Chapitre 32



" Mademoiselle Gray, veuillez m'excuser "

Toute la nuit Liya avait les paroles du cheikh dans la tête sans pouvoir les ôter de son esprit. Alors que l'aurore baignait déjà sa chambre Liya tenait son poignet, figée dans son lit sans pouvoir bouger. Elle savait pourtant que cette situation était irrationnelle. En réalité si elle réagissait aussi stupidement c'est parce qu'elle ne s'était jamais retrouvée dans une situation telle que celle-ci...en compagnie d'un homme. Elle avait passé ses premières années de jeune femme à fuir les garçons convaincue de ne pas les intéresser. Avec le cheikh, Liya avait l'impression de sentir pour la première de sa vie ce qu'une femme pouvait éprouvée avec un homme. Mais il ne voyait pas, pire encore, il était bien plus âgé qu'elle et son passé de séducteur autoritaire laissait croire que son expérience faisait de lui un homme pour qui la femme n'avait plus de secret. Néanmoins ce baiser avait ravivé en elle un espoir.

L'espoir qu'un jour elle puisse plaire à un homme qui verrait en elle bien plus qu'une apparence physique.

- Miss Gray ! S'exclama Jamila en pénétrant dans sa chambre l'air incrédule ; Que faites-vous encore au lit ? Êtes-vous malade ?

Liya s'étira en quittant sa torpeur. En fait elle craignait de retrouver le cheikh. Sa réaction à son baiser sur son poignet avait été de loin la plus désastreuse de tout les temps. Elle s'était levée précipitamment, manquant de renverser le plateau en argent puis elle s'était mise à bafouiller comme adolescente. La honte l'avait alors submergée sous le rire grave du cheikh.

Ensuite, elle s'était enfuie...

- Je voulais profiter un peu du silence.

Jamila souleva les draps pour l'inciter à se lever.

- Son altesse vous attends pour le petit-déjeuner, allez hop !

Liya inspira profondément et se cacha le visage dans son oreiller consciente que son comportement était enfantin.

- Je me suis ridiculisée hier, il est hors de question que je sorte d'ici !

Jamila lui ôta l'oreiller, affichant un sourire en coin.

- Sa majesté m'a expliqué, je trouve que vous exagérez un peu Liya.

Liya se redressa sur le lit, les cheveux en bataille.

- Il vous a quoi ? Croassa-t-elle les joues en feu.

Jamila l'obligea à se lever et la poussa jusqu'à la coiffeuse.

- Le cheikh m'a demandé où vous étiez, il semblait inquiet. Il m'a dit que hier soir, il vous a déposé un baiser sur la main pour s'excuser et vous vous êtes subitement enfuie.

Liya sentit son sang quitter peu à peu son visage alors qu'elle s'employait à lui brosser les cheveux.

- Enfin Liya qu'est-ce qui vous a pris ?

- J'ai été prise au dépourvue, je...enfin...j'ai paniqué.

Jamila semblait perplexe au point de froncer des sourcils. Bien-sûr Liya savait que ses explications n'avaient aucun sens. Ce baiser tout à fait innocent ne valait pas la peine de s'enfuir à toutes jambes.

- En fait, commença-t-elle gênée d'être sur le point de se confier ; C'est la première fois que je laisse un garçon m'approcher de la sorte, je n'ai aucune expérience en matière d'hommes. Je n'ai pas su interpréter ce baisemain comme.

Cette fois-ci Jamila lui témoigna de la compassion, la gratifiant d'un sourire désolé.

- Oh Liya, murmura-t-elle en s'abaissant pour river son regard dans le miroir ; Ce n'est pas si grave que vous le pensez. C'est plutôt adorable je trouve.

Liya n'était pas de cet avis.

- Quand j'étais à la fac, j'étais très discrète et à chaque fois qu'un garçon voulait m'aborder je fuyais car à l'époque, ils s'amusaient à faire des paris. J'ai gardé une mauvaise image depuis ce temps et puis il se trouve que mon père était très protecteur.

Jamila se contentait de l'écouter avec un sourire au bord des lèvres. Se confier à elle lui apportait un grand réconfort. Elle avait l'impression d'être comprise voire adoré par cette femme.

- Quand mon père est tombé gravement malade j'ai cessé de faire attention à mon propre reflet, c'était comme si je m'étais oubliée.

- Vous êtes une personne d'une grand bonté Liya Gray, ne laissez personne vous dire le contraire.

Liya inspira profondément en esquissant un fin sourire qui disparut aussitôt.

- Est-ce que vous me trouvez assez jolie pour espérer plaire un jour ?

Jamila rompit ses gestes dans ses cheveux, arrimant son regard dans le sien.

