Céleste pensa un long moment qu'elle aurait dû passer sa nuit avec Zeyn, à lui dire sans cesse qu'elle ne le laisserait pas tomber. Mais le matin venu, quand elle vit son visage serein, elle fut rassurée. Quelque chose semblait avoir fonctionné, apaisé un petit peu son cœur.

Ou peut-être qu'il avait accepté qu'il allait mourir aujourd'hui, qu'il ne pouvait rien y faire et que ça ne servait à rien de débattre pendant quatre ans sur ce fait.

Les soldats du Bataillon d'exploration étaient étonnement calmes. Une ambiance lourde régnait entre les membres du corps d'armée et seul le raclement des couverts dans les bols se faisait entendre. Les quelques recrues se regardaient entre elles, cherchaient du réconfort dans leur regard ; elles avaient passé trois ans ensemble, c'était assez rassurant de trouver un visage familier, et un peu effrayé, en cette matinée pesante.

Lorsque le major annonça qu'il fallait se préparer pour y aller, Céleste se demanda si ses jambes allaient la porter jusqu'à destination. Elle suivit son escouade pour récupérer son équipement tridimensionnel, tout en remarquant que ses doigts tremblaient plus que ce qu'elle avait prévu. Finalement, elle n'avait même pas besoin de s'intéresser au cas de Zeyn, le sien était suffisamment intéressant.

« Doucement, Céleste. Si tu te précipites comme ça, tu vas finir par le regretter quand on sera dehors. »

Accroupi devant elle, Lahssen avait arrêté son mouvement et desserrait ses sangles. Visiblement, elle avait mal accroché son équipement et, dans le stress, n'avait même pas remarqué cette erreur qui aurait pu s'avérer fatale. Et si elle s'attendait à ce qui la laisse recommencer, le bras droit s'occupa personnellement de la préparer. Contrairement à elle, il respirait calmement et ses gestes étaient lents, calculés, stables.

« Merci.

— C'est normal. »

Il avait beau être agaçant, quand il s'agissait de sécurité, on pouvait compter sur lui. Lorsqu'il eut fini avec elle, il se dirigea vers Zeyn qui semblait aussi perdu alors que Becca était inspectée par Caius. Désormais seule, Céleste n'avait plus qu'à se concentrer sur son cœur qui battait beaucoup trop fort et sur ses mains qui tremblaient de plus en plus. Du coin de l'œil, elle vit cependant son chef d'escouade qui la regardait. D'un mouvement du menton, il lui indiqua l'extérieur et elle comprit qu'il l'invitait à prendre l'air. Il avait raison ; elle avait besoin de respirer.

Parmi tous les soldats qui avaient fini de se préparer, la noiraude essayait de retrouver un visage familier. Que ce soit une recrue ou bien Levi... Mais personne ne vint à elle et la jeune femme se retrouva seule à contempler l'extérieur, les autres qui étaient de plus en plus agités.

« Stresse pas trop, ça va bien se passer. On va rester ensemble tout le long de l'expédition, il n'y a aucune raison que tu meures. »

Lahssen avait rejoint Céleste, bras croisés. Il essayait assurément de réconforter la noiraude mais cela ne lui faisait rien.

« Enfin... Je ne savais pas que tu étais du genre à t'en faire autant.

— Je n'ai pas le même mental que Becca.

— Ce n'est pas ce qu'elle m'a dit. »

Le vétéran haussa ses épaules, alors qu'elle regardait de plus en plus au loin. Son amie pensait ça d'elle ? Au fond, elle ne l'avait pas imaginé. Becca était toujours celle qui gardait le plus la tête sur les épaules, elle était étonnée qu'elle estime qu'elle soit forte mentalement. Soudain, Lahssen frappa avec force sur son épaule, la faisant sursauter.

