Chapitre 1

Je marche tranquillement, les mains enfoncées dans mes poches, le sourire au coin des lèvres. Encore une magnifique soirée passée avec mes amis, à parler, danser, et rencontrer de jolies filles... Je passe le portail de la Demeure Agreste, accompagné de ma conquête du soir, me résignant à regagner ma prison. Mais mon père m'attend au pied des escaliers. Un seul regard noir vers la fille que je tiens dans mes bras la fait déguerpir en quelques minutes. Ce signe est de très mauvaise augure, je le sais. Qu'ai-je bien pu faire encore ?

" Adrien, j'ai pris une décision.

- De quel genre... ? demandai-je avec appréhension.

- J'ai décidé qu'il était temps pour toi de quitter la maison, et de te débrouiller par toi-même.

- Pardon ? Mais je n'ai même pas de travail !?

- Justement ! Il va falloir en trouver un rapidement !" dit-il, sévèrement. Je me retiens de l'étrangler - idée tentante quoique interdite par la loi. Non content de m'avoir enfermé dans une prison toutes ces années, voilà qu'il me jette littéralement dehors.

" Va te coucher. Demain, tu feras tes valises. " J'exécute ses ordres, sourcils froncés, et doigts agités par une irrémédiable envie de meurtre. Demain, je partirai, piétinant le peu d'insouciance que j'essayais de garder. Réalisant que j'ai presque trente ans, et qu'il est temps de me prendre en charge.

-------------

Mon réveil sonne, mettant fin à ce sommeil reposant. Les souvenirs de la veille me frappent de plein fouet. Je me lève d'un bond, et vais chercher une grande valise dans mon armoire. Adieu petite - façon de parler compte tenu de sa taille - chambre. Étrangement, je ne te regretterai pas. Je remplis ma valise de toutes sortes d'objets, sentimentaux ou nécessaires à la vie quotidienne, puis rejoint ma voiture toute cabossée qui m'attend sagement dans le parking de la cour. Je ne prends même pas la peine d'aller saluer mon père avant le grand départ, car je me fiche éperdument qu'il soit mon géniteur. A mes yeux, il restera un être de glace qui n'a jamais été là pour moi. Je démarre et roule en direction du petit appartement que j'ai loué pour l'occasion, en attendant de pouvoir trouver un logement plus correct. Une fois arrivé dans le hall de l'immeuble, on me donne toutes sortes de recommandations concernant l'appartement. Je n'écoute absolument rien. Au bout de ce qui me semble une éternité, je suis libéré, et peux monter m'installer. J'ouvre la porte de mon appartement, et découvre l'intérieur de celui-ci, qui est grisâtre et peu accueillant. Je shoote dans un rat mort qui traîne au sol, agacé, puis j'installe mes affaires. Mon téléphone vibre dans ma poche.

Père

Adrien, tu es déjà parti ? J'ai réussi à te dégoter un job dans une très grande entreprise de mode. Tu seras mannequin pour nulle autre que la grande Mlle Dupain-Cheng ! Tu commences demain. Je t'envoies l'adresse.

Moi

Génial.

