Chapitre 13
- Excellente idée, approuva Savana d'un souffle.
Elle avait même prié le ciel qu'il intervienne. Savana n'avait pas réellement réfléchi aux conséquences qu'auraient ce dîner sur elle et sur sa thérapie. Avant son accident, elle se souvenait encore de son visage creusé par la maigreur dont elle avait été victime. De toutes ces soirées à ne pas pouvoir manger comme elle le voulait. Petit à petit elle arrivait à se défaire de ses habitudes imposées par Max. Mais elle avait toujours l'impression qu'il la surveillait.
- Filet de bœuf aux morilles, haricots verts ? Proposa-t-il en l'extirpant à ses pensées.
C'était comme s'il avait pu lire dans ses pensées. Savana ne put que sourire en opinant de la tête.
- En entrée...hum, commença-t-il en examinant la carte d'un œil expert.
On toqua à la porte. Il se leva promptement et alla ouvrir. Arik accueillit le maître d'hôtel du mieux qu'il le put. C'est-à-dire avec un sourire contenu.
- Je viens prendre votre commande votre altesse, annonça-t-il sur un ton révérencieux.
- Nous serons deux ce soir, rectifia-t-il en attirant la surprise de l'homme.
Arik s'empressa de passer sa commande. Il commença d'abord par lui, puis Savana.
- En entrée, elle prendra la coquille de saumon puis le bœuf aux morilles et duo d'haricots verts, un supplément de frites c'est possible ?
- Certainement votre altesse, affirma le maitre d'hôtel.
- En dessert mettez le trio de chocolats et un café pour moi.
Il referma la carte et lui tendit en s'efforçant de rester immobile le temps qu'il se retourne par pure politesses. Il referma la porte délicatement et se retourna d'un mouvement pressé.
Les yeux de biches de la jeune femme étaient rivés sur lui. Sa bouche était fermée quant à ses mains...elles se tortillaient l'une contre l'autre. Ce qui aurait presque pu le faire vaciller était son regard porté sur ses balafres. Sa vie sentimentale était un fiasco depuis des années et le seul plaisir émaillé par quelques femmes l'avait laissé de marbre.
Si bien qu'il n'avait jamais songé à se marier avec l'une d'entres elles...un vœux qu'elles chérissaient toutes.
- La commande est passée, informa-t-il en revenant s'asseoir : Nous pouvons à présent continuer là où nous nous sommes arrêtés.
Savana se pinça la lèvre, intimidé par son regard profond et presque animal...
Jamais un homme ne l'avait regardé d'une telle façon...sans doute parce qu'elle ne leur avait pas donné l'occasion.
En se mariant si jeune elle avait amoindri ses chance de connaître un autre jeune homme et de peut-être avoir une vie comme elle l'avait toujours voulu. Devait-elle se sentir coupable d'avoir désiré le monde merveilleux qu'elle s'était construit ? De ces histoires qu'elle se racontait à elle-même ? Non, lui avait répondu son psychiatre.
Rien n'était de sa faute. Âgé de vingt ans à l'époque, Max avait d'abord su comment la conquérir. Savana se souvenait encore de leur tout premier rendez-vous et l'équipe de quater back du lycée sifflant la prestation de leur capitaine d'équipe. Puis s'ensuivit la demande...quelques mois plus tard. Irréel, précipité.
" La plus belle fille du lycée " Disait-on d'elle à l'époque.
Cette jeune fille avait fini par disparaître quelques mois suivant le mariage. Lors d'un dîner avec un entrepreneur censé racheté une part de l'entreprise qu'il avait hérité de son père.
" Soit belle et tais-toi " Lui avait sommé Max. Savana se souvenait encore du tremblement qui l'avait saisi à ce moment-là. De cet instant où quelque part au fond d'elle...inévitablement, elle sut que son conte de fées allait devenir noir, sordide et pénible.
- Où vivez-vous ? Demanda-t-elle d'une voix qui trahissait sa volonté de ne rien montrer quant aux terribles souvenirs qui la traversaient.
- Dans un palais, répondit l'homme en plissant ses épais sourcils comme s'il devinait ses tourments les plus anciens.
- Quelle chance ! S'exclama alors Savana pour lui montrer que tout allait bien.
