami, Alex, lorsque nous étions petits. Pour faire simple, après l'école, on se retrouvait toujours au parc pour manger notre goûter, discuter et jouer. Et on avait cette petite habitude de se demander "quelles furent la pire et la meilleure chose qui t'étant arrivées aujourd'hui", sachant qu'on n'était pas dans la même classe.
Les lèvres de Dean s'étirent en un sourire, qui est assez contagieux puisque je souris bêtement à mon tour.
— Sérieux ? rigole-t-il en haussant les sourcils. Vous aviez vraiment une enfance de merde si vous jouiez à ce truc débile. Vous n'étiez pas des gosses très nets.
Je rigole doucement en me passant une main dans les cheveux.
— Je sais, on était plutôt matures pour notre âge, c'est certain. Néanmoins, cela nous a permis de forger d'autant plus notre amitié-
— Oui, bon, bla-bla-bla... Mais où tu veux en venir avec ce jeu ? En quoi ça a un rapport avec nous, là ?
Ma conscience tilte légèrement sur le mot "nous", qu'il vient d'employer, pour une raison que j'ignore étrangement.
— Eh bien, je me disais qu'on pouvait le revisiter, histoire d'en apprendre plus sur l'autre... Au lieu de se demander le pire et le meilleur de notre journée, on pourrait littéralement se questionner sur le pire et le meilleur de notre vie ?
Et étrangement, Dean n'en semble pas ravi. Il se crispe, et sa mâchoire se resserre. Son regard s'assombrit tellement que j'en suis déroutée. Je pensais pourtant que cela l'amuserait...
— Euh... ajoute-t-il, légèrement hésitant.
Bon, au pire, je n'ai qu'à plonger et le lui demander. Peut-être que j'hallucine, et qu'en réalité, il appréciera ce jeu ?
— Alors, quelle fut la pire chose qui te soit arrivée dans la vie ? lui demandai-je alors en me penchant sur la table, les bras croisés.
Ses sourcils se froncent méchamment, et il me lance une sorte de regard préventif. Préventif de quoi ? Je ne fais que poser une question... Malgré le masque de colère qu'il porte, j'ai comme l'impression qu'une multitude de choses inexplicables se bousculent dans son esprit. Et étrangement, ça m'intrigue. Je sais pertinemment que cela semble le troubler, voire l'énerver, mais c'est assez intrigant... En quoi cette question le met-il dans un tel état ? C'est donc avec un esprit curieux et plein de questions, que je continue sur ma lancée.
— Allez, c'est pourtant simple, rappelles-toi !
Je me fige à la seconde même où je pose cette question. Dean me lance très certainement le regard le plus sombre et froid qu'il m'ait été donné de voir avec lui. Il semble monstrueusement en colère, même s'il ne s'agite pas. Ses doigts se serrent en un ferme poing, et il se met à se gratter frénétiquement le "L" du tatouage "L O V E" des phalanges de sa main droite. Je suis confuse.
— Quoi ? Comment ça ? "Rappelles-toi" ? C'est ça que tu ne veux pas que je répète ? lui demandai-je avec confusion.
— Annabelle... Pour l'amour du ciel, boucle-la.
Et sans rien dire de plus, il replonge son nez dans son repas, les nerfs au plus haut, et me laissant pantelante de questions. Je fronce les sourcils. Mais qu'est-ce qui lui prend ? Et puis, comment ça "boucle-la" ? Il n'est pas sérieux là ?!
Alors que je sens la colère pointer le bout de son nez, je respire un bon coup, et essaye de me calmer du mieux que je peux. Ce n'est pas en m'énervant que j'arrangerai la situation. J'ai dû l'offusquer avec ma question, donc je n'ai qu'à m'en prendre à moi-même. Et puis, franchement, je devais m'y attendre... Moi qui souhaite devenir ami avec un personnage comme Dean, il faut que je me prépare au pire !
Je réfléchis afin de trouver un moyen de calmer la tension pesante entre nous, et finis par trouver.
— Moi, je pense que c'était en CM2, lançais-je soudainement, perdue dans mes pensées et mes souvenirs. J'étais vraiment la petite intello de la classe, assez méprisée de tous, et j'avais peu d'amis. Certes, à cette époque, j'avais Alex, mais il n'était pas dans la même classe que moi.
Dean daigne finalement de lever la tête vers moi. Il semble moins en colère qu'auparavant, même si son visage garde toujours une certaine crispation. Ses yeux aussi...