« Ne te tracasse pas trop sur ça. Tu as tout de même fait partie des dix premiers de ta promotion, ai un petit peu confiance en toi. Ça va aller, tu vas y arriver et ce soir, tu vas faire ta double page avec ton amie. Allez, viens, on va préparer nos chevaux, ça va bientôt être l'heure. »

Céleste emboîta rapidement le pas derrière son « supérieur », partit avec lui vers les écuries. Beaucoup y étaient déjà et la noiraude dû se frayer un passage pour récupérer sa monture. Elle avait déjà fait la rencontre de l'animal, avait eu tout le temps du monde pour l'apprivoiser et connaître cette jument au pelage brun. Avec Lahssen, elle guida la bête et quatre autres vers l'extérieur, heureuse de voir que quelqu'un les avait préparés avant.

« Merci de nous avoir amené les chevaux. »

C'est à cet instant que le reste de l'escouade rejoignit le duo. Chacun se saisit de rênes et monta en selle. Rapidement, la noiraude vit qu'il ne restait plus que quelques soldats à terre et que la grande majorité commençait à se diriger sur la route vers les Murs.

« Je suis là. »

Becca avait attrapé la main de son amie en se rapprochant d'elle, le visage grave. Doigts liés, les deux noiraudes se regardèrent droit dans les yeux, gardant en tête la promesse qu'elles se faisaient à nouveau. Ça allait bien se passer, elles le savaient.

Le trajet vers la porte de Shiganshina se fit dans le calme. Chacun suivait un rythme soutenu, profitait de la nature tranquille autour. Des derniers moments avant le chaos infernal qui allait bientôt s'ensuivre. Lorsqu'ils arrivèrent près des Murs, tous purent voir les visages des civils, le jugement de certains, l'émerveillement des autres.

Céleste était à l'arrière du Bataillon, ne put pas entendre son major annoncer le départ de l'expédition. Elle s'était alors contentée de suivre le mouvement, mains serrées sur ses rênes tout en se répétant que tout allait bien se passer.

Les premières minutes furent tranquilles. La noiraude ne vit aucun titan à l'horizon, était rassurée de voir les membres de son équipe autour d'elle. La confiance remontait dans sa poitrine ; elle savait utiliser son équipement, connaissait son cheval, avait confiance en son escouade. Le temps était d'autant plus clément, aucun orage ne semblait arriver droit sur eux et cela la rassurait encore plus.

« On va rester ensemble encore un moment et ensuite on va devoir commencer à se déployer ! Lahssen et Becca, vous irez à l'est ; Zeyn et Céleste avec moi ! »

Cette fois, cette expédition avait pour but de continuer à repérer certains lieux. La noiraude savait que le Bataillon souhaitait établir des campements extra-muros et il fallait, pour cela, pouvoir tout cartographier et connaître les lieux susceptibles d'avoir un campement.

La soldate regarda son amie et son supérieur partir tandis qu'elle restait avec les deux autres membres de son équipe. Doigts serrés autour de ses rênes, elle commençait à se demander pourquoi est-ce qu'ils faisaient tout ça. Était-ce si important d'établir un campement ? Il pouvait se faire détruire à tout moment...

Mais cette pensée se fit réduire à néant quand elle releva la tête. Au diable toutes ces manœuvres qui pouvaient ne servir à rien, elle avait devant elle un paysage qu'elle n'avait jamais vu : celui d'au-delà les Murs. Et si Céleste n'étais pas très aventureuse, elle était heureuse d'être là, de pouvoir voir cette étendue verte là. Elle n'était en aucun point différente de celles où elle allait se promener mais elle avait un petit goût de nouveau, d'inconnu.

« Titan à quinze mètres, préparez-vous à contourner. »

Caius était beaucoup plus précautionneux que les deux cadets ; ils n'avaient pas vu la créature se promener vers eux malgré l'absence de tout obstacle autour d'eux.

« On n'engage pas le combat ?

— ­Non, on n'a rien pour s'accrocher, ce serait trop dangereux pour vous. »

Le chef d'escouade avait raison et ce n'étaient ni Zeyn ou Céleste qui allaient le contredire. De toute manière, ils étaient encore assez nombreux et organisés pour se permettre de ne pas sortir les armes.

