Echos du passé et espoirs de l'avenir (2 Avril 2017)
Avril 2017, une date à marquer dans les esprits. Et pas seulement parce que c'est la rentrée et que j'ai toujours très profondément haï les rentrées. Ni parce que c'est ma première rentrée depuis 2013 et que je croyais y avoir échapper. Mais bon, c'est surtout ma rentrée à Hope's Peak, et ça vaut la peine que je retourne derrière les bureaux... ou les barreaux, choisissez.
Enfin. Cette école présente un certain nombre d'opportunités, et pas que pour moi. Louna m'accompagne, d'ailleurs, aujourd'hui. Elle n'a pas de titre, mais ses parents ont accepté qu'elle me suive au Japon. Il faut dire, en toute honnêteté, qu'ils ne pouvaient pas faire autrement, vu qu'Hope's Peak la voulait sur place le temps d'attendre que le titre d'Ultime Scénariste perde en célébrité et qu'elle l'accepte... La faute à quoi on se le demande, hein.
Bon. Cessons les idées noires. Je ne pourrai de toute façon pas me permettre de m'y perdre. Trop risqué. Et Hope's Peak ne manque pas d'opportunités. À commencer par toutes ces magnifiques personnes que je vois passer dans la cour. Surtout des nouveaux élèves et la réserve, puisque c'est l'hécatombe dans la promo de l'année dernière. Apparemment, on est partis sur cinquante-quatre capturés sur cent, et niveau survivants... Eh, à peine une dizaine ? Je ne sais pas, j'ai pas suivi les nouvelles de près... J'aurais peut-être dû.
Toujours est-il que je suis en ce moment-même devant les grandes portes d'Hope's Peak, en compagnie de ma chère et tendre qui me jette d'ailleurs un regard narquois. Je lui tire la langue en guise de réponse. Pas besoin de communiquer davantage. Ça fait bien deux ans, maintenant, qu'on est en quelque sorte ensemble, et on se comprend comme si on s'était connus au berceau. Ou frères et sœurs. J'avoue que j'aimerais bien avoir ses parents. Je les appelle beaux-parents pour plaisanter mais depuis que j'ai reçu la lettre d'Hope's Peak, je crois que la plaisanterie se barre tout doucement de cette relation.
« C'est que ça stresse, Emerens ? Ricane d'ailleurs Louna après un énième regard à la porte. C'est rien, voyons, juste l'école la plus prestigieuse et la plus dangereuse du monde !
— Moi ? Stresser ? Psh, tu m'insultes. Et pour le danger, je compte bien me sortir de là vivant avec mon diplôme, et je compte sur toi pour faire pareil.
— Je ne m'en fais pas trop pour ça. Allez, la cérémonie d'ouverture est dans une heure, je peux bien t'accompagner le temps qu'Hope's Peak me mette dehors. Prêt à tout casser ? »
Un large sourire plein d'orgueil se dessine sur mon visage alors que je m'avance vers les portes de l'école.
« Un peu que je le suis. Chaud devant, Hope's Peak, Emerens Van Heel est dans la place ! »
Louna rit, et me suit jusque dans la cour du bâtiment. Dommage que personne ne m'ait vu. J'ai ma petite célébrité, titre ou pas, et même si j'ai tendance à éviter les fans, c'est toujours agréable d'être reconnu. Un sacré pied-de-nez dans la gueule de mes vieux, tiens ! Et accessoirement un peu d'espoir pour ma sœur, j'ai envie de dire... Même si elle est complètement aveugle, Elvira.
Bref. Le bâtiment d'Hope's Peak est quand même assez impressionnant. Immense, gris, un peu clair quand même, difficile de comparer ça avec mes anciennes écoles. C'est pas trop festif vu qu'il y a les rideaux noirs du deuil, mais bon, au moins, c'est pas morne ou quoi. C'est juste que je ne pense pas voir beaucoup d'Ultimes ici. Tous ceux que je vois ont l'uniforme de la Réserve... Je dois dénoter, vu que je n'ai pas mis d'uniforme tout court, mais au moins Hope's Peak est assez tranquille quand tu portes un titre. C'est un peu du despotisme, mais comme je déteste les uniformes, je ne vais pas m'en plaindre.
