Arik était presque sûr qu'elle aurait refusé de l'accompagner. Sa réponse vive et concise l'avait prit de court. Confus, il rentra dans la salle en la dévisageant.

- Vous désirez m'accompagner ?

- Oui, répéta-t-elle les yeux étincelants.

Sans pouvoir s'empêcher de la regarder avec un regard possessif, Arik combla l'espace qui les séparait.

- Vous êtes sûre ? Insista-t-il en posant sa main sur son épaule.

Elle tremblait. Mais Arik était presque sûr que ce tremblement était dû à une émotion de joie. Car elle souriait, cherchant ses mots...dans l'espoir qu'il ne lui refuse pas.

- Je n'ai jamais voyagé, j'aimerai vraiment venir avec vous, dit-elle d'une voix chevrotante ; De plus, je préfère que ce soit vous pour mes soins.

Nerveusement elle se mit à jouer avec le ruban qu'il lui avait offert plus tôt dans la journée. Comme si elle redoutait qu'il refuse...alors que c'est lui-même qui venait de lui proposer. Arik avait longuement hésiter avant de lui demander. Il avait même hésité à annuler sa présence à Capri pour elle...et pour lui. Savana accaparait toutes ses pensées. Alors partir quatre jour de l'autre côté de la méditerranée sur une île dont il était tombé amoureux pour sa beauté antique lui était impossible. Savana allait s'y plaire autant qu'elle se plaisait au milieu du désert. Il avait tant de chose à lui faire découvrir. Conscient des risques qu'il allait prendre en emmenant la jeune femme avec lui, Arik serra ses mâchoires et glissa son index sous son menton.

- Alors c'est d'accord, dit-il d'une voix qu'il eut peine à reconnaître.

Immédiatement elle lui sourit, les yeux pétillants. Elle avait l'air soulagée et impatiente de le suivre.

- Que dois-je emporter ? S'enquit-elle en mettant ses mains dans son doigts.

- Vous, murmura-t-il d'une voix rauque ; Je me chargerais de votre garde-robe.

Savana sentit son cœur s'affoler.

Son regard devint si possessif qu'elle crut s'évanouir dans ses bras. Partir avec lui sur cette île paradisiaque était une nouvelle étape qu'elle était prête à franchir. Heureuse...oui elle se sentait heureuse de pouvoir l'accompagner.

- Tenez, c'est pour vous.

Il sortit un livre de sa poche-arrière.

- Jane Austen...mais où l'avez-vous trouvé !

- J'ai demandé à votre frère de me le faire parvenir au plus vite, expliqua-t-il tandis qu'elle le porta contre son cœur ; Si j'avais su qu'il viendrait vous rendre visite deux jours plus tard...

Il tiqua en embauchant une petite grimace.

- Le principal c'est qu'il soit ici, murmura-t-elle en peinant à croire qu'il ait pensé à son livre.

- Vous pensez vraiment à tout, c'est...je...merci Arik.

Ça y est, Savana venait enfin de l'appeler par son prénom. Satisfait, il esquissa un sourire en coin puis s'éloigna comme un conquérant...savourant sa victoire.

- Alors c'est tout ce que j'emmène ? Demanda-t-elle précipitamment.

Il se stoppa à la porte et darda un regard brûlant sur elle.

- Vous...et votre livre.

Décontenancée par les profondeurs mystérieuses de sa voix, Savana ne savait plus où se diriger.

- Moi...et mon livre, bafouilla-t-elle.

Il rit en se pinçant l'arête du nez. Peu lui importait. Il pouvait rire d'elle, Savana n'avait jamais été aussi comblée de partir au milieu de nulle part.

Une heure plus tard ils arrivèrent jusqu'au jet privé du cheikh. Savana prit ses airs et ne commenta pas le chargement de ses béquilles et fauteuil roulant. Arik se voulait prudent. Si c'était la seule condition pour ce voyage, Savana était prête à les accepter. Arik n'était plus l'homme du désert mais l'homme d'affaire vêtu d'un costume sur-mesure. Sa veste noire et sa chemise semblaient avoir de la peine à résister tant son large corps puissant frottait contre le tissu. Ses muscles roulaient à chacun de ses mouvements. Le monde auquel il appartenait était différent du sien. Même si son frère était un grand avocat, Savana n'avait jamais réussi à se faire à ce monde plongé dans l'opulence Le même monde qui avait fait de Max un monstre assoiffé de pouvoir. Mais Arik était différent. En outre son statu de roi...et pas des moindres, il semblait se détacher de ce monde aussi souvent que cela lui était permis. Par exemple au cottage. Il s'était conduit comme un homme simple. De plus elle avait remarqué qu'il n'avait aucune arrogance. Ni dans le regard et ni dans son attitude.