— Et puis, un jour, on travaillait en groupe. Coup de bol, je me retrouve dans le groupe des populaires, qui en passant, m'ignorait comme jamais. Tant que je me contentais de faire tout le sale boulot, ils me laissaient tranquille.
Les lèvres de Dean frémissent doucement et sûrement, ce qui m'encourage à continuer. Ce n'était pas une si mauvaise idée, enfaite...
— Mais moi, j'en avais marre d'être la fille nulle, tu vois ? Du coup, j'ai eu une idée méga-révolutionnaire, qui allait me propulser vers la place de la fille la plus drôle et cool de la classe... voire de l'école même ! Du coup, je me suis dit que j'allais leur faire une petite blague...
— Oh non, rigole Dean en se passant la main dans les cheveux d'un air dramatique.
Je rigole légèrement, et mon collègue affiche cette fois-ci un long sourire. Ses yeux restent scotchés à mes lèvres, en attente de la suite. Bah dis donc, il est vachement bipolaire... Ah oui, je le savais déjà.
— Oui, je pense que tu devines assez bien la suite, en vue de mon humour très mauvais. Du coup, je me suis tournée vers eux, et je leur ai demandé : "Pourquoi il ne faut jamais manger de pissenlits ?... Parce qu'on risque de pisser au lit !".
Dean rigole en secouant doucement sa tête, et je le joins dans son hilarité.
— Apparemment, ça ne les a pas trop fait rire. Mais moi, au contraire, j'étais littéralement pliée de rire. Sauf que, boum, il s'est passé quelque chose que je n'oublierai jamais...
Je laisse couler un petit suspens, et Dean s'impatiente.
— Bordel, craches le morceau !
Une impatiente qui lui est bien unique...
— Eh bien, je me suis littéralement fait dessus. J'étais tellement morte de rire que... voilà quoi.
Dean éclate d'un rire tonitruant, et beaucoup de personnes se tournent vers nous. Je leur lance un regard se voulant excusant du comportement de Dean, en rougissant légèrement.
— Sérieux ? Mais t'étais vraiment pas nette comme gosse toi, se moque-t-il en riant légèrement.
— Oui oui, je sais... Du coup, tout le monde s'est moqué de moi, et ma réputation est devenue encore pire. Enfin bref, on me harcelait et c'était vraiment une année pas cool. J'ai pris beaucoup de temps avant d'en parler à ma mère... Et en vue de son tempérament de feu, elle a bien remonté les bretelles de tous les petits cons qui me harcelaient et m'appelaient "Annapisse". Mais bon, comme j'étais en fin d'année de CM2, ça allait sachant que j'allais tout de suite passer au collège. Voilà ce que je peux considérer comme la pire chose qui me soit arrivée dans la vie.
— Annapisse... Intéressant. Il faudrait que j'aille rendre visite à ce groupe de jeunes, histoire de les féliciter pour ce magnifique nom.
Je lève les yeux au ciel avant de soupirer doucement.
— T'es vraiment con...
Un instant, j'hésite à lui demander de me raconter à son tour quelle fut la pire chose lui étant arrivée dans la vie. Logiquement, cela devrait aller sachant qu'il a bien dû comprendre que je n'attends pas de sa part -même si cela n'empêche pas de taper ma curiosité, la vraie "pire chose lui étant arrivée dans la vie". Du moins, avec ce que je viens de lui raconter, j'espère bien qu'il l'a compris.
Parce qu'il est juste évident que faire pipi sur moi-même n'est pas la pire chose m'étant arrivée dans la vie...
Après quelques minutes de silence où nous continuons notre repas, je finis par me lancer :
— Et... du coup, pour toi, c'est quoi ?
Il lève le visage vers moi, et examine un instant mon expression hésitante. Après un petit moment, il finit par se lancer en soupirant, affichant néanmoins un petit sourire amusé qui me trouble.
— Hum... Je dirais, pour faire simple, que c'était lorsque j'ai baisé une meuf qui a joui seulement après une minute de baise, et qui m'a pissé dessus durant son orgasme. C'était immonde, et je n'ai littéralement pris aucun plaisir.
Simple et efficace. Je rougis et rigole en même temps. Ah ouais, lui c'est littéralement un autre level pour les anecdotes...
— J'ai vraiment la drôle d'impression que toutes nos histoires pourries tournent autour de la pisse... rigole-t-il en se passant une main dans les cheveux.