Je range rageusement mon téléphone. J'aurais put choisir de travailler dans une chouette pizzéria, ou dans un bar, pour pouvoir côtoyer de jolies jeunes filles, et pour m'amuser quand même un peu... Mais non. Je suis obligé de reprendre ma carrière de mannequin, ainsi que les régimes et les séances de sport. Pas que j'ai pris du poids ces derniers temps, bien au contraire, mais parce que le métier de mannequin exige la perfection absolue. Une fois mes affaires complètement installées, je me laisse tomber sur le sol, épuisé. Je glisse mon nez hors de l'appartement, et aperçois une belle blonde en tenue moulante qui sort de l'appartement juste en face du mien. Un sourire charmeur prend place sur mes lèvres. Peut-être que cette situation a de bons côtés, finalement ! Je rentre dans l'appartement, et me sers un verre d'eau. Je pourrais peut-être faire une petite balade pour me changer les idées. Je sors donc de l'appartement et descends les escaliers en vitesse. Je rabats ma capuche sur ma tête. Certes, cela fait sept ans que je n'ai plus endossé le rôle de mannequin, mais ma célébrité, elle, ne s'est pas évaporée pour autant. Impossible de sortir de chez soi sans être assailli de fans. Alors j'ai pris l'habitude de cacher mon identité, sauf pendant les soirées aux bars, où ce n'est pas nécessaire, car c'est grâce à mon identité que je suis désirable auprès des filles. Tout le monde veut au moins avoir une aventure avec Adrien Agreste, ancien mannequin et fils unique de l'illustre Gabriel Agreste. Je marche dans les rues, sans but précis, puis une idée me vient. Je sors mon téléphone et consulte l'adresse que m'a envoyé mon paternel. Pourquoi ne pas aller voir à quoi ressemble la merveilleuse entreprise Dupain-Cheng, dont tout les journaux parlent ? Je suis les instructions de mon père à la lettre, et arrive devant un immense bâtiment rouge, noir et vert. Je reste bouche bée devant. Il est plus imposant que cinquante Demeures Agreste. Je contourne le bâtiment pour pouvoir le voir de face. De grandes lettres rouges et noires s'étalent au-dessus de l'entrée.

ENTREPRISE DUPAIN-CHENG

Je vais être franc. Ce bâtiment m'impressionne à un point tel que je ne peux le lâcher des yeux. Il n'a que deux fenêtres en tout, une grande donnant visiblement sur un bureau, et une autre tout aussi grande donnant sur un autre bureau encore. Celles-ci donnent l'impression que l'entreprise possède deux immenses yeux braqués sur la ville. Soudain, j'entends quelqu'un toussoter derrière moi. Je me retourne, et me retrouve face à une jeune femme d'une tête de moins que moi, vêtue d'un costume noir à épaulettes, et me regardant avec ses grands yeux bleus. Reprenant mon air charmeur, je lui lance :

" Salut, beauté ! " Elle lève les yeux au ciel, puis me regarde avec tellement d'intensité que je manque de tomber à la renverse. Sourcils froncés, menton relevé et mains crispées sur un paquet de documents, elle me répond d'une voix froide :

" Bonjour. Je suppose que vous êtes M.Agreste ? Nous ne vous attendions pas avant demain, mais soit, ce sera l'occasion de vous faire visiter. Je me présente, Mlle Dupain-Cheng, patronne de cette entreprise. " Je glapis de surprise. Je ne l'imaginais pas du tout ainsi. On dirait qu'elle a mon âge ! Elle reprend en me faisant signe de la suivre.

" Premièrement, sachez que si vous êtes ici, c'est uniquement parce que nous avons besoin d'un mannequin en urgence, et que votre père est un illustre styliste qui a tout mon respect et mon admiration. Si cela n'avait tenu qu'à moi, vous n'auriez jamais mis les pieds dans mon entreprise. Nous n'acceptons que des gens sérieux et expérimentés, qui ne dragueront pas leur patronne à la première occasion venue. " Je suis littéralement effaré. Certes, le physique de ma patronne me surprend, car elle est petite, pâle et qu'à son âge, il est très rare, voire quasiment impossible d'avoir une si grande entreprise sous son commandement, mais son caractère en revanche, je me l'étais très bien imaginé. Professionnelle, moqueuse, supérieure, et froide comme de la glace. Visiblement, se laisser faire ne fait pas partie de son vocabulaire. Autrement dit, j'ai plutôt intérêt à ne rien tenter avec elle. Pas de flirt. Surtout pas de flirt. Nous entrons dans le bâtiment. La première chose qui me frappe, est le nombre incalculable de portes qui s'étendent le long des couloirs.

" Les portes que vous voyez donnent toutes accès à un atelier relié à un bureau. Il y a donc deux portes pour presque chaque employé de l'entreprise. Sauf les mannequins, qui ne travaillent que dans les quatre studios vers la fin du couloir. Quant à mon bureau, il se trouve tout au fond. Vous ne pouvez pas le manquer. Maintenant, je vais vous présenter vos collègues. "

Je la suis docilement, en essayant de mémoriser chaque porte, chaque petit recoin de l'entreprise, pour éviter de me perdre, demain. Nous arrivons à une porte un peu plus grande que les autres. Mlle Dupain-Cheng la pousse, et je découvre une longue pièce, où sont regroupés tous les employés.

