Chapitre 2



Si Liya espérait obtenir l'aide du cheikh Al Elhazar elle préférait garder le silence face à son père complètement démuni. Elle ne voulait pas lui créer de faux espoirs qui pourraient mettre sa santé en danger. Elle quitta la maison pour se réfugier sur le perron. Elle s'installa sur la balancelle puis s'entoura de ses bras, exhalant un soupir tremblant. Cette idée paraissait si stupide qu'elle se mit à rire nerveusement. Se pourrait-il qu'il soit sensible à son malheur ? Après tout elle avait été pour lui une employée, son infirmière et parfois son souffre douleur. Est-ce que cette raison était suffisamment valable pour qu'il lui vienne en aide ?

Si son corps paraissait épuisé son esprit ne parvenait pas à oublier l'avenir désastreux qui l'attendait. Perdue voire abandonnée Liya tentait vainement d'échapper à cette solution en essayant désespérément d'en trouver une autre.

- Bonsoir Liya...

À cette voix volontairement lente Liya se redressa, le cœur battant de peur. La balancelle heurta le mur de la maison lorsqu'elle se leva d'un bon.

- Jack ? Quelle...surprise...

Le jeune entrepreneur monta les marches pour venir à sa rencontre. D'instinct elle recula, réprimant une amère grimace.

- J'espérais vous emmener dîner ce soir, histoire de nous connaître un peu mieux.

Dans ses yeux, une lueur de satisfaction passa lentement, laissant croire que ses projets étaient bien plus précis qu'un simple dîner.

- Je regrette, papa ne se sent pas bien du tout.

Liya s'entoura de ses bras, les yeux baissés lorsqu'il esquissa une moue dubitative.

- Quel dommage, j'espère qu'il ira mieux car j'ai bien l'intention de réitérer ma demande demain. Vous devez comprendre Liya que notre mariage aura lieu au plus tard dans moins de quatre mois. Si nous voulons paraître crédible, il faut au moins nous connaître.

- Vous avez attendu mon retour à Seattle pour me traquer afin de me soumette à un terrible chantage, vous n'allez pas me faire croire que vous n'avez pas fait quelques recherches sur moi, lança-t-elle avec sarcasme.

Jack se mit à rire comme si cette petite pic ne l'atteignait pas...comme s'il était conscient du pouvoir qu'il avait sur elle.

- Ne soyez pas malpolie Liya vous savez comme moi que ce petit ton dédaigneux ne vous mènera nulle part.

Liya se mordit l'intérieur de la joue, lèvres serrées.

- Vous êtes l'homme le plus monstrueux que j'ai jamais rencontré, je pense que cela suffira, inutile d'un dîner pour apprendre à connaître le fond de ma pensée, rétorqua Liya en s'éloignant.

Il la rattrapa par le poignet, serrant suffisamment sa prise pour lui arracher une grimace. Une peur grandissante l'empêcha de protester alors qu'il arborait un sourire arrogant doublé d'un rire sardonique.

- Comme je le vous disais votre comportement ne vous mènera à rien si ce n'est quelques soucis et vous savez exactement où je veux en venir.

- Lâchez-moi ! Vous me faites mal ! Protesta-t-elle en tentant de se dégager.

Plus elle résistait plus elle sentait son poignet se tordre, lui arrachant une plainte de douleur.

- Est-ce que c'est clair ?

Liya s'empressa d'acquiescer pour mettre fin à cette douleur insupportable.

- Bien, fit-il satisfait en la relâchant.

De violentes douleurs l'obligèrent à se pincer les lèvres tout en massant son poignet douloureux. Pour garder un semblant d'honneur Liya lutta tant bien que mal contre les larmes qui lui picotaient les yeux, menaçant de tomber d'une seconde à l'autre.

- Demain, nous irons dîner afin de mieux nous connaitre, n'est-ce pas Liya ? Décréta ce dernier en s'abaissant à sa hauteur, venant glisser ses doigts sous son menton pour l'obliger à relever la tête.

Le ventre noué, le cœur lancinant, Liya hocha de la tête cherchant désespérément à éviter le baiser qu'il venait d'écraser sur ses lèvres. Incapable de réprimer une grimace de dégoût elle préféra se retourner pour essuyer ses lèvres, ouvrant la porte à la volée pour mieux la refermer.

- Liya ? Tout va bien ? S'alarma son père.

Prudemment elle tourna le dos à son père le temps de reprendre une respiration convenable tout en posant sa paume de main sur son poignet rouge afin de le cacher.

- Ou...oui tout va bien, je suis juste un peu fatiguée.

