Dix ans depuis... (2- AU sans Tuerie)

Partie 2 : Rapprochements et camaraderie

Deux semaines après la rentrée.

Bon, je dois l'avouer avec beaucoup de honte, je n'ai pas tenu ma promesse. Mais il a fallu que je consacre tous mes efforts à rattraper le temps perdu avec Sharon, et Louna me prenait la liberté qu'il me restait. Ça, plus le conseil des étudiants que hou là là, il faut vraiment construire à la racine, plus ma nouvelle lubie de me concentrer au maximum sur ma guitare, plus l'écriture de mes romans qui se fait pas en un jour...

Avec tout ça, je n'ai pas recontacté une seule fois Senri, et j'en suis fort déçu. Même si lui doit être bien content de ne pas m'avoir sur le dos. Je l'ai pas beaucoup vu, cette dernière semaine, et pourtant, je rôde dans le campus comme le plus beau des cryptides. Des fois, je me demande s'il a une vie sociale.

Et me voilà dans le self, me demandant bien qui je vais honorer de ma présence, jusqu'à le remarquer dans une table au coin en train de mâchonner son omelette au riz japonaise. Tout seul. Ouch, ma remarque sur la vie sociale était peut-être un poil trop proche de la vérité.

En attendant, je vais pas le laisser tout seul, ça me fait sincèrement de la peine et ça réveille pas de très bons souvenirs non plus. Je me dirige vers sa table après avoir abandonné le plus poliment du monde le groupe que je suivais, et il fronce les sourcils en me voyant m'installer en face de lui.

« Tu fais quoi, là ?

— Je viens te tenir compagnie en tout bien tout honneur, je souris. Puis plus sincèrement, j'aime pas voir les gens tout seuls. »

Parce que le dernier gens qui s'est retrouvé tout seul... Eh. On va dire que Saint-Cyr a dû beaucoup couvrir les frais, et c'était moche.

Senri hausse les épaules.

« Je ne vois pas pourquoi tu t'embêtes. Ça ne me dérange pas d'être seul.

— Ma copine est du même genre, je réponds, imperturbable. Elle apprécie la solitude de temps à autres. Il n'empêche qu'elle n'apprécie pas de se sentir seule. Et là, mon cher parrain, je trouve que tu n'as pas trop l'air seul par choix. Alors je viens faire mon devoir de gentil filleul et je viens te tenir compagnie, pour le meilleur ou pour le pire. »

Et cette fois, on dirait bien que j'ai visé en plein dans le mille. Une petite once de tristesse traverse le visage de Senri, avant qu'il repose, doucement, ses baguettes.

« J'avoue que je ne dis pas non à la compagnie.

— Ah bah voilà. Allez, dans le pire des cas, tu pourras juste bouffer en silence, j'ai l'habitude. Ma chérie parle pas beaucoup non plus, ça m'empêche pas de l'adorer. »

Ouh là. Là par contre, je m'aventure en terrain dangereux. Visiblement, la tristesse semble de plus en plus le posséder au fur et à mesure que je parle de Louna. Et je me rappelle, bien trop tard, qu'il y avait un petit drama entre lui et Raraka Son. Dont je viens visiblement de trouver la nature. Moi et mes gros sabots... bravo, génie.

« Tu as une copine, hein, soupire Senri après quelques minutes de silence. Ça doit être sympa, d'être aimé en retour.

— Ouh là, alors pour le coup c'est plus compliqué. T'as le temps pour un cours sur les relations queerplatoniques ? Certes, c'est un peu mon job en tant que Romancier, mais ça risque de me prendre du temps. »

D'habitude, je clarifie pas immédiatement la nature de notre relation avec Louna, mais j'avoue que là, j'aimerais bien mettre les choses au clair rapidement. J'ai pas envie d'être le con qui étale plus que nécessaire son bonheur au visage des gens, vu à quel point ça a été facile pour moi. Et puis, parler de Louna sans trop détailler me ferait parler d'Alexis, et même si mon gaydar est en activité constante depuis la rentrée, je suis pas encore prêt à balancer ma pansexualité en plus de l'aromantisme.

On va attendre un peu pour les coming-outs.

Senri hausse un sourcil.

« Tu m'intrigues.

— En soit c'est pas si compliqué, mais les nouveaux termes, tout ça. Pour résumer, je soupire, je ne suis pas amoureux. Elle non plus. Mais comme on partage une affection très, très forte, eh bien, on vit un peu de la même manière. Pas des amis, pas des amants non plus. En gros. »

Ouaip, on va pas partir dans le détail. Certes, je pourrais deviser là-dessus pendant des heures, mais le but, c'est pas de l'ennuyer, surtout s'il est célib. Et célibataire malheureux, en plus de ça.