Il haussa des épaules, impassible.
- Par moments, cette chance devient lourde.
- Pourquoi donc ?
- Je m'y sens seul, même si j'ai moi-même refaits l'architecture il y a quelques mois.
Surprise, elle fronça des sourcils intriguée par sa réponse.
- Vous voulez dire que vous l'avez dessiné ?
- Oui, je l'ai supervisé également, affirma-t-il.
Étonnée, Savana lissa nerveusement la nappe blanche qui habillait la table.
- Vous avez fait des études ?
- Assez pour concevoir un bâtiment quel qu'il soit, répondit-il avec un sourire en coin.
Il faisait preuve de retenu et de modestie, remarqua Savana en lui rendant le sourire qu'il arborait.
Neutre et efficace pour masquer le trouble qu'il faisait naître en elle.
- Ça ne doit pas être facile de diriger tout un pays.
Il étira une grimace qui rehaussa ses balafres.
- Vous dire que je m'amuse serait un mensonge, confia-t-il en appuyant ses coudes sur la table : Je dois signer des accords, des traités entre certains pays européens, plusieurs réunions et j'en passe.
- Avez-vous du temps pour vous amuser ? Demanda-t-elle en réalisant trop tard le portant qu'avait sa phrase.
- Enfin....je veux dire vous avez des passions, rectifia-t-elle en réprimant des rougeurs apparentes.
Il sourit et poussa un profond soupir.
- J'adore faire des balades à cheval.
Savana ne s'était pas trompée lorsqu'elle l'avait imaginé sur un cheval au milieu du désert.
- Vous en avez beaucoup ? S'informa-t-elle complètement absorbé par le rêve vendu par ce cheikh puissant.
- Une bonne vingtaine.
Savana ne put s'empêcher d'écarquiller les yeux. Il avait beaucoup de chance d'avoir toutes ces choses. Cela lui rappelait l'insensé demande qu'elle avait émise à ses parents lorsqu'elle était enfant. Un poney.
- J'ai toujours rêvé d'apprendre à monter, confia-t-elle à voix haute.
- Vraiment ? S'enquit-il avec sa voix grave et percée d'un accent chaud : Il n'est jamais trop tard pour apprendre.
- Pas avec mes jambes, contrat-elle en secouant tristement la tête : C'est fini pour moi, je ne peux plus permettre certaines choses.
- Rien n'est jamais fini, rétorqua brusquement le cheikh sérieusement ; Rien n'est impossible Savana, croyez-en mon expérience.
Elle baissa les yeux, terriblement troublée.
- Si vous étiez à Dahazar, je m'appliquerais à vous apprendre tout ce que vous ne pensez ne plus pouvoir faire.
Savana cilla.
Il paraissait si sérieux qu'elle crut ses paroles qui sonnaient comme une promesse. Elle divaguait, songea-t-elle en secouant imperceptiblement de la tête.
- Comme m'apprendre à monter sur un cheval ? Dit-elle avec une pointe d'ironie dans la voix.
- Essentiellement, murmura-t-il sans la quitter des yeux.
On toqua de nouveau à la porte.
Le cheikh se leva impérieusement. Elle profita de se bref répit pour reprendre sa respiration. Les battements de son cœur n'avaient jamais été aussi forts et si rapides.
Un homme entra dans la suite et fit rouler un chariot jusqu'à la table en passant un regard intrigué sur elle. Savana détourna immédiatement les yeux.
- Merci, dit le cheikh en sortant son portefeuille pour en sortir un billet.
Le maître d'hôtel disparut après s'être incliné.
Savana n'avait jamais eu aussi faim qu'aujourd'hui. Les odeurs qui se dégageaient étaient si délicieuse qu'elle était impatiente qu'il soulève la première cloche.
- Je serais vraiment honoré si vous ne laissiez rien dans vos assiettes, confia-t-il en posant verres et couvertes sur la table.
Savana se pinça les lèvres. Cette remarque ne manqua pas de lui faire battre son cœur plus vite.
- Rien ne presse, reprit-il en déposant la première assiette ; Prenez votre temps et s'il se fait tard, vous dormirez ici, dans la seconde chambre...
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