" Vous avez de la chance, M. Agreste. Vous arrivez pile à l'heure de la pause. Tous vos collègues sont donc réunis dans cette pièce. C'est un peu comme un réfectoire, et un endroit où se reposer. "

Nous passons au milieu des rangées de tables et des machines à café, tandis que les gens me jettent des regards noirs. Comme si elle comprenait, ma patronne dit :

" Inutile de vous expliquer que vous avez mauvaise réputation, ici.

- Comment ça ? demandais-je.

- Votre père nous a fait part de la situation, en venant lui-même nous voir, et en nous expliquant ce qui le poussait à faire la décision de vous laisser vous débrouiller par vous-même. Sachez que toutes les personnes que vous voyez là, ont travaillé à la sueur de leur front pour entrer dans l'entreprise. Nous ne recrutons que la crème de la crème, même en ce qui concerne les mannequins. Et à nos yeux à tous, M.Agreste, vous n'êtes PAS la crème de la crème. Vous n'avez donc PAS votre place ici, malgré votre statut de célébrité, et de fils d'un très grand styliste. Si vous êtes finalement dans cette entreprise, c'est parce que j'ai bon cœur. Car aucun de ceux que vous voyez là n'en aurait fait autant. Aucun ne vous aurait laissé passer ne serait-ce que les portes de ce bâtiment. "

J'ai l'irrésistible envie de la tuer. Là, immédiatement, et au sens propre du terme. Et bla, bla, bla, vous n'êtes pas à la hauteur, et bla, bla, bla, vous avez très mauvaise réputation, et bla, bla, bla... D'accord, c'est la chef de cette entreprise, mais de là à me balancer toutes ces choses à la figure, je trouve que c'est exagéré. Je vais immédiatement donner ma démission et me trouver un petit boulot dans un bar, comme c'était prévu à la base. Mais elle se tourne vers moi, m'empêchant de tourner les talons. Elle plonge ses yeux dans les miens. Son regard est vide, et brisé. Je suis littéralement cloué sur place face à l'intensité avec laquelle elle m'observe, de ses grands yeux bleus.

" Bien sûr, vous aurez un très bon salaire. Salaire que vous ne trouverez nulle part ailleurs. Alors, c'est à prendre ou à laisser.

- Je... Euh...

- Je vais, bien entendu, vous donner le contrat d'embauche. Vous aurez ensuite le reste de cette journée pour réfléchir.

- CDD ou CDI ? demandai-je.

- CDD. Vous n'êtes ici que pour remplacer un de nos mannequins. Mais, si la maladie de celui-ci vient à s'aggraver, nous pourrons vous garder. Maintenant, venez. Nous allons nous rendre dans mon bureau pour s'occuper du contrat. " Je hoche la tête. Je suis partagé entre la curiosité concernant le salaire, et l'envie de travailler dans un établissement moins strict, et surtout, le plus loin possible de cette jeune femme glaçante. Et j'ai aussi l'irrésistible envie de savoir à quoi ressemble son bureau. Y a-t-il des photos de chats partout ? Ou les murs sont-ils gris à faire pleurer ? La curiosité ayant toujours été l'un de mes plus grands défauts, je me sens obligé de suivre mon éventuelle patronne, jusqu'à son bureau. Sur la porte, des lettres dorées forment le nom :

