Inspirant profondément, elle rouvrit les yeux tentant désespérément de reprendre son souffle. Il lui aurait été si facile de se retourner pour lui échapper. Son corps refusait de lui obéir. Elle recroquevilla sa tête vers lui sans jamais le regarder par peur qu'il se réveille ou qu'il lui soit déjà. Peur qu'il lui demande ce qu'il lui arrivait. Poings toujours liés sur sa bouche elle plia en deux pour se rapprocher encore de lui. Jamais elle n'avait été si proche d'un homme. Même avant de voir le vrai visage de Max, celui-ci n'était pas porté sur les câlins ni les caresses. Il ne s'appliquait jamais à lui donner le bonheur dont elle rêvait. Écartant ses doigts de sa bouche elle déplia ses mains en poings pour y déceler malgré la pénombre les nombreuses brûlures que le four lui avait provoqué il y a des années, quand sa vie avait encore un semblant de sens. Malgré tout ces défauts qui lui donnaient l'impression d'être laide et indésirable, elle se raccrochait à l'idée qu'elle plaisait à cet homme allongé près d'elle. Dévisageant ses doigts tristement elle se rendit compte trop tard du bras qui se posait sur sa taille et de cette main dans son dos. Envahie par la panique Savana ouvrit complément les yeux. Dès lors, que son corps alangui fut ramené vers le guerrier, Savana retint son souffle. Son bras se resserra autour de son dos. Dans la pénombre, elle trouva son regard penché au-dessus d'elle, l'observant en silence. Pourvu qu'il n'est pas senti son baiser !

La bouche sèche, elle arqua sa tête en arrière, cherchant ses mots.

- Pitié dites-moi que vous dormiez il y a encore cinq minutes, murmura-t-elle mortifiée.

Il ne répondit pas. Il se contenta de la regarder sans un mot.

- Pourquoi, chuchota-t-il d'une voix rauque ; est-ce qu'il y a quelque chose que je dois savoir ?

Elle secoua négativement de la tête. Arik ne parvenait pas à s'expliquer sur ce qui l'avait assailli quand ses lèvres s'étaient posées sur les siennes. Mais il ne voulait pas la rendre plus mal à l'aise qu'elle l'était déjà. Il avait ressenti son envie, son désir de vouloir essayer. Que pouvait-il demander de plus ? Elle faisait un travail exemplaire sur elle-même. Elle était magnifique. Jamais aucune femme ne lui avait provoqué un tel effet au point d'en avoir mal. Pendant un instant, il se sentit vulnérable. Prisonnier d'un désir incontrôlable.

- Vous n'arrivez pas à dormir ?

- Si !

Elle ferma fort les yeux pour feindre d'être épuisée ce qui lui valu un rire étouffé.

- Comme ça ? Demanda-t-il en la ramenant plus prêt de lui, persuadé qu'elle voulait être contre lui.

Elle déploya ses longs cils. L'azur de ses yeux brillaient d'une lueur qu'il ne sut déchiffrer.

- Oui, répondit-elle en cachant son visage dans l'oreiller.

Refoulant l'ardeur de ses désirs, Arik passa son bras sous sa taille et enroula son bras autour d'elle. Savana ne parvenait plus à réfléchir. En réalité, elle ne voulait plus réfléchir. Elle voulait saisir cette chance de se sentir protégée rien qu'une fois. Un sentiment plus profond qu'elle ne l'aurait crû marqua son cœur au fer rouge. Les bras puissants du cheikh l'entouraient si étroitement qu'elle se sentait proche de son torse.

- Vous m'apaisez, murmura-t-elle d'une voix mal assurée.

- Vraiment ?

De là, il s'employa à dessiner des petits cercles sur le haut de son épaule. Des frissons parcoururent son épiderme déjà très sensibles à ses touchés.

- Oui, je voulais vous le dire.

Toujours la main posée sur son épaule, il cessa ses caresses et son torse se gonfla d'une respiration. Absorbée par son large torse, Savana avait l'impression d'être l'héroïne d'un roman historique.

- Vous me faites penser à un héro de l'un de mes livres.