Voyons, est-ce que je vais pouvoir reconnaître quelques gens... je me suis renseigné sur plusieurs Ultimes, ceux dont les infos passaient, du moins, je n'ai pas franchement ce qu'on peut appeler un réseau. Par exemple, je reconnais au loin Ibrahim Nassaoui, qui s'est fait une célébrité dans la guerre d'indépendance laosienne, surtout pour être le meilleur soldat du côté perdant ; mais la petite aux cheveux châtains qui traîne seule en serrant dans ses mains un foulard noir, je suis presque sûr que je n'ai aucune info sur elle. Pareil pour la grande blond platine qui fixe tout ce qu'elle peut avec ses yeux bleu glacé. Et ça m'étonnerait que ce soit les seuls. Bon, c'est normal quelque part, mais je n'aime pas ne pas avoir d'infos sur les gens... J'essaierai peut-être de leur parler plus tard.
« Tu cherches tes futures victimes ? » Ricane Louna en me voyant observer les alentours.
Je lui souris.
« Un peu. Imagine je trouve personne à emballer ? Je devrais me rabattre sur toi pour atteindre mon quota de flirt quotidien, quelle horreur !
— Oh, en effet, quelle tragédie, mon cœur. Tiens, regarde par-là, y'a ta cible préférée, des bully et leurs victimes, ça t'évitera de devoir t'attaquer aux imperturbables...
— Imperturbables ? Tu deviens tellement rouge que j'ai presque pu inventer un nouveau nom de couleur. Fais voir les bully ? Faut que je reprenne du service, ça fait bien cinq ans que j'ai pas donné de coups de prothèse... »
Elle me montre du doigt un coin du couloir, où effectivement, se tient Daisuke Nakano, le fameux Tigre des Hauts Plateaux, qui a les muscles contractés et un regard mauvais fixés sur quelque chose. Il n'a pas l'air d'être spécialement un bully, du moins pas un bully classique qui peut être terrifié par des attaques d'organes détachés ; mais quoi qu'il fasse, il emmerde quelqu'un, et je n'aime pas beaucoup sa manière d'agir. Surtout de la part de quelqu'un qui a envoyé le coup de poing de leur vie aux envoyés d'Hope's Peak en pleine télévision. Louna m'a dit qu'elle était bien contente de ne pas être à leur place...
Bon, comparé à lui, je suis une crevette. Mais il n'empêche, je ne peux pas rester là sans intervenir. D'abord, voir qui il... Oh, seigneur.
Je pousse un profond soupir.
« Louna, attends-moi là.
— Ouh là. Il y a un problème ?
— Pas vraiment, non. Mais j'aimerais bien que tu restes en dehors de ça. Contente-toi de gourmander Daisuke quand il se barrera. Ça suffira. »
Parce qu'il y a certaines choses qui sont personnelles. Même pour Louna. Et les retours dans un lointain passé que je pourrais plus qualifier de doux-amer qu'autre chose en font partie.
Je me dirige vers les trois personnes, à savoir Daisuke qui emmerde le monde, et le monde qui se constitue de deux femmes d'assez petite taille, une aux cheveux blond sale et pâle comme la mort, et l'autre au teint sombre et aux cheveux crépus coupés court. Je ne reconnais pas la première. C'est la seconde qui provoque ce petit pincement au cœur que je serais bien en peine de m'expliquer.
Essayant de me faire discret, je m'approche, sur le côté. J'aimerais bien savoir de quoi parle Daisuke, avant d'intervenir. La curiosité, sans doute, et le mec n'a pas l'air d'être du genre à frapper sans raison, même si la raison est obscure et complètement irrationnelle. Voyons ça.
Daisuke est en mode combat, mais ne semble pas près à taper. Il regarde ses deux victimes de haut, les yeux plissés, et c'est à peine s'il parle. Par chance, je me retrouve à portée d'oreille pile au moment où il ouvre la bouche, et je peux donc entendre ce qu'il dit.
« Fais pas l'innocente. T'as un truc bizarre, gamine, et j'aime pas voir des trucs bizarres dans une école pleine de meurtriers. Je veux savoir c'est quoi ton problème.
