ㅤ📃 CHAPITRE 70
Assis sur le rebord du Mur Maria, Kris regardait le district s'étendre sous ses pieds.
La « victoire » avait été sonnée quatre heures plus tôt mais en était-ce réellement une ? Dix survivants pour plus d'une centaine de combattants, ce n'était pas ce qu'on appelait une victoire.
La nausée au fond de sa gorge ne disparaissait toujours pas et malgré son ventre vide depuis la fin de la bataille, il savait qu'il pouvait vomir à nouveau à n'importe quel moment.
Lorsque l'explosion avait soufflé une partie de la zone, il s'était convaincu que les autres avaient réussi à en réchapper in extremis. C'est ce qui l'avait poussé à rester concentrer sur la chute de Reiner.
Lorsque Hanji était réapparux subitement pour aider à battre le Cuirassé, il s'était juré qu'elles allaient bientôt réapparaître à leur tour.
Lorsque tout se termina et que læ cheff d'escouade annonça dans un sanglot qu'iel était seull, tout s'était arrêté autour de lui.
Il s'en moquait bien que Berthold ait été vaincu, que Reiner ait été récupéré, qu'Armin ait survécu.
Tout ce qui tournait dans son esprit, c'était que Céleste et Becca étaient mortes.
Qu'il avait perdu sa mère alors qu'elle n'était sa mère que depuis une semaine. Et qu'il devrait l'annoncer aux autres à son retour.
Les quatre heures qui avaient suivi, il avait refusé de se reposer ou de manger quelque chose. Il avait passé tout ce temps à fouiller les décombres, à crier le nom des deux noiraudes, à prier pour qu'elles apparaissent miraculeusement. Pour qu'au moins l'une d'entre elles soit là, encore vivante, encore debout.
Au départ, les autres l'avaient accompagné, avaient cherché avec lui des survivants mais il n'y avait plus aucun signe de vie, ici bas. Seulement des maisons détruites et des corps calcinés.
Et même s'il ne pourrait jamais oublier l'image de ces corps, Kris ne pouvait se résoudre à croire en la disparation des deux femmes.
Il voulait les retrouver. Les embrasser. Pleurer contre elles.
Mais rien.
Dans le champ de ruines devant lui, il avait fini par s'effondrer, avait été relevé de force par Jean qui l'avait remonté sur le Mur contre son gré. « Reste-là », lui avait-il ordonné. Et il avait beau eu tout faire pour calmer sa voix tremblante, il n'avait pu cacher à son ami le désespoir qui le prenait lui aussi.
Alors l'adolescent était resté les pieds dans le vide, le regard rivé vers là où Berthold s'était transformé, à prier de tout son cœur pour quelque chose. Pour un miracle. Seulement, rien ne venait et il pouvait supplier autant qu'il voulait, il savait qu'elles étaient désormais avec Zeyn.
Qu'il était à nouveau seul face au monde.
Et au-delà de l'étau dans son cœur, sa gorge brûlait désormais d'une colère sourde. Si elles avaient disparu, c'était parce qu'au-delà du monde connu, ils avaient des ennemis. Des traîtres. Des anciens amis qui avaient causé leur perte.
La maigre satisfaction qu'apportait la mort de Berthold était vite effacée par le simple fait que Reiner était toujours en vie. Qu'il était tout aussi responsable que son camarade de tout ça. Si ce n'est plus.
Il devait payer.
« Kris, Armin s'est réveillé.
— D'accord. »
Jean posa sa main sur son épaule avant de la serrer d'une simple pression. Il savait que son ami n'allait pas se lever pour voir comme le blond allait ; non, il restait à la même position, quoi qu'il arrive.
Néanmoins, l'adolescent écouta la conversation qui avait lieu à côté d'une oreille plus ou moins attentive. Bien sûr qu'Armin était choqué d'apprendre tout ça, il y avait de quoi. Il prenait d'ailleurs les nouvelles avec bien plus de maturité qu'il ne l'aurait cru mais était-ce étonnant ? Le soldat avait toujours su garder sa tête sur les épaules.