- Par allah ! Enfin regardez-vous ! Êtes-vous à ce point naïve de votre propre beauté ?

Les mots sincères de Jamila furent pour elle comme un grand réconfort, elle en avait presque les larmes aux yeux.

- Personne ne m'a jamais dit que j'étais assez belle pour plaire, hormis mon père mais son avis n'est peut-être pas objectif.

- Vous vous trompez Liya, assura Jamila en venant l'obligeant à la regarder ; Il est peut-être temps pour vous de sortir, de découvrir le monde.

Liya lui sourit timidement, réprimant des larmes, la gorge serrée.

- Allez ! Il est temps de rejoindre son altesse ! Il faut vous habiller.

- Je peux y aller en pyjama, protesta-t-elle en se levant pour attraper son kimono.

Jamila écarquilla les yeux.

- Je...ne pense pas que ce soit une excellente idée.

- Pourquoi donc ? Il ne peut pas me voir de toute façon.

Liya fronça la tête la première hors de sa chambre sous les protestations de Jamila qu'elle ignora. Elle allait devoir lui expliquer son comportement disproportionné de la veille. Qu'elle le fasse en pyjama ou en tenue banale ne changerait rien, songea-t-elle en évitant soigneusement le regard de l'un des gardes visiblement stupéfait.

Tant pis ! S'écria-t-elle intérieurement.

- Enfin ! S'exclama le cheikh en pianotant ses doigts sur la table visiblement à bout de patience.

- Veuillez m'excuser votre altesse, j'ai flemmardé au lit, ma tenue est négligée, je suis encore en pyjama.

Liya mit ses mains devant son visage, jurant intérieurement. Quelle idiote ! Pourquoi lui avoir dit ?

- J'aurais préféré ne pas le savoir, dit-il froidement, le regard soudainement sombre.

- Et pourquoi donc ? Osa-t-elle demander en se laissant choir sur la chaise.

- Parce qu'il se trouve que mon palais comporte des règles auxquelles je tiens ! Mes hommes n'ont nul besoin de vous voir en tenue légère !

Liya réprima un sursaut sous le ton vibrant de sa voix. Ses yeux étaient percés d'une lueur sombre et inquiétante.

- Rassurez-vous votre altesse je ne suis pas le genre de femme à porter des nuisettes mais plutôt des chemises de nuit style empire des années 1800 ou alors des pyjamas.

Son explication n'avait pas l'air de le convaincre. Ses mâchoires convulsèrent.

- Ne vous avisez plus de faire ça, est-ce que c'est compris ? Je ne le tolérais pas !

- Bien votre majesté, murmura Liya en attrapant un croissant.

- Depuis quand mangez-vous des croissants ? S'interrogea Liya afin de dévier le sujet sur quelque chose de banale.

- Il se trouve que cette attention particulière était pour vous mais après vives réflexions je me demande si vous le méritez.

Liya crut entendre son cœur palpiter dans son oreille. Ses mains devinrent subitement moites.

- Oh...

- Pour quelle raison vous êtes-vous enfuie hier soir ?

Ça y est, Liya ne pouvait plus faire machine arrière. Le ton du cheikh exigeait une réponse.

- J'étais confuse, j'ai paniqué.

- Paniqué ? Répéta le cheikh en fronçant des sourcils ; Puis-je en connaître la raison ?

Incapable de supporter son regard braqué dans le sien, Liya préféra baisser les yeux pour masquer son trouble.

- Je n'ai pas réfléchie, j'ai cru que c'était inapproprié et je...

- Je vous l'ai déjà dit ! Jamais je m'abaisserais à profiter d'une jeune fille innocente ! S'emporta Zhayar furieux.

La présence de la jeune femme à peine vêtue ne fit qu'aggraver la situation dans laquelle il se trouvait. Inutile de se mentir plus longtemps, le comportement de la jeune femme l'avait irrité bien plus qu'il ne l'aurait crû.

À peine ses lèvres posées sur son poignet que pour une raison qui lui échappait encore Zhayar avait senti ses sens s'éveiller. Puis la jeune femme avait mis fin à son état second en ôtant son poignet à la hâte, la respiration saccadée.

- Je le sais, murmura-t-elle d'une voix empreinte de tristesses ; Je vous prie de m'excuser, j'ai mal réagi.

- Ce n'est rien de le dire ! Fit-il remarquer entre ses dents serrées ; Ce baisemain était tout à fait innocent et sans arrière-pensées. Peu m'importe l'expérience peut-être chaotique que vous avez vécu dans le passé avec vos petits-amis, j'ai peut-être été affublé de ce surnom indiquant un caractère bestial, je sais me comporter avec une femme.

- C'est justement là le soucis, murmura-t-elle d'une voix à peine audible ; Je n'ai jamais eu de petit-ami...

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