ㅤ📃 CHAPITRE 59
Le début de l'automne signait le mariage de Lahssen. Puisqu'il s'agissait d'une cérémonie en petit comité, n'avaient été invités que l'escouade du futur époux et quelques collègues d'Ophélie. Cela n'était pas dérangeant pour les jeunes mariés et le brun avait même chuchoté que tout cela leur avait permis de limiter les frais pour l'événement.
L'excitation du soldat avait été communicative : tous ses camarades débordaient presque d'énergie le jour venu, s'agitaient dans le jardin pour finir les préparations. Toute la partie administrative se passait entre les deux amoureux, Caius et une amie proche de la jeune femme ; ainsi, les autres convives attendaient sur place et avaient décidé de tout mettre en place, si ce n'est plus encore.
« Zeyn tu poses ça immédiatement.
— Je fais attention, ne t'en fais pas.
— Tu casses, tu payes. »
Sous les regards paniqués de Jorj, Becca surveillait son ami blond. Ce n'était rien de grave mais puisque le garçon tenait dans ses bras un plateau de verres, il avait tout intérêt à faire attention à ce qu'il faisait.
Le jeune soldat jeta un coup d'œil derrière lui pour voir les autres invités, rougit jusqu'aux oreilles lorsqu'il vit que toute l'attention avait été portée sur les deux soldats. Vite, il essaya de retrouver Céleste pour qu'elle se charge de la situation mais la noiraude était invisible. Que devait-il faire ? Valait-il mieux ignorer la situation et laisser ceux qui se connaissaient depuis... huit ans ? Sûrement.
« S'ils continuent à faire n'importe quoi, tu as le droit de leur dire d'arrêter. »
Peut-être que la future bras droit était une sorcière ; elle venait d'apparaître dans le dos du garçon, parlait doucement près de lui pour ne pas être entendue des autres.
« Je ne sais pas... Je n'ai pas envie de les blesser ou quoi...
— Ces deux-là ? Jamais. N'hésite pas à leur dire ce que tu penses et s'ils râlent je serai là. »
Elle méritait son surnom de mamie. Au-delà de son âge, même si elle n'était pas si vieille que ça pour le roux, Céleste faisait penser à Jorj à sa propre grand-mère. Fière, avec un fort caractère, parfois taciturne, souvent sarcastique mais toujours présente. Peu importe l'événement, elle avait à chaque fois été là. Surtout quand il s'agissait d'un membre de l'escouade.
« Évitons de nous mettre la honte alors que les amis d'Ophélie sont là. Essaye de calmer ces deux zigotos pendant que je finis d'installer le reste, d'accord ? »
Le sourire tendre de la soldate fut contagieux ; le garçon avait désormais un léger rictus. Il n'était pas plus serein pour autant, ni prêt à arrêter Becca et Zeyn. Heureusement, ils s'étaient d'eux-mêmes calmés.
Le reste des préparatifs se fit bien plus calmement. On cuisina aussi la viande qui avait été secrètement achetée, s'amusa à décorer le jardin avec des guirlandes en papier, posa enfin les fleurs sur la grande table.
De l'extérieur, c'était une cérémonie bien simple, sans grands artifices et magie. Mais aux yeux de Lahssen et Ophélie, ce fut le plus cadeau qu'on pouvait leur faire. Il n'y avait peut-être pas d'orchestre mais les chants des collègues, la guitare apportée et les claquements de main suffisaient à donner un rythme. Et puisqu'on était un petit peu à l'extérieur du village, qui allait-on déranger en faisant du bruit ?
La journée se déroula dans les rires et joies. Tout le monde avait fini par se mélanger, discuter gaiement, danser autour du seul instrument de musique. Les jeunes mariés avaient été les premiers à valser, avaient fini par entraîner avec eux les autres invités.
Il n'y avait pas eu de grand discours, tout le monde se comportait comme s'il s'agissait d'une journée normale. Certes, les soldats ne reconnurent pas forcément leur camarade, bien plus tendre aux côtés de son épouse, mais ils n'avaient pas déclaré leur amour devant tout le monde. Cependant, on se doutait bien qu'il l'avait fait dans le creux de son oreille, assis à l'écart des invités.
Seule à table, Céleste regardait avec un grand sourire Zeyn tenter des pas maladroits avec une collègue d'Ophélie et Becca apprendre à Jorj allez savoir quelle bêtise. Elle n'avait alors pas remarqué Caius sur sa droite.
« Tout va bien ?
— Un peu mal aux pieds. Ça fait longtemps que je n'ai pas porté de talons.
