ㅤ📃 CHAPITRE 61

Les doigts glissant sur l’épaule de Levi, Céleste se réveillait petit à petit. L’esprit toujours embué, elle n’avait définitivement pas assez dormi, elle prenait malgré tout plaisir à rester contre le soldat, à écouter son cœur battre lentement alors qu’il était encore assoupi.

Vu la lumière qui pénétrait à travers les volets à moitié fermé, il devait être environ neuf heures, ce qui, si elle calculait bien, signifiait qu’ils étaient rentrés deux heures plus tôt. La seule chose qui la faisait douter quand à cette « affirmation », c’était le manque d’agitation dans les couloirs. Normalement, il y aurait dû y avoir du mouvement, au moins quelques pas, mais rien.

Mais quelque chose soufflait dans l’esprit de la noiraude que les soldats restés au quartier général avaient profité de l’absence de leur major, et de son bras droit, pour organiser leur propre soirée. Si c’était réellement le cas, cela expliquerait le silence presque trop pesant ; mais cela agacerait aussi Erwin qui n’avait aucunement envie de perdre plus de temps.

Pourtant, l’instructrice se moquait bien de prendre du retard, aujourd’hui. Elle préférait clairement rester au lit, récupérer un petit peu plus d’énergie. Et puis, pour une fois que le caporal était contre elle, et non l’inverse, elle n’avait pas le droit de s’enfuir.

De toute manière, il l’en empêchait ; il avait passé un bras dans son dos, l’avait « emprisonnée » alors que c’était elle qui devait le garder.

Les yeux parcourant la chambre, elle vit les vêtements portés la « veille », posés et pliés sur le bureau, puis la bougie qui faiblissait petit à petit. Malgré le jour présent à leur arrivée, elle avait été allumée pour faire disparaître les dernières ombres… Et cette attention, aussi simple soit-elle, avait malgré tout secoué Céleste.

Depuis leur retour, elle avait l’impression d’avoir perdu pied, qu’on lui avait retiré une partie d’elle-même. Le poids sur sa poitrine s’était envolé à l’instant même où elle avait embrassé le noiraud et tout son équilibre avait disparu au même moment. Elle qui s’était habituée à composer avec, elle se retrouvait maintenant déboussolée face à cette légèreté inconnue.

Et peut-être que dans d’autres circonstances, elle aurait été effrayée de se retrouver aussi « légère » mais avec Levi à ses côtés, elle gardait la tête haute. C’était ce qu’elle avait voulu et elle ne le regrettait aucunement. Mieux, elle était heureuse de cette situation, de ce chamboulement aussi soudain.

Elle ne voulait perdre ça pour rien au monde.

Lorsqu’elle sentit contre sa peau un baiser rapide, elle baissa aussitôt sa tête vers le caporal, le regarda se redresser légèrement pour la fixer aussi. Une seconde, elle s’attendit à ce qu’il lui parle mais il ne se contenta que de détailler son visage avec attention.

Oh, elle avait la sensation qu’il n’avait fait que ça, depuis hier. Analyser chaque grain de sa peau, tout faire pour mémoriser tous ses traits jusqu’à être capable de les retracer les yeux fermés.

« Tu ne dors pas ? »

Sa question n’en avait que l’apparence. Silencieusement, il l’invitait à se recoucher, à ignorer toutes les potentielles obligations, à retourner contre lui. Et qui était-elle pour refuser ? Alors elle se replaça tranquillement, finit par être définitivement capturée dans les bras de Levi. Quand elle embrassa fugacement ses lèvres, elle le sentit se tendre légèrement.

« Tout va bien ?

— Oui.

— Vraiment ?

— Je réalise encore, c’est tout. »

La main contre son dos traçait désormais des lignes imaginaires, lui arrachait un frisson long. Céleste comprenait parfaitement ce qu’il voulait dire.

« Je suis désolée d’avoir pris autant de temps.

