Chapitre 39
Liya tressaillit lorsqu'elle se tourna vers lui et le découvrit le visage entièrement recouvert d'un keffieh. Elle ne voyait plus que ses yeux d'un bleu profond. Il était vêtu de la même tenue que ses gardes. Cet aspect eut bon de la faire frémir alors que ses joues devinrent peu à peu rouge cramoisie.
- Vous êtes là, s'entendit-elle murmurer complètement hypnotisée malgré elle par son profil de guerrier.
- Oui, je suis là, dit-il d'une voix étouffée.
- Pour...pourquoi êtes-vous ainsi vêtu ? parvint-elle à demander quand la voiture quitta la grande allée.
Il se tourna vers elle, laissant alors une arme de point se dévoiler sur le côté de sa hanche gauche.
- Pour donner l'illusion que je suis un simple garde, expliqua-t-il en levant sa main vers elle.
Sans crier gare il captura sa main, refermant ses doigts sur les siens puis posa leurs mains liées sur sa cuisse musclée.
Liya retint son souffle, envahie par un feu irradiant ses veines. Rien de ce geste laissait penser autre chose qu'un pur acte de réconfort de la part du cheikh et pourtant, Liya ne put s'empêcher de rougir comme une idiote.
- Je tenais à vous accompagner, je n'avais pas le coeur de vous laisser seule dans cette voiture, expliqua-t-il en pressant sa main virile sur la sienne, lui arrachant au passage une grimace d'une douleur passagère.
- C'est très prévenant votre majesté.
Le regard tourné vers la fenêtre il se mit à soupirer, la laissant perplexe quant au cours de ses pensées.
- Hassan va vous accompagner jusqu'à Seattle, reprit-il dune voix étrangement calme mais teintée d'un léger agacement qui la mit mal à l'aise.
- C'est inutile vous...
- Il est inutile de discuter mes ordres Liya et vous le savez mieux que quiconque, coupa le cheikh froidement.
Liya se mordit violemment les lèvres, baissant les yeux sur leurs mains liées quand celui-ci tourna sa tête dans sa direction.
Le soleil brûlant du désert commença peu à peu à lui chauffer la peau, le véhicule roulait à une vitesse peu raisonnable alors que des voitures noires les suivaient à l'arrière comme à l'avant. Peu habituée, Liya se mit peu à peu à paniquer et comprit pourquoi il s'était empressé de lui tenir la main. Si elle n'était pas sûre d'être dans la réalité Liya se serait cru dans un mauvais film.
- Une fois dans l'avion vous trouverez une enveloppe avec le reste de la sommes qui vous est due.
Le voix sérieuse et impérieuse du cheikh lui fit réaliser qu'une fois dans cet avion cet homme ne serait plus qu'un souvenir.
- Merci beaucoup votre majesté...
Sans plus un mot ni même une respiration Liya se laissa submerger par la contemplation du paysage magnifique du désert avant que la voiture ne s'engage sur un tarmac isolé de l'aéroport. Lorsqu'elle aperçut Hassan au pied des marches du jet privé son coeur rata quelques battements.
- Nous sommes arrivés votre altesse, annonça le chauffeur avant de quitter le véhicule pour charger ses bagages.
Elle ferma les yeux un bref instant alors que peu à peu les doigts du cheikh libéraient sa main.
- C'est l'heure de nous quitter Liya Gray, lui dit-il de sa voix virile et inquiétante.
Liya était terriblement déçue de ne pas pouvoir observer son visage une dernière fois. Elle distinguait seulement sa paire d'yeux menaçante et la naissance de l'une de ses balafres.
- J'ai été heureuse de travailler pour vous votre altesse.
Elle vit ses yeux se rétrécir subitement, comme s'il souriait.
- Même malgré mes sautes d'humeurs constante ? Malgré la peur qui vous a poussé plusieurs fois à me fuir ? Malgré cette profonde solitude dans laquelle je vous ai volontairement plongée, faisant de vous une prisonnière ?
Liya inspira profondément, les lèvres sèches.
- Oui, avoua-t-elle péniblement.
Dans un tumulte d'émotions contradictoire Liya eut peine à lui faire face.
