ㅤ📃 CHAPITRE 54

Céleste et Becca continuèrent à dormir ensemble encore un mois. Elles passaient surtout leurs nuits à discuter et la plus jeune observait silencieusement son amie sombrer contre elle. Petit à petit, elle prit l'habitude de partir quand elle finissait par s'endormir, rejoignait sa propre chambre sur la pointe des pieds. Ce manège sembla leur convaincre car la fin de novembre arrivée, elles continuèrent d'agir ainsi.

Parfois, la noiraude se réveillait en sursaut, mettait plusieurs minutes à réaliser où elle était, à comprendre pourquoi elle était désormais seule. Ce qu'elle faisait après dépendait mais elle avait fini par prendre l'habitude de tenter de se rendormir, ne pas y arriver, aller voir Levi. Sûrement avait-il fini par la prendre en compte dans son quotidien, une tasse de thé l'attendait toujours sur son bureau, prête à être remplie et servie à la jeune femme.

La gêne n'était plus de mise entre eux et le soldat lui avait même avoué qu'il appréciait quand elle venait ; pouvoir parler durant ces nuits où le sommeil ne venait pas était assez agréable. Il arrivait de temps en temps que Céleste finisse par s'endormir sur sa chaise. Elle était alors soit portée jusqu'au lit à côté ou se réveillait là où elle avait sombré, une couverture sur ses épaules. Tout dépendait de la force restante à Levi.

L'hiver s'installait lentement, refroidissait tout le monde. On évitait de se promener seul pour essayer de gagner un minimum de chaleur auprès des autres et les sorties étaient devenues rares. Les premières neiges n'allaient pas tarder à arriver et on était soulagé de savoir qu'aucune expédition avant le printemps n'était prévu. Paraissait-il qu'elles étaient particulièrement chiantes.

Puisque cela annonçait pour tout le monde un temps de « vacances », le Major Shardiz autorisa ses soldats à retourner dans leurs familles pour les festivités de fin d'année. Quand Céleste demanda si ça se faisait souvent ou si c'était exceptionnel, on lui signifia que non. C'était tout le temps comme ça, depuis presque la création du Bataillon... Elle décida de garder cette nouvelle et de ne pas l'annoncer à Cassandre.

De l'escouade, seules les deux noiraudes restèrent au quartier général. Caius allait retrouver ses parents de l'autre côté des Murs, vers le district de Hermiha, tandis que Lahssen avait déjà rejoint sa fiancée. Zeyn comptait lui aussi partir, il voulait voir sa famille et son petit-frère.

Quand il ne resta sur place que ceux qui le voulaient, on n'entendit plus que le vent souffler dans les couloirs. La fraîcheur habituelle était devenue glaciale et on limitait les mouvements. Ils étaient une vingtaine à être là, avaient collés plusieurs tables pour l'occasion, se donner l'impression qu'ils étaient nombreux. Des visages connus, Céleste n'avait que celui de Levi et Hanji. Il y avait celui d'un grand blond mais ne lui ayant jamais parlé, elle ne le comptait pas. Bien évidemment, Becca était aussi à ses côtés, plus mélancolique que d'habitude. Sûrement se rappelait-elle les moments passés auprès de sa mère. Lui avait-elle reparlé, depuis son départ ? La noiraude n'avait jamais su ce qu'il s'était passé...

Peut-être était-ce bien qu'elle se soit foulée le poignet, ne puisse pas sortir. Au moins, elles restaient toutes les deux à l'intérieur, n'allaient pas les rues, ne voyaient pas de familles se promener, cadeaux dans les bras, sûrement en quête d'encore d'autres présents. Elle était loin l'époque des paquets près de la cheminée, des grands repas en famille, des célébrations joyeuses. Avait-elle seulement été là.

Le temps passait, la météo se gâtait, on prévoyait de la neige d'ici peu. Plus personne n'allait s'entraîner, on passait plutôt ses journées à regarder la journée s'écouler, à jouer à des jeux de carte ou d'argent, à se prélasser dans sa chambre. Ils étaient si peu nombreux, le quartier général était vide...

« 'Leste, 'Leste. »

Dans un couloir vide, après le petit-déjeuner, on avait attrapé le bras de la soldate. Le sourire amical de Hanji réchauffa le cœur de la jeune femme ; cela faisait un petit moment qu'iels ne s'étaient pas reparléx, la faute à leurs emplois du temps.

« J'ai besoin de ton aide.

— Dis-moi.

— Tu es amie avec Levi, non ?

— Oui ? Pourquoi cette question ? Il y a un soucis ?