— Il n’y a pas à demander pardon. Ce qui est fait est fait et nous ne pouvons remonter le temps. J’ai moi aussi mes torts et aujourd’hui, on s’en moque. Tu es là, dans mes bras, je n’ai rien d’autre à demander. »

S’il le pouvait, il la garderait contre lui éternellement. Il embrasserait tout ce qu’il pourrait, couvrirait la noiraude de passion, ne la laisserait pas s’enfuir ailleurs. Mais c’était impossible, elle allait devoir se dérober un jour ou l’autre ; alors, tant qu’elle restait là, il en profitait un maximum.

Il gravait encore et encore ses traits dans sa mémoire, enregistrait sa voix, son souffle, les battements de son cœur, respirait dans de longues inspirations son odeur. Qu’elle reste encore près de lui malgré son absence, qu’elle ne lui manque pas trop lorsqu’il faudra se quitter pour retourner aux occupations.

Et même s’il savait qu’elle n’avait aucunement l’envie de s’en aller, il la connaissait suffisamment pour savoir que d’ici quelques heures, lorsque le monde sonnera l’après-midi, elle s’enfuira. Elle le lui avait dit, de toute manière, on avait besoin d’elle aujourd’hui et elle ne pouvait se dérober, pas même pour ses beaux yeux.

Alors il profitait, embrassait du bout des lèvres l’épaule à sa portée, laissait son nez se faire chatouiller par ses cheveux.

Le temps s’arrêtait, lorsqu’il était avec elle. Ils avaient beau rester silencieux, quelque chose l’apaisait définitivement, le laissait l’esprit tranquille. Mais il n’avait pas le droit de goûter au bonheur trop longtemps, pas encore. Lorsque Céleste se dégagea, non sans mal, de ses bras, il sut qu’il était l’heure.

Techniquement, il était encore « tôt » mais la noiraude avait terriblement besoin d’une douche. Et elle voulait aussi avoir le plus de temps possible pour régler son affaire. Ce n’était rien de grave, elle l’avait assuré à Levi mais quelque chose lui soufflait que c’était important. Qu’il ne fallait pas ignorer.

Alors, la mort dans l’âme, elle quitta le soldat. Trop flemmarde pour s’habiller réellement, elle resta dans ce qui lui avait servi de tenue de nuit, c’est-à-dire la sous-robe de sa tenue de soirée. Tout en attrapant ses vêtements de la veille, elle se tourna vers le soldat, lui offrit un sourire.

« Repose-toi, d’accord ? Je reviens dès que j’ai fini.

— Si tu crois que je vais rester couché maintenant que tu t’en vas, tu te fourres le doigt dans l’œil.

— Alors ménage toi. »

Et elle s’en alla.

Comme elle se l’était dit, les couloirs étaient déserts et elle ne croisa personne. Le seul moment où elle vit des soldats, ce fut vers le réfectoire, après sa douche. Et elle pouvait affirmer sans grands dommages, en voyant les lieux, qu’on s’y était amusé. Ah, ça lui avait rappelé les soirées auxquelles elle avait participé, à l’époque…

Mais ce n’était pas ça qui l’intéressait. De toute manière, il valait mieux rester loin de l’endroit ; la noiraude savait parfaitement que Levi allait y passer à un moment elle ne voulait pas être là lorsqu’il verra les dégâts.

Assez instinctivement, elle monta sur le toit du quartier général. Quelque chose lui disait, assez naturellement, que c’était là-bas qu’elle finirait par retrouver Kris.

« Je savais que tu finirais par venir. »

Elle avait eu raison. Assis près du rebord, le garçon ne s’était pas retourné en l’entendant arriver. Il jeta simplement un regard dans sa direction quand elle s’installa à ses côtés.

« Bien sûr. Pourquoi ne serai-je pas venue ?

— Parce que tu étais avec le caporal ? Je ne sais pas… Tu n’avais peut-être pas envie de le quitter pour moi.

— Il survivra sans moi, ne t’en fais pas. »

Cette fois encore, il était curieusement fuyant. Mais les questions avaient beau brûler la langue de la noiraude, elle n’osait piper mot, attendait plutôt que l’adolescent parle. Ça devait venir de lui, de personne d’autre.

« Tu te rappelles… Quand j’ai dit que mes parents m’avaient jamais répondu ?

— Oui ?

