Chapitre 33



À peine eut-elle lâché ces mots que son cœur s'accéléra. Elle voulait fuir au plus loin d'ici, ne plus jamais revenir dans ces appartements. La honte l'absorbait à mesure que l'étonnement se lisait sur le visage du cheikh. Elle se pinça les lèvres, consciente qu'un tel aveu de faiblesse serait pour lui un moyen de creuser plus.

Il allait probablement la juger.

- Je vous demande pardon ?

Liya poussa un soupir de désolation.

- Laissez tomber votre altesse, je vous en prie.

Son ton fut suppliant, presque désespéré. Elle espérait qu'il ne veuille pas poursuivre cette conversation et qu'il la laisse accuser sa honte. Hélas, le cheikh était un homme déterminé.

- Vous n'avez jamais eu de petit-ami ?

- Non ! S'écria-t-elle excédée ; Bon sang je pensais que vous l'aviez deviné depuis le temps !

- Vous m'avez laissé entendre que vous aimiez les livres d'amour, que vous croyez au grand amour pas que vous n'aviez aucune expérience en la matière, précisa-t-il.

- Ça suffit ! Je ne veux pas en parler, sinon je...

- Sinon quoi Liya ? Vous êtes sous mes ordres, aussi je vous ordonne de rester assise.

Frémissante de colère Liya serra les poings se retenant de lui envoyer sa tasse de thé à la figure.

- Vous n'avez aucun ordre à me donner ! Je ne suis pas une enfant !

Liya se recula subitement au fond de sa chaise, étouffant un hoquet lorsqu'il se leva brutalement, dépliant sa canne pour parvenir jusqu'à elle. Paralysée, incapable de bouger Liya serra les accoudoirs de la chaise comme seul soutient au déferlement qui allait suivre.

- Je vous interdis de me parler ainsi, votre comportement ne fera qu'empirer mon agacement.

Liya sentit ses lèvres trembler lorsqu'il se pencha soudain, espérant peut-être accroître sa menace. Ainsi tout proche, ses effrayantes cicatrices lui rappelèrent que son comportement ô combien légitime lui apporterait que des ennuis. Elle vit un muscle de sa mâchoire tressauter et tout son être se figea dans l'attente de son jugement.

- J'attends des excuses miss Gray...

- Vous prenez plaisir à me torturer n'est-ce pas ?

- Aucun plaisir seulement celui d'avoir été compris or je crois que vous avez quelques soucis à assimiler cette partie du contrat.

Son souffle chaud effleura son visage.

- Je ne m'excuserais pas pour avoir sauvé le peu d'estime qu'il me reste ! S'exclama-t-elle d'une voix qu'elle espérait moins tremblante ; Je vous ai répondu en toute franchise, je vous ai dit que je refusais d'en parler avec vous et vous tentez d'insister.

Il jura en arabe et d'une main habile trouva son visage. Sans qu'elle ne puisse se débattre le cheikh tenait déjà son menton entre ses mains. Le souffle court Liya sentit des milliers de frissons courir sur son visage jusqu'à l'engourdir. Sa poigne était féroce, autoritaire.

Zhayar luttait tant bien que mal contre les pulsions meurtrières de son corps. Il pouvait l'entendre hoqueter d'inquiétude et de peur mêlées. Elle faisait preuve d'un grand courage mais peu de forces pour achever la lutte.

- Vous avez énormément de chance Liya...

Zhayar raffermit sa pression sur son menton fin, approchant son visage du sien jusqu'à ce que cette odeur enivrante ne vienne chatouiller ses narines. Pour lui, cette confidence lui était presque impossible. Jamais encore il n'avait rencontré une femme dont l'expérience se résumait à zéro relation quelconque, pas même une brève aventure passagère. Il peinait à y croire mais la réaction qu'elle avait eue hier lui confirmait la réalité de sa confidence.

Liya Gray était pour ainsi dire l'innocence à l'état pure.

- Beaucoup de chance...répéta Zhayar avant de se redresser de toute sa hauteur.

Il n'avait aucune raison de lui tenir en rigueur. En réalité il comprenait fort bien sa réaction pour préserver sa vie privée. Peut-être qu'elle envisageait réellement de trouver un homme idéal digne de ses romans ? Songea-t-il en reprenant sa place. C'était tout à son honneur mais légèrement déstabilisant.