— Non. Enfin... Si ? C'est juste que j'ai appris de la part d'Erwin que-

— Qui ?

— Le chef de son escouade ! Grand, blond, sourcils fournis.

— D'accord, je vois. Du coup ? Désolée, je t'ai coupéx.

— Aucun soucis. Donc, je disais, il m'a dit que c'était bientôt son anniversaire. Le vingt-cinq, je crois ? Dans tous les cas, je ne sais pas vraiment quoi lui offrir. Pour Moblit, c'était un petit peu plus facile mais pour lui ? Il ne dit jamais ce qu'il aime et Becky m'a dit de te demander, il paraît que vous êtes souvent ensemble le soir et que vous vous connaissiez avant. Je me suis dit que tu saurais et...

— Il aime beaucoup le thé. Il prend toujours le moins cher mais je sais qu'il apprécie les plus complexes. Il a beaucoup aimé d'une boutique pas trop loin, je peux te donner l'adresse et le nom. Sinon... Je ne sais pas vraiment... Si. Une fois, j'avais ramené des gâteaux d'une sortie avec mon escouade. Il ne m'a rien laissé. Ça, je pense que ça lui plairait.

— Je ne savais pas que c'était un homme qui se laissait avoir par la nourriture !

— Je ne te dis que ce que je sais. On discute rarement de nos goûts, je ne sais pas s'il aime lire, boire ou quoi que ce soit d'autre.

— Ne t'en fais pas, c'est déjà beaucoup. Je prends tout ça et si j'ai besoin, je te redemanderai ! Merci beaucoup !

— Il n'y a pas de quoi. »

Hanji s'en alla comme iel était venux, laissant la noiraude seule dans le couloir. Elle regarda à travers la fenêtre, vit le terrain vide. L'anniversaire de Levi, elle l'avait appris au détour d'une conversation avec le soldat. Il le lui avait soufflé la date sans rien ajouter de plus, sans même la laisser s'excuser. Depuis tout ce temps, jamais elle ne le lui avait demandé, avait pris la peine de poser une simple question.

Peut-être pour être sûre de ne jamais oublier, elle avait rapidement acheté quelque chose pour le noiraud. Lui offrir du thé lui semblait risible, l'envie de prendre un objet qui avait une plus grande valeur l'appelait. Un présent qui aurait autant d'importance que sa broche.

Elle avait trouvé son bonheur durant une sortie avec son escouade, avait gardé le cadeau dans ses affaires, caché au fond de son armoire. Qu'on ne le trouve pas par inadvertance. Et maintenant que décembre était là, que le temps arrivait, elle avait hâte de pouvoir l'offrir. De voir une autre expression sur le visage de Levi, de lui faire plaisir.

Et plus la date approchait, plus Céleste trépignait presque d'y arriver, ce qui interrogeait Becca. La jeune femme savait que son amie avait prévu un cadeau pour le soldat mais elle ne comprenait par son agitation ; il y avait quelque chose qui dormait là dont elle ne lui parlait pas. C'était bien faute de lui demander la nuit venue, alors qu'elles discutaient dans le lit de l'aînée. Aucune révélation ne venait et elle devait tirer ses conclusions toute seule, prier pour que ses camarades masculins puissent l'éclairer.

La noiraude se demandait si ses premières intuitions n'avaient pas été justes. Quand elle avait embêté son amie en lui demandant si elle n'était pas attirée par Levi, elle se moquait simplement d'elle. Mais aujourd'hui ? Quelque chose lui soufflait qu'il y avait peut-être un petit peu de vrai. Elle avait beau le réfuter, ne surtout jamais donner de réponse, Céleste ne pouvait cacher son léger sourire quand elle parlait désormais du soldat.

Mais cette nuit, à quelques jours du réveillon, quelque chose d'autre attira son attention. Allongées toutes les deux dans les draps et couvertures, elles s'amusaient avec leurs mains, liaient leurs doigts dans les airs. Becca faisait attention au poignet de sa camarade, même si elle avait de moins en moins mal, veillait à ne pas la blesser davantage. Plongée dans un silence étrange, l'aînée n'avait même pas répondu aux questions de son amie, avait perdu son regard dans le plafond, ne prêtait plus attention à rien. Ce n'était pas la première fois que ça arrivait, la cadette avait déjà constaté cette absence chez la noiraude, la laissait se perdre dans ses pensées... Elle avait alors profité de ce calme pour observer la chambre, voir sur le bureau un tas de lettres laissées dans un coin.