« Ça va bien se passer, ne vous en faîtes pas. »

Malheureusement, personne ne pouvait prévoir l'imprévisibilité des titans. Alors que le groupe d'une vingtaine de soldats approchaient un bois, deux monstres surgirent et prirent de court les membres du Bataillon. On ordonna aux recrues de rester en retrait, alors que Caius et d'autres vétérans s'occupaient des créatures. Céleste regarda avec un presque émerveillement son chef d'escouade sortir ses lames et s'élancer avec son équipement tridimensionnel.

Les titans vaincus, pour une fois sans victimes, tous repartirent à cheval.

Au galop, Céleste essayait de retrouver du regard son amie qui était allez savoir où. Allait-elle bien ? Bien évidemment, pourquoi Becca ne pourrait-elle pas s'en sortir ? Ce serait totalement idiot, elle était bien meilleure qu'elle.

« Les bleus ! On va essayer de retrouver les autres et de se poser un temps. Restez attentifs, ça ne veut pas dire qu'on doit baisser la garde. »

Il fallut au groupe de soldats une bonne vingtaine de minutes pour retrouver une grosse partie du Bataillon. Ils s'étaient installés en haut d'une colline, là où ils avaient une bonne vue sur le reste de la plaine, et avaient tiré plusieurs fumigènes verts pour indiquer leur position.

À leur arrivée, Zeyn et Céleste cherchèrent automatiquement leur amie autour d'eux. Caius en faisait de même pour son bras droit. Mais les deux membres de l'équipe manquaient visiblement à l'appel. La noiraude remarqua un soldat qui discutait avec le vétéran. À pas rapides, elle se rapprocha d'eux.

« Lahssen et sa coéquipière ont dû s'éloigner avec l'escouade de Frank. Ils devraient bientôt arriver, si tout va bien. Il manque beaucoup de monde, en vrai, ils doivent être tous ensemble.

— Vers quel niveau ?

— Un peu plus au nord. »

Les épaules tendues de Caius fit dire à la demoiselle que ce n'était pas normal. Moins que d'habitude. Mais que pouvait-elle y faire, mis à part espérer que tout aille bien ?

« Allez vous reposer cinq minutes, je vais essayer de voir ce qu'on fait. J'ai l'impression que pour une fois, nous ne subissons pas trop de pertes. »

C'était assez étrange de voir le chef d'escouade dans cet état. Il n'avait pas perdu son calme, n'avait pas haussé le ton mais il était assurément anxieux. Ne pas avoir Lahssen auprès de lui semblait l'agacer plus que de raisons.

Céleste partit s'asseoir avec Zeyn, tournée vers l'horizon. Elle essayait de guetter le reste de son équipe, de les voir enfin arriver. Mais rien ne venait. Du coin de l'œil, elle vit cependant les soldats commencer à s'agiter. La noiraude se releva au moment même où Caius arriva à son niveau.

« Que se passe-t-il ?

— Un soldat qui était à l'ouest avec les autres vient d'arriver.

— Et alors ? Qu'est-ce qu'il se passe ?

— On va rentrer.

— Mais... Et les autres ? »

Le blond s'était exclamé, la gorge nouée. Comment ça, « rentrer » ? Ça n'avait pas de sens, il n'y avait pas encore tout le monde ! Il attrapa la manche de veste de son amie, comme pour l'inciter à la suivre dans son discours. Ils ne pouvaient pas s'en aller ainsi, pas sans Becca et Lahssen !

« Zeyn...

— On va pas les laisser là ! Il faut aller les chercher !

— C'est trop tard, Zeyn. » 

une expédition rapide mais efficace ! (non)

je vous l'avais dit, je n'aime vraiment pas écrire les expéditions donc celle-ci est vraiment... bâclée ? je suis désolée pour cette qualité, je ne suis pas franchement contente mais j'ai préféré avancer et reléguer ça à la réécriture ahaha

en attendant, où sont lahssen et becca ? on le saura peut-être au prochain chapitre !!