Je le vois hausser les épaules.

« Je vois le genre. Mais ça reste ta copine, si j'en crois les termes. Donc ça ne change pas grand-chose, si ? »

... Ah ah ah moi et mes gros sabots... J'vais me pendre je reviens. C'est une blague. Pour des raisons légales. Même pas besoin de hocher la tête, en plus, mon silence est assez évocateur. Oui, je n'ai peut-être pas de vie amoureuse, mais j'ai une vie de couple...

En désespoir de cause, je cherche un autre sujet à aborder. Qu'on reste pas là-dessus, quoi.

« Question qui va te paraître conne et un peu hors-sujet, mais tu jouerais pas d'un instrument, pas hasard ? »

En plein dans le mille ! Il vient de hausser un sourcil. Et visiblement, on dirait que j'ai touché juste, puisque ma question semble plutôt le faire se demander comment je sais ça.

« Oui, de la guitare, un peu de basse à mes heures perdues, il répond. Qui te l'a dit ?

— Personne, j'en ai bien peur. J'ai eu mes doutes quand on s'est serrés la main, vu que je suis moi-même guitariste, puis avoue que ton style est un peu un cliché. Sans vouloir te vexer, tu as une gueule de musicien. »

Il a un léger sourire. Décidément, on dirait que je ne suis pas trop con, au moins sur ce plan.

« Bonjour les clichés... Et c'est un écrivain qui ose me sortir un truc pareil...

— Les clichés, ce n'est pas le mal, enfin, » je réplique, le temps de lever le doigt pire qu'un prêcheur en plein sermon. « Tu dois accepter le cliché, vivre le cliché, devenir le cliché, pour pouvoir détourner le cliché. En plus, si tu cherches à faire des trucs originaux à tout prix, tu vas juste sortir complètement du sens d'une histoire.

— ça ressemble à un truc que dirait l'Ultime Illustratrice de livres pour enfants, ça.

— Ah non, pitié, ne me parle pas d'elle ! Je suis ses cours, et elle m'a pris en grippe direct en apprenant mes pronoms ! Fin elle le montre pas, mais je flaire le passif-agressif à des kilomètres, littéralement... Je suis sûr qu'elle est en train de dire du mal de moi dans mon dos en ce moment-même ! »

Il a un petit rire, et j'avoue que je crois bien que je ne me suis jamais senti aussi accompli dans ma vie.

Okay, Emerens. Nouvel objectif de vie : Faire se déplier le hérisson.

***

Bon, c'est bien joli tout ça, mais je crois que je ne me suis jamais senti aussi nerveux en appelant quelqu'un.

Faut dire à ma défense, qu'il n'y a pas plus difficilement approchable que Senri Kizoku, nom de Zeus. Même Louna avait moins d'épines, et on parle de quelqu'un avec un bagage de harcèlement scolaire.

Et puis bon, j'ai pas envie de ficher ça en l'air. Je crois bien que le gars a besoin d'un ami. Et je connais le sentiment. Je le connais trop, trop bien.

Il est marqué sur ma peau à grands renforts de lames dont les souvenirs ne veulent plus me quitter.

Je secoue la tête. Pas de mauvaises pensées, Emerens, c'est pas bon pour la thérapie. En plus, faudrait pas déprimer devant Senri. Surtout alors qu'on commence à peine à échanger un peu plus que le stade où j'essaie de m'incruster et il tolère ma présence.

On est un mois après la rentrée. J'ai pu lui poser quelques questions sur qui il était, sa vie en tant que trésorier d'État, comment il combinait ça avec Hope's Peak, tout ça. Et en même temps, ses hobbies, ses passions, ce genre de choses. On a tissé quelques liens sur notre amour respectif du rock et de l'alt-rock, même si je crois que sa tête quand je lui ai fait écouter ma playlist était mémorable.

Eh, c'est pas parce que je m'habille comme un play-boy soixante-dix pour cent du temps et comme un strip-teaser le reste que je devrais écouter des trucs des tendances. Non mais.

Sauf que du coup, ça a un rapport avec la raison de mon appel. Parce que j'ai déniché un chouette bar, avec une ambiance cozy et une playlist bien dans nos goûts à tous les deux, pas loin de chez moi, et je suis trop sympa pour ne pas vouloir lui faire profiter de l'occasion.