Marinette Dupain-Cheng

Directrice

Alors comme ça, elle s'appelle Marinette ? Ce prénom a une consonance enfantine, fragile, et ne correspond pas, mais alors pas du tout, au caractère de la jeune femme. Mais, peut-être n'est-ce qu'une apparence qu'elle se donne ? Peut-être a-t-elle vécu tant de choses horribles qu'elle n'arrive plus à être elle-même ? Je me fait surement des idées. Elle pousse la porte, et m'invite ( ou plutôt m'ordonne ) de rentrer. Je m'exécute, et découvre une immense pièce - possédant d'ailleurs l'une des deux seules fenêtres que j'ai aperçues de l'extérieur - aux murs peints en bleu ciel. Au centre, se trouve un long bureau noir ébène, possédant une dizaine de tiroirs tous étiquetés consciencieusement. Il n'y a aucun tableau accroché aux murs, et pas une seule photo de famille posée sur le bureau. En revanche, mon œil accroche une page épinglée derrière la porte. C'est la une d'un journal. Mon cœur fait un bond quand je lis le titre :

LE TERRIBLE ACCIDENT D'ADRIEN AGRESTE

Je reste les yeux écarquillés de stupeur, fixant deux photos insérées dans l'article. Une me représente à l'âge de quatorze ans, lorsque je posais encore pour la marque Agreste. L'autre, bien plus funeste, me rappelle des souvenirs atroces. Elle représente ce fameux jour, où je roulais tranquillement en voiture, il y a deux ans, et qu'une camionnette roulant bien au-dessus de la limitation de vitesse, avait grillé un feu rouge et m'était rentrée dedans avec violence. On m'avait alors immédiatement transféré à l'hôpital, et j'étais resté une semaine dans le coma. Je m'étais finalement réveillé, et remis petit à petit. Même si cette histoire s'est déroulée il y a longtemps, je garde toujours le traumatisme de cet accident. Lorsque ma voiture a été percutée avec une telle violence que ma tête a claqué contre la portière, m'assommant au passage. Je détourne difficilement le regard de l'affiche pour le poser sur Mlle Dupain-Cheng. Elle est en train de fouiller dans un tiroir pour trouver mon contrat, indifférente à ma sidération. Je toussote légèrement pour attirer son attention. Elle relève la tête, et je lui désigne d'un coup de menton la page du journal. Je vois de la panique s'installer dans ses yeux, un bref instant, avant qu'ils ne reprennent cette froideur habituelle.

" Qu'y a-t-il ?

- Je... Eh bien, je me demandais juste ce que fait cet article épinglé à votre porte ?

- Cela ne vous regarde pas, M. Agreste. " Et bien, si, justement, ça me regarde. Mais je ne peux décemment pas lui répondre cela. Je jette un nouveau regard vers l'article. Mais pourquoi diable garde-t-elle cette page de journal, accrochée à sa porte ??? Parlant de moi, qui plus est ! L'hypothèse concernant le fait que c'était elle, au volant de la camionnette est à mettre de côté, puisque le conducteur était un homme de quarante ans qui était complètement saoul. Mais alors pourquoi ? Pour quelle raison ? Cette femme est vraiment des plus mystérieuses.

" Je vous donne votre contrat ?

- Euh... Oui, oui...", réponds-je distraitement, le regard toujours scotché à l'article. Je détourne finalement les yeux, et elle me donne le contrat.

" J'ai pris ma décision, Mademoiselle.

- Bien. Alors, c'est un oui ?

- En effet. J'ai vraiment besoin d'un travail, et celui-ci tombe à pic. Quant au salaire, je refuse d'être payé autant pour un si petit boulot. " Mais que dis-je ??? J'ai vraiment besoin d'argent, alors pourquoi est-ce que je le repousse ?

" C'est moi qui décide, ici, M. Agreste. Il va falloir vous y faire. Si je décide de vous payer autant, ce n'est pas à vous de juger. " J'ai surement mal entendu. Pourquoi tient-elle à me donner autant d'argent ? Cette fille est décidément l'une des plus mystérieuse qu'il m'ait été donné de rencontrer. Certes, l'envie est tentante de découvrir ses secrets. Pourquoi a-t-elle dans ses yeux une sorte de douleur glaçante ? Pourquoi possède-t-elle l'une des plus grandes entreprises de mode en France à son âge ? Pourquoi a-t-elle un article me concernant scotché à sa porte ? Pourquoi me paye-t-elle autant alors qu'elle me déteste ? Et surtout pourquoi, pourquoi est-ce qu'elle a ce pouvoir sur moi ? Qui fait que dès qu'elle plonge ses grands yeux bleus dans les miens, je suis paralysé de la tête aux pieds, et je peux à peine réfléchir correctement ? J'aimerai tellement avoir des réponses à mes questions. Mais si je tente quoi que soit, je suis à peu près sûr de me faire renvoyer illico presto. Comme pour appuyer mes pensées, elle ajoute :

" Une seule erreur, M. Agreste. Une seule erreur concernant votre travail, et vous serez licencié sur le champ. Me suis-je montrée assez claire ?