- J'ai qu'un seul regret Liya, c'est de ne pas pouvoir mettre un visage sur ce nom si tendre et qui est à la hauteur de votre bonté.
Liya le sentit sincère malgré la tonalité sobre de sa voix. Il captura sa main pour y poser un baiser à travers son keffieh.
- Adieux Liya Gray.
Le cœur lourd Liya ouvrit la portière puis rompit l'élan qui la poussait à quitter le véhicule. Hésitante, elle se retourna pour le dévisager alors qu'il avait le regard planté droit devant lui, comme une statue de glace, impénétrable...
En dépit des lourdes menaces qui pesaient dans son regard en guise d'avertissement Liya se glissa sur la banquette se rehaussant à l'aide de son genou afin d'être à suffisamment à sa hauteur pour poser sa main droit sur sa joue gauche et déposa un délicat et tremblant baiser son oeil.
Surpris, l'homme eut un bref mouvement d'épaule.
- Je vous souhaite de trouver le bonheur votre altesse.
Liya s'empressa de quitter la voiture et referma la portière, mettant fin à son étrange captivité.
Elle se dirigea vers l'avion sans se retourner accueillie par Hassan qui sans un mot l'invita à le suivre.
Une fois installée sur le siège côté hublot Liya ne put s'empêcher de jeter un coup d'œil vers la voiture noire qui n'avait pas bougée. Jamais au grand jamais Liya aurait crû ressentir un tel déchiffrement de quitter cet homme dont l'avenir restait encore incertain.
- Est-ce qu'il ira bien ? Demanda-t-elle à l'adresse d'Hassan.
Il soupira, l'air pensif.
- Bien-sûr que ça ira, répondit-il avec un sourire rassurant ; Son altesse est fort, sa détermination l'aidera pour le futur. Il a su nous le prouver ces quatre derniers mois.
Il marqua une pause dans laquelle il se pencha vers elle pour glisser son index sur son nez.
- Et vous n'y êtes pas pour rien Liya.
Liya esquissa un modeste sourire avant de reporter son attention sur la voiture toujours immobile sur la piste de décollage.
- J'ai fait mon devoir tout simplement, murmura-t-elle en expirant lentement.
Elle se remit droite sur son siège, luttant vainement contre cette envie ridicule de pleurer.
Elle était libre et elle aurait dû s'en réjouir. Alors pourquoi un tel sentiment de tristesse remplissait tout son être ? Peut-être parce qu'elle s'était habituée à cet endroit et à ce roi rongé de sombres pensées.
Zhayar se rendit compte que ses poings étaient serrés depuis plusieurs minutes. Loin de s'attendre au tendre geste de la jeune femme Zhayar demeurait interdit depuis que la portière s'était refermée sur elle. Mâchoires serrées, le regard perdu dans cette noirceur insupportable il pouvait déceler les réacteurs de l'avion et ce bruit assourdissant qui annonçait le départ imminent de son jet privé qui emportera cette jeune femme à jamais. Une pointe atroce et méconnue lui comprima le cœur pourtant si insensibles à ce genre d'adieux. Un cœur de pierre, disait-on de lui et c'est exactement l'image qu'il souhaitait que l'on garde de sa personne. Pourtant, malgré cette barrière de glace qu'il avait dressée autour de son coeur, la jeune fille à la voix douce et apaisante avait su la franchir et lui faire admettre une chose ;
Elle allait lui manquer indéniablement.
Son baiser sur son œil était pour lui un symbole de haute valeur. Malgré son apparence repoussante, malgré son caractère monstrueux la jeune femme avait su faire preuve d'une grande patience et d'un courage que peu de femmes auraient eu pendant ces long mois. Il garderait d'elle l'odeur d'une rose fraîchement cueillie.
Il espérait qu'elle trouve le bonheur et l'amour qu'elle méritait. À présent, il était temps pour lui de se tourner vers l'avenir. Un avenir qui commencerait par la mort de son ennemi...
À l'instant même où l'avion prit son envole Zhayar ferma brièvement les yeux pour tourner définitivement cette page du livre.
- Allons-y...
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