Chapitre 39



  - Est-ce que tu es sûre Liya ?

Elle leva les yeux au ciel pour la seconde fois esquissant un faible sourire amusé.

- On sera bien ici, affirma-t-elle en déballant le dernier carton de livres.

Son père se laissa tomber dans le canapé avec humeur. Essayant vainement de ne pas y faire attention Liya faisait mine de trier les livres par catégorie alors que son esprit était en tumulte. Elle savait pertinemment que son père n'était pas pour la laisser seule dans cette appartement au centre de Seattle mais il était temps pour elle de penser à l'avenir même si ce dernier lui semblait encore incertain.

- J'espère que tu as pris la bonne décision, déclara son père en se passant une main sur le visage.

Sachant qu'il ne disait pas tout sur le cours de ses pensées Liya se tourna vers lui, les lèvres tremblantes, la gorge nouée.

- Je t'en prie papa, dis-moi ce que tu as sur le cœur, j'ai besoin de connaître le fond de ta pensée. Même si j'ai l'étrange sensation que je ne vais pas aimer ça.

Il bougonna dans sa barbe, balançant sa tête de droite à gauche.

- Je pense que tu devrais l'informer sur ta grossesse.

Effectivement, elle n'aimait pas ça, songea-t-elle en croisant les bras contre sa poitrine.

- Ce n'est pas toi qui m'a dit que tu ne voulais plus qu'il s'approche de moi ?

- Oui c'est vrai, admit-il en soupirant ; À présent les choses sont différentes. Tu es enceinte Liya et seule par-dessus le marché.

Liya préféra se retourner et poursuivie de feindre l'impossible. Dangereusement les larmes commençaient déjà à rouler sur ses joues.

- Je vais y arriver parce que je suis forte, articula-t-elle en essuyant furtivement sa joue et je ne veux plus jamais parler de cet homme à partir de maintenant.

- Tu es peut-être une femme forte ma chérie mais les circonstances ne te permettent pas de lire dans l'avenir, rétorqua son père en se levant difficilement ; Tout peut changer du jour au lendemain.

Liya laissa échapper un rire amer.

- Je ne dirais pas mieux ! S'exclama-t-elle en secouant de la tête ; Néanmoins je peux t'affirmer avec certitude que je saurais me débrouiller.

Instinctivement elle porta sa main à son ventre. Trois longs et affreux mois s'étaient écoulés depuis la dernière et unique fois qu'elle avait vu Zhayar et même si son cœur était déchiré en mille morceaux elle refusait de lâcher prise maintenant.

- Je ne peux aller contre ta décision, abdiqua son père en baissant la tête.

Forte de cette décision elle hocha de la tête puis lui sourit afin que cette terrible culpabilité qu'elle lisait dans son regard cesse enfin.

- Il est temps d'y aller papa, je vais me débrouiller pour le reste.

Hésitant il lui embrassa la joue puis s'en alla, la laissant seule dans cet appartement silencieux. Le goût de l'amertume commençait seulement à s'atténuer. Elle ne ressentait plus de colère envers lui mais ne put s'empêcher de se demander ce qu'il devenait. Son regard se riva alors vers son ordinateur portable mais elle prit la décision de ne pas y toucher ayant la crainte d'y trouver des informations qui pourraient l'anéantir.

Une fois le dernier carton vidé elle s'installa sur le canapé, submergée d'un bonheur pur. Celui de devenir maman.

Cette perception de l'avenir l'a ravissait à tel point qu'elle l'imaginait dans ses bras.

Perdue dans ses pensées elle n'entendit pas tout de suite la sonnette retentir. Les sourcils froncés elle se leva pour ouvrir la porte et fut sous le choc de découvrir Jamila, avec son bébé, le regard rempli d'un vif soulagement.

- Jamila ! Souffla-t-elle sous le choc.

Sans plus tarder elle poussa la porte pour pénétrer à l'intérieur et posa le berceau sur le canapé.

Trop submergée par l'émotion Liya se contentait de la regarder sans pouvoir traduire le moindre son.

- Liya, ma petite Liya, murmura-t-elle avant de l'enlacer ; J'étais si inquiète ! Comment allez-vous ?

- Comment m'avez-vous trouvée ? Comment êtes-vous parvenue jusqu'ici.

Jamila l'examina minutieusement, paume sur sa joue.

- Hassan m'a exhorté de quitter le pays, je devais partir pour la France mais j'ai changé m'a destination au dernier moment.

- Pourquoi ? Que se passe-t-il ?

Tristement elle secoua de la tête.

La petite Louane poussa un petit cri d'alarme. Eberluée elle posa son regard sur l'adorable bambin qui s'agitait dans son berceau et l'émotion la submergea.