- Limpide, mademoiselle.

- Tant mieux. Veuillez signer le contrat, s'il vous plaît. " Je m'exécute, les mains tremblantes. Après ça, je ne pourrais plus faire marche arrière. Il faudra que je travaille d'arrache-pied pour faire mes preuves. Je lui rend le contrat.

" Parfait. Vous commencez demain à 10h00, et votre journée se termine à 17h00. Vous pouvez disposer, M. Agreste. " Je hoche lentement la tête, puis me dirige vers la sortie. Mes yeux se pose quelques minutes sur la page accrochée à la porte, puis je sors du bureau, la tête basse. Lorsque je passe dans les couloirs, quelques murmures se font entendre, parmi lesquels je distingue ces phrases :

" Il a dû passer un sale quart d'heure....

- Il n'a pas sa place ici !

- C'est scandaleux !

- Ne vous inquiétez pas, la directrice se chargera de lui !

- Oh oui ! Il va regretter d'être arrivé ici, le pauvre ! "

Je leur jette un regard noir, qui signifie clairement :

" Taisez-vous ou je risque de commettre un meurtre ! "

Ils rient, puis se remettent au travail. Je pousse un soupir dépité. Mais qu'ai-je fais pour mériter cela ?

Je rentre chez moi, dans ce petit appartement gris, le moral très bas. Le visage de ma patronne n'arrive pas à sortir de mon esprit. Surtout ses grands yeux bleus. J'ai l'impression de les avoir déjà vu quelque part. Et quand ils se plongent dans les miens, je suis complètement incapable de bouger, ou de réfléchir. Ça me fait frissonner, toute cette histoire. Je me laisse tomber sur une chaise et ferme doucement les yeux. Une petite sieste me fera le plus grand bien, après tous ces évènements.

Je me réveille difficilement. Le soleil est maintenant haut dans le ciel. Je regarde ma montre : il est 13h00. Il serait peut-être temps de manger. Je sors de l'immeuble en descendant les marches quatre à quatre et débouche dans la rue. J'ai remarqué une petite sandwicherie en arrivant ce matin. Je sors mon argent de poche et m'achète un sandwich jambon-fromage. Je décide d'aller le manger au Trocadéro, qui n'est qu'à quelques rues d'ici. J'y arrive rapidement, et m'assois dans l'herbe, pour déguster mon sandwich. J'aperçois un groupe de filles qui arrivent dans ma direction. Habituellement, je leur aurais adressé un magnifique sourire charmeur, et j'aurais passé le reste de la journée en leur compagnie, mais étrangement, je ressens un vide dans la poitrine. Je n'ai plus ce brin d'excitation à la vue de la gente féminine. Pourquoi ? C'est surement passager. Une petite baisse de moral suite à la découverte de mes nouveaux collègues ? Ou de ma nouvelle patronne ? Aucune idée. Toujours est-il que je reporte mon attention sur mon casse-croûte, sans leur accorder un seul regard de plus. Mon portable se met soudain à sonner. C'est un appel de mon père. Je ne décroche pas, mais me lève finalement et rentre chez moi, une étrange boule logée au creux de mon ventre. La journée de demain risque d'être rude. Le tout est de prendre sur soi et de leur prouver à tous, que je mérite ma place dans cette entreprise. Une fois installé sur une chaise, dans mon petit appartement grisâtre, je m'autorise à fermer un instant les yeux, et à imaginer que je suis encore à la Demeure Agreste, et que tout ceci n'est qu'un simple rêve. Bon, ou mauvais, telle est la question. De toute façon, ce n'est pas un rêve, loin de là. Je le sais, parce que ce matin encore, je me suis mordu la lèvre, pour me persuader que tout était bien réel. Alors, à moins que l'on puisse saigner dans nos rêves, ceci n'en est point un. A mon plus grand désarroi, il semble que toute cette histoire ne soit pas l'affaire d'un simple songe, une nuit de sommeil quelque peu agitée, mais bien d'une véritable journée. Las de tous ces évènements, je décide de passer le reste de ma journée devant la télévision, histoire de se calmer un peu, et de relativiser. La télé est toujours bonne conseillère dans ces moments-là. Il n'y a qu'elle pour nous redonner, l'espace d'un instant, goût au quotidien.