Nous finissons ensuite notre repas, et commandons des desserts lorsque le serveur arrive. Alors que nous savourons nos soufflés au chocolat -nous avons commandé la même chose, je lui demande :
— Et du coup, c'est quoi la meilleure chose qui te soit arrivée dans la vie ?
Il prend un moment pour réfléchir, et finit par se tourner vers moi en affichant un sourire à la fois triomphant et malicieux.
— Te rencontrer, tigresse.
Je lève encore une fois les yeux au ciel tandis qu'il me lance pleins de bisous volants. Quel gamin...
— Oui bien sûr, je te crois, marmonnai-je en chassant ses bisous de ma main. Plus sérieusement, c'est quoi ? Car sincèrement, je ne pense que ma simple rencontre soit la meilleure chose t'étant arrivée dans la vie.
Il fronce légèrement les sourcils en souriant, comme s'il n'arrivait pas à répondre. Étrange...
— Bah, je n'ai pas vraiment eu une vie toute rose, donc non je ne sais pas trop... Peut-être la première fois où j'ai baisé-
Alors que j'allais lui répondre que tout tourne toujours autour du sexe avec lui, je le vois se couper dans sa phrase. Il fronce fortement ses sourcils et sa mâchoire se crispe.
— Enfaite non, pas ça.
Il se secoue la tête, comme pour chasser un mauvais souvenir étant passé dans son esprit. Cela pique beaucoup trop ma curiosité, mais je m'abstiens de dire quoi que ce soit. En vue de la bipolarité extrême de Dean, je ne souhaite pas vraiment le provoquer par peur de gâcher une bonne fois pour toute notre déjeuner.
— Et toi ? me demande-t-il finalement en posant son menton sur ses grandes mains, après avoir fini son dessert.
Je fais la moue, et fixe un point derrière Dean. Je réfléchis un instant, avant de me confier en rougissant légèrement.
— Euh... Enfaite, je dois admettre que moi aussi je ne sais pas vraiment, avouai-je en enroulant l'une de mes mèches de cheveux entre mon doigt.
— Même pas notre rencontre ? me demande-t-il en me faisant les yeux doux.
Je hausse mon sourcil droit avant de le toiser avec amusement.
— Dois-je te rappeler que tu m'as littéralement lancé un verre d'alcool en pleine face le jour de notre rencontre, Dean ?
Il lève les mains en signe de défaite et glousse légèrement.
— Ouais, c'est pas faux, je l'admets. J'ai vraiment l'impression que nous passons notre vie à nous jeter des boissons en pleine face, rigole-t-il en se grattant le sourcil.
Pas faux, admet ma conscience.
— Ou alors, c'est peut-être pour toi ta vie avant que ta mère crève ?
Ma bouche s'entrouvre de choc, et je fusille des yeux Dean qui ne semble pas comprendre ma soudaine humeur. Je rêve où il vient vraiment d'employer le mot "crève" pour parler de la mort de ma mère ? Je sais qu'il est du genre à être vulgaire mais là... Plus indiscret que lui, tu meurs.
Non, tu crèves, ajoute ma conscience d'un ton hargneux tout en chargeant sa mitraillette de balles.
Je lance mon regard le plus froid à Dean qui me dévisage. Il peut vraiment être con, lui...
— Quoi ? me demande-t-il, l'incompréhension perceptible dans sa voix grave. Qu'est-ce que j'ai dit ?
— Non mais !... Tu le fais exprès ou quoi ? Tu ne te rends vraiment pas compte de ce que tu viens de dire ? "Que ma mère crève" ? Crève ! Excuse-moi, mais je le prends vraiment mal !...
Il fronce le sourcil, ne semblant toujours pas comprendre la raison pour laquelle je lui en veux.
— Bah, et alors ? rétorque-t-il. C'est pas le verbe qu'on utilise qui changera la situation, Annabelle.
Je fronce les sourcils, mais ne préfère pas lui répondre. Dans tous les cas, je n'arrive pas à comprendre son point de vue sur la "situation", j'en suis navrée. Je finis par me lever avant de déposer l'addition sur la table, et de prendre mes affaires.
— Enfin bref, il est l'heure, je dois aller à l'université.
Sans me demander, Dean se lève à son tour, et me suis hors du restaurant. Nous nous dirigeons en direction de l'université en silence. Le vent fouette mes cheveux qui volent dans tous les sens, et je marche en tenant avec force mon sac. Ma jupe se soulève à certains moments, et je rougis lorsque je constate que cela amuse Dean en vue de son sourire en coin. De son côté, il a porté une cigarette à ses lèvres, et ses mains se trouvent enfoncées dans ses poches.