— J’aurai préféré que ça soit toujours le cas. »

Et presque aussitôt, elle comprit. Il pouvait parler de tout à ses amis mais jamais ils ne comprendraient comme elle. On pouvait saisir le poids qui reposait sur les épaules du garçon mais comprendre la raison, la source de tout cela était impossible ; il aurait fallu connaître Zeyn avant, la relation qu’il entretenait lui-même avec sa famille, l’image que portait aujourd’hui Kris.

« Je savais qu’ils me détestaient, ça, c’est pas une nouvelle, mais je ne pensais pas que ça serait à ce point. Quand je me dis que les autres parents doivent voir leurs enfants comme des héros parce qu’ils sont prêts à se sacrifier pour récupérer le mur Maria, les miens ne pensent qu’à me comparer à mon frère, à dire que je vais échouer tout comme lui, au même endroit. Peut-être que c’est la vérité, mais ça ne veut pas dire que ça fait mal. Et en même temps, je me dis que ça serait mieux que j’y laisse ma peau parce que, sinon, si je reviens couvert de lauriers, ils me diront que je lui ai volé une victoire qui aurait dû être la sienne. »

Si c’était à elle qu’on avait dit ça, elle aurait simplement baissé la tête, aurait abandonné, n’aurait même pas eu envie de se battre. Simplement parce qu’elle se serait dit que c’était la vérité, qu’elle n’était aucunement légitime à cette tâche. Mais puisqu’on l’avait dit à l’adolescent, elle ne sentait en elle qu’une colère froide et sourde.

« Et toi, qu’est-ce que tu veux ? Oublie tes parents, ton frère et tout le reste et dis-moi ce que tu veux.

— Gagner. Rentrer de cette expédition en vainqueur avec vous tous.

— Alors c’est ce qui arrivera.

— Les choses ne sont pas aussi simples, ‘Leste, tu le sais bien mieux que moi. »

Tout en posant sa main sur son épaule, la noiraude soupira.

« Peut-être. Mais si les rôles étaient inversés, tu me dirais la même chose.

— Je sais…

— Kris, regarde-moi. Qu’est-ce qui te tracasse réellement ? Je ne dis pas que ce que tu me dis n’a pas d’importance, bien au contraire, mais je sais qu'il y a quelque chose.

— Je ne peux rien te cacher, hein… ? »

Il était toujours le petit garçon qui venait de s’enrôler, celui qui tremblait malgré son courage, qui savait qu’il s’enfonçait dans une fin presque certaine, très certainement soudaine et douloureuse. Celui qui l’avait regardée avec toute la frayeur du monde, qui avait hurlé qu’il ne fallait abandonner.

« C’est très égoïste, ce que je vais te demander, mais… Je… Je refuse que ma gloire, mon honneur ou même ma mort, soit associée à mes parents. Je ne veux pas que ceux qui ont haï mon frère et me haïssent encore plus soient encore « papa » et « maman ».

— Oh… Kris…

— Ne te sens pas obligée de faire quoi que ce soit. »

Il serra ses poings sur ses jambes, évita soigneusement le regard de Céleste.

« Est-ce que tu me demandes de prendre la responsabilité de devenir ta mère parce que tu en as assez de tes parents ou pour une autre raison ?

— Peut-être aussi parce que c’est toi et que, vraiment, je veux être… Ton fils ? En tout cas, faire officiellement partie de ta famille. »

Le murmure de Kris mourut à peine fut-il soufflé. Le regard toujours fuyant, il sursauta quand il sentit la noiraude le prendre dans ses bras. Et s’il lui fallut un minuscule temps pour réagir, il rendit à Céleste son étreinte.

«  Tu es déjà ma famille. Depuis le début, sans aucune hésitation. Si c’est ce que tu veux vraiment, alors je ferai le nécessaire. »

moh le réveil, c'est qu'ils sont pas trognons <3 ;

enfin, parlons peu, parlons bien, parlons du criquet ;

mon loulou, ma caille, mon bichon, t'es pas gâté mon pauvre ; oui, vous avez bien lu, une "adoption" est en vue et ça va très bien à céleste ;

la relation kris-céleste est encore mystérieuse mais est tout de même l'une de mes favorites et j'espère qu'un jour, j'aborderai tout ses aspects ;

au pire, on le verra mieux dans la ff de kris (quoi)

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