ㅤ📃 CHAPITRE 31
La nuit fut courte. Ce n'était pas très étonnant mais Céleste réalisait seulement au réveil qu'elle aurait mieux fait de se coucher plus tôt. Le corps courbaturé, elle mit plusieurs minutes à se lever, resta assise sur son lit quand sa tête se mit à tourner.
Définitivement, elle aurait dû tout de suite dormir.
Ce fut son ventre grondant qui la poussa à descendre malgré tout dans le salon. Si elle ne mangeait pas maintenant, rien n'allait bien se passer. Sans étonnement, elle vit qu'elle était seule dans la pièce à vivre ; Lahssen ne se réveillait jamais « tôt » quand il ne travaillait pas.
Luttant contre ses bras qui lui hurlaient d'arrêter de bouger, elle prépara un thé, sortit d'un placard une boîte de biscuits. Rien de bien glorieux, seulement de quoi tenir jusqu'au déjeuner. Le brun détestait acheter des choses toutes faites, il était de ceux qui préparaient tout soit même, mais il avait vendu son âme à ces petits gâteaux. Peut-être parce qu'ils étaient gratuits et faits par une voisine mais ça ne voulait absolument rien dire.
Tandis que l'eau chauffait, la noiraude partit ouvrit la porte de derrière, sortit dans le jardin. Puisqu'il n'y avait pas grand monde aux alentours, les deux s'étaient amusés à faire une sorte de potager, avaient planté plusieurs plantes et fleurs pour décorer le tout. Une petite table et deux chaises trônaient près du mur, face à la plaine qui s'étendait.
Cette maison, Céleste l'avait découverte dès son départ de l'armée. Elle qui aurait pensé vivre là où Lahssen et Ophélie s'étaient à l'époque installés, elle avait été surprise de voir que son ami avait déménagé, s'était littéralement reclus ici. À son arrivée, les lieux étaient à peine aménagés, pas franchement accueillants ; ça l'avait occupée de se charger de la décoration, des quelques réparations...
L'instructrice retourna chercher sa boisson chaude quand elle entendit l'eau bouillir. Puisqu'il faisait bon dehors, elle récupéra ce qui lui servait de petit-déjeuner et se posa sur l'une des chaises.
Maintenant que mai arrivait, l'été allait revenir et cela voulait dire manger à l'extérieur à peu près tout le temps.
La tasse encore chaude contre ses lèvres, Céleste observait avec attention les nouvelles plantations de son ami. Il avait rajouté quelques légumes mais les nouvelles fleurs... Elle n'avait pas remarqué ces nouvelles-là, entre les œillets et tulipes, plusieurs lilas s'élevaient tranquillement.
Est-ce que Lahssen les avait plantées là parce qu'il les appréciait ou parce qu'il savait que c'étaient ses préférées ? C'était peu être un peu trop s'avancer mais si c'était le cas...
« Merci pour le thé, mamie.
— C'était pour me resservir.
— Eh bien c'est pour moi, maintenant. »
Tout en s'asseyant à sa droite, le brun posa sur la table son propre repas, attrapa malgré tout l'un des biscuits que l'instructrice s'était prise.
« Tu as les mêmes.
— Ils sont meilleurs chez toi. »
Alors en fit de même, tout en poussant ceux qui lui restaient loin de ces mains voleuses.
« Tu as bien dormi ?
— Pas assez. Et toi ?
— Plutôt, oui. J'aurai aimé continuer mais la faim m'a réveillé. »
La noiraude hocha sa tête, continua à boire son thé. Très vite, le silence se fit entre eux, la contemplation de la nature revint. Ils profitaient silencieusement de cet instant, du moment de paix qu'ils pouvaient avoir. Quand ils étaient aux Brigades d'Entraînement, il fallait se lever tôt, s'occuper des jeunes, préparer les enseignements... Ils n'avaient pas le temps, eux aussi, de se reposer ; il fallait rester sur le qui-vive, prêt à intervenir au cas où, toujours présent pour des recrues dans le besoin.
Mais là, à la maison, ils pouvaient suivre leur propre rythme, ne pas parler de la journée, rester tranquilles et ne pas bouger de leur fauteuil.
