Chapitre 52
Le temps gris de New-York ne lui avait guère manqué. En s'avançant vers les marches du tribunal, elle eut à faire à un raz-de-marée de photographes campés devant le tribunal depuis l'aube. Pour commenter le mariage ? Sa grossesse ? Ou le procès ?
Savana ne tarda pas à obtenir sa réponse. Les trois questions ne tardèrent à fuser de toutes parts. Arik pressa sa main sur sa taille en montant les marches à ses côtés, repoussant les appareils photos d'une main violente.
- Qui les a prévenu ? Grogna-t-il en sortant son téléphone ; Je veux un périmètre de sécurité, ordonna-t-il sans décolérer.
Savana inspira une grande bouffée d'oxygène en se frottant les yeux qui avaient subi les assauts ses flashs.
Ayant une forte influence en Amérique, Arik savait se faire écouter avec fermeté et déjà, quatre gardes se dirigeaient à l'extérieur pour faire des décamper ces journalistes véreux.
Qui des deux étaient le plus nerveux ? Lui ou elle ?
- J'ai besoin d'un café, lâcha-t-il d'une voix impatiente.
- Tu en as prit six depuis ce matin, lui rappela-t-elle en posant sa main sur son torse.
Il ne la regardait même pas. Il passait et repassait son regard dans l'immense couloir. À la recherche de Max.
- Chéri, chuchota Savana en essayant de trouver son regard ; Il sera extradé par l'arrière de la salle d'audience tu ne peux pas le voir.
- Vraiment ? Dit-il sur un ton cinglant ; Dommage....j'aurai tellement voulu le voir.
Savana se pinça les lèvres et posa sa main sur sa joue pour qu'il la regarde.
- Doucement, il ne peut rien m'arriver.
- Étant donné que je suis là...effectivement rien ne t'arrivera, affirma-t-il le visage complètement masqué de pierre.
Un long...très long frisson courut sur se peau sensible. Encore une minute de plus et elle crut qu'il allait bondir sur n'importe qui pour soulager ses nerfs.
Alors elle prit sa main et la posa sur son ventre. À travers son manteau fin et le tissu de son tailleur rouge, on pouvait sentir son ventre pleinement en croissance.
- Il ne peut rien m'arriver Arik, répéta-t-elle en lui souriant.
Même si bientôt elle allait devoir affronter Max, Savana veillait à ce qu'il rentre dans cette salle d'audience sans vouloir commettre un meurtre.
- Vous êtes là !
Savana reconnut la voix de sa belle-sœur et se retourna. Celle-ci était vêtu de sa robe d'avocat. Sa grossesse avancée se voyait à vue d'œil mais se elle portait comme un charme. Cette image d'elle et de son frère suffit à faire monter les larmes qu'elle retenait depuis la veille. Zakhar affichait une mine mauvaise et frustré de ne pas pouvoir la défendre. Savana avait toute confiance en Louane. C'était une grande avocate qui avait fait plusieurs fois ses preuves ces trois derniers mois. Et elle était aussi celle qui avait redonné le sourire à son frère...
- Louane ! Je suis si heureuse de te revoir !
Cette dernière lui embrassa la joue tout en gardant une certaine retenue. Savana savait qu'elle tentait désespérément de garder un lien désuni pour le procès. Ses yeux larmoyant en étaient la preuve.
- Respire Savana...
Son frère prit le bras de son mari pour lui parler en privé. Sa gorge se noua devant l'expression fermée des deux hommes. Louane posa sa main sur son épaule pour l'entraîner vers le banc.
- Comment tu te sens ? S'informa-t-elle.
- Comme quelqu'un qui va devoir affronter les ténèbres.
Louane poussa un soupir et lui sourit.
- Tout ira bien Savana, déclara-t-elle d'une voix ferme ; Personne s'attend à te voir, ni le jury ni son avocat et encore moins Max.
