Chapitre 67



Alors que les fleurs les plus rares s'ouvraient sous les zones d'ombres, Savana sentait des milliers de papillons chatouiller son ventre. Elle se tourna vers son mari. Fascinée par sa beauté froide, elle rougit lorsqu'il s'approcha d'elle. Il l'avait retrouvé. Le palais était rempli d'invités. Conformément aux traditions, ni elle ni lui avaient pu échapper à ce banquet pour célébrer leur mariage. Pour éviter de chanceler, Arik écarta ses jambes, foudroyer depuis le début de cette journée par la beauté chaude de sa femme. Drapée dans une robe blanche simple et pourvu de dentelles, ses cheveux cascadaient dans son dos, inondés par le soleil, couronnés de fleurs blanches.

Arik reprit sa respiration avant de s'avancer vers elle alors qu'une bouffée de désir l'irradiait entièrement.

- J'avais besoin de faire une pause, dit-elle en lui souriant radieusement.

Alors qu'elle s'était retournée face à l'horizon, Arik l'enlaça par-derrière.

- Le banquet te plait ?

- Tout est parfait, murmura-t-elle en refermant ses mains sur les siennes ; Je suis vraiment heureuse que tout le monde soit réunis.

Arik revoyait encore le visage du docteur West s'illuminer de bonheur pour elle. Aujourd'hui elle rayonnait de bonheur. Rien ne pouvait lui faire plus plaisir que voir ce regard si apaisé, si magnifique..

- Tu te rappelles du livre ? Demanda-t-elle en se retournant.

- Celui qui parle d'une prisonnière enlevée par un viking et qu'il finit par tomber en amour pour elle ?

Ses grands yeux s'agrandirent comme si elle ne s'attendait pas à ce qu'il s'en souvienne. Il enlaça sa taille, embrassa son épaule couverte de dentelles.

- Est-ce que notre histoire y ressemble habibti ? S'enquit-il en relevant ses lèvres d'un sourire sensuel.

Savana esquissa un sourire.

- Oui, c'est exactement ça, dit-elle avec un sourire timide et joyeux ; Sauf quand dans la nôtre, personne ni moi s'attendait à ce que l'homme se révèle si protecteur.

Arik haussa un sourcil moqueur.

- Ainsi ce viking n'était pas protecteur autant que je le suis ?

Elle fit mine de réfléchir.

- Possessif serait le terme exact, rectifia-t-elle en posant ses mains sur son torse.

- Oh mais je suis possessif ! Clama Arik haut et fort tout en posant une pluie de baisers sur son visage ; Tu as encore beaucoup à apprendre de moi.

- Vraiment ? S'enquit-elle avec petit rire.

- Oh que oui madame et selon le médecin...je peux te faire l'amour et...

Elle s'empressa de poser son index sur sa bouche en rougissant.

- Chut...ils pourraient t'entendre, chuchota-t-elle avec une petite moue de coquetterie mutine.

Se baissant totalement, Arik renversa sa femme en arrière pour atteindre son ventre si rond...dont la peau se révélait toujours aussi laiteuse que dans ses récents souvenirs.

- Une objection ? Lança-t-il à son ventre d'une voix si rauque qu'elle sentit son corps vibrer entièrement.

Il se redressa et la ramena contre lui pour couler ses lèvres sur les siennes.

- Aucune, chuchota-t-il.

- En revanche...d'autre...

Arik fit rouler ses yeux en marmonnant dans sa barbe. Azima interrompit leur étreinte passionnée pour les informer que le ministre autrichien venait d'arriver. Ils furent obligés de redescendre et de refaire une entrée majestueuse. Si elle avait encore à apprendre Arik était tout aussi captivé que ses invités. Dans sa belle robe blanche qui lui correspondait à merveille et avec cette pudeur innée, elle parcourait les tables mains derrière le dos. Le Dr West partit à sa rencontre. Arik profita de leur échange pour saluer d'autres invités.

- Savana...murmura le Dr West avec une voix tremblante d'émotions ; Regarde-moi cette merveille !

Il lui fit écarter les bras pour l'admirer.

- Il y a encore hier vous étiez la jeune fille cachée contre le mur et aujourd'hui vous marchez comme une reine...

Il lui fit relever la tête avec une pression sur son menton.

- Avec toujours cette réserve et cette bienveillance qui vous rendent unique.

Émue elle inspira profondément pour lui répondre.

- Merci pour tout Docteur, je n'oublierais jamais ce que vous avez fait pour moi.

D'une sourire modeste il lui prit la main pour marcher un peu.

- J'ai dit la vérité mon enfant, dit-il en désignant le banc extérieur d'une main.