Le seul moment où il détourna le regard, ce fut pour voir Eren, Mikasa et les deux vétérans se préparer pour inspecter la fameuse cave.
Ce sous-sol avait intérêt à contenir la solution à tous les problèmes du monde sinon tous ces sacrifices auraient été vains. Et il ne pouvait le concevoir.
Dans le mouvement des choses, Kris capta le regard du caporal. Ce dernier soutint son observation, n'afficha aucune émotion ou soutien. Seulement une lassitude qui lui était bien connue. Mais avec le temps, l'adolescent avait appris à lire dans ces yeux épuisés ; ils avaient la même intensité que ceux de Céleste.
Et quoi qu'il dise, il le savait parfaitement, Levi était très certainement encore plus affecté que lui par la disparition de l'instructrice.
Finalement, les soldats encore présents regardèrent les quatre disparaitre dans les rues détruites et un silence pesant prit tout le groupe. Que pouvaient-ils se dire, de toute manière ?
« Tu veux ma longue-vue pour tenter de voir quelque chose ? »
La question de Floch attira de suite l'attention de Kris. Le soldat debout à sa droite continuait d'inspecter les alentours sans grand espoir. C'était le seul survivant de la charge suicide d'Erwin, celui qui avait supplié le reste du monde pour que ce soit lui qui soit ressuscité et non Armin.
C'était pour cette simple raison qu'il s'était isolé du reste du groupe, continuait de chercher comme il le pouvait des survivants.
Tout en pinçant ses lèvres, le blond retourna à sa contemplation du district.
« Non, je ne pense pas que je verrai quoi que ce s- C'était quoi, ça. »
Là. En bas. À peine visible mais bien remarquable, la légère fumée rouge s'élevait des décombres de l'explosion. Enfin, de la presque limite, là où on n'avait pas réellement osé fouiller à cause du risque d'écroulement des maisons détruites.
Kris se releva d'un bond, arracha presque la longue vue des mains de Floch, dirigea de suite ses yeux sur ce qu'il avait entr'aperçu.
« Je croyais que t'en voulais pas !
— Il y a des survivants. »
Et s'il avait d'abord murmuré sa phrase, la certitude d'avoir vu un fumigène tiré le fit hurler.
« IL Y A DES SURVIVANTS ! »
Dans un seul et même mouvement, le blond rendit l'objet à son camarade, se jeta presque dans le vide, lança ses grapins dans les premiers murs devant lui. Dans son dos, il entendait les autres s'agiter avec moins de précipitation. Mais s'il disait la vérité, alors il fallait agir vite.
Désormais au sol, près de ce qu'il restait de fumée, il se mit à courir.
Est-ce que c'était elles ? Ou quelqu'un d'autre ? Pitié, que ce soient elles, qu'elles soient en vie, qu'elles...
Il balaya les premières décombres comme il put, s'arrêta net quand il vit la structure trembler brusquement. S'il y avait quelqu'un dessous, il valait mieux éviter de tout détruire, non ?
« Calme-toi ! Conny, aide-moi à soulever ça, ça devrait bloquer le reste ! »
Dans son dos, Jean et Conny s'agitaient en vitesse. À eux trois, les décombres furent déplacés, et l'interstice qu'ils avaient fini par repérer devint un passage suffisamment grand pour s'y glisser, faire passer un corps.
Tremblant, Kris s'approcha du trou, hésita à jeter un œil. Et si ce n'étaient pas elles ? Il serait forcément déçu... Même si c'était un survivant, il serait déçu de ne pas les voir. De ne pas sauver Céleste une fois encore.
Pourtant, il passa sa tête, s'arrêta net lorsqu'il vit les deux corps allongés. Malgré l'obscurité qui régnait entre elles, il sut de qui il s'agissait.