- Le vol va durer une bonne partie de la nuit, annonça-t-il en bouclant sa ceinture.

- Nous sommes seuls ? Hamid ne vient pas avec nous ?

- Je n'ai pas besoin d'être protégé, dit-il avec un léger sourire ; Mes gardes sont avec moi juste pour le protocole, reprit-il en s'installant à côté d'elle ; Quant à Hamid, il a le droit à quelques jours de repos vous ne pensez pas ?

Savana se pinça les lèvres. Il est vrai que son conseiller travaillait sans relâche.

- Vous avez raison.

Il se pencha près d'elle pour lui attraper le menton. Une habitude qu'il avait prise pour l'approcher sans craindre de la faire bondir. Elle adorait ça.

- Vous semblez soucieuse, remarqua-t-il.

Pas soucieuse non. Complètement grisée par son regard à la fois pénétrant et infranchissable.

- Seulement un peu fatiguée, mentit-elle en lui souriant timidement.

Il baissa son regard sur ses lèvres entrouvertes et relâcha son menton. C'est seulement à ce moment-là qu'elle se rendit compte qu'ils étaient dans les airs. Un plateau repas leur fut présenté. L'hôtesse s'évertuait à se faire remarquer mais Arik semblait plongé dans ses pensées. Savana mordilla dans une frite puis une autre. Son manque d'élégance l'arrêta brusquement. Des souvenirs sordides affluèrent dans son esprit. Arik remarqua très vite l'hésitation soudaine de la jeune femme. Il se pencha vers elle et referma sa main sur la sienne...suspendu au-dessus du plateau. Elle quitta ses sombres pensées.

- Vous devriez goûter à la viande elle est excellente.

Il piqua un morceau et approcha la fourchette près de ses lèvres qui tremblaient. Pourtant, elle ouvrit la bouche sans hésiter. Charmé par le goût, elle reprit son expression décontracté. Son ex-mari était comme une brume épaisse. Elle accaparait l'esprit de la jeune femme comme une ombre malveillante. Elle la combattait de toutes ses forces mais pas suffisamment pour qu'elle disparaisse de son esprit à jamais. Personne ne lui résistait, songea-t-il en observant la jeune femme les yeux plissés. Et ce n'est certainement pas des sombres flashback qui allaient l'arrêter.

- Vous ne mangez pas ? Demanda-t-elle en remontant la manche de son chemisier.

- Je n'ai pas très faim.

- Vous mangez rarement, lui fit-elle remarquer en prenant une frite.

- J'ai peu d'appétit quand je suis pensif.

- Vous êtes tourmenté par quelque chose de particulier ?

Oui, vous.

- Rien de bien important, murmura-t-il en lui souriant tendrement.

Elle s'allongea sur le siège la tête penchée vers lui. Ses yeux papillonnaient. Elle luttait pour rester éveillée.

- Dors princesse, je te réveillerais quand nous serrons arrivés.

Arik décida qu'il était tant de la tutoyer. Elle ferma les yeux en rougissant. Gagné par le désir de la voir heureuse, il caressa sa joue rouge avec son pouce et se remit droit sur son siège. Il aurait voulu la prendre dans ses bras et l'embrasser. Goûter une seconde fois à ses lèvres exquises et douces. Il voulait encore sentir contre la pulpe de ses doigts son pouls rapide. Il adorait sa fraîcheur d'esprit. En tournant la tête vers elle, Arik fut une fois de plus sidéré par sa beauté naturelle. Difficile voire insoutenable de savoir ce beau visage longtemps maltraité. Le vol dura toute la nuit, l'aube s'éveillait sur eux, parsemant sur la jeune femme des nuances rougeoyantes.

Arik retira sa veste, la passa autour de son corps et la souleva dans ses bras. Incapable de combattre plus longtemps ses désirs, il se pencha pour couvrir ses lèvres d'un baiser. Elle s'éveilla dans ses bras, arquant sa tête vers la sienne. Arik recula sa tête lentement pour capter les premières lueurs de son regard d'hiver. Un sourire émerveilla son regard. Elle se nicha au creux de son épaule. Arik posa sa bouche contre son front, avec la certitude que ce coin de paradis leur réservait de nombreuses surprises.