En chemin, je sens petit à petit la colère me quitter. Je n'ai pas à me mettre en colère pour ça... Il a son propre point de vue par rapport à la mort et au deuil, et il m'a peut-être blessé avec ses propos, mais c'est Dean, et il est comme ça. Nous avons passé un repas plutôt sympa, donc autant ne rien gâcher. C'est à moi de ne pas me mettre dans tous mes états à la moindre chose qu'il me dit.
Tu es vraiment pathétique, s'indigne ma conscience en croisant ses bras autour de sa poitrine. Toujours à tout laisser passer... Un jour, ça se retournera contre toi, Walker !
Je lève les yeux au ciel, et c'est soudainement que je me rends compte que nous sommes finalement arrivés. Je me tourne alors vers Dean qui fume encore et toujours. C'est étrange, même s'il fume régulièrement, je n'ai jamais vraiment trouvé qu'il sentait le tabac trop fort, que ce soit son odeur corporelle ou son haleine...
Au contraire, il sent magnifiquement bon... Bon comme un dieu, confirme en se vantilant ma déesse intérieure.
Je rougis soudainement, et me secoue la tête devant les choses déplacées que je peux penser quelques fois... Dean, de son côté, me fixe étrangement, un brin amusé néanmoins.
— Ça va tigresse ? J'ai comme l'impression que tu te secoues un peu trop la tête...
Mon teint déjà rouge passe au cramoisie. Seigneur, moi qui pensais être discrète !
— Ouais, enfin bref... Tu viens ? bredouillai-je en pointant finalement le bâtiment universitaire de mon pouce.
Je suppose qu'il a cours à cette heure-ci, comme moi et un bon gros nombre d'étudiants à l'université.
— Euh... Je ne vais pas en cours aujourd'hui, j'ai des petites... choses à faire.
Je fronce les sourcils. Sérieux ?... J'ai la drôle d'impression qu'il vient rarement en cours celui-là. À chaque fois que je le questionne, il me dit qu'il n'ira pas, et à chaque fois que je le vois dans les alentours de l'université, c'est plus en compagnie de vraies bimbos.
Je lâche soudainement sans même me rendre compte :
— Ah... Et c'est quoi ces petites choses ? Tu vas... baiser des gonzesses ? lui demandai-je, amusée, tout en faisant des mouvements subjectifs avec mon corps en me mordant la lèvre pour blaguer.
Mais au contraire de ce que je pensais, Dean ne rit pas, mais me regarde plutôt assez fixement, une lueur étrange dans le regard. Je pâlis soudainement, en me rendant compte de ce que je viens de faire et dire. Sérieux, je suis si stupide ?! J'ai vraiment dû passer pour une idiote de service !
Un long et pesant silence s'installe alors entre nous, et nous nous regardons, ce qui me gêne énormément. D'autres étudiants déambulent autour de nous, même si j'ai la réelle impression d'être enfermée dans une bulle -de gêne extrême, avec Dean. Le teint mélangé entre la pâleur et la rougeur, je me creuse la tête comme je peux afin de trouver quelque chose à dire pour arranger le malaise que je ressens.
Je lâche encore une fois quelque chose, sans passer par le filtre de mon cerveau :
— Hum... C'est un s-schtroumpfs, qui court, qui court, qui court... et q-qui tombe. Donc du coup, bah il se f-fait un b-bleu...
Je lui lance un regard désespéré, et le vois froncer les sourcils. Il a compris ou quoi ? Et puis, pourquoi ai-je sorti une blague comme ça ?! Et aussi nulle en plus ?!
— Un "bleu", continuai-je en m'enfonçant de plus en plus dans ma gêne. Parce qu'il est bleu... Parce que c'est un s-schtroumpfs...
Annabelle Walker ! Erreur de débutant ! On n'explique jamais une blague ! Bordel de crotte de bique ! me crache ma conscience, transpirante de partout.
Après quelques secondes, Dean éclate finalement d'un rire si fort et puissant, qu'un bon nombre d'étudiants se tournent vers nous. Certains me dévisagent, se demandant sûrement pourquoi une fille de mon genre traîne avec un homme comme Dean. Telle une cascade, je sens ma gêne retomber brusquement, et je peux enfin respirer tranquillement. Aussi satisfaisant qu'un orgasme, ai-je envie de dire.
Sauf que tu n'en as jamais eu ! se moque fortement ma conscience en me pointant du doigt et en lâchant un "haha" similaire à celui de Nelson dans les Simpsons.
