Chapitre 6
- Il est entré sans être invité, avait-elle fini par répondre.
Son psychiatre nota cette information comme si elle venait de lui offrir une clé à sa guérison.
- Et vous n'avez pas chercher à hurler ? À demander de l'aide ?
Savana se pinça les lèvres en arrachant les fils de son pull.
- Non, murmura-t-elle en relevant les yeux : Il m'a promit de ne pas me faire du mal et je l'ai crû.
- Pourquoi l'avez-vous crû plutôt qu'un autre ?
Le visage grimaçant d'une douleur intérieur, Savana revit dans son esprit l'expression rassurante du cheikh contrastant avec son visage acéré.
- C'était un homme, dit-elle en fixant le tapis : Je veux dire une vrai homme, il s'est montré d'une extrême gentillesse et ensuite...je ne sais pas.
Le Dr West hocha de la tête pensivement sans la quitter du regard.
- Vous m'avez dit qu'il avait des cicatrices, lui rappela-t-il en changeant de feuille.
- Oui deux sur le visage.
- Elles vous on fait peur ?
- Oui, énormément peur mais ensuite j'ai....
Savana s'interrompit.
- Vous vous êtes mis à sa place parce que vous en avez aussi ?
Elle ferma les yeux pour seule réponse en se passant une mains tremblante sur sa joue. Oui, il avait entièrement raison. Lorsqu'elle avait vu ses cicatrices Savana avait eu l'impression qu'elle aurait pu être comprise avant de se résigner à espérer. Le cheikh s'était imposé comme quelqu'un de charismatique, déterminé, avec une férocité dans le regard qui l'avait fait tressaillir. Comment aurait-il pu avoir pitié d'elle ? Une fille comme elle ?
- Et pour vos exercices ? Questionna-t-il pour changer de sujet : Pourquoi l'avoir laissé vous servir à table ?
Savana releva la tête en fronçant des sourcils.
- Je...comment vous le savez ?
Le Dr West esquissa un léger sourire.
- Parce que vous me l'avez dit tout à l'heure...
- Je n'en ai pas le souvenir, murmura-t-elle en secouant énergiquement de la tête.
- C'est parce que votre subconscient à garder en mémoire des choses que vous refusez de garder comme des choses positives, expliqua-t-il en écrivant sur sa feuille : Pendant que vous me racontiez la soirée vous avez dit que des choses négatives mais c'est ce que vous tentez de vous faire croire : Moi j'ai entendu par exemple qu'il vous avez servi à table, qu'il vous a embrassé la main...
Incapable de justifier ces quelques brides qu'elle avait révélée sans s'en apercevoir, Savana baissa de nouveau les yeux.
- Je ne suis pas Max, vos yeux...regardez-moi, l'encouragea-t-il d'une voix si douce et rassurante qu'elle les releva.
- Pourquoi ne pas lui avoir tout simplement dit qui vous étiez Savana ? Demanda le Dr west en ôtant ses lunettes.
Des larmes de honte se mirent à rouler sur son visage.
- Qu'aurais-je dû dire Dr ? Que je me suis mariée j'avais à peine dix-huit ans ? Parce que je croyais aux contes de fées ?
Elle marqua une pause pour éclater en sanglots.
- Que j'ai passé trois ans en enfer, que je fais partie des ces femmes qui ce sont fait maltraitées par leur mari ? Qu'un soir d'été parce que je n'avais pas replié correctement son costume il m'a défenestré ?
Le Dr West se leva sur l'instant pour la rejoindre sur canapé alors qu'elle pleurait à chaude larmes. La douleur qui lui comprimait le cœur était si intense qu'elle ferma les yeux pour qu'elle se dissipe.
- Savana, vous ne devez pas avoir honte de ce qu'il vous est arrivé, dit-il en pressant sa main sur la sienne : Vous êtes une victime et une miraculé.
- Non...je suis...
- Chut...ne dites plus rien, la séance est terminée.
Savana essuya son visage avec le revers de sa main. Il lui était plus facile de se confier au Dr West qu'à n'importe quelle autre personne. Même avec son frère, elle n'arrivait pas à lui avouer ses peurs les plus terrifiantes.
- Cette séance nous a permis d'avancer Savana.
- Vous trouvez ? Murmura-t-elle en étouffant un sanglot.
