Chapitre 11
Comme le salon de son appartement, la chambre de Kyle est relativement épurée. Mais ce côté impersonnel est, disons... minimisé par le bazar installé un peu partout. Le bureau est rempli de livres, papiers, documents en vrac. Par terre, quelques vêtements traînent ça et là. Même sur le grand lit deux places, complètement défait, il y a aussi des objets de toutes sortes; entre autre des cahiers, un chargeur de téléphone, un ordinateur portable ouvert. Oui, clairement, Kyle a su personnaliser sa chambre à sa façon.
– Désolé, j'ai pas eu le temps de ranger.
Il passe sa main sur sa nuque, comme, je le comprends maintenant, à chaque fois qu'il est un peu gêné.
– Non, t'inquiète.
Je regarde un peu partout, ne sachant pas trop où m'assoir. Même la chaise de bureau est prise par une pile de linge. Il s'aperçoit de mon hésitation, et dégage rapidement les affaires sur son lit afin que nous nous y asseyons.
– Ca te va de dormir ici? Je vais changer les draps, t'inquiète pas.
– Non, non, t'embête pas. C'est parfait.
– Je t'assure, vaut mieux que je les change. Je dois t'avouer que j'attends toujours qu'ils sentent un peu le fromage pour le faire. Ca me permettra de les laver un peu plus tôt que d'habitude.
Je pouffe, et me demande s'il est sérieux. Je crois qu'il l'est, en fait.
– D'accord alors. Je vais t'aider.
Il sort des draps propres de l'armoire, et nous nous mettons tous les deux au travail. Et je ne peux qu'éclater de rire alors qu'il est empêtré à l'intérieur de la housse de couette noire et blanche.
– Ne te moque pas, dit-il d'une voix étouffée par le tissu, ou je t'enferme là dedans avec moi. Shit! Où sont ces satanés coins?
On finit par s'en sortir, et nous rasseyons sur le lit une fois celui-ci terminé.
– Tu veux dormir tout de suite? Je veux dire... on peut regarder un épisode d'une série sympa si tu veux. Ca s'appelle Safe. Je l'ai déjà commencée mais je te commenterai tout pour que tu puisses suivre. T'as vu que je suis très fort pour expliquer les films.
Je glousse devant son sourire malicieux, et repense à quelques-uns de ses commentaires acerbes à propos de Venom, tout à l'heure.
– Ca me va.
Il prépare l'ordinateur, pendant que je monte sur le lit et m'adosse contre le mur, les mains entourant mes genoux. Puis il place l'écran bien face à moi, et me rejoint. Il me prend dans ses bras alors que le générique débute. Et il trouve déjà quelque chose à critiquer à propos de la musique. Je sens que je vais passer un bon moment.
En effet. Il me fait tellement rire tout au long de la série, qui pourtant est du genre thriller bien stressant, que j'en ai presque des crampes aux joues.
Et puis, plus tard, alors que nous sommes lovés l'un contre l'autre, tous les deux silencieux, il me demande, les yeux rivés sur l'écran:
– Je peux te poser une question?
– Quelle genre de question? Si j'aime les séries genre Desperate Housewives mais avec des flics?
– Non, un truc plus sérieux.
Je stresse tout à coup. J'attends qu'il me pose sa satanée question.
– T'es pas obligée de me répondre.
– Vas-y Kyle, crache le morceau.
– Pourquoi t'as paniqué dans l'ascenseur?
Je ne réponds pas.
– Je sais que tu n'as pas peur de moi. Je te ferai jamais aucun mal, tu le sais, hein?
– Je préfère pas en parler, je le coupe sèchement.
J'essaie très très fort de me radoucir un peu.
– Si ça peut te rassurer, ça n'a rien à voir avec toi. Juste... un truc que je préfère oublier.
– D'accord, j'insiste pas.
Nous terminons de regarder la série en silence, et, finalement, optons pour un second épisode. Au bout d'un moment, je n'arrive plus à retenir mes paupières trop lourdes. Je tente plusieurs fois de les relever, mais elles finissent par avoir raison de moi et je m'endors tout contre Kyle, le meilleur endroit que j'ai jamais connu, je crois...
Je sens quelqu'un me déplacer de ma position si confortable avec une grande douceur, et m'allonger délicatement. Je ne me réveille qu'à moitié, lève une paupière, et tombe nez à nez avec un beau visage que je ne me lasse pas de regarder.
– Qu'est-ce que tu fais? lui dis-je, la voix enrouée par le sommeil.
– C'est l'heure de dormir, miss, me murmure-t-il avec un sourire.
Il commence à s'éloigner de moi, et je n'aime pas ça du tout.
– Tu vas où, lui demandé-je inquiète.
– Je vais me coucher.
– Reste avec moi.