De quand dataient-elles ? Céleste ne le lui avait pas dit qu'elle avait une correspondance... Enfin, ça ne la regardait pas ! Mais tout de même, elle avait l'impression qu'il y avait un lien entre les deux. En un mois, son amie avait reçu autant de courrier ? C'était assez étrange. Et elle avait beau se dire que ça aurait pu être des anciennes, écrites par Cassandre, la manière dont elles avaient été laissées là sur le meuble alors qu'elles étaient, habituellement, soigneusement rangées dans le tiroir attira son attention.

Et si ce n'était pas le frère qui lui parlait, elle avait bien une idée de qui pouvait le faire.

Ce qui ne l'enchantait pas le moins du monde.

Pourtant, elle ne posa pas de questions, ne voulu cette fois ci pas comprendre ce qu'il se passait. À trop demander des choses, elle se doutait bien que Céleste finirait par lui retourner la chose et Becca n'y était encore pas prête. Elle se doutait bien que ce n'était pas dans le caractère de son amie, elle avait toujours évité de trop gratter. De chercher à savoir.

« Tu veux des enfants, toi ? »

L'interrogation soudaine de la plus âgée surprit son amie. Pourquoi lui demandait-elle ça ? La soldate arrêta son jeu de mains, alors qu'elle se tournait vers celle qui avait parlé. Le regard toujours fixé sur le plafond, elle semblait perdue dans ses pensées, avoir réfléchi à voix haute.

« J'en sais rien ? Je pense pas. Je ne ferai pas une bonne mère... Et puis, c'est quoi cette question ? Tu es enceinte ?

— Quoi ? Non ! Je me demandais juste...

— Et toi ? Tu en veux ?

— J'imagine que je suis un petit peu comme toi. »

Non, il y avait quelque chose. Becca se redressa, entraîna Céleste avec elle. Des fois, elle se doutait bien qu'elle parlait pour remplir l'espace mais maintenant ? Elle la connaissait trop bien. Pourtant, rien ne franchissait la barrière des lèvres de la noiraude. Mais ses yeux allaient de ceux de la taupe à la pile sur son bureau. La cadette comprit, emprisonna le visage de son amie entre ses mains, la força à se reconcentrer sur elle.

« Est-ce que tu te poses cette question parce que cet idiot de Connor t'a fait la remarque ou-

— Parce que je veux savoir si je ne veux pas avoir d'enfants parce que j'ai peur de devenir ma mère ou parce que c'est parce que j'ai peur d'en avoir avec quelqu'un que je déteste. Peut-être les deux. Mais... Ça n'empêche pas que parfois, j'y pense. Je me demande si fonder une famille est dans mes cordes, si j'en suis capable. Quand je partirai, quand je retrouverai Cassandre, est-ce que je finirai ma vie avec lui, sa femme et mes... neveux ? Ou est-ce que je rencontrerai quelqu'un, deviendrai moi-même mère... ? Peut-être que je vais mourir avant, va savoir... J'ai peur de ne pas avoir le temps de découvrir tout cela.

— Tu n'es pas ta mère, tu n'épouseras pas quelqu'un que tu détestes... et tu vivras. Il se peut que tu n'aies jamais d'enfants, comme le contraire peut arriver, mais ce n'est pas eux qui feront ta famille. C'est ton frère. C'est moi. C'est notre escouade. Tu n'as pas besoin de créer et porter la vie pour ça. »

Front contre front, les deux noiraudes n'osaient plus parler. Céleste murmura seulement un « merci » mais rien d'autre ne vint. Et c'était bien comme ça. Becca se demandait souvent ce qu'il se passait dans son esprit... Mais plus le temps passait, plus elle était convaincu d'une chose ; ses anciennes croyances tombaient au fur et à mesure qu'elle choisissait sa voie. 

céleste et becca sont juste trop pipous toutes les deux, elles me font tellement chaud au coeur ; je sais que dans cette première version de DTTME, je les fais pas "trop" intéragir mais le peu où je les écris ensemble, c'est toujours un moment absolument incroyable vraiment je

leur discussion m'a fait plaisir à écrire, comme la petite interaction avec hanji ; en vrai, on rentre dans une addition de chapitres plutôt sympas, c'est le moment de profiter parce qu'on va être content pendant un petit moment (après ça pue) ;

je tiens aussi à vous remercier pour les 3k, je m'y attendais pas !! ; n'hésitez vraiment pas à lâcher des petits commentaires ou même des votes de temps en temps, ça fait plaisir et ça me motive à sortir la suite <3 ;

on se dit à vendredi !

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