Il lui offrit un sourire rassurant en posant une main sur son épaule.
- Petit à petit Savana, vous avancez je peux vous l'assurez, affirma-t-il en lui tendant un mouchoir.
Savana n'était pas de cet avis mais lui faisait entièrement confiance. Cette séance lui avait fait beaucoup de bien et c'est moins angoissée qu'elle quitta le cabinet. Profitant de l'air glacial, Savana descendit prudemment les marches de l'hôpital et décida de se promener dans les rues de Manhattan pour se vider l'esprit.
Arik dévisagea Hamid car ce dernier hésitait à s'avancer vers lui. Une attitude qui ne lui ressemblait pas.
- Allons Hamid que se passe-t-il ? L'intima Arik en se levant pour venir à sa rencontre.
- Amélia Hood n'existe pas votre altesse, lâcha-t-il enfin.
Arik émit un bref rire en secouant de la tête.
- Insinuerais-tu que je mens Hamid ? Demanda-t-il d'une voix grave.
- Non votre majesté, s'empressa-t-il de dire en s'inclinant respectueusement : Vous devriez vous asseoir à présent que je puisse continuer.
Devant la mine grave de son conseiller, Arik s'exécuta en soulignant son agacement d'un soupir bruyant.
- Savana Slovovitsh n'est pas au Mexique mais à l'adresse que je vous ai donné, déclara-t-il en posant les dossiers sur la table.
- Impossible, Amélia Hood m'a très clairement précisé qu'elle se trouvait au Mexique.
Devant son agacement, Hamid déposa devant lui une photo qui présentait Amélia...du moins....Impossible !
La jeune femme semblait encore plus jeune qu'aujourd'hui, mais ses yeux d'hiver ne pouvaient la tromper.
- Aurait-elle menti ! S'exclama Arik en prenant la photo pour l'examiner de plus près.
Arik refusait d'y croire et pourtant...
- C'est impossible que ce soit elle Hamid pour la raison suivante : Elle est trop jeune pour être l'épouse de qui que ce soit, déclara-t-il avec une pointe de jalousie soudaine.
Hamid baissa les yeux terriblement gêné.
- Malheueusement c'est bien l'ex-épouse de cet homme...
- Impossible ! Es-tu fou ! Hamid as-tu fait les bonnes recherches ? S'emporta Arik en se levant.
Hamid ouvrit le dossier et le lui donna.
- Vous devriez le regarder vous-même votre majesté, suggéra-t-il en se reculant : Pour être honnête avec vous, je n'aurais pas la force de vous expliquer.
Interpellé par la tristesse qu'il lut dans les yeux d'Hamid, il baissa les yeux sur le dossier.
De là, Arik avait l'impression d'être torturé chaque fois qu'il tournait une page. Une profonde méprise contre lui-même noua sa gorge. Ses doigts se crispèrent sur l'insupportable photo qu'il avait devant les yeux.
- Qui a prit cette photo ? Questionna-t-il d'une voix altérée.
- Un voisin sans scrupule sans doute.
Dents serrées, Arik sentit son visage se crisper d'une indicible tristesse pour Savana Slovovitsh. Voilà pourquoi elle boitait. Voilà pourquoi elle tremblait si fort et s'était comportée avec lui d'une façon si mystérieuse. Comment aurait-il pu en être autrement ?
- Depuis quand remarche-t-elle ? Demanda-t-il d'une voix si basse qu'il eut peine à s'entendre lui même.
- Je l'ignore votre altesse.
Arik soupira en fermant les yeux.
- La prochaine fois que j'ai la ferme intention d'aller affronter un ennemi quel qu'il soit, je t'en prie Hamid rappelle-moi ce jour.
Son conseiller inclina légèrement sa tête en guise de réponse. S'il s'était renseigné sur elle avant de se lancer à sa recherche, Arik ne se serait jamais comporté d'une telle façon avec elle.
- J'ai le profil d'un monstre...les gens disent vrai.
- Non, je vous interdis de dire une telle chose ! S'exclama Hamid vivement : Ces personnes jugent votre visage sans même vous connaître, c'est deux choses différentes.
Incapable d'en regarder plus, Arik referma le dossier violemment.
- Il faut absolument que je m'entretienne avec son frère, dès aujourd'hui, déclara-t-il alors.
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