« Est-ce que tu veux aller voir ta famille aujourd'hui ? Si on se dépêche, on pourra y être pas trop tard.
— Hier soir, je t'aurai dit oui. Mais là, mon corps me fait trop souffrir.
— J'en aurai entendu des excuses de merde.
— D'accord. »
Un oiseau se posa dans l'herbe, sembla chercher une graine dans la terre du potager. Il s'envola aussitôt quand Lahssen fit un mouvement du pied dans sa direction. Plusieurs fois, il avait dit qu'il allait installer un épouvantail ici ; il ne l'avait toujours pas fait.
Et ils prévirent, au final, de se charger de ça mais le bruit de roues sur la route devant chez eux les intrigua.
« Tu attendais quelqu'un ?
— Non, tu es là. Je vais voir, reste là. »
Tout en râlant malgré tout, le brun se leva, partit à l'entrée. Peut-être que c'était quelqu'un qui s'était perdu ? C'était déjà arrivé, on pouvait facilement finir ici si on loupait le croisement pour la ville. Le son d'une discussion arriva aux oreilles de la femme, l'intrigua. Visiblement, c'était un homme. Il demandait sûrement son chemin, allait bientôt s'en aller. Tiens, d'ailleurs, le bruit des roues reprenaient, le voyageur devait avoir eu son compte...
« MAMIE ! C'EST POUR TOI !! »
Le cri de Lahssen la fit sursauter. Quoi ? Pour elle ? Qui ? D'un pas lent, la faute à ses jambes encore endolories, elle se dirigea dans le salon, marcha jusqu'à son ami. Mais elle s'arrêta à mi-chemin quand l'invité apparut dans son champ de vision, sourit tristement en sa direction.
« Cassandre ?
— Ça fait longtemps... »
Qu'importe que son corps fut encore courbaturé, que le brun regardait la scène, que ce n'était peut-être pas le moment ; Céleste se précipita dans les bras de son frère, le serra contre lui. En douze ans, la seule chose qui avait changé chez lui était son visage, bien plus noble et adulte. Et si elle avait cru se faire repousser par son aîné, elle se rassura en le sentant l'attraper en retour, embrasser le haut de son crâne.
« Tu es là. Tu es vivante. Tu es vivante...
— Je suis désolée... J'aurai dû te le dire, je-
— Non, tu as bien fait. Tu n'aurais pas été en sécurité. J'aurai seulement aimé te retrouver plus tôt... »
Il sentait bon le savon. La noiraude se raccrochait à cette odeur, ce simple fait qui le rendait réel ; dans son rêve, elle n'aurait pas eu accès à cette information. Cela voulait dire qu'elle était bien réveillée, que tout se déroulait pour de vrai.
« Mais quand même, Cæl, une révolution ? Déjà que ça sentait le faisan que le Major Smith m'a contacté, je ne pensais pas que vous iriez jusqu'à là. Et dire que tu t'es mêlée à tout ça.
— Tu vois ? Je te l'avais dit, c'est trop.
— Oui mais, au final, on sait tous que ça nous servira.
— Je ne dis pas le contraire. Cependant, c'était très osé de ta part de te remontrer au grand jour avec cette affaire. Tout le monde en parle, père ne sait plus où donner de la tête.
— C'est parfait. Plus qu'à-
— Attends. D'abord, est-ce que je peux m'installer ? Je ne comptais pas repartir avant un moment, on a quand même beaucoup à faire. Et je préfère d'abord te retrouver. »
Qui était-elle pour refuser cela ? Pourtant, elle ne bougeait pas, restait contre lui. En un instant, Céleste était redevenue une enfant qui réclamait son grand-frère, qui s'accrochait à lui de peur que tout s'effondre, qu'il ne disparaisse soudainement.
« Je ne vais pas partir, Cæl. Je t'ai perdue trop longtemps... »
Ce fut lui qui se détacha, garda malgré tout les mains de sa sœur dans les siennes. Lahssen était parti, avait en réalité récupéré le pauvre petit-déjeuner abandonné à l'extérieur et tout posé sur la table du salon.