— Moi aussi j'ai une blague pour toi, lâche ensuite Dean en s'essuyant les yeux. Qu'est-ce qui fait bleu-rouge-bleu-rouge-bleu-rouge-blanc ?
Il hausse un sourcil, en attente de ma réponse. Je me contente de hausser les épaules, ne connaissant pas la réponse.
— Un schtroumpf qui se branle.
Il lâche un énième rire, et je lève les yeux au ciel, ne pouvant néanmoins pas masquer mon petit pouffement.
— Tout ne tourne qu'autour du sexe avec toi...
Nos yeux se croisent encore une fois, et je rougis devant l'intensité des siens. L'amusement ne brille plus dans ses iris, et c'est quelque chose de bien plus différent... Quelque chose de bien plus lascif... Je regarde donc partout sauf vers lui, et en voyant que les étudiants se font de moins en moins nombreux, je trouve une échappatoire.
— Euh, je crois que je vais y aller, si je ne veux pas finir en retard, bredouillai-je en hésitant à partir en courant ou non.
Je ne sais pas si je lui fais la bise -mauvaise idée connaissant l'esprit légèrement pervers de Dean, si je lui serre la main -un peu trop formel pour cette énergumène, ou rien du tout. J'opte finalement pour le rien du tout, et lui adresse un fin et timide sourire avant de tourner les talons.
Soudainement, je sens la main de Dean s'enrouler autour de mon bras. Il me tire vers lui, et je me retourne subitement. Je croise son regard de braise, et sens alors mon corps prendre feu. Oh oh.
— Avant que tu ne partes, j'aimerais que tu saches quelques petites choses ; si je te vois encore une fois prononcer le mot "baiser", tout en faisant toutes ces gestuelles perverses et en te mordillant la lèvre, je te jure que je te prends sur place, avec ou sans ton consentement.
Un long et puissant feu embrase mon bas-ventre. C'est si intense que c'en est presque douloureux. Je resserre discrètement mes jambes entre elles, alors que mes pensées se bousculent dans mon esprit. Je sens ma respiration se faire plus courte, plus haletante. Je ne sais plus quoi penser, surtout après ce qu'il vient de me dire, après qu'il m'ait regardé ainsi, après qu'il m'ait embrasé d'un simple touché. Seigneur, qu'est-ce qui m'arrive ?! Je dois répliquer, et lui faire comprendre qu'il ne peut penser ainsi, ne peut me dire cela ! Mais ma voix reste bloquée, et sors difficilement.
— Je... quoi ? bégayai-je, les mains tremblantes. Dean, nous sommes amis et-
Puis, je comprends tout. Qu'est-ce que je suis stupide... Je suis sûre que même après notre pacte de paix, Dean souhaite toujours faire ce qu'il m'avait dit lors de la soirée. À cette simple pensée, ma déesse intérieure se réveille, les hormones en feu. Non ! Je ne peux pas penser ça ! Dean peut penser ce qu'il veut, mais jamais je ne ferais ça. Il faut au moins qu'il le sache...
— Dean... Je suis navrée mais, même si peut-être tu souhaites tout cela, je ne pourrais pas faire ça. Je te l'ai déjà dit, mais je ne peux pas coucher avec toi.
— Tu ne peux ou tu ne veux pas ? Car ce sont des choses complètement différentes.
J'ouvre la bouche pour lui répondre, mais me retrouve étrangement dans l'incapacité de le faire... Pourquoi ?
— Dean, ça ne sert à rien de me demander cela car c'est non.
Il me lâche ensuite. À cet instant, je ressens comme un vide, un froid à l'endroit même où se trouvait sa main... Étrange.
— Annabelle, je vais te poser une question. À ton avis, pourquoi le lion est-il le roi des animaux ?
Je fronce subitement les sourcils. Pourquoi me pose-t-il cette question ? Surtout après m'avoir dit tout cela ? Puis, je comprends que ce roi en question, c'est lui. Je réponds alors en prenant mes connaissances.
— Euh... Eh bien, je suppose que c'est parce qu'il est... beau, fort...
Ses yeux se plissent, et il croise ses bras sur sa poitrine en se mordillant légèrement la lèvre inférieure. Ces simples gestes me rendent toute chose.
Il te dévisage ainsi parce que, même si tu l'as déjà remarqué, c'est comme si tu venais de lui dire ouvertement qu'il est beau et fort, idiote ! s'écrie ma conscience.