En fin de soirée, j'ai les yeux qui me brûlent atrocement, un mal de crâne abominable, et l'estomac qui crie famine. Suite à cette cascade de sensations désagréables, je mets un moment à comprendre ce que je veux, en premier lieu. Manger, sans aucun doute. Comme pour appuyer ma pensée, mon estomac émet un cri de protestation, signifiant très certainement, en langage d'organe : " NOURRIS-TOI, TRIPLE ANDOUILLE !!! " J'attrape mon téléphone et commande une pizza quatre fromages. Une demi-heure plus tard, on vient m'apporter le met tant désiré, et de peu, je me serais incliné mille fois devant mon sauveur, qui n'est autre qu'un grand bonhomme bedonnant, portant une casquette rouge et verte, et me regardant comme si j'étais devenu fou.

" A mon avis, monsieur, vous devriez appeler une ambulance... " Je lui fais signe de se mêler de ce qui le regarde, et m'attaque à la pizza, la dégustant à grandes bouchées, me brûlant fortement les lèvres. Quoique dans cette situation, me brûler est le cadet de mes soucis. Une fois mon repas englouti de sorte à ce qu'il ne reste plus aucune miette de ce qui fut autrefois une valeureuse pizza, qui participa à éradiquer la faim dans le monde - et plus particulièrement de mon estomac, c'est avec un sursaut d'horreur, que je réalise la bêtise que je vient de commettre. Mon régime ! Je secoue la tête de droite à gauche. Ce n'est pas comme ça que je vais faire mes preuves au sein de l'entreprise Dupain-Cheng. Je vais donc faire un petit footing, pour perdre mes calories en trop. Lorsque je reviens à mon appartement, il fait nuit et je suis épuisé. La journée a été un véritable fiasco, mêlant la découverte d'une patronne au cœur de glace, et d'une quasi mort de faim, tout en ajoutant à ce curieux mélange, une bonne rasade de mystère. En agitant le tout, vous obtiendrez à peu près ma journée d'aujourd'hui, en bien moins éprouvant. Je m'allonge sur un matelas à même le sol, fort peu confortable, et tente de m'endormir, mais c'est peine perdue. J'ai la désagréable impression que les yeux de Mlle Dupain-Cheng m'observent depuis chaque recoin de l'appartement. Ils me fixent, insistants, profonds. Je ferme les paupières le plus violemment possible, pour les faire disparaître, au point de me faire mal, mais j'ai toujours cette sensation, au creux de la poitrine, qui me signale que ce n'est qu'un peu de répit, avant de devoir affronter ses yeux, à nouveau. Je m'endors difficilement, avec un seul prénom à l'esprit... Un prénom et un nom, dansant sous mes paupières closes, et me rappelant cruellement les beaux yeux bleus de leur propriétaire...

_____________________

Premier chapitre d'une nouvelle histoire sur Miraculous, dans un contexte différent de ce que j'ai fait jusque-là, et avec un style d'écriture précis ( toute l'histoire va se dérouler à travers les yeux d'Adrien ). Dites-moi ce que vous pensez de ce premier chapitre, et si le scénario de l'histoire vous parait intéressant. Si vous avez des remarques à faire ( fautes d'orthographe, mauvaise formulation, erreur de temps... Ou quelque commentaire sur ce premier chapitre ) n'hésitez pas ! On se retrouve au prochain chapitre ;)



Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top