Chapitre 6



Liya retint son souffle, son cœur battait à la chamade alors qu'elle tentait de se dégager. En vain, sa prise était trop puissante...sa grande main ferme et virile encerclait son poignet, il avait le regard sévère comme si sa bataille pour se reculer lui déplaisait fortement. En dépit de la peur, Liya ressentit un trouble naître en elle. Une chaleur inopportune la fit rougir de honte et de peur mêlées. Elle se trouvait si proche de lui qu'elle pouvait sentir son odeur musquée lui monter au nez.

- Votre majesté je...

- Je ne vais pas vous faire du mal ! S'agaça-t-il en cherchant à lui prendre son autre poignet ; Je veux juste toucher votre visage afin de distinguer à quoi vous ressembler !

Liya réprima difficilement ce trouble qui l'habitait et cessa de se débattre, sans trop savoir si elle venait de prendre la bonne décision.

- Hassan ne vous a pas menti, je suis banale.

Et c'était exactement la vérité. Liya avait le visage dépourvu de maquillages, elle ne faisait pas non plus l'effort de se vêtir à la dernière mode. Elle était plutôt un rat de bibliothèque, discrète et peu intéressée des hommes, cherchant la passion au fond d'un livre ancien.

- Laissez-moi en juger par moi-même, décréta le cheikh en lâchant ses poignets.

Ses mains hâlées se mirent alors à chercher son visage. Liya retint sa respiration alors qu'il venait de prendre son visage en coupe. De là, ses mains se mirent à l'explorer avec précisions. Son nez, sa bouche, ses yeux. Incapable de bouger, Liya ferma les yeux envahie par une sensation mystérieuse. Ses mains étaient légèrement rugueuses, lorsqu'elle rouvrit les yeux, le cheikh arborait une expression impassible.

Au premier contact, Zhayar sentit sous ses doigts une peau douce, lisse. Ses traits paraissaient très fins quant à son nez il semblait légèrement recourbé. Il passa son pouce sur ses lèvres scellées. Charnues, pleines, elles avaient la texture d'une rose.

- De quelle couleur sont vos yeux ?

- Votre ma...

- J'ai dit, de quelle couleur sont vos yeux, répéta Zhayar fermement.

- Vert, ils sont verts.

Prenant soins de prendre son temps, Zhayar glissa ses doigts sur ses cheveux qui semblaient tressés. Ils étaient long et doux.

- Vos cheveux ? S'enquit-il sur le même ton.

- Je suis blonde.

Zhayar retira ses mains et se remit sur son oreiller agacé par l'obscurité dans laquelle il était plongé.

- Vous êtes jeune cela ne fait aucun doute, lâcha-t-il sur un ton morne.

Il l'entendit bafouiller quelques mots inaudibles.

- Voulez-vous passer votre tunique.

Zhayar tendit sa main dans la direction de sa voix pour qu'elle lui passe le vêtement. Il l'enfila de lui-même.

- Je ne vois pas en quoi mon âge vous pose un problème votre majesté.

Zhayar tourna sa tête dans sa direction.

- Cela m'en pose un en effet et de taille, mais nous savons tout les deux que nous n'avons pas le choix n'est-ce pas miss Gray ?

Se voulant menaçant, Zhayar se redressa malgré les douleurs incessantes que son corps lui infligeaient.

- Oui.

Liya inspira profondément pour rassembler un peu de courage alors que son visage fourmillait encore.

- En dépit de mon apparence monstrueuse et de mon cœur de pierre, le but qui vous amène ici me semble suffisant pour vous garder.

Sous le choc Liya redressa la tête. Hier encore elle n'osait pas entrevoir son avenir ici. Aujourd'hui le cheikh semblait d'accord pour lui donner sa chance.

- Merci votre altesse ! S'écria Liya en peinant à contenir sa joie.

Il marmonna dans sa barbe, le regard toujours aussi froid.

- Ne vous réjouissez pas trop vite mademoiselle Gray, reprit-il d'une voix étrangement professionnelle ; À la moindre erreur de votre part, je n'hésiterais pas à vous renvoyer.

- J'en prends note, murmura-t-elle sans se départir de son sourire heureux.

Un sourire qu'il ne pouvait pas voir.

- Je vais vous laisser à présent.

Liya s'empressa de faire le tour du lit avant que sa voix grave ne l'arrête.

- Mademoiselle Gray ?

- Oui votre majesté ?

Le cœur battant à la chamade Liya se demandait par quel miracle elle parvenait à ne pas détourner les yeux.

- Vous êtes pressée ? Nota le cheikh en tapotant sa main près de la table de nuit.

- No..non, bredouilla Liya en battant des cils.

