Désir JVA : Couleur utopie
Demain, je te rêverai. J'ouvrirai les yeux et ne verrai que toi. Tu m'obsèderas chaque jour qui passera, il n'y aura pas une voix qui me semblera la tienne, pas un visage dont les traits ne me rappelleront les tiens, si beaux, si doux, si purs ! Tu envahiras mon cœur d'un sentiment inexplicable. De l'amour ? Je ne crois pas, il ne me semble pas, ça ne me fait pas envie. Je n'aime pas l'amour ; il est trop vu, trop connu, trop rêvé. Toi, je ne veux pas t'aimer. Je ne t'ai jamais vue, jamais je ne te connaîtrai, et je ne t'ai pas encore assez rêvée.
Demain, je m'envolerai. Je me noierai dans l'immensité brune du ciel de tes yeux émeraude. Sans amour toujours, sans aucun sentiment, sans rien que je m'autorise à nommer, de peur de te rêver trop typographiquement. Je ne veux pas d'un songe de lettres : je te veux belle, entière, façonnée d'images mouvantes. Mais aujourd'hui ne s'appelle plus demain, alors je t'écris des mots, des sons distordus en attendant de t'apercevoir.
Mais quand demain viendra, je ne te parlerai pas.
Tu seras belle à en détruire la grammaire, la conjugaison, la ponctuation, la langue toute entière ! Je ne saurai me rappeler de tout ce qui se rapporte à la voix, ta simple présence me fera oublier mes cordes vocales. Dès lors, je ne serai que l'instrument de ton éthérée splendeur, de ta peau céleste et tes doigts de nuages.
Demain, le monde changera. Poétisé par mes rêves ineffables, l'univers tournera autour de nous et de cette illusion de notre non-sentiment. Ce sera mieux ainsi, les émotions se nomment toutes, alors il est plus facile de ressentir autre chose sans que ça porte un nom.
Toi non plus, tu n'auras pas de nom.
Ça n'aurait pas grand intérêt, si tu étais nommable, tu serais tangible, tu serais réelle, et je devrais t'aimer. Le ressentir n'a pas à être une obligation.
Je préférerais ressangtir, vibrer en rouge, tressaillir à ton odeur âcre et métallique et toucher ton corps liquide et poisseux. Ce serait indéssang, un sangctuaire carmin de mort et de beauté. Je te veux rouge.
Demain, je t'entendrai. Je ne sais pas encore quelle forme aura ta voix, si les sons de ta bouche seront courbes ou crénelés, à quel point tes mots seront distordus. Je ne puis savoir. Tu ne cesses de changer après tout ! Insensible, innocente, indécente, impossible, paradoxale, tu n'es qu'un changement, des mots qui se transforment, se désordonnent. Tu n'est qu'une métamorphose. Tantôt belle et éthérée, tantôt rouge et sanglante, tu es l'image de la perfection imparfaite que je me suis toujours attachée à libérer.
Tu seras les couleurs. Pas un être beige et brun non, tu seras toutes les teintes, de tous les ornements. Tu seras mille arcs-en-ciel enchevêtrés. Ta peau sera un firmament pailleté. Tu seras vouge, jiolet parfois blorange. En toi, s'uniront toutes les teintes, surtout celles qui n'existent pas.
Demain tout sera différent. Ce sera un jour neuf, nouveau, un univers de tous les possibles ! Le monde devrait se réjouir de cette idée ! Pourquoi tout reste si terne, si morne ? Le ciel pleure des larmes fades. Tout est triste. Les souvenirs ressurgissent en moi. Voilà que la réalité revient me frapper.
Je ne te rêverai pas : demain ne viendra jamais.
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