— C'est vrai que tu es très élégante aujourd'hui.
— Merci ! Tu as beaucoup de charme aussi.
— Venant de ma mamie préférée, ce compliment me va droit au cœur. Je peux m'asseoir ?
— Bien sûr. »
Assis l'un à côté de l'autre, ils voyaient leurs quatre camarades évoluer dans le jardin. La noiraude tapa sur l'épaule de son supérieur pour ensuite désigner du menton leur camarade blond. Il était bien plus confiant avec sa partenaire, dansait avec elle de mieux en mieux. Le vétéran esquissa un sourire, pouffa, se pencha vers la jeune femme pour lui parler.
« Si le morveux finit avec la meilleure amie d'Ophélie, je demande à organiser le mariage.
— Qu'est-ce qu'il faut pas entendre comme bêtises.
— Dans tous les cas, je suis heureux que vous soyez ici. Même s'il n'y pas d'expéditions prévues avant fin octobre...
— On pourrait devoir sortir demain, on serait tout de même là. Je préfèrerai ne pas aller à l'extérieur et me faire tirer les oreilles par le major plutôt que les empêcher de s'amuser. »
Caius fixa les deux soldats avec sérieux. Il avait raison. Voir Jorj rire avec Becca et Zeyn danser était une chose trop précieuse. Insacrifiable.
Le jeune marié s'installa à la droite de la noiraude. Un instant, les trois se regardèrent en silence mais ce fut le plus âgé qui prit la parole.
« Et je suis heureux de savoir que tu pars, Lahssen. Tu vas nous manquer, surtout à moi. Je te connais depuis trop longtemps pour dire que ton absence ne sera pas remarquée mais je préfère que ce soit ainsi. Que tu sois avec ta femme ici. Ça m'étonne aussi que tu aies décidé de rentrer dans les brigades d'entraînement mais vu qu'il y a un campement pas loin, c'est assez intelligent.
— Je viendrai vous voir de temps en temps, promis.
— J'espère bien ! Et tu as intérêt à nous écrire, aussi !
— C'est vrai, qui va te remplacer dans la création de mots stupides avant une expédition.
— Sûrement pas toi, mamie, tu es bien trop élogieuse. »
Céleste se sentait bien. Mieux. Elle était heureuse. En entendant le brun parler, elle n'avait pu réprimer son pouffement. Oui, ça n'allait plus être pareil dès le lendemain mais ce n'était pas grave. Elle avait cet instant gravé dans son cœur et ça lui suffisait amplement. Elle pouvait elle aussi s'en aller d'ici quelques jours, elle savait qu'elle garderait à jamais ces souvenirs.
« En parlant d'éloges...
— Tu as le courage de faire un discours devant tout le monde ?
— Mon épouse le mérite. »
Peut-être que Lahssen avait attendu que la soirée s'installe pour rassembler tout le monde, attraper les mains de la jeune mariée et la guider au centre du jardin. Dans tous les cas, il s'était lancé après avoir bu un verre d'alcool, s'était faufilé parmi les invités et avait désormais un grand sourire.
« J'avoue, j'avoue, j'aurai dû le faire plus tôt dans la journée mais je n'osais pas. »
C'était bien quelque chose que le soldat pouvait faire. Se lancer sans vraiment savoir pourquoi ou comment dans une action, laisser les choses faire et avancer. Mais la dizaine d'invités regardait sans ciller le jeune homme, attendait qu'il parle. Qu'il avoue tout ce qu'il avait sur le cœur.
« Mais quand je me dis que tout le monde nous fixe maintenant, j'ai encore moins de courage que tout à l'heure. Pourtant... Je ne pourrai pas remettre ça à demain, ce serait trop cruel de ma part. Je me suis dit, à un moment, que je n'avais qu'à attendre que tout le monde s'en aille pour te faire un grand et beau discours... Tu mérites cependant que toutes les personnes présentes sachent à quel point je t'aime. »
Lahssen arrêta deux secondes de parler, plongé dans les yeux d'Ophélie. Une expression surprise avait pris place sur son visage.
« Ne fais pas trop l'étonnée, tout le monde va croire que je ne te le dis jamais.
— C'est un petit peu le cas.
— Quand il y a du monde. »
Si les collègues de la jeune femme pouffaient en voyant le brun chuchoter malicieusement, l'escouade regardait le couple avec des regards complices. Sûrement connaissaient-ils la voix qu'il prenait, utilisée à chaque fois qu'il fallait embêter les deux noiraudes ou effrayer Zeyn.
