43. Point de non retour
Idriss Akrour
La musique résonnait même à l'extérieur de l'appartement, putain j'allais encore entendre râler mes vieux voisins. Oh et puis merde, qu'ils se fument un bon joint et qu'ils se détendent ceux là.
Mon frère et Théo étaient assis avec moi sur le balcon, j'avais demandé au gars de fumer à l'extérieur. Même si Victoria ne l'avait pas demandé, ou ne s'en était jamais plainte, rester dans un aquarium était sûrement loin d'être un truc bien pour elle. Pour sa maladie.
Maladie dont je ne savais d'ailleurs rien. À chaque fois que j'avais essayé de lui tirer les verres du nez c'était parti en grand éclat de voix et en menace. Je savais pas comment me positionner face à ça. Et ça me faisait chier bordel. J'avais l'impression de naviguer à l'aveugle.
- C'est le moment de stopper Burb, lança Théo.
Deen était complètement pété. Et confondait apparement Ken avec un doudou ou un oreiller.
- Laisse le, tant qu'il fait ça il va pas traîner avec cette vieille catin de Juliette, grogna Hakim.
- Il s'est remis avec? demandais-je.
- J'sais pas gros, mais l'autre jour il s'est barré du stud pour la rejoindre. Et Eff m'a dit qu'il l'avait croisé chez burb.
- C'est un poison cette meuf, j'sais même pas pourquoi il y retourne ce con.
Mon frère avait un très basse estime de Juliette, voir même inexistante. On était tous un peu dans ce cas.
Elle avait traîné avec nous après s'être mise avec Deen. Au début je l'avais trouvé cool, mais elle s'était avérée être une grosse fausse. Elle puait le faux et l'intérêt à 10 000. Burbigo avait fini par la jeter au bout de quelques mois, mais apparement cette sangsue était motivée à s'accrocher et à nous rester dans les pattes.
- Il veut sûrement juste tirer son coup, il est pas con.
- Tu parles, il va y replonger dedans la tête là première, grogna Hakim. Putain, c'est mort pas de meuf comme ça dans l'équipe. Y'en a assez de la surexcitée et de l'autre à problème.
- L'autre à problème? répétais-je.
- Ouais ta meuf.
- Qu'est ce tu racontes?
- Tu devrais demander à ta copine pourquoi elle traîne à l'hôpital. Oh et au passage demande lui comment elle a trouvé le Bronx Lebanon Hospital Center, cracha t-il avant d'écraser sa cigarette et entrer à l'intérieur.
Le quoi?
Et comment il savait ça lui?
Putain je pigeais rien.
Merde mais c'était quoi tout ça?
J'allais me lever pour le suivre et lui demander des explications quand la rouquine passa la porte de la baie vitrée.
- Putain mais expliquez à Doums que c'est Vicky et pas Vichy, il vient de me filer un paquet de bonbon Vichy emballée et avec un petit noeud, pouffa t-elle en montrant le paquet.
Théo qui avait assisté à la scène me jeta un coup d'œil avant de disparaître rapidement dans le salon.
- Qu'est ce qu'il a? demanda la rousse en fronçant les sourcils.
- Pourquoi t'étais à New-York?
Elle me regarda en fronçant les sourcils.
- Bah pour mon semestre à l'étranger, tu le sais bien.
- Arrête de mentir, soufflais-je. C'est quoi la vrai raison? Pourquoi tu t'es tirée six mois de l'autre côté du monde?
- Pour mes étu...
- Putain mais arrête! hurlais-je en me relevant. Arrête de me mentir!
- Idr...
- T'as trois secondes pour me dire la vérité ou j'me tire, et crois moi tu ne me reverras pas de si tôt.
Elle essayait de me sonder, de savoir si j'étais sérieux ou si c'était un simple coup de pression. Mais putain j'étais sérieux à en crever pour le coup.
Elle se mordilla la lèvre avant de jeter un coup d'œil à la pièce qui était soudainement bien silencieuse. Visiblement attiré par nos cris, ils avaient tous arrêté leur bordel pour voir ce qu'il se passait.
Peu motivé à s'expliquer en public, Victoria me regarda avec un regard suppliant. Mais putain au point où on en était j'en avais rien à foutre qu'ils assistent à ça.
- Maintenant ou j'me tire.
- T'es chez toi, remarqua t-elle.
- Essaie même pas de détourner la discussion, m'énervais-je.
- Idriss je peux pas... c'est compliqué et je...