Lorsqu'elle se retourna, son père referma son journal à la hâte.

- Tu es toute pâle, ta voix tremble, est-ce...

- Je viens de te dire que tout va bien, le coupa-t-elle en grimpant l'escalier pour se réfugier dans sa chambre.

Une fois à l'intérieur Liya céda aux larmes qu'elle gardait depuis trop longtemps n'ayant pas le souvenir d'avoir ressenti une telle peine une telle peur l'envahir au point de plus pouvoir respirer. Elle baissa les yeux sur son poignet, essuyant furtivement ses lèvres au passage. Cette douleur lancinante était-elle la première d'une longue série ? Etait-ce un avertissement de ce qui l'attendait ?

Soudain sa tête se mit à tourner et une violente nausée lui serra la gorge. Elle se jeta sur son lit, la tête dans l'oreiller, cherchant à étouffer son chagrin. Une fois ressaisie, Liya se redressa sur le lit, examinant la bague de fiançailles qui ornait son doigt.

Des centaines de questions envahissaient son esprit à mesure qu'elle l'observait.

Serait-elle assez forte pour survivre à ça ? Allait-il se lasser d'elle et exiger un divorce dans l'année ? Avait-elle une issue de secours si jamais elle acceptait ce mariage ?

Il y avait bien pire !

Si Jack Carter désirait dîner demain soir avec elle, Liya le soupçonnait d'avoir d'autre projet pour elle. Des projets qui l'effrayaient au point d'en avoir le souffle coupé. Elle avait bien vu son regard jadis quelques minutes. C'était un regard d'un homme en quête d'un petit avant-gout de ce qui pourrait l'attendre une fois marié.

- Chérie ?

Son père n'attendit pas son autorisation pour pénétrer dans sa chambre.

- Papa s'il te plaît je...

Il vint s'asseoir près d'elle et lui essuya la joue, un triste sourire aux lèvres. A les regarder, là assis comme deux âmes en peine Liya avait l'impression que la mort les attendait.

- Si on prévenait la police je suis...

- Jack Carter possède une entreprise qui est en pleine croissante mondiale papa, du haut des vingt-sept ans il a suffisamment de pouvoir pour faire d'une plainte à la police un véritable cauchemar pour nous. Il nous enverra les huissiers de justice immédiatement.

Liya marque une pause le temps pour elle de dissimuler son poignet en enfilant un gilet.

- Nous avons aucun autre toit, ni même de quoi payer un loyer convenable et la banque continue chaque jour de nous harceler. J'ai réussi à obtenir un sursis grâce à la générosité de mon ancien patron mais ça ne durera pas assez longtemps pour trouver une autre solution.

Son père se redressa vivement, se frottant la tempe l'air songeur.

- Ton ancien patron pourrait peut-être nous aider.

Liya relava subitement les yeux. La visite de Jack l'avait tellement bouleversée qu'elle en avait oublié le cheikh et son idée complétement stupide de l'appeler à l'aide.

- Papa, je ne pense pas que ce soit la meilleure solution bien que celle-ci m'a traversé l'esprit.

- Tu peux toujours essayer de le solliciter Liya ! Tu as été à son service pendant quatre mois tout de même.

- Mais il en avait besoin, objecta Liya en secouant furtivement de la tête ; Crois-tu sincèrement que cette situation l'a enchantée ?

Son père ne chercha pas à rétorquer visiblement conscient qu'elle avait raison.

- Néanmoins, je suis certain que cet homme sera sensible à ta situation, insista son père en se levant difficilement ; Il a veillé sur toi à bien des égards et...

- Tu ne le connais pas papa, murmura-t-elle avec le souvenir des nombreuses larmes qu'elle avait versée par sa faute.

- Alors explique-moi que je puisse comprendre.

Malheureusement elle ne pouvait pas. Rien de ce qu'elle avait vu dans ce palais devait quitter ses lèvres. Si jamais elle parlait alors elle perdrait définitivement la confiance de cet homme aveugle et isolé. Cependant son père n'avait pas tort sur un point. Il avait veillé sur elle de façon à ce qu'elle n'ait jamais l'impression d'être une prisonnière maltraitée. Mais Jack lui, venait de lui donner un petit aperçu de ce que serait sa vie dans moins de quatre mois.

- Tu as raison papa, finit-elle par dire ; Je vais essayer de l'appeler.

Il soupira bruyamment, soulagé qu'elle ait pris cette décision et quitta sa chambre.

Comme un automate, Liya s'approcha de son téléphone et le saisit d'une main tremblante.


  - Un peu de courage Liya...

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