Chapitre 31
Pendant un moment, Liya voulait à tout prix refuser. Cette soirée avait été celle de trop. Elle n'avait qu'un seul et unique souhait.
Sortir de ces appartements au plus vite et disparaître dans sa chambre.
Le cheikh lui parut soudainement impatient.
- Liya, commença-t-il d'une voix lente ; Vous comprendrez aisément qu'il vous sera difficile de refuser sous peine d'y être forcée.
Un lent frisson d'appréhension courut sur sa nuque car il semblait très sérieux.
- Où est Chléo ?
- À l'heure où je vous parle je dirais qu'elle est dans un avion pour les Etats-Unis.
Surprise, Liya releva les yeux vers lui.
- Mais pour qu'elle raison ?
Il poussa un profond soupir qui laissait entendre qu'il était lassé d'avance d'en parler.
- Je ne suis pas en mesure de la garder ici et je n'ai pas de projet de mariage comme vous le savez, n'est-ce pas Liya ?
Liya savait très bien où il venait en venir. C'est elle qui était à l'origine de ce dîner. Jamais elle n'aurait imaginé se retrouver dans une telle situation et encore moins devoir subir les méprises et insultes de son ancienne maîtresse. Au départ, Liya avait vu en cette femme un moyen pour lui de renouer avec le monde extérieur et peut-être envisager qu'il renoue avec elle.
Prise dans son propre piège Liya s'était très vite rendue compte que cette femme aspirait à bien d'avantages que les privilèges d'une telle rencontre inespérée.
- Je vous promets de ne plus jamais m'immiscer dans votre vie privée votre altesse, je tire de cette soirée une grande leçon.
Satisfait il inclina sa tête, un bref sourire aux lèvres puis quitta les cuisines en l'invitant à le suivre. Ôtant son tablier à la hâte Liya le suivit avec deux flûtes à champagne sans trop savoir si prolonger la soirée était une bonne idée.
Allait-il la fustiger de reproches ? Accentuant alors son impression d'être une potiche inexpérimentée, osant vouloir pousser cet homme et cette femme dans les bras l'un de l'autre alors qu'elle tirait ses conseils que dans des livres romantique ?
Elle le suivit du regard alors qu'il s'approchait de cette cheminée qui était son seul repaire, sa seule façon pour lui de ne jamais rester dans le silence.
- Je peux vous poser une question votre altesse ?
- Est-ce qu'elle mérite une réponse ? Lança-t-il avec un soupçon d'ironie.
Liya leva au ciel.
- Vous n'avez pas chaud avec cette chaleur écrasante et cette cheminée constamment allumée ?
Il posa ses mains sur le haut de la cheminée lui révélant la carrure parfaite de son dos musclé.
- J'ai passé des jours au milieu du désert sous une chaleur impitoyable, répondit-il sans se retourner ; La cheminée ne me dérange pas d'autant plus que le palais est climatisé.
Il marqua une pause dans laquelle Liya se sentit vaguement idiote de lui avoir posé cette question.
- Elle m'aide à me sentir moins seul lorsque la pénombre m'est insupportable. Entendre les crépitements apaise ma solitude.
Liya baissa les yeux, un pincement au cœur.
- Je comprends, murmura-t-elle en le rejoignant ; Est-ce que vous désirez que je ravive le feu ? Proposa-t-elle gentiment.
Il s'écarta doucement en acquiesçant sa proposition.
Liya posa les flûtes sur la table basse et s'empressa de le raviver. Ses joues s'embrasèrent, ses mains devinrent si chaudes qu'elle dut s'écarter, essuyant son front moite.
Elle riva son regard vers lui, assis dans son fauteuil royal, l'air rembruni, impassible.
C'est avec les lèvres pincées qu'elle versa le champagne dans la flûte et lui tendit prudemment.
- Merci...
Elle s'installa sur le tapis confusément, ne sachant pas quoi faire de sa propre personne.
- Je voulais vous féliciter, déclara-t-il en couvrant le silence inquiétant ; Le dîner était délicieux. Vous êtes douée Liya.
- Merci votre altesse, je suis ravie d'avoir relever ce défi de taille.
Un sourire presque indéchiffrable rehaussa légèrement sa bouche. Liya tapota son index sur la flûte, sans le quitter des yeux, la bouche sèche.
- Cependant, j'espère que vous tiendrez votre promesse de ne plus jamais vous immiscer dans ma vie privé, cela vous évitera de nombreux ennuis.
- J'ai compris la leçon...