- Je ne pouvais pas vous laissez ainsi dans l'ignorance plus longtemps, commença-t-elle en prenant Louane dans ses bras ; Si Zhayar vous a quitté c'est pour vous protéger.

Liya étouffa un rire incrédule.

- Je ne pense pas que cela soit suffisant comme explication Jamila, il m'a quitté au pied de ma porte sans me donner aucune explication.

- Et il est en train de s'en mordre les doigts, rétorqua-t-elle lorsque Louane se calma enfin ; Il ne vous a jamais quitté, il vous a menti pour vous protéger de Mustapha.

Liya cilla sans trop comprendre. En réalité elle en avait assez de tout ces mensonges, de toutes ces énigmes qu'elle ne parvenait pas à expliquer ni même à déceler.

- Je peine à comprendre et je crois sincèrement qu'il est inutile de poursuivre j'en ai assez Jamila.

- Attendez Liya, la supplia Jamila en posant sa main sur son avant-bras ; Lorsqu'il a trouvé des preuves de menaces extérieurs et que Jack Carter était dans le coup Zhayar a fini par comprendre qu'il y avait un grand danger au sein même de son pays.

S'efforçant d'écouter Liya abaissa ses mains près de son ventre pour le cacher.

- Jack Carter travaillait pour Mustapha, nous avons tous cru qu'il était mort mais nous nous sommes trompés. Mustapha avait pour plan de vous enlever et de faire un échange avec Zhayar.

Liya frémit, un frisson parcourut son échine.

- Zhayar devait impérativement vous tenir à l'écart et donner l'illusion que vous n'étiez plus qu'un souvenir pour lui.

Luttant contre les larmes qui menaçaient de tomber sur ses joues Liya secoua de la tête.

- Il avait d'autres solutions Jamila, murmura-t-elle anéantie.

Jamila demeura interdite consciente qu'elle avait raison.

- Il aurait pu me dire la vérité, au lieu de ça il s'est enfuie comme un voleur sans explication, ajouta-t-elle en la dévisageant les larmes aux yeux ; Voilà bientôt quatre mois que je suis seule et sans nouvelle de sa part.

- Liya, commença-t-elle désespérément ; Je crois qu'il n'a pas su comment s'y prendre. Il avait peur qu'il vous arrive quelque chose.

- Hassan vous a éloigné d'Elhazar pour votre sécurité tout en vous disant la vérité, nota-t-elle en se retournant comme une âme en peine.

- Certes, je l'admet, il s'est comporté comme un imbécile, mais à l'heure où nous parlons il parcourt les montagnes pour trouver Mustapha, il se bat dans l'unique but de vous retrouver.

Liya appuya ses mains sur le plan de travail, les yeux fermés puis inspira profondément avant de répliquer ;

- À l'heure où nous parlons je suis enceinte de trois mois et demi et je suis toute seule.

Jamila hoqueta, les yeux écarquillés.

Avec l'énergie du désespoir elle se tourna vers elle pour la confronter.

Immédiatement celle qu'elle avait considéré comme sa mère baissa les yeux sur son ventre légèrement arrondi et les mots semblaient lui manquer.

- Vou..vous êtes enceinte ? Répéta-t-elle d'un souffle.

- Je l'ai su quelques semaines après son départ.

- Mon dieu ! S'exclama-t-elle en s'approchant pour la prendre dans ses bras.

Ce geste était réconfortant, il était même parlant...il disait...je suis là.

Mais la présence de Jamila ne serait pas suffisante pour étouffer cette douleur, cette impression d'avoir été abandonnée même si le but était de la protéger.

- Tout ira bien Liya je...

- Non, au contraire tout va mal, la coupa-t-elle en se passant les mains dans les cheveux ; Je suis fatiguée physiquement et je...je ne sais plus quoi penser.

- Zhayar regrette la manière dont il a agit, je vous en prie laissez-lui une chance de s'expliquer avant de le blâmer. Je crois que l'amour qu'il ressent pour vous l'a totalement dépassé.

Liya inspira profondément dans l'espoir d'atténuer ses douleurs intérieurs. Elle croyait Jamila mais ne comprenait pas pour quelle raison l'avait ainsi traitée, ne lui offrant même pas sa confiance.

- Ce qui m'importe aujourd'hui c'est mon bébé et l'avenir que je peux lui apporter, Zhayar lui, a un royaume à gouverné et ce monde ne me correspond pas.

Elle marqua une pause avant que Jamila s'approche, les traits tendus.

- Je crois Liya que vous ne connaissez pas Zhayar comme je le connais, il ne reculera devant rien pour se faire pardonner.

Liya sentit son coeur se serrer avant qu'elle ne rajoute ;

- Même s'il doit avoir du sang sur les mains...

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