Chapitre 5



Zhayar cligna lentement des paupières avant de plisser les yeux pour mieux la détailler. Il attendait avait impatience qu'elle daigne enfin se retourner subjugué par la longueur de ses cheveux blonds comme le blé légèrement nuancé par des reflets vénitien. Il fit un pas dans sa direction cherchant un moyen d'attirer son attention alors que l'excitation qui courrait dans ses veines palpitait à mesure que son corps pivotait lentement dans sa direction. Mince et petite, la jeune femme semblait trop frêle mais alors que ses yeux parcouraient sa silhouette, enfin, son visage lui apparut dissimulé par ses cheveux. Zhayar rompit tout geste, tout mouvement et ses doigts se refermèrent contre sa paume. Désarçonné à nouveau, Zhayar retint sa respiration quand enfin elle se retourna complètement et leva sa paire d'yeux vers lui. À cet instant, alors qu'il s'était longuement préparé à faire face au pire Zhayar serra convulsivement les mâchoires alors qu'un maelstrom d'émotions se propageait en lui. Deux grands yeux de couleur aigue marine se plongèrent dans les siens.

Banale ? Lui avait-on dit ?

Une furieuse colère envahissait tout son être alors qu'il poursuivait son observation. Elle n'avait aucune imperfection, rien ! Pas même un défaut susceptible de l'empêcher d'étrangler Hassan pour lui avoir délibérément menti !

Sa peau d'albâtre semblait aussi lisse que de la soie. Ses traits étaient proche de la perfection si on retirait les cernes sous ses yeux brodés de longs cils. Quant à sa bouche, pulpeuse et aussi rouge qu'un fruit défendu...elle était dessinée pour être embrassée.

Conscient de la dévisager comme un fou furieux Zhayar tenta de détendre ses traits pour ne rien laisser paraître de son tumulte intérieur. Malheureusement il ne parvenait pas à détourner son regard de cette petite poupée sortie tout droit d'un roman historique qui portait un manteau dix fois trop long pour elle, dissimulant une robe nacrée. L'avait-elle démasqué ?

Zhayar observa son expression et nota une légère frayeur dans ses yeux. Elle semblait très timide, les yeux perdus dans la pièce, évitant soigneusement son regard.

- Bonjour, votre majesté...

Oui, c'était bien elle.

Pendant un court instant il avait songé à une fausse blague de la part d'Hassan. Hélas sa voix douce était bien celle qui le hantait depuis plus d'un mois. Des souvenirs désagréables lui revinrent à l'esprit.

Voilà à quoi ressemblait la jeune femme qui avait supporté ses colères, ses rages, sa méprise, cette table qu'il avait renversée afin de lui faire peur ?

Maintenant qu'il pouvait voir son visage fin, il imaginait très clairement les expressions horrifiées qu'elle avait pu esquisser tout au long de son séjour au palais.

Puis d'autres souvenirs se mirent à l'envahir.

C'était cette jeune femme qui lui avait porté secours cette fameuse nuit de douleurs insupportables. C'était cette jeune femme qui chaque jour lui avait prodigué tous ses soins...

Zhayar dévia son regard, le visage crispé. Une pointe de culpabilité lui serra le cœur.

- Bonjour Liya, parvint-il à dire d'une voix grave.

Les mains liées contre son vente Liya sentit un courant d'air froid dans son dos. Une étrange émotion lui comprima la poitrine. Il n'avait pas changé. Un mètre quatre-vingt-dix de puissance et de virilité. Des cheveux noir de jais, un nez busqué, des traits menaçants et des cicatrices toujours aussi intimidantes sillonnaient son visage hâlé. Ses puissantes mâchoires volontaires et d'acier étaient contractées quant à son regard, Liya avait l'impression que la pièce tournait autour d'elle. Elle avait l'impression d'être observée différemment. Bien des fois il était parvenu à plonger son regard dans le sien sans s'en rendre compte. Cette fois-ci tout semblait différent.

- Comment allez-vous votre altesse ? Le voyage s'est-il bien passé ?

Elle se voulait polie, respectueuse envers lui, envers ce geste qui avait beaucoup d'importance pour elle.

- Le voyage...était agréable, articula-t-il d'une voix étrange.

Devant la froideur impénétrable du cheikh Liya eut envie de faire demi-tour.

- Venez donc vous asseoir.