- Un homme de ma position ne peut guère envisager de prendre une épouse avec un simple dîner qui plus est avec une ancienne maîtresse qui ne demande que cela.
Liya se mordit la lèvre, réalisant l'importance de la situation.
- Je ne suis pas habituée à tout ça, je n'ai pas le manuel destiné aux personnes de votre rang. J'ai simplement crû que...qu'un dîner en bonne compagnie vous donnerez l'impression d'être moins seul.
Il soupira bruyamment visiblement attentif à son explication mais cependant agacé.
- Si je voulais de la compagnie, croyez-moi Liya, je ferais en sorte d'attirer toutes les femmes assez stupides pour me vouer une attention toute particulière.
Un sourire indéchiffrable couvrit ses lèvres. Bien-sûr Liya le prit très au sérieux. Il ne fallait pas longtemps à cet homme de pouvoir pour trouver une compagnie féminine peu importe laquelle.
- Je suis désolé votre altesse.
Après une gorgée de champagne, Liya baissa son regard sur le tapis.
- C'est comme si je vous jetais dans les bras d'Ousmane sans que vous en ayez forcément envie.
Liya haussa des épaules avec indifférence.
- Cela ne me dérangerais pas car il est charmant.
Le cheikh leva un sourcil étonné.
- En êtes-vous sûre Liya ? Moi qui croyais qu'il ne vous intéressait pas.
Une légère rougeur colora ses joues car en effet c'est ce qu'elle avait laissé entendre pour se défendre des accusations portées à son égard.
- Un dîner n'engage à rien votre altesse.
- En effet, du moins je suis forcé de reconnaître que je l'ignore.
Incrédule Liya le dévisagea alors qu'une lueur mystérieuse réchauffait ses yeux bleus.
- Chaque dîner que j'ai pu partager avec une femme s'est fini au lit.
Liya poussa un soupir ponctué de dégoût.
- Inutile de me décrire les détails je crois avoir saisi.
Le cheikh étouffa un rire puis termina sa coupe d'un trait.
- Où êtes-vous ?
- Sur le tapis.
- Grand dieu Liya vous auriez pu rapprocher une chaise ! Gronda-t-il en baissant les yeux instinctivement sur le tapis.
- Il est très confortable, assura-t-elle en esquissant un sourire nerveux.
Le cheikh se redressa à la hâte, tendant sa main dans sa direction. Les joues brûlantes elle glissa sa main dans la sienne sans trop savoir ce qu'il espérait d'elle.
Il referma sa main sur la sienne, la caressant comme s'il essayait de la deviner.
- Elle est d'une telle douceur, commenta-t-il d'une voix basse et pensive ; Vos doigts sont si fins, j'ai l'impression qu'ils pourraient se casser à tout moment.
Le cœur battant à la chamade Liya déglutit péniblement. Pendant une seconde elle fut tentée de récupérer sa main car cette étrange proximité n'était pas autorisé. C'était son patron et elle son employée.
Elle voulait récupérer sa main mais le cheikh força sa prise et la ramena vers lui.
- N'ayez aucune crainte, murmura le cheikh le visage inexpressif, intensément fort et viril.
Liya n'osait plus bouger, paralysée par la peur.
Zhayar serra son verre qu'il reposa prudemment sur le plateau d'argent. Le plus sage pour lui était sans doute de libérer cette main et de laisser la jeune femme s'en aller. Or, ses volontés vacillèrent soudain, le cœur saigné par la tristesse de Liya. Comment oublier les sanglots incontrôlables qu'il avait pu entendre dans sa voix ?
- Vous faites une...une drôle de fixette sur mes mains, balbutia-t-elle nerveusement.
Sa voix agita Zhayar d'une façon qu'il ne sut expliquer. Ses doigts se crispèrent sur les siens. Pourquoi est-ce qu'il avait l'impression qu'elle le craignait ?
- Peut-être parce que je n'en ai jamais touché d'aussi douces et délicates.
- Oh mon dieu ! Seriez-vous en train de vous rattraper ?
Zhayar éclata de rire en tournant sa tête furtivement sur le côté.
- Je n'ai nulle besoin de vous noyez de compliments pour me faire pardonner, j'ai d'autres moyens bien plus délicats et sincères.
- Vraiment ? Comme ?
Zhayar pressa ses doigts sur sa main tout en tournant sa tête vers sa voix qui venait de le défier.
- Veuillez m'excuser mademoiselle Gray, chuchota-t-il avant de ramener son poignet retourné à ses lèvres afin d'y poser un délicat baiser...
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