Combat
Faim.
J'ai horriblement faim.
Je suis littéralement en train de mourir de faim. Ça fait quoi, deux, cinq jours que je n'ai pas mangé ? Je n'en ai strictement aucune idée, j'ai perdu la notion du temps.
Ce que je sais, c'est que je suis en train de torturer mon corps en lui refusant la moindre bouchée de nourriture. Et il se venge terriblement bien en me faisant ressentir ce manque de nutriment.
J'ai mal. J'ai faim.
Pourtant, je suis dans l'incapacité absolue de me sustenter.
Je ne peux pas. Je ne veux pas.
Je suis dans l'obscurité de ma chambre, comme d'habitude. Mon placard à bouffe est rempli de nourriture, mon ordinateur est chargé à 100% et mon téléphone est plein de batterie. Mes parents viennent de faire les courses, mais l'envie de manger ne me vient pas. Des vêtements traînent par terre, et mon lit est complètement défait. Les fenêtres et volets sont fermées, la seule source de lumière est l'appareil électronique nommé "ordinateur". La seule source de bruit est mon estomac qui se noue, se creuse et se tord. Il gargouille pour manifester son besoin vital, sa raison d'être. Mais je l'ignore, n'ayant pas la force d'accéder à sa demande malgré la tentation.
Je ne veux pas. Je ne peux pas. Je ne . . .
Un haut-le-cœur soulève mon organe digestif. Ai-je tellement faim que mon estomac décide de sortir de mon corps afin de se nourrir par lui-même ?
Je cours jusqu'aux toilettes et me penche au dessus de la cuve d'eau, mais rien ne sort. Pourtant, quelque chose semble vouloir sortir... Je suis secouée dans tous les sens mais impossible de vomir. Normal quand on a rien mangé de la journée, peut-être même depuis plusieurs jours . . . De violents spasmes me font trembler, et des larmes dévalent mes joues creuses. J'ai envie de hurler, de dégueuler, de cesser d'exister, qu'importe, mais que ça s'arrête !
Je n'en peux plus . . .
De la bile finit par sortir de ma bouche, et plonge dans un bruit épouvantable au fond de la cuve. En remontant mon œsophage, le liquide acide m'arrache un cri rauque. J'ai l'impression que des ongles aiguisées me griffent lentement le fond de ma gorge. L'odeur montant jusqu'à mes narines me donne encore plus envie de vomir, mais je n'ai plus rien à sortir. Si ça continue, ce sont mes organes qui vont s'échapper de mes lèvres gercées...
Après quelques minutes de lutte interminables, je m'effondre sur la lunette. D'un effort surhumain, je parviens à tirer la chasse. Ma main tombe lourdement le long de mon corps.
J'ai mal, j'ai faim, j'ai sommeil.
Pourquoi l'être humain est-il aussi faible ? Il y a tant de choses qui lui sont vitales ! Celui qui a dit que nous sommes une espèce supérieure aux autres doit être aveugle et complètement con, car je ne comprends pas comment on peut penser une telle chose.
C'est avec ce genre de pensées que je m'endors d'épuisement sur l'inconfortable toilette.
Je me réveille bien plus tard, une douleur à la joue et des courbatures partout. Je me lève avec difficulté et manque de tomber. Je me rattrape de justesse et marche péniblement jusque ma chambre. L'avantage de vivre dans une famille aisée est d'avoir une salle de bain reliée à sa chambre. Ainsi, pas besoin de sortir de ma piaule au risque de croiser des gens en se rendant aux toilettes. C'est l'un des très rares points positifs qui me font apprécier mes parents.
Toc Toc.
Quand on parle du loup... Je serre les dents. Je n'ai pas envie de parler, d'avoir le moindre contact avec l'extérieur.
- Ça va ? Ton frère dit avoir entendu des bruits étranges... Comment tu te sens ?
Malgré l'obscurité, j'attrape un bout de papier et un stylo, puis griffonne quelques mots dessus avant de le faire glisser sous la porte. "Pardon de vous déranger, je vais mieux." Mon père n'insiste pas, il sait que ça ne sert à rien. J'entends avec soulagement le bruit de ses pas s'éloigner, puis me dirige vers mon placard à bouffe. Malgré le dégoût que je ressens suite à ma régurgitation et l'odeur répugnante toujours présente dans mes narines, j'attrape une bouteille de limonade et m'installe sur mon lit. J'avale une petite gorgée directement au goulot et sens le pétillement de la boisson sur ma langue. Le gout acide me fait grimacer, mais il est bien meilleur que celui de la bile. Loin d'être repu, mon estomac gargouille, mais c'est tout ce que je peux lui offrir. Je n'ai pas assez de force pour prendre un repas complet, et de toute façon je n'en ai pas envie.
Mes doigts glissent tout seuls sur la clavier de mon ordinateur, et en deux clics je lance un épisode de Mob Psycho 100 en buvant la boisson gazeuse. Casque branché, couette enroulée autour de mon corps frêle, je souris. Je préfère largement quand ma journée se déroule comme ça.
Je vénère les humains qui ont inventé les mangas et animés, le Streaming et Netflix. Voilà bien une chose que j'adore, au milieu de ce monde que je hais.
Le virtuel est tellement mieux que le réel . . .
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