Et moi-même, profiter de l'occasion, aussi.

Bon allez, je peux pas tergiverser si longtemps que ça. J'appuie sur la touche d'appel, et j'attends de l'entendre décrocher.

Ce qui arrive assez vite. Deux bips plus tard, sa voix agacée retentit dans le combiné.

« Oui, je sais pourquoi vous m'appelez, non, je n'ai pas fini de creuser ce problème dans les comptes, oui, on verra plus tard. Bonne journée, patron. »

... Et il me raccroche au nez.

Je rêve ou– Ou il m'a pris pour son boss ?

Je ne peux m'empêcher d'éclater de rire, et la tête d'une Louna amusée passe la porte de de ma chambre.

« La vache, il était expéditif, ton appel à Senri. Qu'est-ce qu'il y a, tu t'es pris un râteau ?

— Pire, je me suis fait patron-zoner, je m'exclame, une main sur le cœur. Je ne me suis jamais senti aussi bafoué ! »

Bon okay, j'avoue, c'est drôle. Mais un peu triste, aussi. Est-ce qu'il assume toujours que les numéros inconnus sont ceux de ses patrons ? Surtout que le mien est encore français, quoi, je crois quand même qu'il y a une petite différence avec le format japonais ? Enfin bref, j'imagine qu'il a juste vu le numéro inconnu et pensé travail.

Moi qui aurais pensé que des gens type Aloïs l'auraient appelé à un moment...

Ah mais attends je suis con. Je lui ai même pas envoyé de texto avant ! Tu m'étonnes qu'il ait pas eu le temps de sauvegarder mon contact... Je suis sûr qu'Aloïs, lui, y aurait pensé. Eh bé, j'ai du chemin à faire, moi.

Louna hausse les épaules, avant de sortir de la chambre. Et moi, toujours rigolant, je fais ce que j'aurais dû faire depuis le début, à savoir, lui envoyer un message pour lui signaler ma tentative de contact.

Dont la réponse ne se fait pas attendre.

Désolé, pas l'habitude de recevoir des appels de numéros inconnus sur mon téléphone. Habituellement, c'est surtout mes supérieurs qui cherchent à me contacter.

Et je m'en doutais. Enfin, quand même, c'était drôle.

C'est moi qui m'excuse, j'aurais dû t'envoyer un message avant. Mais quand même, Senri, je suis pas sûr que la particule du numéro de ton boss soit +33, si ? C'est la française !

Je regarde rarement les particules, pas l'habitude de recevoir des appels à l'étranger. Mais bref. Tu voulais quoi ?

Ah bah au moins, il va droit au but. J'aime ça chez les hommes.

Te proposer une petite sortie. J'ai repéré un bar sympa il n'y a pas longtemps, pas trop bruyant, avec une ambiance alt-rock. Je me suis dit que ça te plairait, t'en es ?

... Avec qui ?

Bah, pour l'instant, moi. Et avant que tu te poses la question avec ton petit air blasé, parce que oui je le connais bien, non, ce n'est pas une excuse pour un date.

Fin peut-être. Je sais pas. Moi, vous savez, je suis ouvert à toutes les possibilités. Même si c'est pas ma priorité pour l'instant, aussi mignon soit-il, ce cher Senri.

J'attends quelques minutes. Largement assez pour pouvoir me représenter parfaitement son soupir de mécontentement et ses sourcils froncés. Avant qu'un nouveau message n'apparaisse sur mon écran, l'air beaucoup moins fermé que ce à quoi je m'attendais.

Écoute, pourquoi pas. Mais ne rajoute pas plus de monde par surprise, s'il te plaît.

Yes ! Et c'est une victoire pour le joueur néerlandais ! En plus, vu à quel point je m'attendais à lutter, on peut vraiment pas m'en vouloir d'être un peu satisfait d'être arrivé à mes fins si vite. Ou alors ma fantastique vie sociale commence à déteindre un peu sur lui. Je sais pas. En tout cas, c'est une très bonne chose.

C'est particulièrement heureux que je descends manger ce soir-là, et une Louna amusée m'accueille avec ses grillons de poulet. Décidément, je les enchaîne les bonnes nouvelles.

« Tu es de bien bonne humeur, sourit Louna en me voyant sautiller comme un cabri unijambiste. Tu as réussi à avoir un date, alors ? »

Je lui fais un large sourire enthousiaste.

« Bien mieux, ma chérie. Bien mieux. »

***

Sept mois après la rentrée.