Elle sursauta quand ce dernier tira l'une des chaises un peu trop brusquement. Liya eut envie de l'aider mais se résigna lorsqu'il prit place sur l'une d'elles, impassible, le regard légèrement dévié dans sa direction.

Zhayar la vit s'approcher le regard baissé et se demanda si c'est ce qu'elle faisait depuis le début de leur rencontre. À cette époque pourtant si proche, il ne pouvait pas la voir alors pourquoi se donner tant de peine ?

Un violent sursaut intérieur l'obligea à se redresser.

Le harem, le bain au lait d'ânesse...elle nue et pudique...

Son regard remonta lentement vers elle, Zhayar sentit ses lèvres frémir dangereusement en l'observant.

Elle semblait si perdue qu'elle donnait l'impression de ne pas savoir quoi faire de sa propre personne. Timidement et d'une main tremblant elle se pencha en avant pour aligner les couverts dressés sur la table.

Cette attention particulière lui noua la gorge lui rappelant alors celle lors du dîner avec Chléo.

Chléo qui avait sûrement dû jouir de lui mentir au sujet de la jeune femme et de son apparence. En fait, tout le monde avait tenté de le trompé sauf elle.

Zhayar prenait peu à peu conscience que la jeune femme semblait ignorer le reflet qu'elle renvoyait. Son univers se bornait à quatre pâtés de maisons, cela ne faisait aucun doute.

Pouvait-elle être aussi naïve ?

Très vite Zhayar prit la décision de mettre fin à ce numéro qui laissait croire qu'il ne voyait toujours pas.

- Je suis heureux de vous revoir Liya.

Ses yeux s'alanguirent soudain de bonheur.

- C'est vrai ? Vous le pensez sincèrement ?

Zhayar ne put s'empêcher de braquer son regard dans le sien pour y voir clairement de l'incertitude, une peur rationnelle qu'il ne s'expliquait pas.

- Bien-sûr, affirma-t-il en forçant un sourire.

- Et...vous.? Votre altesse ? Comment se passe vos affaires et votre pays ?

Sans s'en rendre compte elle venait de lui tendre une perche qu'il s'empressa de saisir.

- Mustapha est mort.

Elle ouvrit la bouche, les yeux écarquillés.

- Oh...je...mais que s'est-il passé ? Vous avez réussi à l'attraper ?

Zhayar serra son poing contre sa cuisse. Mustapha avait eu pour projet de l'enlever, maintenant il savait pourquoi...

Il ne regrettait pas de l'avoir infligé cette blessure mortelle à la base de son cou. Oh non, il ne regrettait rien !

- Il s'est introduit dans le palais dans le but de me tuer.

Les yeux verts de la jeune femme se mirent à le dévisager.

- Mon dieu vous n'avez rien ?

- Non, j'ai réussi à le tuer du moins la chute qui a suivie mon attaque l'a tué, nous avons chutés du balcon.

- Nous ? Coassa-t-elle l'air paniqué pour lui ; Vous êtes tombé avec lui ? Est-ce que vous allez bien ?

Zhayar ne put s'empêcher de sourire.

- À vous de me le dire, comment me trouvez-vous ?

La jeune femme leva les yeux au ciel. Zhayar plissa les yeux en se demandant si c'était la première qu'elle le faisait.

Il baissa les yeux sur la table et toutes les questions qui fusaient dans tête prirent fin quand son regard s'attarda sur la bague de fiançailles qui ornait son doigt.

Pour une raison qu'il ne prit même la peine de comprendre sa vision devint subitement rétréci par une noirceur indéchiffrable.

Était-ce la raison qui l'avait poussé à le faire venir ici ? Pour lui annoncer son mariage prochain ?

Avait-elle trouvé l'homme de sa vie en aussi peu de temps ? Au lieu de s'en réjouir Zhayar braqua son regard dans le sien et comprit que la froideur qui l'accompagnait était perceptible puisqu'elle se recula contre le dossier de la chaise.

- Je suis heureux d'être tombé avec lui Liya car il s'est pour ainsi dire produit un miracle.

La jeune femme devint subitement livide alors que c'est beaux yeux limpides brillaient d'une peur dont il n'éprouva aucune satisfaction.

Il se contenta de se pencher, le regard braqué dans le sien.

- Vous ne devinez pas lequel ?

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