Chapitre 30 : Disneyland Paris
– Vous êtes sûrs que vous n'avez besoin de rien ? Des sandwiches, peut-être ? Une bouteille d'eau ?
Je souris. Au début, nous ne devions pas rester très longtemps dans les Pyrénées françaises. Je veux dire, ni Andrew ni moi ne savions vraiment dans quoi nous nous embarquions, ni si la rencontre avec ma famille se passerait bien ou non. Nous avons fini par réviser nos plans – bien qu'on n'ait pas changé grand-chose puisqu'on avait décidé de faire au coup par coup.
Nous sommes restés près de trois semaines, finalement. Non seulement ça nous a permis d'apprécier le paysage – et la neige ! –, en plus de visiter un peu les lieux – à pieds, car comme dit précédemment : la neige ! –, mais surtout, j'ai pu me rapprocher un peu de ma famille. Je ne dirais pas que nous sommes les meilleurs amis du monde, il y a tant d'années à rattraper ! Pourtant, j'ai bon espoir que les choses s'améliorent. Ma grand-mère a même émis l'idée de venir nous rendre visite à Los Angeles, un de ces quatre, c'est dire ! Puis mon oncle a plaisanté sur le fait que mon père ne paierait certainement pas leurs billets, et sa remarque qui se voulait drôle a jeté un froid ; je ne lui en veux pas.
Aujourd'hui, nous voilà Andrew et moi, valises bouclées, en train d'attendre le prochain train pour Toulouse. De là, nous opérerons un changement pour Paris, et ensuite notre destination finale de cette année 2017 : Marne-la-vallée ! Eh oui, nous avons décidé de terminer cette année pleine de surprises à Disneyland Paris. Quitte à être en France, autant en profiter ! Quant à pourquoi le parc s'appelle Disneyland Paris alors qu'il n'est pas à Paris, cherchez l'erreur. Ils sont fous ces français – comment ça j'ai des origines françaises ?
– Mais vous êtes sûrs que vous ne voulez rien ?, redemande ma grand-mère pour la quatorzième fois au moins.
De nouveau, je secoue la tête.
– Non merci, c'est très gentil Suzette mais nous n'avons besoin de rien.
– Bon.
Je ne sais même pas pourquoi mes grand-parents ont tenu à nous accompagner à la gare à vrai dire, pourtant je dois avouer que ça me fait plaisir. Malgré la neige et le froid, ils ont pris le temps de s'occuper de moi : on sent qu'ils regrettent vraiment de ne pas l'avoir fait plus tôt.
Une annonce dont je ne distingue pas trois mots résonnent dans la gare, et le train arrive enfin. Le cœur un peu serré, je fais signe à mes grand-parents avant d'embarquer à la suite d'Andrew.
Est-ce que les français survivent vraiment à leurs voyages en train ? Est-ce que c'est toujours aussi compliqué ? Nous avons mis plus de douze heures pour faire un trajet qui aurait dû nous en prendre peut-être six ou sept grand maximum. Notre train Lannemezan-Toulouse est tombé en panne en pleine voie ! Et vu comment pestaient les gens, je suis presque certaine que c'est régulier. J'avais déjà entendu parler de la fameuse SNCF, la société qui monopolise les trains, par ma mère, mais le vivre en vrai, c'est une toute autre expérience !
Je dois reconnaître qu'Andrew a été très pro, vraiment très classe : il a pris son mal en patience avec beaucoup de maestria. Le pauvre, quelle expérience de la France pour lui ! Entre ma famille en froid pendant trente ans pour du manque de communication, la tempête de neige que nous avons essuyé pendant notre séjour dans les montagnes, et le retard conséquent de notre train ! Pas étonnant qu'il se soit endormi aussitôt allongé dans le lit de l'hôtel.
Nous n'avons même pas pu profiter des attractions quelques heures, comme c'était prévu à la base. Nous sommes arrivés assez tard pour que le parc soit tout bonnement fermé. Aussi, nous avons simplement pris notre repas puis sommes montés dans notre chambre.
En réalité, c'est une suite qu'Andrew a réservé. La suite Cendrillon. Je ne peux pas dire que j'aie manqué de quoi que ce soit, enfant, mes parents ont tous les deux des métiers qui leur permettent d'être à l'aise, financièrement parlant. Mais là, c'est d'un tout autre niveau. Tout est magnifique, ici ; en même temps, je suppose que c'est ce qui fait la magie de Disney.
Après avoir fait un brin de toilette dans la salle de bain incroyable – c'est une baignoire à remous ! – et enfilé mon pyjama, j'éteins la suite et me glisse dans les draps. La seule chose qui éclaire un peu les lieux est la faible lueur de la lune, derrière la fenêtre. Et dire qu'il a plu toute la journée !
– Hey..., murmure Andrew à côté de moi.