— Laisse-la tranquille, intervient l'autre. Tout le monde n'est pas un ennemi potentiel, c'est plus la guerre, Nakano !
— Te fous pas de moi ! Hurle l'autre. T'as lu le bouquin ? Sans vouloir vous faire la morale, on est tous des ennemis potentiels, duconne ! Et je veux savoir ce qui m'attend avec vous autres salopards ! »
Okay ça suffit, j'en ai assez entendu. Surtout parce qu'il lève son poing et que je suis peut-être curieux, mais je ne vais certainement pas le laisser les frapper. J'accélère le pas jusqu'à me retrouver sur son côté, et c'est à peine s'il détecte ma présence avant que je ne referme le poing sur son poignet. Qui en fait à peine le tour, d'ailleurs, heureusement que j'ai pensé à l'entretien de ma forme physique.
« Ça suffit, Nakano. On ne t'a jamais dit que c'était très vilain de harceler les gens ? »
Une contraction de mon poing ponctue mes paroles, alors que le mastodonte se retourne vers moi. Heureusement pour moi, il fait à peu près la même taille que moi, ça m'évite de lever la tête. Ce serait assez embarrassant pour moi, et à n'en pas douter un type comme Daisuke m'aurait pris pour un simple caillou dans sa chaussure si j'avais dû faire ça. Mais là, un coup d'œil sur mon visage crispé lui fait écarquiller les yeux, avant que son œil encore valide ne se teinte d'un dégoût sans nom. Ça va, calme-toi tout de suite, ça fait assez d'échos pour aujourd'hui.
Les deux autres sont silencieuses comme des tombes, en train de fixer la confrontation. Assez tendue, je dois l'avouer. Écho oblige, et sans doute à cause du fait que j'ai utilisé la même phrase que lors de ce petit souci il y a cinq ou six ans, je suis animé de la même colère. Et je n'ai pas l'intention de lâcher.
Daisuke me fixe quelques secondes, avant de grogner, son poignet toujours entre mes doigts.
« Au cas où t'aurais pas remarqué, la colombe, harceler les gens c'est le dernier de mes soucis. Mais c'est ça, fais-toi plaisir dans ton rôle de chevalier servant, si ça peut te faire sentir bien à propos de toi-même !
— Contrairement à certains je ne menace pas des gens, je siffle, de plus en plus agacé. Si c'est terrifier les plus faibles que soi qu'on t'apprend dans pendant une guerre, garde ça pour une Tuerie, si jamais tu t'y retrouves. Même si c'est loin d'être le meilleur moyen d'empêcher de se faire buter. »
Il doit y avoir quelque chose de particulier dans mon regard puisque Daisuke se dégage d'un coup sec, une expression indéfinissable sur son visage. Il n'ajoute rien de plus, se contentant de cracher dans ma direction avant de se barrer. Oh, comme cette douce attitude me rappelle mon grand-père. Comme si je n'en avais pas eu assez, d'échos.
Je soupire, avant de me tourner vers les deux femmes. Avec tout le loisir de regarder la seconde.
« Enfin il se barre... ça va, vous ? »
Sharon n'a pas changé d'un pouce. Quelques centimètres en plus, de taille comme de cheveux, sans doute, et l'uniforme qu'elle porte est évidemment différent du temps où nous étions à Saint-Cyr, mais mis à part ça elle est toujours la même qu'il y a cinq ans. Avec plus de cernes et un peu moins de sourires. Pas grave, je peux bien assez sourire pour deux. Surtout qu'il y a rien de mieux pour apaiser cet air éberlué que je vois sur son visage, pas vrai.
D'ailleurs, je peux bien lui en sortir un maintenant. Juste pour le bonheur de la voir.
« Ça faisait une éternité, dis-donc. »
Elle ne dit rien. Elle se contente de se jeter dans mes bras avec une telle force que je manque de perdre l'équilibre. Eh, ça va, j'ai une prothèse, je vous rappelle. Et je ne m'y attendais pas non plus. Enfin, je suis très content, mais quand même.
Je me tourne vers l'autre femme, qui me fixe avec une certaine neutralité.
