Chapitre 3 : La poigne des aiguilles se referme sur mon cœur
"Cher Zoro.
J'ai eu ta dernière lettre il y a peu. je dois t'avouer que je l'ai dévorée des yeux un certain temps sans avoir le courage de l'ouvrir. C'était la première que tu m'envoyais et un flot de questions s'écoulait dans ma tête. Mais le temps usé à me torturer l'esprit en valut bien la chandelle, car en lisant je crus entendre ta voix, sérieuse et grave.
Le temps. J'avoue que c'est ce qui me fais le plus peur. cette sensation d'avancer à l'aveuglette pendant que les aiguilles font un tour, deux tours de cadrant.
Puis j'ai réalisé que chaque jour avançait avec la possibilité que tu puisses être mort. J'ai regardé l'horloge, puis j'ai réalisé que ça se jouait à la seconde, et non à la journée ou à l'heure. Et je restais là, assis sur ma chaise, à contempler le vide en attendant je ne sais quoi de revenir.
la vie normale.
la pensée que cela pourrait être dans quelques années m'horripile. Pire, elle m'effraie. J'ai peur, je l'admet. Chaque seconde est devenu un enfer, et pourtant, j'ai bien les pieds sur terre, c'est ça le pire.
Tout devient une éternité. Les choses banales que je faisais lorsque tu étais encore là, telles que travailler, me sont devenues lassantes. J'enchaine les clients avec l'envie de terminer la journée, mais la nuit je ne peux fermer les yeux. Et ça recommence, c'est un cercle vicieux. Je déambule comme une brise dans les couloirs de notre maison vide, l'écho de mes pas même me semble assourdissant, lourd, monstrueux, comme le tonnerre qui s'abat sur la terre dans un grand fracas.
Hier soir, j'ai eu cette lourde sensation dans la gorge, comme si on me la serrait, fort, très fort ; je m'étranglais de sanglots, mes yeux brûlaient. Je ne voulais pas pleurer pour rien, alors que tu étais là-bas, seul contre un danger immaitrisable. Étrangement, cette pensée me dérangea encore plus, et je finis ma nuit emmitouflé dans une couverture, sur le canapé, à attendre le soleil au delà de la fenêtre, sans vraiment avoir envie qu'il se pointe, avec sa vanité et sa prestance.
Le weekend, c'est bien le pire. Je n'essaie même plus de rien faire, et je m'en rend compte. le pire, c'est que je m'en fiche. J'ai l'impression de revivre un chagrin amoureux du lycée.
Le temps passe, il me nargue, mes journées ne deviennent qu'inquiétudes et espoirs.
L'horloge murale n'est plus là. J'ai dû la retirer.
Le tic-tac des aiguilles était insupportable
Encore plus lent que d'habitude
A chaque coup on me poignardait au cœur avec ténacité.
Pourquoi il a fallu qu'on soit séparé, pourquoi de cette manière ?
Tu sais, j'envisage sérieusement de..."
Zoro tourne la page. Elle était vierge. Il regarde encore une fois dans l'enveloppe. Il n'y avait rien d'autre que l'odeur imprégnée sur l'enveloppe de l'homme qu'il aimait, aucune trace de la suite. Zoro commença à s'inquiéter. Il le sut, car son cœur commençait à battre à la chamade.
Une angoisse soudaine lui glaça le sang.
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