Le cheikh lui tendit son téléphone.

- Vous pouvez appeler votre père, à la condition de passer cet appel ici.

Comment pouvait-elle refuser ?

Liya s'empressa de le prendre en y mettant de la douceur pour ne pas lui montrer son impatience.

- Je vous remercie infiniment.

À peine dans ses mains qu'elle se pressa à l'appeler. Embarrassée, le regard braqué sur le cheikh Liya se pinça les lèvres jusqu'à ce que la voix de son père résonne au creux de son oreille.

Liya lui demanda l'essentiel alors qu'elle avait l'impression que le regard du cheikh pesait sur elle. Au bout de cinq minutes elle coupa la communication, gagnée par un regain d'énergie.

- Comment se porte votre père ? Demanda l'homme en récupérant son téléphone.

- Très bien, merci de m'avoir permis de lui parler si vite.

Il était sans doute temps pour elle de le laisser. Alors elle se glissa discrètement derrière l'immense lit, les yeux rivés sur les portes de son antre qui par miracle s'écartèrent pour laisser place à Hassan.

Liya s'inclina rapidement avant de prendre la fuite à l'autre bout du couloir. Une fois réfugiée dans sa chambre elle se laissa tomber sur le lit pour lâcher quelques sanglots trop longtemps refoulé. Il fallait se le dire...le cheikh la terrifiait. En dépit des balafres qui entaillaient son visage le cheikh avait un charisme impressionnant et une carrure imposante. C'était un bel homme, reconnut-elle en inspirant profondément. Il possédait une beauté froide et dangereuse. Soudain elle se demanda si Hassan avait eu le courage de lui décrire son visage sillonné de balafres ?

Le cheikh avait-il la moindre de la l'image bestiale qui renvoyait ?

Un frisson d'angoisse parcourut son échine.

Son cœur n'avait cesse de s'accélérer et son visage était encore parcourut de frissons, comme si ses mains étaient encore en train de le parcourir. Liya acheva le cours de ses pensées et s'ordonna de se ressaisir car dépit de sa froideur le cheikh lui avait permis de parler à son père et surtout il était prêt à lui donner une chance.

Une chance qu'elle refusait de briser. Les intérêts étaient bien trop importants.

~

Zhayar attendit que les portes se referment pour interroger Hassan.

- Avait-elle le regard d'une biche apeurée ?

Le bref silence de son ami suffit à lui faire comprendre que oui.

- Il faut lui laisser le temps nécessaire pour trouver ses repaires votre altesse.

- Je te parle de mon visage ! Pas de la façon dont elle se repaire dans les couloirs du palais.

- Je ne vous ai jamais menti Zhayar, commença Hassan en prenant un ton paternel ; Elle est apeurée pour bien des raisons.

Sa sincérité fit naître en lui une légère colère qu'il tenta de dissiper au mieux. Depuis l'explosion, Zhayar n'avait jamais pu votre son visage. Il se contentait de le toucher pour se faire une idée sur les dégâts irréparables causés par Mustapha.

À ce nom, Zhayar serra les dents.

Après l'annonce des médecins, il avait d'abord connu la tristesse mais celle-ci s'était très vite transformée en une haine vorace.

- Mais j'ai pu voir que vous avez fait énormément d'effort avec elle.

Zhayar pouffa.

- Je lui ai donné sa chance, rectifia Zhayar avec humeur ; Et peu m'importe si mon visage lui donne des sueurs froides.

Et c'était le cas. Zhayar en avait que faire de lui faire peur. À cette réflexion il se souvint de la réaction de sa maitresse lors de sa visite à l'hôpital. Son cri d'effroi résonnait encore dans ses oreilles. À ce moment-là, alors que son visage était tuméfié Chléo lui avait confirmé d'un seul cri que les femmes étaient toutes pareilles. Il n'avait pas tardé à la chasser de son pays sans prendre en compte ses cris de protestations et encore moins ce ton suppliant qu'elle avait employé pour se justifier. Certes très belle, Chléo demeurait pas moins une femme vénale comme toutes celles qu'il avait rencontré. Alors savoir que miss Gray éprouvait de la répugnance à son égard était le cadet de ses soucis. Visage nu, sans artifice, cheveux soigneusement tressés, il ne lui en fallait pas plus pour confirmer les dires de son ami.

Une jeune fille banale.

Néanmoins, Zhayar manquait cruellement de compagnie féminine. Il en avait assez d'entendre les voix de ses hommes et il se trouvait que miss Gray parvenait au seul écho de sa voix à lui donner l'impression que temps passait plus vite.

Zhayar prit alors la décision d'ajouter au travail de la jeune femme cette exigence qu'il espérait divertissante...

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