- Comment ça va se passer ? Que dois-je faire ?
- Tu rentreras avec Arik, avant qu'il soit dans la salle, expliqua-t-elle en lui prenant la main ; Il y a un avocat chargé de la protection des femmes, elle voudra sûrement t'interroger.
- Et l'avocat de Max ?
Elle grimaça en faisant mine d'avoir des frissons.
- Son arrogance le tuera ou toi...car tu as toutes les cartes en main.
Savana inspira profondément en acquiesçant les yeux rivés sur Arik.
- Quoi qu'il puisse arriver, Max retournera en prison, ajouta Louane ; Notre but est la perpétuité.
- Ok, souffla Savana en se levant.
- Il est temps d'y aller, annonça Zakhar en revenant avec Arik.
Il lui embrassa la main et enlaça ses doigts aux siens. C'était le moment. Il ne pouvait plus rien lui arriver, songea-t-elle quand les portes s'ouvriront sur elle, flanquée des deux hommes de sa vie qui l'entouraient. Alors elle s'avança dans la salle d'audience en bravant les regards qui se tournaient vers elle. Des murmures s'élevèrent...certains jurés écarquillèrent les yeux. L'avocate de la défense des droits des femmes battues lui adressa un sourire en coin, visiblement au courant de sa venue. Le juge lui, ôta ses lunettes tout en se frottant pensivement le menton.
- Je n'étais pas au courant ! S'écria l'avocat de Max en direction du juge.
- Cela s'appelle un témoin surprise maître Carozo, j'ai nulle besoin de vous rappeler les codes ? Si ?
L'homme se rembrunit et marmonna dans sa barbe.
- Madame Dahazar, salua le juge en mettant ses lunettes ; Votre altesse...
Arik se contenta de le saluer d'un mouvement de tête et se glissa sur le banc, cachant Savana du mieux qu'il le put. La porte sur la gauche s'ouvrit, laissant apparaître ce monstre qui se stoppa net en découvrant Savana assise près de lui, tête baissée. Son regard devint subitement possessif ce qui provoqua en lui un accès de rage qu'il s'efforçait de combattre. Cet homme était fou. Il avait le regard rivé sur elle, une lueur mystérieuse dans les yeux comme s'il avait l'espoir de sortir...comme si Savana était ici pour plaider sa cause.
Grognant silencieusement il posa sa bouche frémissante de colère sur la tempe de sa femme, pour lui montrer que désormais, elle était à lui.
- Monsieur Stilling je vous prierais de ne pas regarder madame Dahazar et de vous asseoir immédiatement, ordonna le juge.
Savana sentit une douleur lui cisaillait la gorge. À la dérobée, elle l'avait vu entrer dans la salle et des souvenirs affreux se mirent à jaillir de sa mémoire.
- Il est temps d'appeler notre premier témoin à la barre.
Quand ce témoin s'approcha à la barre pour jurer de dire la vérité et rien que la vérité, Savana reconnut aussitôt l'infirmière qui l'avait prise en charge lorsqu'elle avait perdu son bébé.
La main puissante de son mari se referma sur son ventre rebondi.
- Madame Jennking, vous étiez l'infirmière de garde ce jour-là ? Le 4 juin pour être exact.
- Oui c'est ça.
- Vous avez pris en charge mademoiselle Slovovitsh pour des saignements et des douleurs au ventre ?
La femme un peu rondelette s'approcha du micro.
- Elle était en train de perdre son bébé, je l'ai tout de suite prise en charge mais quelque minutes plus tard, après qu'un médecin soit passé, le cœur de l'enfant ne battait plus.
Louane quitta sa place pour venir vers le témoin.
- Que s'est-il passé ensuite ?
- Elle venait d'entamer sa seizième semaine, alors nous avons dû déclencher l'accouchement avec des médicaments.
Arik ferma les yeux, incapable de supporter la suite supposée à venir.