« Enfin... Ce n'est pas ça le plus important. Je pourrai parler du jour où je t'ai rencontrée. La mare aux grenouilles, tu te rappelles ? Je pourrai aussi raconter la fois où ton oncle m'a pourchassé avec une fourche. Ou celle où je suis définitivement tombé amoureux de toi. Je le ferai peut-être si on m'alcoolise beaucoup, ça serait drôle. Mais ce soir ? Aujourd'hui ? Rien n'est plus important que mon envie de parler de toi. De la femme qui a accepté de me suivre dans cette aventure, même si elle pouvait s'arrêter à tout moment. Qui a toujours été présente pour moi, même si nous avons vécu de longues périodes sans nous voir. Qui mérite le monde entier. Je sais, j'ai mis énormément de temps à préparer ce mariage. Tu es restée ma fiancée bien trop longtemps et si j'avais pu, je t'aurai épousée tout de suite. J'aurai peut-être dû.
— Tu sais bien que je m'en moque.
— Je sais ! Mais tout de même ! Je t'ai fait trop attendre. Et ce n'est pas juste. Voyons ! Becca me le dit tous les jours mais je la comprends maintenant, je suis vraiment stupide. Il n'y a pas d'autres explications. Si ce n'est l'argent... Mais, qu'est-ce qui justifierait sinon le fait de ne pas avoir épousé une femme comme toi ? Aussi belle, intelligente, drôle. Avec tellement de gentillesse. De bonté. D'humour. Chaque fois que je rentre à la maison, ce n'est que de l'amour qui m'accueille. Et si certains de mes camarades survivent dehors parce qu'ils ont une rage de vaincre ou une force hors du commun, c'est toi qui me sauves à chaque fois. Dès que je vais dehors, c'est ton sourire qui reste gravé dans mon esprit. Ainsi que l'idée que si je disparais, je ne pourrai plus jamais le revoir... Je pense que c'est ça qui me terrifie le plus. Et je serai vraiment idiot de ne pas le penser. Demain, tu le sais, je vais quitter le bataillon pour aller dans les brigades d'entraînement. Me séparer de mes camarades qui m'ont accompagné tout ce temps, que ce soit des mois ou des années, me déchire le cœur. Mais c'est être chaque jour terriblement loin de toi qui me déprime. Et puis, je me dis que si j'arrive à mater les futurs soldats, je serai parfait pour gérer nos mini-nous ! Parce qu'avec un peu de chance, ils auront mon sublime caractère. Enfin... Tout ça pour dire qu'aujourd'hui, je suis définitivement l'homme le plus heureux du monde. Et je le serai très certainement jusqu'à la fin de ma vie. Parce que personne ne peut me dire qu'il a comme partenaire une personne aussi formidable, avec un aussi grand cœur et un sourire encore plus magnifique.
— Lahssen...
— Je t'aime, Ophélie. Je suis heureux d'être à la maison avec toi, d'avoir construit ce foyer à tes côtés et j'ai hâte de le voir grandir. Ou rester tel qu'il est. Tant que c'est avec toi, c'est le principal. »
Le brun marqua une longue pause. Voulait-il ajouter autre chose ? Finalement, la jeune femme sourit, leva ses yeux au ciel et prit une grande inspiration.
« Je ne m'attendais pas à un discours, je dois bien te l'avouer. Mais j'imagine qu'en faire un aussi est de rigueur. Et même si ce n'est pas le cas, je vais le faire quand même. Que tu saches que je t'aime tout autant. Si ce n'est plus... Je sais que nous avons été fiancés longtemps mais ça ne m'a jamais dérangé. Tout ce qui m'a toujours tenu à cœur, c'était de savoir que tu rentrais vivant de tes expéditions et que tu reviendrais bientôt à mes côtés. Je suis heureuse, aujourd'hui, de savoir que je suis ton épouse. Peut-être que tu ne seras pas tous les jours présent mais tu ne seras jamais trop loin. Et ça me suffit. Parce que je sais que tu rentreras malgré tout à un moment et que je pourrai te répéter que je t'aime. »
ouin ouin, snif snif ; tant d'amour ? ; tant de douceur ? ; tant de bonheur ? ; ça fait du bien, ça fait plaisir, ouin ;
mes bébés ;
lahssen a réussi à se sauver les miches, bravo lahssen, c'est pas du tout parce que je l'ai promis à quelqu'un sous la menace (le bus, je parle de toi) ;
quel bonheur, quelle douceur ce chapitre, ça fait du bien, ça fait plaisir, nous disons oui, nous applaudissons ;
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