– Tu dors pas ?, je chuchote en retour.
De ses yeux entrouverts, il me contemple ; un demi-sourire étire ses lèvres. D'un bras, il m'attire à lui. Je pose ma tête contre son torse et ferme les yeux.
La respiration du brun se fait de plus en plus lente, de plus en plus régulière. Je le sens qui s'endort ; j'en suis incapable.
Aussi étrange que cela puisse paraître, nous n'avons jamais tenté de dormir dans les bras l'un de l'autre, au sens propre du terme. En général, on s'endort chacun de notre côté, et les fois où l'on dort ensemble... eh bien, on est simplement côte à côte. Ça me convient très bien, parce que de toute façon je n'arrive pas à m'endormir si je n'ai pas mon espace vital.
Je suis bien, collée à Andrew. Bercée par les battements de son cœur, je peux allègrement sentir son odeur que j'aime tant.
Je roule sur un côté, en espérant vainement que ça suffise pour que Morphée m'accueille dans ses bras. Celui d'Andrew suit mon mouvement, se cale sur ma taille : ses doigts reposent sur la petite parcelle de peau nue de mon ventre qu'a laissé filtrer mon pyjama. Je sens cette pression jusque dans ma moelle épinière ; visiblement, Morphée me refusera toute entrée dans son royaume pour le moment.
J'ai le dos appuyé contre le torse d'Andrew, nos jambes et nos bassins ne se touchent pas toutefois. Son souffle chaud s'écrase sur ma nuque, résonnant dans mon oreille ; il m'arrache une chair de poule. J'ai beau adorer le contact de mon petit ami, je suis cent pour cent consciente que jamais je ne réussirai à dormir. Je finis donc par m'écarter un peu de lui.
– Tu ne veux pas revenir ?, souffle-t-il alors.
Moi qui croyais qu'il dormait !
J'ai envie d'accepter sa requête, d'un autre côté je sais que si je le fais, jamais je ne m'en sortirai. Non seulement je commence à avoir mal à la nuque, mais en plus je sais que si je reste collée à lui, jamais je ne trouverai le sommeil. J'ai besoin de mon espace personnel pour m'endormir, c'est comme ça et ça le sera toujours, y compris avec l'homme de ma vie. Désolée de vous décevoir, mais sincèrement, vous trouvez ça agréable de dormir collé à quelqu'un ? Parce que pas moi.
– Non, est-ce que tu peux lever ton bras s'il te plaît ?
Il s'exécute avant que j'aie le temps de dire autre chose, il roule sur le côté et me tourne le dos. Je ravale ma salive ; je crois que je l'ai vexé, putain, c'est pas ce que je voulais ! J'ai peut-être été un peu trop cash ? Mais je suis fatiguée, j'ai passé une mauvaise journée, et je ne pensais pas qu'il s'irriterait pour si peu !
J'ai envie de lui expliquer ma réaction, mais j'ai surtout envie de faire pipi, aussi je me lève. Quand je reviens, Andrew dort sur le dos, la bouche ouverte, c'est presque si la bave ne lui coule pas sur le menton. Attendrie par cette vision, je me recouche et finis par m'endormir à mon tour.
C'est un rayon de lumière faiblarde pile dans ma face qui me réveille, le lendemain matin. Un rapide coup d'oeil à mon téléphone portable m'indique qu'il est neuf heures onze. Étrange que je ne me sois pas réveillée avant.
De la main, je tâte le lit à côté de moi : il est vide. Les draps étant encore chauds, je suppose qu'Andrew n'est pas levé depuis bien longtemps. Des bruits de pas me font me retourner : le brun sort de la salle de bain, les cheveux en bataille, uniquement vêtu de son caleçon.
Un jour, il faudra qu'on m'explique comment font les mecs pour dormir uniquement en sous-vêtements en plein hiver. Personnellement, si je ne porte pas un bon pyjama bien chaud, je ne me sens pas à l'aise. Évidemment, en plein été, je ne dors qu'avec une culotte ; là, nous sommes en plein hiver, à Paris qui plus est !
– Salut !, je lance en me redressant dans le lit. Bien dormi ?
Un grognement constitue sa seule réponse. Je sais qu'Andrew n'est pas foncièrement bavard le matin, mais tout de même !
– Quelque chose ne va pas ?, je m'inquiète.
Ne me dites pas qu'il est tombé malade ou un truc du genre ! Avec le temps de chiotte qu'on a, le froid et nos péripéties de la veille... Je n'en serais pas étonnée, toutefois ce serait triste pour lui d'avoir chopé la crève pour fêter la nouvelle année.
De nouveau, Andrew répond d'un grognement. Et soudain, je me souviens de hier soir, et du fait que je l'ai probablement vexé. Ce rappel me donne envie de lever les yeux au ciel. Il s'est vraiment vexé pour si peu ? C'est un gamin ! Néanmoins, je me force à placer mon égo de côté et lâche :
– À propos de hier soir...
