Chapitre 10



  - Oui, enfin...si vous le souhaitez.

Elle évita soigneusement son regard. Sa main se posa sur la sienne, évitant qu'un mouvement ne l'empêche de continuer les points de sutures.

- Mon cousin, un vieil homme aigri s'est mit dans la tête de soulever le pays à la mort de mon père, expliqua-t-il d'une voix songeuse.

Attentive, Savana en oubliait sa main posée sur la sienne.

- Des d'hommes ont crû à ses belles paroles : Mais très vite, lorsque j'ai ordonné d'aller au combat, ces hommes ont comprit avec honte qu'ils s'étaient trompés : Mon cousin leur a promis beaucoup d'argent, de l'or, des maisons.

- Qu'avez-vous fait ?

Son visage était fermé. Ses yeux percés d'une lueur profondément triste.

- Nous avons dû nous battre, mon cousin était déterminé à accéder au trône : Cette guerre a duré deux mois.

Savana entrouvrit ses lèvres. Quelle histoire !

- J'ai perdu des hommes, dit-il d'une voix où perçait du remords, comme s'il se sentait coupable.

- Et...votre cousin ?

Ses yeux se braquèrent sur les siens. Savana sentit le poids de l'intensité qu'il y mit. Néanmoins, elle ne put détourner les yeux. Trop happé par ses yeux mordorés.

- Définitivement mort, lâcha-t-il froidement.

Elle frissonna, parce qu'elle savait sans le moindre doute que s'était lui qui l'avait tué. Pas une once de remord traversa son regard acéré.

- C'est lui qui m'a fait ces cicatrices, reprit-il en reportant son attention sur l'animal : J'ai eu un moment d'inattention et il en à profité pour me lacérer le visage.

- C'est affreux ! S'exclama-t-elle tristement en baissant les yeux sur le faon.

- Je préfère les accepter comme une marque de guerre qu'un fardeaux, reprit-il en coupant le fil : Mon pays à reprit son rythme de vie, il ne s'est jamais aussi bien porté.

Comment faisait-il pour en parler avec autant de détachement ? Savana n'eut pas besoin de chercher bien longtemps. Il était brave, robuste, comme un guerrier...et ce qu'il était.

Elle se surpris même à l'imaginer sur un cheval, brandissant une épée. Néanmoins, Savana ne parvenait toujours pas à comprendre l'intérêt qu'il avait pour elle.

- Voilà, l'opération est terminée, annonça-t-il en caressant l'animal à moitié endormi.

- Vous l'avez sauvé, merci infiniment pour votre aide.

Il inclina sa tête impérieusement.

- C'était trois fois rien, dit Arik rangeant le matériels.

Les yeux de la jeune femme brillaient. Elle semblait heureuse. Une douleur l'oppressait. Car il avait beau tout essayer, Arik la désirait. Oui il la désirait. Il désirait effleurer sa peau diaphane, lui montrer qu'elle ne risquait rien. Il voulait l'aider à retrouver le bonheur. Bon sang ! Il perdait l'esprit ! Pourtant il avait des tas de raisons pour s'empêcher de l'approcher ! Elle était jeune...terrifiée, mais tellement belle, tellement captivante qu'il avait l'impression de ne plus se reconnaître.

- Utilisez la cuisine pour vous laver les mains, dit-elle en l'arrachant à ses pensées.

Savana s'empêchait de le suivre du regard. Elle n'arrivait pas à ralentir les battements de son cœur. Forcée de constater qu'il avait su éveiller en elle des émotions troublantes, Savana rougit en se demandant bien ce qu'il pouvait penser d'elle. Est-ce qu'il la trouvait jolie ? Déstabilisée par le cours de ses pensées Savana sursauta quand le faon reprit conscience et se redressa d'un bond sur la table.

- Oh ! Doucement.

- Laissez-le descendre de lui-même, intervint la voix du cheikh en émergeant de la cuisine avec un torchon.

L'animal réagit à la voix de l'homme et le fixa avec ses grands yeux amendes. De là, Savana retint son souffle. Lentement il s'approcha et tira l'une des chaises puis l'invita à se reculer d'une mouvement de tête. Il ouvrit la porte en grand et elle sut que bientôt le faon partirait. Après de longue minutes à regarder autour de lui comme s'il cherchait le danger, le petit faon sauta sur la chaise puis sur le sol et perdit l'équilibre. Arik la stoppa d'une main quand elle voulut lui venir en aide.

Cette scène lui rappelait à quel point elle avait souffert lorsqu'elle-même tombé de son fauteuil roulant...observée de tous...sans que personne ne l'aide.

<< La combativité, lui avait murmuré son kiné >>

Alors elle se relevait seule, dans la douleur avec le sentiment d'être humiliée chaque seconde de chaque heure. Mais le faon se releva, combattant, vaillant puis...quitta la maison.