Il plonge ses grands yeux bleu limpide dans les miens. Je le sens hésiter. Alors j'insiste un peu:
– S'il te plaît.
Il laisse passer un instant, avant de murmurer:
– OK.
Doucement, il s'allonge tout près de moi, et je peux reprendre la meilleure place au monde, pour m'endormir presque instantanément.
Quand je me réveille, il me semble qu'il est très tôt, ou très tard, je ne sais pas trop à vrai dire. Je crois qu'il fait toujours nuit. La pénombre me permet tout juste de distinguer la silhouette de Kyle, tout près de moi. Il est endormi, sur le ventre, un genou replié, la bouche entrouverte, et une main sur la courbe de mon flanc.
Un petit frisson me parcours l'échine. J'ai froid. Nous nous sommes endormis par dessus les draps que nous avons mis tant de temps à disposer sur le grand lit. Alors je me lève sans bruit, retire mon jean, et me glisse sous la couette pour essayer de me rendormir.
J'observe de nouveau mon américain endormi, poussée par une envie impérieuse de me blottir contre lui. Je n'aurais pas dû bouger, j'ai brisé le doux contact de ses doigts sur ma hanche. Alors je me rapproche tout près, la couette entre nous, et lui prends la main le plus délicatement possible, pour me placer sous sa paume chaude. Je regarde un moment mon bel au bois dormant immergé dans un sommeil profond, et tente d'imaginer quels sont les rêves qui le traversent. Et, petit à petit, mes yeux se referment pour retrouver le sommeil.
Une sonnerie absolument dissonante et insupportable me réveille brusquement. Je sursaute, me redresse rapidement sur le lit pour rechercher ce qui a osé me sortir de ce moment si paisible. Il se trouve que c'est l'alarme de mon téléphone.
Je me lève pour arrêter le plus vite possible le trouble-fête. Et la réalité finit de me sortir de mon état léthargique. J'ai cours dans moins d'une heure et demi. Je me tourne et vois deux grands yeux cérulés m'analyser. Je me rends alors compte que je suis en culotte. Mes bras s'entrelacent autour de mes cuisses dans un geste instinctif, et je cherche des yeux mon jean dans la pièce.
– Bien dormi?
Je n'ose pas le regarder pour lui répondre. J'attrape mon pantalon posé au pied du lit, et commence à l'enfiler, le visage certainement cramoisi.
– Euh, oui merci. Et toi?
– Ouais. T'as cours à quelle heure?
– Neuf heures trente, et toi?
– Dix heures. Je vais t'accompagner, je dois passer à la B.U.*
– D'accord, merci.
– Tu veux prendre une douche?
– Oui, si c'est possible, je veux bien.
Je dois sentir la transpiration et les odeurs pas très ragoûtantes du matin, et certainement ressembler à... pas grand chose, avec mon mascara passé d'hier.
– C'est la porte au fond du couloir. Je t'attends là. Sauf si tu as besoin de moi bien sû...
– Non, non, je le coupe. J'y vais.
Je l'entends rire alors que je sors de la pièce, les couleurs de mes joues une nouvelle fois ravivées.
Nous sommes dans le métro pour nous rendre à la fac, collés l'un à l'autre, et aussi à tout le wagon en fait. On est en plein dans les heures de pointes, et je suffoque dans cette chaleur émise par tous ces gens serrés les uns contre les autres, qui respirent tous le même air.
Heureusement que nous sommes dans la ligne 1. L'air y circule davantage. Au moins, les odeurs nauséabondes de transpiration et haleine du matin sont un peu plus diffuses. Et malgré ce moment qui devrait me sembler des plus désagréables, je ne souhaite pas qu'il se termine. Car, quand nous arriverons à la fac, la Cendrillon que je prétends être depuis hier soir se transformera de nouveau en fille insignifiante et seule au monde.
Kyle scrute mon visage et me souffle:
– Qu'est-ce que t'as?
Je ne dis rien, mais je crois qu'il lit sans mal les expressions reflétées sur mon visage.
– Ah ouais... On dirait bien qu'on est déjà "demain", hein?
Je ne peux que lui répondre de mes yeux grands ouverts, brillants d'humidité, braqués vers les siens, qui, me semble-t-il, n'en mènent pas large non plus.
On termine le trajet dans le bruit du métro, des gens, des pas, de l'effervescence ambiante, du stress, de la morosité des lève-tôt, mais il semble que nous, n'en faisons plus aucun de bruit.
* B.U. : bibliothèque universitaire
Bon... Et maintenant, on fait quoi alors à votre avis?
Et pourquoi j'ai choisi ce morceau... Une idée?
Safe, la série (pour les fans d'After, Hero joue dedans ;) :
J
e ne vous dirais jamais assez merci pour vos petites étoiles et commentaires, ça permet d'y croire et de poursuivre cette aventure avec vous ❤❤❤
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