Elle parlait plus vite qu'elle le voulait. Ses pensées étaient trop intenses pour les conserver. Elle avait l'intime conviction qu'elle pouvait tout lui confier sans jamais être prise pour une rêveuse insignifiante, comme lui précisait Max à chaque fois qu'elle voulait lui narrer l'une de ses histoires.

Il se redressa pour se pencher au-dessus de son visage. C'était pourtant ce genre d'homme qui devait se montrer désintéressé par ce genre de détail.

- Comment est ce héro ? S'enquit-il en la dévisageant avec intérêt.

Savana se pinça les lèvres. Il serra ses mâchoires, surélevant sa tête avec l'oreiller. Le feu gagna ses joues.

- C'est un guerrier surpuissant.

Flatté, il leva un sourcil.

- Un viking austère et sombre, reprit-elle en posant sa main sur son bras musclé ; Elle c'est une saxonne, leur deux clans se détestent. Mais il la veut, il l'épouse alors qu'elle ne le veut pas. Dans la suite de l'histoire il montre un côté sombre voué à l'éloigner encore plus de lui, il croit dur comme fer que son âme est souillé par le sang qu'il a sur les mains. Mais un jour, alors qu'il se pense condamné, la jeune saxonne le soigne d'une violente fièvre. Alors il recouvre peu à peu l'espoir de la conquérir. La saxonne à beau être terrifiée elle se sent si désirée par cet homme, qu'elle n'arrive plus à lutter contre les sentiments qu'elle éprouve pour lui. Alors elle sauve son âme en lui montrant qu'il a le droit d'être aimé.

Elle marqua une pause pour fermer les yeux, sourire aux lèvres.

- Leur amour était voué à l'échec, ils n'étaient prédestinés à être ensemble et pourtant, elle finit pour lui donner un amour si fort qu'à la simple pensé de la perdre, il avait l'impression de mourir.

Attentif, il la dévisagea un moment.

- Vous semblez aimer les histoires anciennes, lui fit-il remarquer.

- J'ai l'impression que tout était moins compliqué à cette époque, répondit-elle en retirant sa main de son épaule ; une simple lampe à huile, un lit et le nécessaire pour vivre. Je suis sûre que les hommes accordaient plus d'intérêt à leur femme qu'ils en apportent aujourd'hui.

Elle ferma les yeux.

- Tout est si compliqué maintenant, murmura-t-elle d'une voix presque inaudible.

- Pourquoi je vous fais penser à lui ? Demanda-t-il d'une voix douce.

Elle rouvrit les yeux pour plonger son regard dans le siens.

- Parce que vous avez l'allure d'un homme sévère, ayant l'intime conviction d'être un monstre. Cet homme a tué pour protéger son village, vous avez tué pour protéger votre pays, vous avez l'impression que la honte vous ronge l'âme mais vous n'avez pas choisi, vous avez été forcé de prendre des décisions.

Elle marqua une pause de déglutir.

- Il y a une différence entre avoir l'impression d'être un monstre et d'avoir choisi de l'être par pure plaisir de torturer des âmes innocente.

Arik détourna son regard vers son oreiller, incapable de dissimuler son expression. Elle avait réussi à toucher un point sensible, une douleur lancinante le perça de part en part.

- Votre âme est innocente, murmura-t-il douloureusement.

Il riva son regard au sien et s'aperçut qu'elle s'était endormie. Arik déglutit péniblement en admirant son visage apaisé. Arik glissa son index sur le contour de sa mâchoire et baissa la tête un instant en expirant un souffle tremblant.

- Dormez à présent, chuchota-t-il en collant sa bouche contre ses cheveux.

Elle remua légèrement, glissant sa tête sur le côté. Arik la veilla toute la nuit, repensant à l'histoire qu'elle lui avait narrée comme si c'était elle... l'héroïne de ce roman sombre et passionnel. Savana Slovovitsh espérait-elle un amour aussi fort ? Aussi passionnel ?

Pensivement, Arik songeait déjà au lendemain, pressé d'en apprendre encore plus sur ses rêves très précis.