Émue et triste qu'il quitte les lieux, Savana sortit sur le perron pour le suivre des yeux. Il disparut à l'entrée de la forêt.

- Il survivra...grâce à vous, lança le cheikh derrière elle.

- Non, rétorqua Savana en secouant légèrement la tête : Grâce à vous rectifia-t-elle en se retournant.

Il se tenait à l'entrée, essuyant ses mains dans le torchon, sans la quitter des yeux. Ses sourcils épais légèrement plissés lui indiquèrent qu'il songeait. Embarrassée, elle pénétra dans la maison, l'obligeant à se reculer. Le faon les avait quelque peu rapprochés...seulement il était temps pour lui de retourner à ses devoirs.

- Je suis navré d'avoir prit de votre temps votre altesse.

- C'était un plaisir, répondit-il furtivement : J'ai une question maintenant, reprit-il avec un sérieux qui lui glaça le sang.

Les mains jointes près de son ventre, elle invita son visiteur à poursuivre d'un simple regard.

- Votre frère m'a accusé d'être à l'origine de vos douleurs aux jambes, que s'est-il passé ?

Savana réprima son agacement en le transformant en un soupir bref.

- Je suis tombé dans les dernières marches de l'escalier, avait-elle dit sur un ton résigné.

La réaction du cheikh ne se fit pas attendre. Ses yeux perçants furent remplacé par une vive inquiétude qui la troubla.

- Vous ne devriez pas rester ici, déclara l'homme durement : Cette maison est trop dangereuse.

Elle ne chercha pas à le contredire et secoua simplement des épaules.

- J'essaye de le vendre pour tout vous avouer.

- Vous n'allez pas en tirer un bon prix dans cet état, objecta le cheikh en s'avançant vers elle, les traits marqués par une émotion mystérieuse.

Impossible ! S'écria-t-elle intérieurement. Il ne pouvait pas se faire autant de soucis pour elle !

Alors Savana se recula le visage presque meurtrie.

- Pitié ! S'entendit-elle implorer en regardant le sol : Pou...Pourquoi vous faites tout cela pour moi c'est...insensé !

Elle porta une main à sa tête comme si une douleur vive lui arraché les membres.

- Inexplicable ! S'exclama-t-il vivement d'une voix si rauque qu'elle releva la tête.

Il avait avancé ses mains devant lui comme pour l'apaiser.

- Je vous l'accorde, c'est insensé et vous voulez savoir pourquoi ? Ajouta-t-il le souffle haché : Parce que je ne devrais pas ressentir ce que je ressens là, tout de suite.

Elle vit ses mâchoires tressauter violemment. Comme s'il combattait intérieurement une pulsion violente. Il y a une semaines, jamais elle n'aurait crû qu'un cheikh puisse passer le pas de son cottage et encore moins qu'il bouleverse son quotidien. Elle avait beau trembler, Savana ne pouvait ignorer le trouble qu'il exerçait sur elle.

- Et si je vous invitez à dîner ce soir ?

Quand il énonça sa proposition, Savana cilla.

- Pourquoi ?

- Vous avoir à dîner me comblerait de joie, murmura-t-il d'une voix profonde, le regard ancré dans le sien : Ça serait une façon de me remercier pour aujourd'hui, ainsi nous serions quitte ?

Après les violences, les humiliations, les coups Savana s'était promis de ne plus jamais laisser un homme l'approcher. Mais l'attrait qu'il exerçait sur elle était comme une confiance...une promesse de découvrir de merveilleuses choses.

- Un chauffeur pourrait venir vous chercher dans la soirée, ajouta-t-il comme elle ne répondait rien.

- Je ne peux pas monter dans une...voiture avec...non, parvint-elle en se mordant l'intérieur de la joue.

Arik décida malgré lui d'arrêter pour aujourd'hui. Déçu, en colère contre celui qui l'avait détruite, il refusait de lui imposer sa volonté. Pour cela, il crispa ses poings contre ses hanches afin d'endiguer sa frustration de ne pas l'avoir à ses côtés pour le dîner. Il ne s'avouait pas vaincu pour autant. Si Arik avait des quantités de défauts l'un d'entre eux faisait partie intégrante de son quotidien.

La persévérance.

- Ça ne fait rien, dit-il alors en lui faisant relever les yeux : J'aurais voulu vous avoir à mes côtés mais je comprend votre réticence à accepter : Reposez-vous, je vais me retirer à présent.

Arik enfila son manteau, non sans ressentir un goût de défaite dans la bouche.

- Mais peut-être que si vous m'attendiez...le temps que je prenne mes affaires je pourrais venir avec vous, proposa-t-elle soudain.

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