« Désolé, je te l'emprunte ! On a du temps à rattraper, visiblement... »
Elle hoche doucement la tête, avec un air approbateur que j'ai du mal à comprendre, avant de se barrer dans le couloir. Elle va dans la direction de Louna, j'espère que ça va aller. Après tout, elle n'a techniquement pas le droit d'être là.
Tant mieux. Ça me laisse tout le loisir de retrouver mon ancienne meilleure amie. Qui m'a beaucoup manqué, elle n'imagine pas à quel point. Et j'espère qu'elle n'aura jamais à l'appréhender.
Je l'étreins à mon tour, cachant mon bonheur derrière une ou deux remarques amusées.
« Eh bien, j'ai manqué à quelqu'un on dirait ! ça va depuis le temps ?
— On va dire... Soupire Sharon contre mon torse. De tous les endroits où on aurait pu se revoir, je ne pensais pas que ce serait ici.
— Eh, je pouffe, c'est le destin, on va pas lutter contre le destin quand même ! En parlant du destin, ça te dit une petite sortie vers la fin de la journée ? On a du temps à rattraper et j'aime moyen l'idée de le faire en plein milieu d'une école.
— ... Je veux bien, mais... Je dois travailler. »
Ah, ça non plus, ça n'a pas changé. Sharon, bourreau du travail même dans les lieux aussi peu propices au boulot qu'une école. Quoi ? Mauvaise langue ? C'est rien c'est le trauma. Enfin bon, c'est pas ça qui va m'arrêter, et encore moins maintenant.
« Je doute fort qu'on ait des cours le jour de la cérémonie de rentrée, et puis même, ça te fera pas de mal de sortir un peu ! Je promets de pas te retenir longtemps si ça devient une routine, ça te dit ? »
Je ponctue ma réplique d'un clin d'œil, et Sharon prend une couleur tomate très assimilable à celle de Louna. Tiens, tiens, tiens. Mais que vois-je là ? Serait-ce une nouvelle victime dans mon viseur ? Eh, qu'est-ce que vous voulez, j'adore beaucoup trop voir les visages rouges des gens quand je flirte avec eux, et si Louna se prend trois attaques par jour minimum, le monde se doute bien que je ne vais pas épargner Sharon.
Enfin, d'abord, câlin. Ça, c'est quelque chose qui change pas mal comparé à avant, elle n'en faisait pas des masses et pour être franc, je voyais pas pourquoi la forcer. Il y avait Thibs à portée de bras, de toute façon. Et maintenant, j'ai Louna pour faire exutoire.
Elle n'est pas des plus loquaces, comme avant. À peine me marmonne-t-elle un petit oui en se dégageant doucement lorsque je réitère ma question. Mais j'ai quand même droit à un petit sourire, comme avant quand elle était contente de me voir. Et comme avant, ça me suffit largement à faire ma journée.
En fin de compte, il y a pas mal de choses qui sont comme avant. Nous nous revoyons dans une école, je dois faire fuir les harceleurs, elle est toujours contente de ma présence, elle n'a quasiment pas changé. Moi si, j'imagine. Et sans doute pas en bien.
Mais quelque part, ça me permet d'espérer que notre relation puisse reprendre un tour comme auparavant. Sans Saint-Cyr et l'affreuse pression, sans son besoin de cacher ce qu'elle est, sans les dernières traces de mon désir de rendre mes parents fiers.
Je crois que rien ne pourrait me rendre plus heureux que de pouvoir tout recommencer à zéro.
Peu importe ce que j'ai à faire pour ça.
_______
Maw, ils sont pipous, hein.
Quel dommage que cette scène se passe dans le canon et qu'il est fort probable que leur relation prenne fin de manière particulièrement sanglante dans leurs Tueries respectives :3
Du coup dans l'AU sans Tuerie j'imagine que leurs retrouvailles se passeront un peu différemment. En tout cas, il n'y aura pas les petites attaques de Daisuke "tout le monde est un ennemi et surtout TOI" Nakano qui sait très bien dans quoi il s'engage... Mais ce sera sans doute à peu près le même déroulé.
Voilà voilà x)
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