- Tu sais quoi, t'as raison, je suis chez moi. Je veux plus te voir ici. C'est fini. Prends tes affaires et casse toi, j'veux pas rester avec une sale menteuse.
Ses yeux étaient emplit de larmes, mais aucune ne franchirent le seuil de ses cils.
- Idriss je... tenta t-elle.
- Barre toi Victoria, murmurais-je.
Je vis ses lèvres se mettre à trembler. Elle serra légèrement les poings avant de se frotter le visage en tentant de contrôler sa respiration. Elle me lança un dernier regard emplit de tristesse et de regret avant de traverser le salon et quitter l'appartement. Définitivement.
Les autres tournèrent la tête vers moi, les yeux écarquillés. Putain j'allais serrer.
J'allais exploser et déglinguer le premier qui allait oser m'adresser la parole.
La première personne que je vis bouger c'était Louna. Elle avait attrapé son manteau avant de poursuivre Victoria. Les autres s'étaient regardés sans vraiment comprendre jusqu'à ce qu'Hakim les chasse un par un. Excepté Thylane.
Elle était restée assise, et n'arrêtait pas d'alterner des regards désolés entre moi et mon frère.
- Toi, dis-je en m'approchant d'Haks, j'viens de lâcher ma go alors t'as intérêt de me dire ce que c'est cette histoire.
J'avais l'impression que tout mon corps était tendu, au bord de l'implosion.
- Restes calme, grogna t-il en attrapant un verre avant de se servir une grosse dose de bourbon.
- Non j'suis pas calme putain, tu t'fous de ma gueule! Faut que tu me dises ce que tu sais!
Thylane qui jusque là s'était fait discrète se redressa légèrement pour attirer mon attention.
- Lundi j'étais à l'hôpital, tu sais j'y vais tous les jours pour Luka, murmura t-elle. Et j'attendais le docteur alors je suis descendue pour me prendre un café. J'étais pas sûr au début que ce soit Victoria, mais la voix me disait quelque chose. Je voulais pas écouter ou quoi que ce soit, et au final j'ai entendu des bribes de conversation.
- Qu'est ce que t'as entendu? demandais-je la voix blanche.
- Pas grand chose, à part le nom de cet hôpital à New-York, le Bronx Lebanon.
Putain j'y comprenais plus rien.
- Je suis désolée, je pensais pas qu'en le racontant à cet abruti il allait lâché ça au milieu de sa soirée d'anniversaire, s'excusa t-elle.
Hakim grogna en l'entendant l'appeler comme ça.
- T'y es pour rien, murmurais-je en me frottant l'arrête du nez.
- Elle t'a expliqué?
- Non. Rien.
- Je veux pas me faire l'avocat du diable, mais elle a peut être des raisons, tenta l'asiatique.
Hakim grommela encore une fois.
- Arrête Haks t'aides en rien à jouer le grognon.
- Et tu crois que faire la mère Thérèsa ça arrange quelque chose? Cette meuf c'est une grosse mytho et elle va t'exploser a la gueule si tu lâches pas le truc.
Il avait terminé sa phrase par une grande gorgée de l'alcool qui m'avait coûté un bras. Thylane avait roulé des yeux avant de me regarder avec un petit regard triste.
Il avait peut être raison après tout. Peut être que Victoria était simplement une sale menteuse, et que pour une raison ou une autre je l'avais idéalisé. Peut être que je m'étais fait d'elle une image qui n'était rien d'autre qu'une vision biaisée.
Mon envie de tout exploser s'était lentement transformé en résignation. Et j'avais passé le reste de la nuit avec Haks et Thyl à boire comme des trous.
Histoire d'oublier cette bonne soirée de merde.
Mais le lendemain, dès le réveil, tout m'était revenu dans la gueule comme un boomerang. Ou une avalanche. Je m'étais traîné tant bien que mal jusqu'à ma machine à café en évitant soigneusement du regard tout ce qui pouvait me relier à la rouquine.
Ces putains de ballons en forme de vingt-quatre me rappelait ce que même l'alcool n'avait pas réussi à faire disparaître.
Je l'aimais.
Et j'avais rompu sous le coup de la colère, sous les nerfs.
Mais j'pouvais plus faire marche arrière. Je pouvais plus, je réussirai plus à rester avec elle en sachant pertinemment qu'elle cachait des trucs.
Parce que la vérité, c'était que je crevais de peur à l'idée de ne pas savoir ce qui se passait réellement. Et rester près d'elle en sachant qu'elle omettait des choses, ça allait me tuer à petit feu.
Alors pour le coup, je préférais la fuite. La méthode des lâches.
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