Néanmoins Liya était encore jeune pour être jugée si vite.

- Quant à votre estime je pense qu'elle est sauve car vous n'avez aucune raison d'être honteuse, je trouve cela très honorable.

Alors qu'elle se massait son menton engourdie Liya releva subitement les yeux.

Avait-elle bien entendu ?

- Je vous demande pardon ?

Une lueur indéchiffrable perçait les iris magnifiques du roi. Celui-ci prit son temps pour lui répondre.

- Je suis certes surpris par cette révélation mais vous êtes jeune, vous avez tout le temps devant vous pour vous poser nombres de questions en matière d'hommes.

Liya déglutit, loin de s'attendre à une telle réaction de sa part.

- Je...

- Allons ça suffit, coupa-t-il en levant sa main pour la stopper ; cet incident est clos, je ne veux plus en parler.

Liya ferma instinctivement les lèvres. Il valait mieux ne plus jamais rouvrir ce sujet sensible et qui lui donnait l'impression d'être honteuse.

- Cette après-midi je dois rencontrer des dirigeants importants, cette rencontre est cruciale pour moi.

Liya fronça des sourcils car elle ignorait où il voulait en venir.

- En quoi cela me concerne ?

- Je ne veux pas que vous sortiez de votre chambre. Votre présence ne doit pas s'ébruiter.

- Je comprends, murmura-t-elle en buvant une gorgée de son thé pour s'humecter les lèvres.

- Ce n'est pas une punition Liya.

- Bien-sûr, je le sais, j'ai bien compris l'importance de ma captivité, railla-t-elle avec un rire nerveux.

Le regard du cheikh se rembrunit subitement.

- Ne soyez pas si théâtrale Liya, les conditions dans lesquelles vous êtes sont loin de ressembler à une vraie captivité.

Un frisson glacé remonta le long de son échine. Ses pensées se tournèrent immédiatement vers Mustapha.

- Je tentais de faire un peu d'humour, rien d'autre votre altesse.

- J'avais saisi la blague, murmura-t-il en plissant les yeux l'air indéchiffrable.

Maladroitement elle reposa sa tasse de thé.

- Avez-vous besoin de mes services avant votre rendez-vous.

- Me rendre présentable, répondit-il sans plus tarder.

Les sourcils foncés, Liya examina le cheikh avec une attention vouée à chercher où il voulait en venir.

- Je voue une confiance totale en vous, ajouta-t-il sérieusement.

Son regard tomba sur sa barbe noire, bien trop longue et ses cheveux avait besoin d'un bon coup de ciseau.

- Laissez-moi le temps d'enfiler quelque chose de présentable et je ferais de vous un nouvel homme.

Le cheikh acquiesça une lueur de satisfaction dans le regard.

- Ne soyez pas trop longue, l'entendit-elle murmurer quand elle quitta les appartements.

Liya accourut jusqu'à sa chambre et fila dans la douche pour se rafraîchir les idées. Chaque fois qu'elle se trouvait en sa compagnie Liya avait l'impression de ne plus rien contrôler...de vouloir tout lui dire et à la fois tout lui cacher. Le front posé sur la paroi de la cabine de douche Liya exhala un soupir tremblant avant de se ressaisir. Elle ferait mieux d'oublier ce déjeuné chaotique et se concentrer sur l'essentiel.

Le rendez-vous du cheikh.

Cette prison dorée n'était pas seulement un poids insupportable sur ses épaules, Liya avait l'impression d'être un fantôme. Cet enfermement commençait à lui peser énormément sur le moral. Elle n'avait même pas pu découvrir le reste du palais...piégée dans cette aile sans pouvoir jouir des nombreux trésors du palais. Luttant contre les larmes qui lui picotaient les yeux Liya enfila son pantalon favoris, l'esprit embrumé. Des tas de questions défilaient dans sa tête notamment une ;

Quand pourrait-elle enfin retrouver sa liberté ?

- Où êtes-vous ? Demanda-t-elle en pénétrant à nouveau dans les appartements.

Liya s'approcha jusqu'au centre de la pièce, faisant un tour sur elle-même, les mains jointes contre son ventre, luttant contre cette envie constante de fuir.

- Ici ! Approchez.

Liya fit un pas dans la direction que lui indiquait la voix du cheikh avant de s'arrêter net lorsqu'elle distingua une épaisse vapeur s'échapper d'une pièce adjacente...

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