Savana s'y installa.

- Mais c'est vous et vous seule qui est à l'origine de cette réussite, expliqua-t-il en pointant son ventre du doigt ; Le travail que vous avez accompli vous le devez qu'à vous.

Mains sur les genoux, Savana retraça sa vie d'avant et celle d'aujourd'hui.

- Vous y avez contribué, dit-elle en le regardant droit dans les yeux ; Avant j'étais seule, je me sentais seule mais plus maintenant ; Vous m'avez tous aidé.

West posa sa main sur la sienne.

- Êtes-vous guérie Savana ?

Cette question se révélait plus difficile qu'elle ne l'aurait crû. Elle savait qu'en lui posant cette question il attendait une réponse définitive. Comme s'il voulait achever son travail. Elle aurait voulu répondre oui...seulement au plus profond d'elle, Savana savait qu'il lui restait une dernière chose à faire avant de lui répondre...

Replaçant une mèche derrière son oreille avec un sourire contenu elle dévisageait l'horizon.

- Il me reste quelque chose à accomplir avant, murmura-t-elle la gorge serrée.

Elle se leva en direction du soleil couchant, inspirant profondément.

Recevant des félicitations du ministre autrichien, Arik bavardait avec lui depuis quinze minutes sur des éventuelles perspectives en Autriche. Notamment sur une commercialisation de son champagne qui faisait déjà fureur en Angleterre. Une idée qu'avait eue Savana. Songeant à elle, il se redressa en la cherchant du regard. Alerté de découvrir le Dr West en pleine conversation avec des invités, il coupa la conversation et se leva en passant un regard partout dans la salle de réception.

- Où est Savana ?

- Dans les jardins, près de la fontaine.

Le Dr West marqua une pause puis reprit.

- Vous devriez y aller.

Ne perdant pas une seconde, il se fraya un chemin parmi les invités. Plus il s'enfonçait dans les profondeurs des jardins plus le bruit assourdissant des invités s'estompait. Zafir qui avait retrouvé sa liberté hennissait dans le pré, face au désert qui prenait des tons chauds. Arik traversa le jardin en cherchant sa femme et suivit les chuchotements de la fontaine pour la retrouver. Quand la silhouette de sa femme lui apparut c'est lentement qu'il s'approcha pour rompre totalement la marche, gorge serrée. Dans ce genre de moment difficile et même si celui-ci se faisait dans un endroit paisible et coloré, le silence s'imposait. Sa belle robe blanche était souillée par l'effort et les larmes qui tombaient sur le tissu. Arik ignorait s'il devait rester à l'écart ou s'il devait avancer. Si le docteur West lui avait dit de y aller c'était qu'il estimait qu'il se devait d'être présent. Avec ses mains, elle creusait la terre dans l'immense vasque garnie de fleurs, cherchant vainement d'atteindre la profondeur. Arik décida d'avancer. Lorsqu'elle tourna sa tête dans sa direction, les yeux larmoyant, il combla l'espace qui les séparait. Sans un mot, il l'aida à finir ce qu'elle avait œuvré et posa furtivement un regard sur la boîte reposant à côté d'elle. Lorsqu'il acheva de creuser suffisamment profond, c'est avec émotion qu'elle prit les souvenirs de son fils qui n'avait jamais vu le jour et la déposa dans le trou.

Savana fut submergée d'émotions face au silence respectueux que lui témoignait Arik, à ses côtés, la soutenant dans cette dernière épreuve qui renfermait définitivement son passé. Longuement elle avait contemplé ce jardin magnifique en songeant à faire reposer ce dernier souvenir dans cet endroit inspirant la paix. Posant une dernière fois son regard embué de larmes sur la boite elle la couvrit de la terre humide. Ici, elle était sûre qu'elle le retrouverait toujours. Les écoulements reposants de la fontaine était comme une berceuse infinie. Comme une mélodie. De sa chambre elle saurait maintenant en écoutant cette belle musique que son fils à qui elle n'avait jamais donné de prénom serait le gardien de ce jardin verdoyant et protégerait ceux et celles qui le fouleraient. La gorge nouée de sanglots et tapota la terre et déposa les fleurs sauvages.

Relevant les yeux vers Arik, elle constata que cet homme dont le regard féroce n'avait pas révélé tous ses secrets, la regardait avec une infinie tendresse, les yeux brillants.

- Maintenant je suis guérie, déclara-t-elle les lèvres tremblantes.

Parsemée de terre, elle referma ses bras autour dans son cou, joue posée contre son épaule alors qu'il lui caressait le dos, lui murmurant une dernière promesse.

Celle de l'infinie.

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