Mine de rien, j'ai fait un énorme progrès en guitare, là. Faut croire que la reprise de cours intensive, plus l'expertise des Ultimes dans le domaine de la musique et de Lyslas Bloom, sans doute la musicienne la plus polyvalente de tous les temps sans même que ce soit son titre, ça sert. Mon répertoire, qui se limitait à deux chansons, est passé à sept en l'espace de six mois, et j'ai même trouvé du plaisir à revoir mon solfège.

Malgré les mauvais souvenirs.

J'en suis au point de me tâter à prendre une option musicologie et/ou arts du son l'année prochaine, mais bon malheureusement, ma phobie scolaire ne s'arrange pas. Pour l'instant, je supporte le campus, je m'implique, je pense que pour la thérapie, ça suffit. Mon nouveau psychologue a l'air d'être plutôt d'accord avec ce point. Sur le fait qu'une exposition progressive suffit et qu'Hope's Peak semble être le meilleur endroit pour ça, vu le laxisme du CA.

Enfin bref. Du coup, maintenant, j'occupe tous mes moments de libres pas pris par le BDE ou mes potes à m'entraîner. Ma guitare a déjà subi deux fois un changement de corde, tellement je la mets à contribution, et derrière, j'ai très souvent les doigts blessés parce que je m'entraîne trop. Mais je m'en fous. Je redécouvre un loisir qui m'a longtemps fasciné avant que mes parents ne l'instrumentalisent, et j'avoue que réclamer cette part de mon enfance a quelque chose de rassurant.

Bon, c'est pas demain la veille que je toucherai de nouveau à un piano, mais au moins, il y a du progrès.

D'ailleurs, c'est là que je suis, en ce moment. En train de faire tous les branchements nécessaires pour ma prochaine chanson à apprendre. J'épluche les albums de Muse, en ce moment, parce que j'ai assez d'oreille pour voir mes fautes moi-même, mais je me dis qu'il faudrait peut-être que je change de répertoire.

Après je me suis dit ça à la dernière. Puis l'avant dernière. Puis l'avant... enfin, vous avez compris l'idée, quoi.

Mais du coup, je cherche dans ma réserve de partitions et ma playlist, en même temps de finir de brancher l'ampli, quand la salle s'ouvre.

Et j'ai la surprise de retrouver Senri derrière la porte, qui semble lui aussi très étonné de me trouver là.

« Ah tiens, salut, Emerens. T'étais pas censé être en cours ?

— Depuis le temps que tu me connais, Senri, tu devrais savoir que je sèche, je pouffe. J'ai même pas appris mon emploi du temps par cœur. De toute façon, je compte clairement pas passer l'examen final de suite. »

Il hausse les épaules.

« Certes. Mais du coup, qu'est-ce que tu fais là ? »

Je lui montre du doigt ma guitare en train d'être branchée, et ses yeux s'écarquillent.

« Attends tu te fiches de moi là ? C'est probablement un des plus beaux modèles qui existent !

— Eh ouais, j'adore mettre de la thune dans mes hobbys, je ricane, c'est le privilège du millionnaire en euros. J'ai aussi une tradi à la maison, mais celle-là est ma préférée. Quoi ? Tu pensais que je grattais juste à droite à gauche ? »

Je sais que je fais un peu le cliché du millionnaire excentrique, surtout que n'importe qui ayant un peu de connaissance sur l'économie néerlandaise connaît mon nom de famille pour ce qu'il est et je suppose qu'il ne fait pas exception, mais quand même. Si j'ai acheté deux guitares, c'est bien parce que je suis investi. Enfin.

Senri fait la moue. Quoi ? On doute de mes fantastiques capacités ? Je suis outré, mec, outré.

« Tu joues quoi là-dessus ?

— Rock. Beaucoup de rock. Répertoire assez réduit, mais bon, quand même, je pense me débrouiller plutôt bien. »

Inutile également de lui citer mon répertoire de fanboy. Surtout que les chansons de Muse ne sont pas les plus faciles à bosser, de ce que je sais. Il va vite comprendre que je ne suis pas un simple débutant qui reste sur un même artiste parce qu'il est facile.

Je le vois hausser les épaules, avant qu'il ne s'assoie sur le canapé.