- Où se trouvez monsieur à ce moment-là ?
L'infirmière posa son regard sur Max avant de la reporter sur Louane.
- Il était dans le couloir en train de passer un coup de fil, répondit-elle en baissant les yeux ; Je l'ai interpellé pour savoir s'il venait pour soutenir sa femme mais il a repoussé ma question de la main, alors je n'ai pas insisté.
- Est-ce que ce comportement détaché vous a alerté ?
- Evidemment ! S'empressa-t-elle de dire en prenant un air indigné ; J'ai eu affaire à des fausses-couches tardives est les couples sont toujours solides et unis dans cette épreuves, accoucher d'un enfant mort c'est extrêmement difficile et éprouvant, cela conduit parfois à une dépression.
Savana s'efforçait à ne pas se souvenir de cette époque, mais des images de son fils revenaient la hanter.
- Ensuite ? Avez-vous remarqué autre chose ?
- Oui, des bleus sur son ventre et sur son poignet droit, dit-elle en secouant de la tête tristement ; Evidemment ces hématomes concordaient avec la version de cette chute dans l'escalier.
- Comment elle vous a paru ?
- Affaiblie, très pâle et muette, elle ne disait quasiment rien, murmura-t-elle en s'éloignant du micro comme si elle regrettait de n'avoir rien fait ; Sa tension a subitement chutée, son mari a insisté pour qu'elle rentre chez elle mais je l'ai admise dans le service des soins contre son avis, j'espérais que sans sa présence elle aurait pu me parler mais elle était comme...vide, livide je dirais.
Tous écoutaient le témoignage de cette femme avec la plus grande attention. Savana pouvait sentir son regard sur elle, et dut inspirer profondément pour ne pas perdre pied. Du moins pas tout de suite.
- Dans votre déposition vous dîtes avoir entendu un dispute dans la chambre, fit remarquer Louane.
- Oh ce n'était pas un dispute, c'était lui qui parlait fort, il n'arrêtait pas de dire « Je te préviens ! »
Louane fit demi-tour vers la table.
- Je n'ai plus de questions.
Quand l'avocat de Max se leva pour poser des questions à l'infirmière Savana bloqua son souffle.
- Madame, il y a quelque chose qui me trouble, pourquoi ne pas avoir alerté votre supérieur ou bien même la police s'il vous paraissait dangereux ?
- Objection ! Le témoin relates des faits il n'ait pas ici pour être jugé !
- Objection accordé, maitre...
- Je reformule ma question, s'exclama celui-ci avec humeur ; Pourquoi avoir laissé monsieur Stilling repartir sans lui poser des questions ?
- Fallait-il pourvoir le faire ! S'insurgea le témoin ; Même pour la fiche d'admission il s'est comporté avec virulence, il n'a guère parlé, il vociférait comme si cela était trop long à son goût ! Que fallait-il que je fasse ? Deux infirmières ont même eu peine à obtenir l'assurance des soins pour sa femme.
L'avocat repassa derrière le bureau dans une posture qui ne lui plaisait guère. L'infirmière fulmina près du micro et posa son regard sur elle, chargé d'empathies.
- Je refuse que l'on remette ma profession en doute, j'ai tout fait pour connaître la vérité mais cette pauvre enfant semblait complètement morte !
La salle entière s'agita sur le dernier mot qu'avait employé l'infirmière.
- Personne ici ne remet votre profession en cause , dit le juge en inclinant sa tête ; Si vous n'avez plus de questions à poser au témoin celui-ci peut quitter la barre.
En passant dans l'allée, celle-ci lui sourit tristement. Savana baissa les yeux sur son ventre et agrippa l'index d'Arik en se pinçant les lèvres. Le procès venait à peine de débuter, elle se demandait si elle allait tenir jusqu'au bout....heureusement la puissance qui émanait d'Arik l'aida à relever la tête pour le témoignage suivant.
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