40. Né au mauvais endroit

Victoria Olsson

- C'est le dernier meuble, mais c'est hallucinant le nombre d'affaire que t'as enfaite! s'exclama Théo en posant le carton qu'il tenait, au sol.

- Quand j'suis partie l'année dernière j'ai résilié mon bail, mais j'avais quand même toutes mes affaires. Les mettre dans un box c'était ma seule solution.

- T'as dû le payer une blinde.

- M'en parle pas, soupirais-je, je suis bien contente d'enfin avoir un appart à moi.

Louna qui était entrain d'installer mes affaires dans la salle de bain passa la tête par l'embranchement de la porte.

- Sympa Toupou, grogna t-elle.

- J'avoue sympa la miff, ça fait plaisir, ajouta Deen en entrant. Rappelle moi de ne plus jamais héberger les chiens errants.

Il se prit un coussin dans la tête avant même d'avoir atteint le canapé slash lit.

- Je suis pas un chien errant.

- J'avoue, toi t'es plutôt un renard errant.

Je roula des yeux totalement blasé par la débilité de ça gars.

Théo qui était entrain d'essayer de monter une étagère sursauta en entendant la sonnette retentir. Les quelques planches qu'il avait assemblé se cassèrent immédiatement la gueule. Deen se marra alors que Louna qui nous avait rejoint le regarda blasé.

- J'aurai dû rester à Bora Bora, grogna Théo.

Théo et Jasmine étaient parti trois semaines en lune de miel à Bora Bora, et bien sûr on avait eu le droit au magnifique photo à la plage, à l'eau turquoise et au sable blanc. Ça nous avait tous foutu le seum, ici, à Paris, il avait fait un sale temps de chien.

J'avais passé ces trois semaines à enchaîner entre les cours et ma recherche d'appartement qui s'était soldé par la trouvaille de ce petit studio, plutôt sympa et bien placé.

- Bah zer2 qu'est ce tu fous?

Ken et Idriss venaient de passer le pas de la porte, des sacs de bouffe dans les mains.

- Jsais pas je pige rien à cette armoire. Framal c'est ta meuf démerde toi avec ses meubles, lâcha t-il en se relevant. Mon grec m'attend.

Instantanément il se posa par terre, après avoir attraper une des poches que tenait Idriss. Et il se mit à dévorer.

- Les mecs c'est plus ce que c'était, constata Louna en pouffant.

- Toi tu vas finir à la rue, grogna Ken.

- Je rigole mon coeur. T'es le meilleur. Mais tu réussirai pas à la monter cette armoire. Mais j't'aime je te jure!

Les deux commencèrent à se chamailler comme des gamins. L'amour chez les autres c'est fatiguant. Genre vraiment.

Je roula des yeux avant de m'asseoir face au meuble et en regarder la notice. Pourquoi les notices étaient toujours en suédois sérieux?

Idriss qui s'était installé à côté de moi me tira la notice des mains avant de la regarder en fronçant les sourcils.

- C'est quoi c'te merde? C'est quoi comme langue?

- Du suédois, rends moi ça, grognais je en la rattrapant.

- Fais pas la go qui capte quelque chose à ça.

- Enfaite j'en comprend un peu, dis-je en regardant plus en détail les indications.

Il me regarda avec un air dubitatif.

- Olsson, tu crois que ça vient d'où peut être?

- Mais t'es suédoise?

- Mon père, moi j'suis née en France.

- Et ta daronne? demanda t-il alors que je commençais à monter les premiers trucs.

- Française.

- Et tu sais le parler?

- J'ai des bases, les petites conneries simple. Je serai incapable de tenir une discussion.

- Putain mais c'est grave frais, s'exclama t-il. Oh les mecs je me tape une petite meuf du nord!

- J'suis pas petite, grognais-je en lui lançant un coup de coude.

Il haussa un sourcil avant de se pencher vers moi.

- T'as 23 ans et tu fais 1m60. T'es une petite meuf, Rebelle.

Je roula des yeux en me concentrant sur mon meuble.

- Mais t'es ma petite meuf, ajouta t-il contre mon oreille.

Je ne pus pas empêcher le petit sourire qui se dessina sur mes lèvres. Ce mec était le plus gros disquetteur de la planète. Et moi comme une conne ça me faisait toujours sourire.

On avait passé le reste de la journée avec la petite bande à installer mes affaires et monter mes meubles, épreuves qui s'était avéré sacrément compliqué pour les gars qui avaient vu leur ego masculin sacrément chuté quand même Louna avait réussi à monter seule ma table basse.

Deen s'était éclipsé dans l'après midi, il m'avait dit que c'était pour rejoindre les gars en studio, mais les 300 coups d'œil qu'il avait jeté à son téléphone en l'espace de quelques minutes confirmaient clairement que ce n'était pas la raison de son départ. Affaire à suivre.

- On sort en boîte ce soir, ça te dis? proposa Louna.

- J'ai cours demain à 8h.

- T'as qu'à passé pas trop tard chez nous alors, proposa t-elle. On boit un coup vite fait puis tu rentre dormir.

- Vas-y, dis-je. Je vous rejoins, j'ai quelques trucs à faire.