Alors qu'il pensait être capable de soulever toutes les montagnes, il ne put s'empêcher de reculer, de trembler de tout son corps alors qu'il portait ses mains à sa bouche. C'était réel ? Ça devait l'être.
Voyant sa soudaine hésitation, Jean fut celui qui se glissa dans les décombres. Bon gré mal gré, il attrapa la première personne qui lui tombait sous la main, la releva comme il put. Malgré ses forces disparaissant petit à petit, il réussit à l'extirper, fut aidé de Conny qui attrapait à son tour celle que les trois reconnurent immédiatement comme leur instructrice.
L'adolescent au crâne rasé se tourna vers le blond, lui fit comprendre dans un regard qu'il le laissait la récupérer, qu'ils puissent sortir la deuxième des décombres.
Alors Kris prit dans ses bras Céleste, s'écroula presque au sol alors qu'elle restait contre lui.
« 'Leste... »
Un bras dans son dos, l'autre sous ses genoux, il la gardait contre elle, vit du coin de l'œil Becca être extirpée elle aussi. Mais qu'importe. Elle, elle était là. Vivante. Malgré son visage sang et cendres, ses mains écorchées et légèrement brûlées, sa jambe tremblante et assurément cassée, elle respirait encore.
Incapable de réprimer son sanglot, il posa son front contre celui de la noiraude, souffla un « merci » pour les cieux qui avaient été plus que généreux.
« Je t'avais... dit... »
Sous ses yeux, il vit les paupières entrouvertes, le sourire crispé.
Oui, elle l'avait dit.
On ne pouvait la tuer.
Kris garda dans ses bras Céleste malgré la proposition d'aide de Jean. Il avait l'impression que s'il la lâchait, il la perdrait et elle s'éteindrait subitement. Cependant, il savait qu'il ne pouvait manipuler son équipement tridimensionnel en la portant en même temps. Alors, lorsqu'ils arrivèrent au pied du mur, Conny partit faire descendre deux brancards avec l'aide de Floch et les deux femmes furent remontées.
Bon gré mal gré, les quatre soldats firent les premiers soins. Ce n'était assurément pas le mieux qu'ils puissent faire et la fatigue jouait beaucoup dans leurs gestes incertains mais ils furent ce qu'ils purent.
Becca s'était d'ailleurs réveillée entre temps. Elle avait marmonné quelque chose dans son souffle, s'était plainte d'une douleur à l'arrière de son crâne, avant de sombrer à nouveau. Au moins, on savait qu'elle était encore bien vivante.
Kris était resté assis face à Céleste, ses mains tenant fermement l'une des siennes. Il avait bandé les deux avec le plus de soin possible, avait réalisé avec tristesse les longues cicatrices les ornant désormais ainsi que ses deux bras.
Et il ne pouvait s'empêcher de se dire que ces cicatrices, elles étaient parce qu'elle avait enveloppé comme elle pouvait Becca. Parce que contrairement à elle, la vétérane s'en sortait avec bien moins de blessures, si ce n'est un choc crânien et un bras cassé. Enfin, c'étaient ce qu'ils avaient pu constater, peut-être qu'il y avait d'autres plaines internes, des côtes fêlées ou quoi que ce soit d'autre...
Dans tous les cas, elles respiraient encore.
« Qu'est-ce que... »
Plongé dans ses réflexions, Kris n'avait pas entendu les quatre autres revenir. Et tandis que Jean expliquait d'une voix tremblante ce qu'il s'était passé, le fumigène, les décombres, l'extirpation, Levi s'était de suite avancé, s'était accroupit juste à côté du blond pour regarder Céleste.
Dans un mouvement presque hésitant, il décala la mèche sur front, regarda son visage, ferma ses yeux.
« Merci de l'avoir retrouvée, gamin. »
kris loulou :((
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top