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« C'est Yamen, il veut te voir, mais d'abord, je dois te demander quelque chose, ajouta-t-elle.

- Je t'écoute, mais arrête de me regarder avec cet air méchant là, tu m'effraies. »

Ses traits se radoucissent et elle sourit légèrement avant de répondre :

« As-tu déjà commis un délit ?

- Hein ?

- As-tu déjà commis un délit, répéta-t-elle.

- Euh... bah, non. Je ne crois pas...

- Tu n'as pas de casier judiciaire ? Tu n'es pas connu des services de l'ordre ?

- Bah non... Ah si ! me rappelai-je. Vu que j'ai fugué, des affiches de mon visage ont été mises partout dans les villes près de chez moi, ainsi que dans les journaux papiers et télévisés... »

Eloïse sembla déçue, voire même anéantie. Elle se pinça l'arête nasale avant de soupirer.

« Tu vas nous donner beaucoup de boulot. Tu aurais pas pu être comme tous les autres de ton âge ? 

- Il faut croire que la vie veut me faire vivre de drôles d'épreuves, écoute, lançai-je de manière sarcastique.

- Ce n'est pas l'heure de se plaindre, me coupa-t-elle. Yamen est chez lui, il aimerait te parler. »

Sur ces mots, elle tourna les talons et sortit de la tente, suivi de moi-même. Une fois à l'extérieur, ce fut le soleil qui était d'une brillance féerique qui m'étonna le plus. Il prodiguait une chaleur sur tout le corps, une chaleur divine. Le ciel d'un bleu tellement pur qu'on avait l'impression de pouvoir s'y baigner était accordé au paysage paradisiaque qui s'offrait à moi : des fleurs jonchaient le sol, des maisons d'un bois verni étaient alignées, et des Mythons discutaient entre eux ou marchaient. L'endroit où je me trouvais semblait être comme un centre-ville, un lieu de rencontre : c'était bondé, mais nous pouvions quand même facilement marcher sans nous foncer sur quelqu'un. 

Tandis qu'Eloïse me racontait certaines choses sur le Refuge, je regardais chaque bâtiment qui semblait être construit seulement par des matières premières, comme s'ils ne connaissaient ni le béton, ni le plâtre. Tout était fait de pierre ou de bois. Ce n'était pas plus mal dans un sens, c'était original. Au lieu de marcher sur des trottoirs, nous marchions sur une herbe tellement verte que j'avais l'impression d'être dans un film. Je n'avais jamais vu un lieu aussi propre, aussi magnifique. 

Au fur et à me sure de notre marche, nous arrivâmes enfin devant une très grande maison, bien plus grande que toutes les autres. Sur la façade de celle-ci se trouvait une grande plaque en pierre où étaient gravés les lettre et chiffre «G4». Avec le minimum de bon sens que j'avais, je devinai facilement qu'il s'agissait de "Gardien". Il devait être le quatrième. 

« C'est là. »

Eloïse me fit entrer le premier dans la demeure. A l'intérieur, c'était tout aussi rustique qu'à l'extérieur, sauf que des couleurs beaucoup plus "royales" sautaient aux yeux : l'or, le rouge et le blanc. La décoration était sublime, à croire qu'ils avaient aussi droit à des décoratrices d'intérieur au Refuge. 

« Vous êtes enfin arrivés. »

Je sursautai. Yamen était assis dans le canapé que je n'avais pas vu au premier coup d'oeil. Mes yeux s'étaient directement posés sur le tapis qui longeait quasiment toute la largeur de la pièce. Nous étions dans ce qui me semblait être le salon. Yamen se leva et s'approcha de moi, toujours de manière sereine. 

« Eloïse, tu peux nous laisser. 

- Appelez-moi dès que vous avez fini, répondit-elle.

- Je t'enverrai un signal. »

Eloïse partit donc et Yamen me proposa de m'asseoir sur son canapé. Une fois installé, il débuta son récit :

« Avant toute chose, sache que tu es libre de croire ou de ne pas croire ce que je vais te dire. Cela ne fait que trois jours que tu es ici, il est compréhensible que ça fasse trop d'informations d'un coup et que ça paraisse trop absurde... »

Il toussa, de plus en plus fort, avant de boire un verre d'eau et de continuer :

« Le Refuge a été construit il y a 437 ans, exactement. C'est mon grand-père qui a permis sa création, avec l'aide de 9 de ses amis. Ils sont ainsi devenus les "gardiens" de ce Refuge. Le Refuge a été conçu pour protéger les Mythons, qui est l'espèce que nous sommes. Ici, personne ne peut détecter notre présence, car nous sommes en lévitation dans l'atmosphère. Nous sommes invisibles aux yeux des humains, évidemment, mais également aux yeux de toute autre espèce qui voudrait nous nuire. Les Mythons sont des humains, mais qui ont des caractéristiques bien spéciales, notamment des pouvoirs surnaturels comme tu peux lire dans des contes, des romans fantastiques, ou autre. Tout cela n'est pas fictif. Si l'humain est capable d'imaginer certaines choses, rien n'affirme que ces choses n'existent pas déjà. C'est le cas pour nous : nous sommes des êtres magiques qui luttons pour maintenir le Bien sur Terre. Contre nous rivalisent les pouvoirs du Mal. Parmi eux se trouvent les chémifs, ceux que tu peux à présent voir car tu connais leur existence. Le fait est que tu es un humain, et que tu connais désormais l'existence de ces êtres, mais également de nous. C'est pour cela que... je dois te proposer un dilemme. J'ai besoin d'une réponse maintenant, alors je te laisserai seulement quelques minutes pour réfléchir. »

Le sang me montait à la tête, je sentais déjà la question fatale arriver. A quoi devais-je m'attendre ? Au fond, j'étais content de connaître quelque chose que personne d'autre sur Terre ne connaissait, ou ne soupçonnait l'existence, mais d'un autre côté, ça m'effrayait. L'inconnu m'effrayait.

« Deux destinées s'ouvrent à toi, Thomas : Soit tu décides d'intégrer la Famille. Tu vivras donc ici. Nous te trouverons bien évidemment un poste, une activité pour nous aider. Tu deviendras alors un Mython, et tu auras des capacités supérieures à celles que tu as actuellement. On pourra te donner ce dont tu n'imagines même pas. Mais dans ce cas... tu devras faire une croix sur ton passé, tu ne verras plus jamais ta famille, tes proches, tes amis. Ta vie sera celle-ci désormais, celle que l'on t'offre, et sache que très peu ont la chance d'avoir cette opportunité... »

J'écoutais attentivement, je savais que mon avenir était en jeu. Je savais que ce choix serait décisif pour demain. Il fallait que je réfléchisse, vite, et bien.

« ... ou soit tu décides de retrouver ta famille, de retourner sur Terre, de retrouver la vie dont tu as toujours voulu. Dans ce cas là, il est évident que nous pourrons pas te laisser repartir avec toutes les connaissances qu'on t'a données. Si tu pars, on t'effacera la mémoire, et tu ne te souviendras de rien, ni des chémifs, ni de nous, ni de tout ce que tu as vécu à partir de ta fugue. »

Comment savait-il que j'avais fugué ? Je ne lui en avais même pas parlé. J'essayais d'oublier ce détail et me concentrait sur le choix que je devais faire. Yamen me dit que j'avais cinq minutes pour me décider, puis me laissa seul dans la pièce. Quel destin était le mieux pour moi ? 



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