Elle hocha la tête avant de me claquer un bisous sur la joue et quitter l'appartement suivit des derniers présents.

Idriss qui était encore allongé sur mon lit attrapa mon sweat pour me faire tomber sur lui. Il posa sa main sur ma taille avant d'enfouir sa tête dans mon cou. Il déposa quelques baisers avant de grogner.

- J'ai aucune envie de les rejoindre.

- Idriss Akrour se serait il lassé des sorties en boîtes? demandais-je avec un petit rictus.

- Non. Mais j'vois les gars toute la journée. J'préfère passer mes soirées avec toi.

Il passa sa main dans mes cheveux avant de soulever mon visage vers lui.

- T'es palote chérie.

- J'suis un peu crevée, répondis-je en enfouissant ma tête dans son cou. J'crois que je pourrai m'endormir dans l'instant, là, avec toi.

- Idriss matelas à ton service, se marra t-il.

- Mhhh, grognais-je.

- Hey Vic, faut que je te demande un truc.

Je me releva sur les coudes pour mieux pouvoir l'observer. D'un coup de tête je lui fis comprendre qu'il pouvait continuer.

- Tes parents, t'en parle jamais. Fin tu m'en as juste parlé dans le parc, mais c'est tout.

- Je suis pas spécialement en contact avec eux. Ils ont déménagés dans le sud il y a 5 ans, et j'ai dû les voir peut être 3 fois depuis. On est pas spécialement proche.

- Pourquoi? demanda t-il en dessinant de petit motif sur mon épaule.

- Ils voulaient pas d'enfant. J'ai un peu été la catastrophe de leurs vies je crois. Alors ils ont jamais vraiment cherché à être proche de moi. Mais ça me va bien, répondis-je. Pas de faux semblant, ils prennent de mes nouvelles de temps en temps, mais pas de fausses amabilités ou de faux engouements.

- T'as grandi seule?

- J'ai grandi avec Louna, répondis-je, ses parents sont bien plus mes parents que les miens. C'est fou à dire. Mais je leur doit beaucoup.

- Ça explique pas mal de chose, murmura t-il.

J'hocha doucement la tête.

- J'ai toujours eu l'impression d'être né au mauvais endroit. Quand j'étais gamine je faisais tout pour être la meilleure, je me disais qu'en faisant ça, ils ne regretteraient pas de m'avoir eu. Puis à l'adolescence j'ai opté pour les conneries. Pour attirer leur attention tu vois. Ça m'a rien apporté à part des galères. Alors depuis que je suis indépendante j'ai choisi l'ignorance. Je m'en porte mieux.

Il glissa ses mains sous mon haut, et le contact chaud de ses paumes me fit frissonner.

Avec lui j'avais l'impression que mon corps n'était qu'un ensemble de nerfs réactif au moindre de ses touchers. Un peu comme un feu qui s'embraser.

- Ils savent pour ta maladie?

Il n'en avait jamais parlé. Il ne l'avait jamais évoqué depuis notre dispute en Grèce. Pourtant je savais pertinemment que jamais ça n'était sorti de sa tête, parce que chaque fois que je toussais, que j'étais essoufflée, ou tout simplement fatiguée, il me couvait d'un regard voguant entre l'inquiétude et la pitié. Et je détestais ce regard.

Il ne connaissait que la moitié de la vérité. Et je m'en voulais terriblement de continuer à lui cacher des choses.

- Non ils sont pas au courant, murmurais-je. Ils s'étaient déjà barrés bien loin quand je l'ai appris.

- Tu devrais leur dire. Et tu devrais le dire à Lou.

Je me releva vivement. Il me fixait, et il avait la mine des conversations sérieuses.

- On en a déjà parlé, tu sais que je le dirai pas.

- Et je maintiens que tu fais de la merde, répondit-il en se relevant à son tour. Tu devrais t'appuyer sur ta miff plutôt que tout cacher.

- Y'a quoi que t'as pas compris dans la phrase « je n'en parlerai pas? », parce que si tu veux je peux t'en définir le contenu histoire que ça monte à ton cerveau une bonne fois pour toute.

Je m'étais totalement levé et Idriss avait suivit mon mouvement. Et maintenant j'avais l'impression d'être au centre d'un ring, prête à jouer l'énième round.

Putain c'était une éternelle boucle.

- Tu me fais vriller quand tu te comportes comme ça Victoria, grogna t-il.

- Quand je me comporte comme quoi? répondis-je en le défiant du regard.

- Comme une petite conne insensible.

Petite conne peut être, insensible sûrement pas assez.

- Tu crois que tu me fais pas péter les plombs quand tu te comportes comme un modèle de vertu avec tes discours moralisateurs? Bah scoop, si! Je déteste quand tu fais ça.

- Je le ferai pas si t'arrêtais un peu de tout cacher. On parle d'un truc sérieux là.

Je souffla en serrant mes poings. Je voulais pas me prendre la tête avec lui. Je voulais pas le blesser. J'voulais plus nous blesser.

Et je savais pertinemment que si il continuait à pousser, j'allais lui balancer les pires atrocités à la gueule. Des trucs que je regretterai salement au moment même où ça franchirait mes lèvres.

- Je crois que tu devrais partir pour ce soir. Je suis fatiguée, murmurais-je.

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