« Vous voulez boire quelque chose ? On avait fait du thé ce matin mais si vous voulez autre chose, je peux-
— On peut se tutoyer. Et du thé, c'est très bien, merci. »
C'était peut-être la première fois que Céleste voyait son ami aussi... Poli ? Mais à l'instant où Cassandre permit une certaine familiarité entre eux, il retrouva son flegme habituel, arrêta de marcher dans sa propre maison comme s'il était un intrus.
« Mamie, tu ne veux pas t'habiller ?
— Si, je vais y aller. Je reviens vite. »
Elle avait envie de se dépêcher. Montant rapidement les escaliers, elle entendit les deux hommes s'installer sur le canapé, rester en silence. L'héritier Fosten prit néanmoins la parole, non sans se racler la gorge. Il avait beau être plus grand que le brun, il se sentait malgré tout écrasé par sa présence, par sa carrure qui ne laissait pas la place aux contestations. Peu importait son air tranquille, il voyait parfaitement qu'il n'était pas du genre à se laisser faire.
« C'est toi qui as pris soin d'elle durant quatre ans ?
— Il y avait Becca, aussi. Mais oui. C'est moi qui l'ai fait sortir quand tu es venu avec ton père la chercher.
— Je me disais bien t'avoir vu. En tout cas, merci. Je ne sais pas ce que Cæl t'a dit à propos de notre famille...
— À peu près tout. En quatre ans, on a le temps de faire le tour.
— Je vois. J'imagine que tu vas te mêler à tout ça, alors. Ça ne serait pas étonnant venant de son compa-
— Oh, je t'arrête tout de suite, on n'est qu'amis. Et je n'ai pas pour projet que ça change. Oui, je compte me mêler de tout ça. Pas parce que Céleste est ma femme ou quoi mais parce que c'est mon amie et qu'elle aura besoin d'aide. C'est tout. »
Ni plus ni moins. Le noiraud hocha lentement sa tête, se tourna vers ses mains.
« Je sais, la situation peut porter à confusion mais tu peux te rassurer sur ça. J'ai déjà une épouse.
— Vraiment ? Je ne l'ai pas vu. Elle est sortie ?
— On peut dire ça. »
L'ombre d'un sourire triste apparu sur les lèvres de l'instructeur ; Cassandre comprit aussitôt, murmura un « je suis désolé » gêné. Lui qui voulait créer une discussion tranquille avait mis les deux pieds dans le plat.
« Et... Becca. Vous avez des nouvelles d'elle ?
— Oui, elle vient de temps en temps manger à la maison. Elle trouve toujours le moyen pour dire que je cuisine de la merde. Enfin, j'ai l'habitude qu'elle me déteste cordialement.
— Cæl m'avait écrit que c'était parce que vous êtes de fortes têtes, tous les deux.
— Elle t'a parlé de nous ? Logique, tu savais qui j'étais.
— Peu, en réalité. Suffisamment pour me dire qu'elle était dans une bonne escouade... Avec le temps, les lettres se sont raréfiées.
— Eh ben, vous avez toute la journée pour rattraper vos douze ans d'éloignement. Évite juste de poser certaines questions, je n'ai pas envie qu'elle aille mal ce soir.
— Tu veux dire ? »
Un instant, juste un instant, Lahssen hésita à lui rentrer dans le lard. Déjà qu'il venait sans prévenir chez-eux, qu'il s'était comporté avec lui comme s'il le connaissait depuis des années, qu'il posait des questions débiles... Il n'avait pas la moindre idée ?
« Écoute, elle vient de passer presque une semaine à crapahuter dans la nature pour un coup d'état à la con. Je te laisse imaginer le stress. Et je pense que tu connais assez ta sœur pour savoir dans quel état elle est depuis quatre ans. Non, ne fais pas les gros yeux comme ça, on sait tous les deux que tu sais qu'elle est vivante depuis au moins trois ans. Je te l'ai dit, je sais tout. Donc tout ce qui concerne la santé, les relations personnelles et je-ne-sais-quoi, on évite pour le moment, d'accord ? »
Et peut-être pour sauver Cassandre, Céleste revint à cet instant précis, se posa près des deux hommes.
« Bon. On peut parler, maintenant ? »
CASSANDRE IS BACK C'EST TIPAR OSCAR,
LES VRAIES CHOSES COMMENCENT !!
https://youtu.be/rMhL5OuFKUM
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