– Tu vas m'expliquer pourquoi tu m'as rejeté comme une merde ?, me coupe le brun avec un haussement de sourcil.
Sa voix est sèche, je n'apprécie pas le ton qu'il prend. Je dois prendre sur moi-même pour ne pas répliquer avec virulence.
– Je m'y suis pas forcément prise de la bonne manière, je suis désolée, j'avance un peu sèchement. On n'a jamais essayé de dormir littéralement dans les bras l'un de l'autre, sinon on aurait forcément été dans cette situation avant.
Je soupire et repousse la mèche de cheveux ébouriffée qui me retombe dans les yeux.
– Y a rien pour toi, mon cœur, vraiment. J'adore être collée à toi, tout ça... C'est juste que j'ai besoin d'espace pour m'endormir, tu vois. Je ne comprends même pas comment ils font, ces gens qui dorment collés-serrés ! À croire qu'ils se fondent en une seule et même personne... Tu sais aussi bien que moi qu'on est trop exubérants, tous les deux, pour réussir ce genre d'exploit.
Ma plaisanterie le déride aussitôt, un demi-sourire naît sur ses lèvres.
– Alors comme ça, Églantine Roberts a besoin d'espace pour dormir ? Je n'aurais jamais cru ça possible !
Je lui balance un oreiller à la figure.
– C'est ça, moque-toi de moi !
– Ah, allez ! Tu sais que j'ai un égo facilement froissable.
Je pouffe tandis qu'il me renvoie le coussin, que j'intercepte d'une main.
– Parce que moi non, peut-être ?, je le hèle. À nous deux, on pourrait gagner le titre de champion du monde dans la catégorie susceptible.
– En attendant la remise officielle de ce titre, tu pourrais peut-être te préparer, histoire qu'on profite à fond de notre séjour ?
Je hoche la tête avant de m'exécuter. C'est vrai que nous n'avons pas pu profiter du parc hier soir, autant ne pas perdre de temps aujourd'hui.
J'ai toujours aimé les parcs d'attraction. En même temps, en vivant à Los Angeles, il est simple pour moi de m'y rendre, même pour une heure ou deux après les cours par exemple. Que ce soit Disneyland, Universal Studio, nous avons de bons endroit où passer le temps entre amis. Néanmoins, c'est cool de découvrir d'autres endroits.
Les attractions sont sympa – je suis particulièrement fan du Space Mountain –, et la parade fait rêver même si l'on n'est pas porté sur l'univers. Surtout que c'est la parade du nouvel an : j'ai l'impression de retourner en enfance.
Les spectacles se succèdent, nous enchaînons les attractions de nuit sur les musiques lancées par le DJ pour la soirée dansante. Bientôt, minuit approche et nous nous retrouvons dans la foule à attendre le feu d'artifice.
Quand celui-ci se déclenche enfin, annonçant minuit et illuminant le château, je passe mes bras autour du cou d'Andrew et l'attire à moi. Alors que nos lèvres se rejoignent dans un choc presque vital, je ferme les yeux. Nos baisers ont toujours le même goût d'urgence et de tendresse, pourtant je crois bien que même après des siècles, je ne pourrais m'en passer.
– Bonne année, Églantine Charline Roberts, glousse Andrew.
Je le serre un peu plus contre moi. Et dire qu'un an tout pile auparavant, je lui roulais une pelle également mais sans savoir qui il était ! De l'eau a coulé sous les ponts, depuis ; je n'imagine pas ma vie sans Andrew, à présent.
Je n'ai jamais été une grande romantique, pas du tout fleur bleue. Je me suis toujours contentée de peu dans mes relations, cependant je dois avouer que je suis ravie. Andrew a fait fort, et j'aime ça : le feu d'artifice tiré depuis le château de Disneyland Paris pour le Nouvel An, il y a de quoi en faire pâlir d'envie plus d'un.
– C'est Andrew Garfield..., chuchote une voix en français près de moi.
Je souris et relâche un peu mon étreinte sur mon petit ami.
– Les gens commencent à nous remarquer, je pouffe.
Il hausse un sourcil, l'air faussement étonné.
– Ah bon ? Et que penses-tu qu'ils diront si je fais, disons... ça !
Passant une main derrière ma taille, il me renverse sur sa jambe pour plaquer un véritable baiser Hollywoodien sur mes lèvres. Les murmures autour de nous s'intensifient, mais je n'y fais plus vraiment attention. Je glisse mes doigts dans les cheveux soyeux d'Andrew. Ses longs cils caressent les miens, et nos nez s'emboîtent à la perfection.
– Bonne année, mon inconnu, je murmure contre sa bouche.
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