Et merde... Je rougis, quand soudainement, une idée me vient. Un petit sourire étire mes lèvres, et je le regarde droit dans les yeux.
— Et surtout parce que les lions sont les plus gros prédateurs de la savane, continuai-je en souriant. Sauf qu'avec leur crinière, les mâles se repèrent de loin. Du coup, ils chassent rarement et laissent ce travail aux lionnes. Le lion surveille la scène de loin, et arrive juste pour prendre de force sa part du butin. Bref, comme tout bon roi, il fait travailler les autres pour lui !
Un sourire triomphant étire mes lèvres, et je croise à mon tour mes bras autour de ma poitrine. Dean ouvre la bouche pour parler mais la referme aussitôt, ne sachant pas quoi dire. Eh oui, je t'ai cloué le bec mon gars ! Je pense qu'il a clairement compris que dans ce que je disais, c'était lui le lion, et moi la lionne. Il sourit ensuite, avant de battre l'air de sa main.
— C'est pas faux, mais non ce n'est pas ça. Pour faire simple, le lion est le roi des animaux, car c'est l'animal le plus persévérant et déterminé.
Son regard perd toute trace d'humour, et retrouve sa lueur sensuelle. Je ne souris plus, et me retrouve complètement à sa merci.
— Quand un animal est sur son tableau de chasse... comme une brebis, eh bien, elle aura beau courir et fuir, le lion la retrouvera toujours, et ne s'arrêtera que lorsqu'il n'en fera qu'une bouchée.
Avec sa main, il mime une bouche qui se referme, et ce simple geste met en vrac tout mon système nerveux. Cette fois-ci, je comprends qu'il suppose que je suis la brebis, et lui le lion. Il suppose également qu'il fera tout pour arriver à ses fins avec moi, et qu'il ne fera qu'une bouchée de moi.
La simple pensée de ses dents, sa bouche, ses lèvres et sa langue sur mon corps fait chavirer la boule incandescente de mon bas-ventre. J'entends bien la voix de ma conscience qui m'hurle, me supplie même, de me reprendre en main, mais c'est presque impossible. C'est presque impossible quand Dean Gonzalès vous fixe ainsi, avec ses deux yeux topaze, tout en parlant avec des sous-entendus...
— Pourtant, je pensais être une tigresse, et non une brebis, ajoutai-je de ma voix tremblante.
Sans que je ne comprenne comment et pourquoi, il approche son visage du mien. Ses lèvres humides ne se retrouvent plus qu'à quelques centimètres des miennes, et je ne sais quoi faire ou dire. Je me retrouve paralysée, et lorsque je me rends compte qu'il compte peut-être m'embrasser, j'ai malheureusement envie qu'il le fasse. Mais non, ses lèvres se dirigent vers ma joue, et il y dépose un long et tendre baiser qui m'embrase tout entière. C'est doux, tellement doux et lent, mais tellement bon. Il retire ses lèvres chaudes de ma joue, et les dirige vers mon oreille afin d'y murmurer quelque chose qui me fait frissonner toute entière :
— Eh bien, la partie n'en sera que plus attrayante...
6049 mots / Non corrigé
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Hey les gars ! 😭❤️
Désolé du retard, mais impossible pour moi d'écrire en ce moment ! Ne m'insultez pas, insultez plutôt mes PARENTS ! 😡
Enfin bref, j'espère que vous avez aimé ce chapitre ? Personnellement, c'était juste un plaisir pour moi de l'écrire (surtout que j'ai un nouvel ordi mouahaha) ! 😍
- L'amitié DANNA sera-t-elle possible ? 😱
- Beaucoup de révélations (oupas) sur la vie de nos deux passionnés... Quelque chose à dire ? Des suppositions pour la suite ? 😏
- MMMMH C'EST ENCORE UNE FOIS BIEN CALIENTE CETTE FIN ? HEHEHE ! 🔞🍑🤯
Enfin bref, j'espère poster dans les temps la prochaine fois, et je vous fais plein de bisous !! 💕❤️
*Juste, on en parle de ce nouveau système d'histoires payantes sur Wattpad ?! Et aussi du "WattpadPremium" ?! De la GROSSE MERDE de mon côté ! Ça enlève tout le côté accessible de Wattpad, et c'est même dommage pour les auteurs dont les histoires vont devenir payantes, sachant que moins de personnes ne pourront les lire (parce que sérieux, ils ont vraiment cru qu'on allait payer pour une histoire, alors qu'il y en a des milliers d'autres sur Wattpad, gratuite et du même genre ?!)*
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