« Pas que je veuille te tester, mais faut bien avouer que je t'imaginais pas avoir le temps de consacrer autant de thune et de temps à un hobby aussi prenant que la musique. Tu peux me faire une petite démo, que je voie ton niveau ? »

Ah mais c'est qu'il me prend vraiment pour un fils de milliardaire excentrique, qui claque toute la thune de papa dans un truc avant de s'y désintéresser parce qu'il n'y est pas immédiatement très bon ? Ou je rêve et je me fais des idées parce qu'il tape un peu dans une grosse insécurité sans même s'en rendre compte.

Dans tous les cas, il va être servi.

Je cale ma guitare sur mon genou après avoir fini les derniers branchements.

« Une démo ? Mais avec grand plaisir, très cher. Constate donc un peu l'étendue de mon talent. »

Il hoche la tête.

Et je me lance dans probablement un de mes meilleurs riffs.

Bon. J'ai pas pris trop de risques. J'ai joué ma préférée, celle où il m'a fallu des semaines pour la maîtriser totalement, être absolument certain de ne pas faire aucune erreur, du genre qui vous prendrait à l'oreille en tant que fan absolu. Mais quand même, ce n'est pas rien.

À deux doigts de chanter, mais je n'ai pas assez de voix, surtout que je ne me suis pas échauffé. À la place, mes doigts courent sur les cordes de la guitare, je tiens mon médiator serré entre mes doigts, et je savoure l'expression stupéfaite de plus en plus marquée de Senri alors que la chanson avance sans, ou presque, de fausses notes.

C'est avec un mouvement de bras très marqué que je termine ma chanson, très, très fier de ma petite démonstration.

« Alors, Senri, qu'est-ce que tu dis de ça ? »

Ce dernier cligne des yeux. Une fois. Deux fois.

« ... Et t'as appris ça à l'oreille ?

— Oui et non, je ricane. Au bout d'un moment, j'ai quand même essayé de trouver la partition, ou à la limite un tuto, pour limiter les petites erreurs à la con. Mais ouaip, les premiers temps, plus ou moins. »

Puis bon, le grand pouvoir du fan aide beaucoup. Ah bordel, je sonne comme le prof de gestion de popularité, maintenant, quelle horreur.

Senri, visiblement à peine remis de sa surprise, jette un coup d'œil à ma guitare. Puis à moi, en train de la reposer. Avant de hausser les épaules.

« Okay. Tu m'as eu. J'avoues, tu joues beaucoup mieux que ce à quoi je m'attendais. Voire mieux que moi, et pourtant, j'en ai fait pas mal.

— Les grands pouvoirs de la pratique intensive. Et puis bon, j'ai appris mon solfège à six ans. Au départ pour du piano, mais j'ai vite commencé à jouer de la guitare en secret. À mon avis, j'en ai fait plus que toi. Même si je ne doute pas de ton talent... »

D'ailleurs, ça me donne une idée. J'ai remarqué avec le conseil des étudiants qu'on avait vraiment très peu d'évènements prévus au sein d'Hope's Peak, et même si dans un sens, ça se comprend, il y a peut-être moyen de commencer maintenant...

« Dis-moi, Senri, tu as déjà joué au sein d'un groupe ? »

Il hausse un sourcil.

« Non, jamais. Pourquoi, toi si ?

— Non plus, non plus. Mais il y a un début à tout. Si on en monte un à Hope's Peak, ça te dirait ou pas ? »

Allez, mon gars, dis oui, pour que j'aie au moins un peu de poids à mon idée au prochain CA. Surtout que je viens de l'avoir, l'idée, j'ai envie de savoir si ça t'intéresserait. Puis je suis sûr que ça te ferait du bien. En plus de me filer une excuse pour te tirer plus souvent de ta solitude.

Il semble hésiter. À deux doigts de sortir les yeux de petit chat, même si je n'ai absolument aucune idée de l'effet que ça aurait sur lui. Il est de toute évidence pas très homosexuel, l'animal, si mes déductions quant à sa vie amoureuse sont justes ; par contre, la bisexualité, on sait jamais.

Mais finalement, je n'en ai pas besoin. Parce qu'un petit sourire vient de se dessiner sur ses lèvres, et je crois que c'est le truc qui pouvait me faire le plus plaisir en ces temps troublés.

« Pourquoi pas. En plus, je crois qu'on devrait trouver facilement des adhérents. Tu as l'Ultime Ingénieure du Son dans ta promo, Veikko serait sûrement pour nous aider, et je crois que Raraka joue de la batterie. Je lui demanderai. »

Ouh là, ça promet. Mais je suis trop content de ma petite victoire pour me dire que je vais devoir côtoyer régulièrement Raraka Son.

Et puis après tout, il y a toujours moyen de s'amuser.

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